Automne sous le grand arbre

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Octobre touche bientôt à sa fin, les feuilles rougeoient puis tombent, le thé brûlant fume dans les bols et il fait bon bouquiner dans la chaleur d’un chez soi. Pour les chanceux qui sont en vacances, pour ceux qui ne le sont pas mais apprécient une petite pause lecture réconfortante après une dure journée de labeur, voici une petite sélection de saison pour profiter des couleurs d’automne pelotonné au coin du canapé :

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Octobre, Sandra Bessière et Cristina Sitja Rubio

Notari

Octobre

Pour lire comme on mange des fruits, entendez frais et de saison, offrez-vous ce bijou d’album aux couleurs douces et flamboyantes. Le métaphorique se dessine au pied de la lettre, le poétique se mêle au factuel dans une belle balade automnale entre brume frisquette et chaude lumière. Un régal à feuilleter doucement en sirotant un thé brûlant.

Chez Céline du tiroir

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Le livre de l’automne, Rotraut Suzanne Berner

La Joie de Lire

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Un classique pour petits et grands ! Dans des paysages où volent les feuilles et tombent la pluie, on s’amuse à suivre la vie de tous les personnages qui font ce livre !

chez Sophie LJ

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Louison Mignon et le bandit aux feuilles mortes, Alex Cousseau et Charles Dutertre

Le Rouergue

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Quand ramasser les feuilles mortes se transforme en un jeu d’enfant !

Chez Pépita

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Tout sur l’automne, Charline Picard et Clémentine Sourdais
Seuil jeunesse, 2011

Un excellent livre pour découvrir cette saison. Photographies, croquis ou illustrations donnent renseignements véridiques et ludiques afin de passer cette saison en toute sérénité.

Chez Bouma

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Louve, Fanny Ducassé

Thierry Magnier

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C’est un conte d’automne ou la nature est plus qu’un décor. Une présence enveloppante, une force irrésistible, un équilibre. Les êtres y prennent des formes animales, évoluent dans un riche monde végétal dont les motifs feuillus et fleuris s’invitent jusque dans les maisons, sur les étoffes. Un chant d’automne, un chant d’amour et des dessins ciselés aux couleurs de forêt.

Chez Bouma, SophieLJ  et Céline du tiroir

et on avait déjà parlé de l’univers de Fanny Ducassé ici

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La retraite de Nénette, Claire Lebourg

2014

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Nénette l’orang-outan vedette du jardin des plantes est à l’automne de sa vie, et débute à Paris une retraite bien méritée. C’est surtout pour ces sublimes aquarelles ou les feuilles dorées semblent réhausser le pelage de Nénette que cet album célèbre l’automne. C’est aussi un vrai petit chef d’oeuvre à découvrir absolument.

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La fête d’automne de la famille souris, Kazuo Iwamura

L’école des loisirs

Afficher l'image d'origineOn ne peut finir la sélection sans cet incontournable. Nos quatorze souris préférées au rythme doux de la nature et des saisons se promènent cette fois parmi les feuilles d’automnes et les champignons. L’heure est à la récolte des trésors des bois qui serviront de provisions. C’est tendre et poétique, et on ne se lasse pas de ces illustrations magnifiques et de cette atmosphère unique.

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Bonne(s) lecture(s) et bel automne à vous, autant de belles feuilles à ramasser que de belles pages à tourner !

Collection « Bon pour les bébés »

A l’ombre du grand arbre, on lit volontiers aux bébés. Dans le cadre de notre travail, dans la sphère familiale ou les deux,  plusieurs d’entre nous ouvrent facilement un album face à un enfant âgé de quelque mois à peine. Alors quand un éditeur sort une collection qui s’appelle « Bon pour les bébés », forcément, on a envie de voir ce que ça donne.

Nous aimons, vous le savez,  croiser les regards, donner un avis pluriel, qui ne se veut pas prescripteur mais cherche à donner un ou plusieurs éclairages sur les livres. Après les avoir lus mais aussi utilisés avec des bébés, nous vous livrons donc aujourd’hui notre point de vue sur cette collection qui se veut atypique.

Voilà donc une toute nouvelle collection, dont le titre est très explicite, que vous évoque-t-il?

Pépita : Comme ça, sans réfléchir, une gourmandise, des livres qu’on a envie de mâchouiller, baver dessus, retourner dans tous les sens,…

Colette : Alors c’est mon côté « pédagogue » qui prend souvent le dessus dans mes interprétations diverses, et quand j’ai lu « bon pour les bébés » j’ai pensé livres adaptés aux compétences sensorielles et intellectuelles des bébés, c’est-à-dire des livres adaptés à leur vue, à leur motricité, à leur taille…

Sophie : Comme Pépita, je suis plus dans l’aspect ludique avec des livres bien costauds pour qu’ils puissent les manipuler, jouer avec, se les approprier.

Bouma : Moi je serais plutôt dans l’approche de Colette.

Donc vous n’y avez pas vu une référence au livre de Marie Bonnafé « Les livres c’est bon pour les bébés »? D’ailleurs, l’argumentaire qui entoure la sortie des albums  fait référence aux travaux d’ACCES (Actions Culturelles Contres les Exclusions et les Ségrégations). Cet argumentaire au fait, l’avez-vous lu avant de découvrir les albums ?

Sophie : En fait, j’ai vu cette référence indirectement puisqu’en Ille et Vilaine, la médiathèque départementale propose une exposition du même nom et c’est à ça que j’ai d’abord pensé. J’ai lu l’argumentaire de Thierry Dedieu en découvrant les livres, juste avant ou juste après, je ne sais plus. Sur le principe, je suis d’accord avec ce qu’il énonce : le très grand format, les contrastes visuels, la musicalité des mots. Sur ce qu’il en fait, c’est plus mitigé.

Pépita : oui moi aussi. j’ai lu tout ça mais quand je vois le produit final (et je parle volontairement de produit) , je ne m’y retrouve pas et cela ne colle pas vraiment avec mon expérience.

Bouma : Moi j’ai découvert cette collection avec l’argumentaire de l’éditeur qui met en avant l’expérimentation qui en a été faite par la bibliothèque départementale du Gers.
Alors forcément j’ai eu envie d’en savoir plus.

Colette : euh… alors moi, je suis une maman passionnée de livres pour bébé et j’ai une super bibliothécaire (oui oui vous savez ma-bibliothécaire-préférée !) qui m’a mis de côté deux exemplaires de cette collection un samedi aprem et c’est là que je les ai découverts après avoir été alertée par mes copinautes, c’est-à-dire : vous ! Je n’ai donc rien lu avant, ni Marie Bonafé (emprunté plusieurs fois mais jamais réussi à le lire en entier) ni l’argumentaire de Mr Dedieu !

Alors voilà donc une collection qui annonce qu’elle est bonne pour les bébés et qui apporte la caution d’ACCES pour valider cela, l’argumentaire dit aussi « bon nombre d’idées reçues vont tomber », est-ce qu’effectivement vous avez été surprises des choix de la collection?
Le grand format, le noir et blanc, les textes complexes, ce sont des choses qui vous semblaient appropriées pour les plus jeunes lecteurs ?

Pépita : Justement, c’est ça qui me gêne ce cautionnement et cet estampillage « Bon pour les bébés 0- 3 ans »…ça prouve quoi ??? C’est enfermer la capacité d’appropriation dans une tranche d’âge donnée. Et du coup, c’est trop intellectuel comme concept.
Alors le format : pourquoi pas un grand format ? Mais bon, ça demande quand même un peu de manipulation pour le tout-petit (moins de 2 ans par exemple, pas évident). Mais je veux bien.
Les contrastes : rien de nouveau sous le soleil, on le sait que les bébés sont très sensibles puisque leur vue n’est pas encore trop accommodée, si on s’intéresse un tant soit peu à leur développement.
Ensuite les textes : deux d’entre eux me vont (Tas de riz tentant et le grand cerf, quoique le chasseur…) mais les deux autres ! Si mettre en avant Cyrano et Pythagore, c’est faire tomber des barrières, qu’on m’explique ! J’ai bien peur au contraire que cela n’en rajoute. C’est pas de l’élitisme ça ?
Par exemple, je préfère nettement le travail de Pascale Estellon aux Grandes personnes avec ses deux imagiers : ils laissent la part belle à l’imaginaire et à l’appropriation par le jeu. Il n’y a pas cette volonté de vouloir affirmer que la petite enfance est un public qu’on peut facilement mettre dans sa poche avec un discours pseudo-pédagogue.

Sophie : Je ne rajoute rien, je suis totalement d’accord avec Pépita !

Pépita : et pour préciser ma pensée…
Ce cautionnement, je le trouve limite : une recherche de légitimité pour être légitime ? On se couvre du coup, une façon de parer les critiques, « ah ben non, vous voyez, on a testé et pas avec n’importe qui ! « . Ceci dit, sur le terrain avec les petits, je ne conteste absolument pas que cela soit bien fait, au contraire, mais c’est l’esprit qui me dérange.

Alors, effectivement, ce sont généralement les même titres qui font débat, mais finalement, qu’est-ce qui les distingue des deux autres titres? En quoi Pytagore ou Cyrano créent-ils plus de barrières, en quoi pour toi sont-ils plus élitistes que les deux autres titres ?

Bouma : Je dirais simplement parce qu’ils véhiculent des références que tous les parents n’ont pas tant dans la provenance de l’extrait choisi que dans la langue utilisée elle-même. Pas facile d’encourager un adulte à lire à son enfant si celui-ci se trouve en défaut devant. En tout cas, en ce qui me concerne personnellement, je ne lis pas à mes enfants (ni à ceux des autres) des livres que je ne comprends pas.

Sophie : D’accord avec Bouma, Pythagore et Cyrano, ce sont des références culturelles d’adultes qu’on maîtrise ou pas d’ailleurs. Tas de riz  et  Dans sa maison, un grand cerf , ce sont des références aussi mais bien plus ancrées dans la culture populaire commune. Donc moins à même de déstabiliser les parents et surtout qui favorisent l’échange entre petits et grands.

Pépita : C’est exactement cela. Quand on n’a pas les clés de lecture culturelles, l’adulte est mis en défaut face à son enfant. C’est élitiste car ne pourrons vraiment transmettre ces textes que ceux qui ont eu cette culture ou qui ont pu se l’approprier par leurs propres moyens (autodidacte). Personnellement, j’ai essayé de les lire à des parents en demande de conseils, et je n’y arrive pas. Paradoxalement, je connais ces références mais je suis mal à l’aise à les dire, à les porter car je ne sens pas d’adhésion de la personne à ce que je suis en train de lire, ça tombe comme un soufflé…Pour Pythagore, j’ai l’impression de réciter une leçon et pour Cyrano, ce n’est qu’un extrait enlevé de son contexte, la langue amène beaucoup d’emphase dans le ton. Après, je ne dis pas qu’il ne faille pas mettre ces textes à disposition ! Mais là, j’y ressens comme une sorte de « violence » par rapport au public ciblé.

Oui, je comprends, donc c’est plutôt vis-à-vis des parents que ça se joue. Les livres ont été testés avec des enfants apparemment, en l’absence de leur parents. Et, dans ce cadre, je veux bien croire que « tas de riz tentant, tas de rats tentés » ne soit pas plus parlant pour les enfants que la carré de l’hypoténuse. Concernant les enfants, la question qui se pose est « est-ce que les textes doivent être compréhensibles ? Est-ce que l’enfant doit pouvoir y mettre du sens ? »

Pépita : Oui, mais qui transmet à l’enfant, c’est l’adulte, non ? Parent ou pas d’ailleurs ! Et si l’adulte n’adhère pas ? Non, les textes ne doivent pas forcément être compréhensibles pour le petit (et je dis petit délibérément), c’est l’intention qui compte. Les tout-petits sont plus sensibles aux sons des mots plus qu’à leur sens. Mais si l’adulte qui transmet n’est pas à l’aise, que se passe-t-il ? Je m’interroge en tant que passeur mais peut-être effectivement faut-il s’autoriser à aller vers de nouvelles formes ? Je suis ouverte à tout ! Mais il y a un tel décalage dans ces quatre titres que je ne peux qu’être interpellée : pourquoi alors ne pas avoir édité les quatre sur le même modèle, celui qui se veut faire abattre des barrières, et en l’occurrence les deux titres qui posent débat ? Au moins il y aurait eu une pertinence. Ce que je crains, c’est la commande de l’éditeur auprès d’un auteur et illustrateur de renom, dans le domaine porteur de la petite enfance, avec une réflexion à la « vas-y que je te pousse », bref, un pur produit commercial.

Colette : Je suis complètement d’accord avec Pépita et comme vous je suis dubitative devant le choix des textes et j’insiste sur l’incongruité du format également très peu pratique pour des « 0-3 ans » qui aiment manipuler à pleine main ! Et vraiment je ne trouve pas la démarche très novatrice quand on pense au travail sur les contrastes de Tana Hoban dans les années 90. Bref une collection qui me laisse vraiment sceptique …

La question du sens donc… Et la question de l’aisance de l’adulte dans la lecture… Mais, finalement, quand on lit (ou dit) « am stram gram » à un bébé, sait-on vraiment ce qu’on dit ? A-t-on besoin d’y mettre du sens ? En quoi est ce différent dans ces albums ?

Sophie : Ça ne me gêne pas forcément qu’il n’y ait pas de sens tant que c’est adapté à l’enfant, qui lui en trouvera. Je pense par exemple à l’album  A ba ba  de Malika Doray, il n’est fait que de babillements et ça va être un jeu pour l’enfant qui va se reconnaître dans ces sons.
Dans cette collection, ce qui me gêne c’est la récupération de textes, sortis totalement de leur contexte et de leur sens propre. Je ne trouve pas l’intérêt, ni pour l’adulte qui ne les maîtrise pas forcément, ni pour l’enfant !

Bouma : Super bien dit Sophie, rien à rajouter pour moi.

Colette : Comme Sophie, je ne comprends pas le choix des textes, je ne pense même pas que ce soit une entrée vers des textes fondateurs de la culture humaine. Comme Pépita je trouve la démarche trop intellectualisée – et pourtant vous savez à quel point je cherche souvent aux livres un intérêt pédagogique, déformation professionnelle oblige !

Je comprends vos arguments mais quelque part ça ce sont des problèmes d’adultes. Les enfants, eux, peuvent juste voir que « hypoténuse » c’est un joli mot et les sonorités de la tirade du nez peut les laisse rêveurs, non?

Colette : Je suis d’accord avec toi Chlop mais pas la peine de rééditer les textes alors dans un format labellisé « spécial bébé » : lisons Cyrano dans le texte à nos loupiots ou un manuel de maths. C’est ce qu’à fait Papa-Poil-Pinceau pour mon aîné lorsqu’il était bébé : quand je l’allaitais il lui lisait des … Jules Verne !

Pépita : Exactement ! C’est toute l’ambiguïté de cette collection.

Je vois que clairement vous n’êtes pas convaincues par les choix des textes. A titre personnel, je lis assez facilement le carré de l’hypoténuse, que je trouve même assez drôle, j’ai plus de mal avec la tirade du nez parce que c’est vraiment long sur chaque image et que, effectivement, sorti de son contexte, ça ne veut pas dire grand chose.

Parlons du format à présent, on connaît les albums de Tana Hoban, beaucoup d’autres ont fait le même choix du petit format pour les petites mains, ici le choix est radicalement différent, qu’en pensez-vous ? Avez-vous testé avec des bébés ?

Colette :  Comme je l’ai dit plus haut pour moi le très grand format ne correspond pas aux bébés lecteurs, à leurs petites mains en tout cas, mais j’imagine que si un adulte le leur lit, en groupe d’autant plus, ces livres peuvent avoir un certain impact visuel.

Pépita : Je préfère pour ma part lire des grands formats à de plus grands enfants.

Bouma : Moi j’aime bien ce grand format même s’il sous-entend l’accompagnement d’un adulte pour le tenir debout. Après, les petits peuvent se coucher dessus pour regarder les dessins seuls, c’est une position très répandue que je vois quotidiennement.

Pépita, tu peux préciser pourquoi ? Et surtout, il me semble que tu as testé ces albums avec des bébés, tu nous raconte rapidement ce que tu as observé ?

Pépita : Pour la raison du besoin impérieux de manipuler les livres pour les petits. Ils sont embarrassés avec un grand format, certes, oui, ils vont se coucher dessus, essayer de le remettre debout maladroitement, se le fourrer dans l’œil, bref, pas génial. Alors qu’un plus grand enfant (niveau maternelle) va davantage apprécier ce format pour s’y immerger même totalement. J’ai un souvenir des Trois brigands en grand format de Tomi Ungerer avec des Grandes sections qui me fiche encore des frissons après plusieurs années ou Chien bleu de Nadja aussi. De grands moments de transmission réussie.
Oui, je les ai testés et ça a fait un flop complet en fait, aussi bien du côté des petits que des adultes.Mais peut-être que je n’ai pas su les porter jusqu’à eux, mon avis négatif l’emportant. Je les ai pourtant intégrés dans mes accueils, fait comme d’habitude mais les adultes ont eu par exemple un mouvement de recul avec le chasseur du grand cerf. Et je suis très mal à l’aise avec l’hypothénuse et Cyrano, je n’y arrive pas.

De mon coté, j’ai d’abord eu le même point de vue que Bouma. J’utilise régulièrement des albums en très grand format avec les bébés, en particulier les albums sur les saison de Suzan Rautrault Berner, je vois les enfants allongés dessus, qui scrutent chaque détail, ou à quatre pattes face à l’album. J’étais donc plutôt favorable à ce format en cartonné, ce qui permet de faire tenir l’album debout sur le tapis des bébés.
Mais j’avoue qu’à l’usage, je n’ai pas trouvé ça approprié. Là où les livres des saisons sont conçus pour être vus de près, les Dedieu semblent être faits pour être vus de loin, quand on les met sous le nez des bébés ça ne leur convient pas, l’image est trop grande.
Du coup, j’ai éloigné l’album de leur visage, mais un tout petit a besoin de toucher, comme l’a dit Pépita. Si le livre est trop loin pour ses bras, comment peut-il le manipuler ?
En réalité, j’ai l’impression que ces livres sont plutôt pensés pour une lecture collective. Ce qui m’étonne de la part d’ACCES, qui prône plutôt la lecture individuelle et qui, à mes yeux, ne convient pas vraiment pour des enfants de moins d’un an…

Je vois que, globalement, nous étions plutôt ouvertes et curieuses quant à cette collection et que nos observations avec les bébés ne nous ont pas totalement convaincues… Deux autres titres viennent de sortir, les avez-vous vus ? Qu’en pensez-vous?

Pépita : Je les ai vus passer, mais pas eus entre les mains. Une souris verte et Pinicho. Je ne sais pas si je vais les acheter. Je pense qu’ils sont plutôt adaptés pour après 3 ans, pour la maternelle en fait, voire plus, ce qu’ « interdit » l’estampillage 0-3 ans ainsi que le format pas adapté pour des petits par rapport aussi, comme tu le soulignes Chlop, à la grandeur de l’image.

Il semble donc que cette collection n’a pas fait ses preuves à nos yeux, peut être l’usage finira-t-il par nous convaincre par la suite ? De mon coté, je continue d’amener ces albums à l’occasion quand je fais des séances de lecture, ils sont choisis de temps en temps. J’ai tout de même noté une anecdote qui m’a beaucoup plue. Ce jour-là, à mon boulot, il y avait un couple avec un enfant d’un peu moins d’un an. La mère, qui me connait, me demande dans un français approximatif, si j’ai des nouveaux livres à montrer à son bébé. Je propose donc ceux-là. Sceptique mais ouverte, elle écoute. Elle me dit qu’elle ne comprend pas « tas de riz ». Je lui explique le principe du virelangue. Elle me dit alors qu’elle connait, qu’il y en a aussi dans son pays et m’en récite quelques-uns en arabe. Elle interpelle son mari qui dit qu’il ne connait pas cela, qu’il ne s’en souvient pas. Il est un peu en retrait de la conversation. Puis, quand je passe au titre suivant « l’hypotènuse », il s’exclame: « ah, ça oui, ça je connais, les maths il y en a chez nous ! »

Voilà qui bouscule en effet mes idées reçues, j’ai toujours tendance à penser que les mathématiques sont aussi difficiles d’accès aux autres qu’elles me le sont à moi. Ce jour-là, j’ai réalisé qu’il n’en était rien. Je vais donc continuer de travailler avec ces albums et, qui sait, peut être vais-je trouver la famille qui changera aussi mon regard sur la tirade du nez ?

En tout cas, si vous avez des expériences qui vont dans un autre sens, n’hésitez pas à nous en faire part en commentaire, nous sommes tout disposés à entendre d’autres avis.

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Lectures d’enfants #18

Aujourd’hui, c’est Axel, presque 7 ans qui prend la parole pour vous parler d’un livre.
Et moi, sa maman, je vous retranscris ses dires.
Vous trouverez donc ses propos en bleu et mes remarques à moi en vert.

Détective Popotin mène l’enquête
(dans son titre entier de Troll chez nobi nobi !).

 C’est l’histoire d’un détective qui s’appelle Popotin parce qu’il pète avec sa tête pour arrêter les voleurs
(et donc qu’il a une tête de fesses).
Il mène une enquête sur un vol de bonbons. Alors il essaye de trouver le voleur pour le donner à la police.

Ce livre est bien parce qu’il y a plein de choses à trouver comme :
(il s’agit donc d’un livre jeu basé sur l’observation et la déduction)

– qui ment parce qu’il y a un voleur dans l’immeuble
– son ami le chien Biscotte qui a mangé le biscuit à la patate douce du détective
– les canetons de la maman parce qu’elle les a perdu dans une image
– il faut trouver quelles traces sont celles du voleur…

Les images sont intéressantes. Les personnages de l’histoire ressemblent à des animaux comme le chien, le cochon, une pieuvre, un crocodile, un guépard…

Ce qui est bien c’est qu’on aide Détective Popotin. C’est comme si on était un détective aussi.

Vous aurez compris que ce personnage nippon à fait son entrée avec brio à la maison. Et qu’Axel vous en recommande vivement la lecture « pour apprendre pour après à trouver des choses plus rapidement sur le livre de Charly ».

Mon avis plus complet sur Un Petit Bout de Bib

Une soupe de lectures !

En plein coeur de l’hiver, quoi de meilleur qu’une bonne soupe ? Pour vous nourrir et vous réchauffer, une petite sélection de lectures savoureuses et fumantes à avaler en grande lampées au coin du feu !

Sophie LJ fait s’évader vos papilles :

La soupe aux épices, Delphine Perret et Elodie Balandras

Les P’tits Bérets,

Un voyage aux quatre coins du monde en quête des ingrédients aussi parfumés qu’hétéroclites de la soupe aux épices.

A la croisée entre fiction et documentaire… une lecture pour voyager et éveiller ses papilles !

 

 

 

Céline du Flacon et de Céline du Tiroir s’en sont réchauffé le coeur :

Une soupe au caillou, Anaïs Vaugelade
L’école des loisirs. 2000.

« C’est la nuit, c’est l’hiver. Un vieux loup s’approche du village des animaux. »
Dans son sac, un caillou pour concocter une bonne soupe au caillou…
Il est vieux et n’a plus qu’une seule dent, se disent les villageois. Et puis, ils ont bien envie de goûter à une soupe au caillou…
Peuvent-ils lui faire confiance ?
Un classique qui a plus d’une morale dans son sac !

 

Au menu de Pépita :

Nous ce qu’on préfère, Malika Doray
L’école des loisirs, 2012

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Une souris, deux grenouilles, un oiseau : chacun à sa soupe favorite. Mais quand le loup arrive, savez-vous quelle soupe il préfère ?
Un album pour les tout-petits, simple et amusant, pour se faire peur… juste une seconde !

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3 contes cruels Matthieu Sylvander Perceval Barrier

l’Ecole des loisirs

Des contes déjantés sur des légumes bien naïfs qui vont finir croqués ou en soupe ! Pour notre plus grand plaisir !

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A table !

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Bouma vous a concocté :

soupe des trois oursLa Soupe des 3 ours
texte de Cécil Kim
illustrations de Mique Moriuchi
Âne bâté éditions, 2012

Un petit format carré aux illustrations colorés vous donnera envie de devenir un des trois ours du fameux conte pour goûter à cette merveilleuse soupe.
Un pur régal que ce conte détourné.

C’est ici !

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La Soupe magique
texte de Hiroyuki Aihara
illustrations de Nami Adachi
Autrement jeunesse, 2012

Les illustrations un brin vintage de cette belle histoire de partage et d’amitié vous donneront envie de cueillettes au fond des bois. Après, à vous d’en faire une belle recette sur le modèle de Fanny et Mélanie, les deux lapines héroïnes de cet album.

C’est ici

et bien sûr :

La Soupe de Maman Baleine
texte et illustrations de Yana Lee
MeMo, 2011

La cuisine d’une mère a toujours un goût particulier. Découvrez donc l’ingrédient spécial qui donne cette saveur reconnaissable entre mille. Un album d’une grande délicatesse dont la poésie des images n’y est pas pour rien.

C’est !

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Pour grandir, les lutines vous recommandent :

La Soupe aux Cailloux par Robert Giraud

Les Mini Castor, Flammarion

La soupe au caillou existe dans bien des versions… Les lutines sont des inconditionnelles de cet album qui ne date pas d’hier. C’est bien connu : c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes !

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Carole a goûté pour vous :

Ah les bonnes soupes ! de Claude Bougeon

L’école des loisirs

Le menton en galoche, le nez crochu, les cheveux blancs, un chapeau pointu et des yeux pleins de malice. Pourtant, à la lecture de l’album, Ratatouille se révèle être une sorcière plus midinette que maléfique !

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Céline du Tiroir vous a mijoté :

La soupe à la souris, Arnold Lobel

L’école des loisirs, 1978

Alors qu’elle lit tranquillement à l’ombre d’un grand arbre comme le notre, une petite souris se fait attraper par une belette. Cette dernière en ferait bien une soupe. Mais pour donner de la saveur aux soupe, il faut y ajouter des histoires…

Une délicieuse invitation à tomber dans la marmite (à histoires)!

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Kik vous régale :

Mange ta soupe ! de Zeloot
Editions Michel Lagarde, 2014

Milo adore la soupe aux pois que sa maman prépare. Il voit rouge quand une mouche s’approche de son bol. Peu importe, il appelle l’araignée à son secours, qui adorera se baigner dans cette soupe chaude. Un oiseau pourra surement la faire déguerpir … Du plus petit au plus gros, les animaux se succèdent. Mais jusqu’où ?

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A déguster bien chaud !

Bon appétit !

Lecture Commune P’tit Biscuit et Interview de Cécile Hudrisier

Un lundi, le premier du mois de février.
Un lundi, avec une lecture commune comme tous les lundis.
Un lundi, avec un album à croquer.
Un lundi, avec Hérisson, Kik, Bouma et Carole.
Un lundi, pour bien commencer la semaine.
Un lundi, avec P’tit Biscuit de Cécile Hudrisier, édité par Didier Jeunesse en 2012.

Quel est votre premier souvenir d’une histoire mettant en scène un petit gâteau en forme de bonhomme qui est vivant ? Pour ma part, j’avoue que je pense directement au film Shreck, mais je me dis aussi que je connaissais avant ce personnage, que j’ai compris la référence lorsque j’ai vu apparaître le personnage dans le film, mais je ne me souviens de rien de précis avant ça…

Hérisson: Etrangement mon premier souvenir n’est pas un livre non plus, mais un gâteau… un bonhomme en pain d’épice, à l’école. Sans doute accompagné d’une histoire mais je serai bien incapable de me souvenir laquelle. Sinon celui qui m’a le plus marqué est moi aussi celui de Shrek !

Carole: Mon souvenir de ce petit bonhomme, c’est tout simplement le livre chez Père Castor dans la collection les classiques ! Et pour cause ! Il trône dans ma bibliothèque depuis toujours, possiblement depuis l’école maternelle ! Je l’ai toujours lu, et je l’ai souvent utilisé avec des maternelles justement ! Du coup, cette nouvelle version m’intéresse, histoire de faire une comparaison avec l’original.

Bouma: Mon premier souvenir d’un biscuit en forme de bonhomme est un souvenir gourmand. J’ai dû en faire pour Noël quand j’étais en maternelle. Je me rappelle surtout de la décoration en bonbon.

Quel a été votre premier sentiment en prenant ce livre pour commencer la lecture ? Qu’avez-vous penser en le feuilletant pour la première fois ? 

Bouma: Je suis allée acheter cet album chez mon libraire car je suis le blog de Cécile Hudrisier (http://leschosettes.canalblog.com/) et qu’il me faisait très envie. J’ai été séduite par l’objet en main, sa qualité d’impression, le feuilleter fut un vrai bonheur.

Carole: Cet album en tant que livre-objet est très beau ! Le format, la police du texte, le papier, les illustrations : tout, absolument tout est de grande qualité

Hérisson: Un très joli album ! Son format à l’italienne et son graphisme épuré sont séduisants, d’autant plus que c’est un album imprimé en France, avec une vraie démarche écologique claire et expliquée [http://www.didierjeunesse-durable.fr/]

Kik: Personnellement je suis tombée sous le charme de cet album à cause des arbres. Ils ont des couleurs un peu diluées (mais pas trop) qui rendent magnifiquement bien sur le blanc. Sans avoir ouvert le livre je l’aimais déjà.

Le sous-titre : L’histoire du bonhomme de pain d’épices qui ne voulut pas finir en miettes, indique que ce personnage à un certain tempérament. En effet dès la première pages, alors qu’il est à peine cuit, P’tit Biscuit s’enfuit de chez la Grand-mère qui vient de le cuisiner. 

Que pensiez-vous qu’il allait se passer à ce moment là ?

Hérisson: Dès le début en effet, il apparaît comme un personnage pensant à part entière, totalement craquant d’ailleurs. Je n’avais pas d’attente particulière cependant à ce moment là de l’histoire, j’attendais juste de voir ses aventures… et je n’ai pas été déçue!

Bouma: Tout comme Sophie, je n’avais pas spécialement d’attente particulière mais je ne m’attendais pas du tout à ça…

Carole: Comme je connaissais l’histoire originale, je me doutais que le petit bonhomme s’enfuirait à peine sorti du four….En revanche, je fus bien surprise de la suite… et de la chute évidemment !

À petits pas biscuités, le bonhomme de pain d’épices avance dans la forêt. Crisss… Crisss… Les feuilles craquent sous ses pieds.
« J’ai faim ! », dit une voix.
Et là, malgré le fait qu’il ne veut pas finir en miettes, P’tit Biscuit se retrouve boulotter progressivement par une souris, un serpent, un hibou et un loup. Il perd un bout de doigt, un bout de bras, un bout de pied, un bout de ventre. Les animaux sont de plus en plus gros, comme les morceaux engloutis.
Le loup est le plus vorace: 

« Croc! » fait le Loup, en emportant dans se gueule, un bout de chemise, un bout de ventre, un bout de nombril, et un bout de main… sans dire merci. »

Fatigué, P’tit Biscuit décide de rentrer chez celle qui l’a cuisiné.

Que pensez-vous autant dans la forme, que dans le fond, de cette partie centrale de l’album ?

Kik: Personnellement, j’aime l’effet de répétition. À chaque fois P’tit Biscuit repart dans la forêt « à petits pas biscuités ». Avec le loup je pensais qu’il y laisserait sa peau de biscuit. Ne me demandez pas pourquoi, mais j’adore la queue du loup, avec tous les traits entremêlés, surtout quand il repart sans dire merci.

Hérisson: Cette partie centrale fonctionne comme un conte en randonnée, structure narrative particulièrement intéressante et qui fonctionne toujours très bien avec les enfants, car ils peuvent participer à l’histoire. Cela rend l’histoire plus interactive avec le lecteur, ce que j’apprécie beaucoup.

Carole: La structure répétitive permet l’adhésion des plus jeunes. C’est déjà le cas dans l’histoire originale, tout comme dans Roule Galette, qui sont pour moi des classiques aujourd’hui. Elle permet la participation des enfants, un vrai dialogue entre eux et l’adulte qui leur lit, et permet de les questionner sur l’éventuel personnage /animal qui pourrait intervenir par la suite. Dans le texte original, le petit bonhomme croise un chat, puis une jument, un petit garçon et une petite fille et enfin une vache. C’est un renard qui aura le dernier mot ! Tous les personnages lui courent après les uns derrière les autres. Là, dans cette version, les personnages diffèrent : la souris, le serpent, le hibou et le loup ! ça change et tant mieux ! Sans compter le retour du petit bonhomme sur son lieu de naissance, ça c’est assez surprenant et inédit ! Donc oui la nouvelle version fonctionne à merveille par l’effet de surprise et le côté inédit ! j’adhère !

Bouma: J’ai acheté cet album sur le simple nom de Cécile Hudrisier car c’est une illustratrice que j’aime beaucoup. J’ai adoré la voir dans un autre style, moins de collages, plus d’aquarelle et de crayons. Cela donne une autre ambiance à son travail, plus intimiste et feutrée (selon moi). L’histoire s’y prête bien d’ailleurs. Ce petit biscuit est très généreux puisqu’il accepte d’aider les animaux qu’ils croisent en leur donnant un peu de son corps. Il n’y a pas que de l’humour, la tristesse, la compassion et le partage sont abordés avec simplicité. Pour le texte, j’ai beaucoup aimé sa rythmique qui le rapproche d’un conte. Un vrai régal pour la lecture à voix haute que je testerai d’ici peu c’est sûr !

Pour finir, et j’ai envie de dire pour le plus surprenant de cette album, que pensez- vous de la chute du livre ? 

Hérisson: Une fin surprenante en effet ! Notre P’tit Biscuit après s’être fait sévèrement croqué à plusieurs reprises retourne dans la maison de la femme qui l’a conçu. Alors qu’elle s’apprête à le dévorer, il se rebelle, mange cette femme en ouvrant une très graaaande bouche puis va se coucher. Rôde alors dans la chambre un petit oiseau qui mange les miettes laissées par terre…
Cette fin ouverte, qui change des versions précédentes du conte, m’a beaucoup plue car elle offre une belle vengeance au P’tit Biscuit, tout en laissant à l’enfant imaginer une autre fin s’il le souhaite, avec la présence de l’oiseau.

Bouma: La grand-mère prend finalement son goûter en mangeant son p’tit biscuit comme l’annonce le début de l’histoire. Mais elle n’est pas aimable pour un sou et je pense que la vengeance de sa création vient de là. A tous les animaux de la forêt qui avaient faim, il leur a donné un morceau de son corps. Mais cette mégère le prend pour son dû, et n’a finalement qu’un juste retour des choses en se faisant manger à son tour. J’ai franchement souri à cette fin à laquelle je ne m’attendais pas du tout. Mais surtout je me suis demandée : qui va reconstruire P’tit Biscuit maintenant qu’il n’y a plus personne avec des bras pour faire de la pâtisserie ???

Carole: Concernant la chute, je le trouve inattendue par définition et surtout très drôle ! Un peu de cynisme dans ce monde de bisounours ! Non plus sérieusement, je suis certaine que ça fonctionne très bien sur les petits ! La cruauté est aussi présente dans la cour de récré, et dans la vie…Je suis pour qu’on puisse proposer aux enfants d’autres fins, surtout en littérature, qu’une fin douce et mielleuse. Les contes le font depuis toujours. Je n’avais pas remarqué le petit oiseau de la dernière page. Du coup, à chacun d’interpréter selon sa sensibilité ou son sens de l’observation !

Interview de l’auteure, Cécile Hudrisier par mail, par Kik

Tout d’abord, j’aimerai poser quelques questions sur la genèse de l’album, pour lequel vous signez le texte et les illustrations. Est-il une envie personnelle ou une commande de l’éditeur ? Si c’est une envie personnelle, pourquoi cette histoire de bonhomme en pain d’épices ? Si c’est une commande, pourquoi avoir dit d’accord ? Qu’est ce qui vous a tenté dans cette histoire ?

Cécile Hudrisier :  Cela faisait un moment que j’avais envie d’un projet rien qu’à moi, texte et illustrations. Ce n’est pas une commande de mon éditeur, mais bien un projet personnel, mené en solo, sans savoir s’il trouverait preneur.
En fait, j’ai eu envie de parler d’un personnage a priori « fragile ». Je me suis dit qu’un personnage fait de biscuit évoquerait bien cette fragilité. (Est-on voué à se faire « manger » lorsqu’on a l’air aussi tendre et délicieux qu’un petit biscuit ?… c’était ma question de départ. Un sujet que j’avais envie de traiter.)

C’est pourquoi j’ai décidé de me réapproprier l’histoire du petit bonhomme de pain d’épices. En fait, c’étaient surtout les caractéristiques physiques du héros qui m’intéressaient. Aussi, le point de départ de l’histoire : je me suis toujours demandé pourquoi cette grand mère fabriquait un biscuit en forme de petit bonhomme, alors qu’elle aurait très bien pu se contenter de fabriquer un biscuit en forme de biscuit…?! J’ai lu plusieurs versions du conte traditionnel, et notamment dans une, il est dit que le vieux couple ne pouvant plus avoir d’enfant, la vieille dame avait eu l’idée de fabriquer un petit bonhomme avec du pain d’épices. J’avais trouvé ce postulat de départ, terriblement cruel… mais terriblement intéressant, aussi !

Les questions de création, d’engendrement…tout ça m’a vraiment inspirée.
Je n’ai pas du tout voulu faire une « réécriture d’un conte populaire », mais simplement m’approprier un personnage pour lui faire raconter une toute autre histoire, cruelle, mais drôle… Une histoire qui me ressemblerait, qui traiterait de sujets qui me touchent.

Pourquoi cette fin, avec le retour à la maison, et cette grand-mère énorme dans la double page qui boulotte pratiquement tout le bonhomme ? Puis ce revirement de situation ? Pourquoi avoir fait « gagner » le P’tit biscuit pour une fois ? 

Cécile Hudrisier : En fait, j’adore l’humour noir. J’adore être surprise, voire choquée. Je n’aime pas les trucs tièdes, ou bien pensants. (Oui, j’avoue que j’aime aussi être un peu « poil à gratter » !…) C’est pourquoi j’avais envie d’une fin qui décoiffe.
La grand-mère énorme qui dévore le ptit biscuit, oui, c’est un peu gore… mais il fallait bien ça pour la montée « dramatique » de l’histoire ! Et surtout, l’exploit du biscuit qui parvient à se rebiffer alors qu’il ne lui reste presque plus rien pour se rebiffer est d’autant plus valeureux, je trouve !
De plus, ça allait dans le sens que je voulais : mon ptit biscuit a beau être né de la dernière fournée, il a beau être gentil et poli, il n’est pas voué à se laisser dévorer,surtout pas par celle qui l’avait cuisiné pour de bien mauvaises raisons…

Question très pratique, juste pour mon esprit cartésien, comment il a fait P’tit Biscuit pour monter dans le lit sans jambes?!

Cécile Hudrisier : Ah ah !! j’adore ! Avec l’éditeur, on s’est un peu posé cette question, et en blaguant, je lui ai dit qu’il pouvait rouler jusqu’au lit… mais bon, en vrai, ça fait partie du mystèèèèèère.Tout comme : comment a-t-il pu ouvrir une bouche assez grande pour dévorer mémé ? comment l’a-t-il avalée vu qu’il n’a plus de ventre ? S’est-il servi de la pique à chignon de mamie pour s’en faire un cure-dent ?! A-t-il recraché son châle pour s’en faire une couverture ?
Et surtout,… comment va-t-il continuer à vivre maintenant qu’il n’est plus qu’une tête de galette ?! Au fond, est-il vraiment vainqueur dans cette histoire ?…
D’autant que si vous avez bien observé, le petit oiseau mangeur de miettes veille à son chevet…. hum hum…

Avez vous envie de faire d’autres adaptations d’histoires classiques de la littérature pour la jeunesse ?

Cécile Hudrisier : Pourquoi pas ! Pour l’instant je n’ai pas de projet en cours, mais j’ai lu des histoires anglo-saxones dont certains héros m’ont bien plu…affaire à suivre.

Quelle est la part de « papier » et de numérique dans la réalisation de vos illustrations ? 

Cécile Hudrisier : Dans cet ouvrage tout est fait main ! pas de numérique ou de retouches photoshop, que de l’aquarelle, de la mine graphite, un peu de crayons de couleurs et des papiers collés.
J’ai aussi oublié de parler de ma grande inspiration : « the melancoly death of oyster boy » et toutes les petites histoires terribles de Tim Burton. J’adore le mélange de poésie et d’humour noir.

Merci aux membres d’À l’ombre du grande arbre pour cette lecture commune.

Retrouvez les chroniques de Bouma et de Gabriel.

Bonne lecture à vous tous.