Billet d’été – Le premier pas du voyage

C’est bien connu, les voyages forment la jeunesse, de corps comme d’esprit.
Et si tous débutent par un premier pas, nous ne pouvons savoir jusqu’où ils vont nous mener.

La sélection de Blandine nous emmène sur les chemins et les routes, à pied ou en transports, en vacances, en voyage, seul ou accompagné, entre découvertes, rencontres et retrouvailles, de l’Autre et, surtout, de Soi.

Départ et poursuite

Cette nuit on part en vacances. Charlotte BELLIERE et Ian DE HAES. Alice Editions, 2020

Tout est dans le titre de ce bel album au format à l’italienne.
Les vacances ne commencent pas dès l’arrivée à destination, mais bien dès que la voiture commence à rouler, dès le voyage, et davantage quand il se fait de nuit où les perceptions sont autres.

Entre quelques phases de sommeil, les lumières si particulières enchantent notre petit narrateur qui transforme les différentes étapes du trajet en épiques scènes d’aventures.
Les illustrations aux teintes nocturnes nous baladent tour à tour entre intimité et immensité, entre cadre de la fenêtre ou pleines pages immersives, entre souvenirs et rêveries.

Son avis complet ICI.

Le Tour du Monde en 80 jours. Jean-Michel COBLENCE et Younn LOCARD, Casterman, 2020

Voici le roman de Jules Verne ici adapté en BD (Prix du meilleur album Angoulême de 2020) pour nous restituer l’extraordinaire pari du fortuné Philéas Fogg qui entend bien profiter des nombreuses avancées technologiques en matière de transports pour faire le Tour du Monde en 80 jours.

Bien que réduite, leur formidable épopée reste très fidèle au récit initial dont sont conservés les moments forts. Le texte est sobre, à l’image de Philéas, et adopte un vocabulaire varié riche de considérations de l’époque. Le graphisme au trait fin foisonne de détails, avec un peu de comique, pour notre plus grand plaisir !

Sa chronique LA.

Road-trip : Du voyage à l’apprentissage

Sur mon chemin. Nancy GUILBERT et Séverine DUCHESNE. Alice Jeunesse, 2022

S’inspirant des haïkus, ces petits poèmes japonais qui, en si peu de mots, saisissent toute l’évanescence d’un moment, d’une émotion, et leur empreinte pourtant si profonde sur nous et le temps, Nancy Guilbert et Séverine Duchesne illustrent en mots et images-objets le départ d’un petit garçon vers Sa Vie.

Onirisme des mots, beauté de la Nature, impressions philosophiques, clins d’œil variés, illustrations délicates pour dire la vie et ses traversées, les rencontres et les étapes, la confiance et l’imprévu, la quête identitaire et l’autonomie.

D’apparence simple, cet album, aussi universel qu’intime, est un trésor qui permettra à chacun de trouver ses résonnances et références.

L’article complet ICI.

Au bout du voyage. Meg ROSOFF. Albin Michel Jeunesse, 2014

Mila et ses parents, Gil et Marieka, viennent pour les vacances aux Etats-Unis chez le meilleur ami de son père, Matthew. Mais ce dernier est parti avant leur arrivée, sans mot dire, comme s’il fuyait.
Gil, Mila et Honey, la chienne de Matthew, prennent alors la route vers un chalet au nord de l’état, dans lequel Matthew pourrait se trouver.
Commence alors une véritable quête, géographique et émotionnelle, troublante et révélatrice, ponctuée de discussions favorisées par une météo capricieuse.

Mila, mature malgré ses douze ans, découvre son père sous un nouvel angle et s’interroge sur le décalage des générations, les relations humaines, l’amitié, l’âge adulte, sur ce qui demeure et change alors que la vie, les idéaux de jeunesse et les gens passent.

L’avis complet LA.

La nuit où les étoiles se sont éteintes. Nine GORMAN et Marie ALHINHO. Albin Michel Jeunesse, 2021

Ado cabossé et rebelle, Finn ne croit pas en l’avenir. Il vit au jour le jour, fait ou ne fait pas les choses, fume de la weed et gagne de l’argent en travaillant au café mais surtout dans des combats clandestins pour payer l’avocat de sa mère, qui est en prison. Renvoyé de différentes familles d’accueil, il arrive finalement à la Nouvelle-Orléans chez Cliff, son oncle musicien qu’il ne connaît pas, et intègre bon gré et surtout mal gré une bande de potes au lycée composée de Kenna, Nate, Kurt et Jaeger.

Tout au long de chapitres à la temporalité croisée, nous suivons l’arrivée de Finn et la construction de leur relation ensemble et à chacun, comme leur road-trip à eux tous l’été qui précède la poursuite de leurs études supérieures.

De nombreux thèmes identitaires et difficiles se révèlent au fur et à mesure, rendant les personnages attachants et si réels dans leurs doutes, fragilités, tâtonnements et espérances.

Découvrir l’Humanité par le prisme d’autres êtres ou objets

Il n’y a pas que les Humains qui vont de par le monde et ceux qui sont les voyageurs de ces trois livres ont un fort pouvoir d’évocation et de révélation sur les relations qu’ils entretiennent avec eux et eux avec la Nature.

La Perle. Anne-Margot RAMSTEIN et Matthias ARÉGUI. La Partie, 2021

Le personnage principal de cet album sans texte n’est pas l’humain, mais une perle. Une perle qui va entreprendre un long voyage, à l’échelle d’une vie, à la fois trépidant, angoissant et merveilleux. Un voyage qui nous invite à observer, d’une manière rapprochée ou plus élargie, nos habitudes, nos consommations, nos loisirs, nos espoirs, nos goûts ici ou ailleurs…

Nous invitant à revoir nos perspectives, cet album aussi élégant qu’étonnant nous rappelle combien nous sommes tous liés, qui que nous soyons et d’où que nous soyons.

A l’Ombre du Grand Arbre, nous l’avons tellement aimé que nous en avons fait une Lecture Commune à retrouver ICI.

De l’autre côté de la mer. Yukiko Noritake. Actes Sud Junior, 2022

La mer nous permet de se nourrir, de voyager, de vivre des aventures, de nous apaiser.
Pourtant nous la blessons par nos activités de loisirs, consuméristes et commerciales, par nos gestes et objets quotidiens en apparences anodins et qui, pourtant, la polluent toujours plus.

La mer nous lie et nous relie et l’autrice nous le montre avec cet album grand format à double entrée.
En deux endroits du monde, deux enfants du même âge interrogent leur père sur ce qui se trouve de l’autre côté de l’océan. D’un côté, comme de l’autre de l’album, au fil de leurs réponses qui convoquent souvenirs et connaissances, les illustrations pleine page se meuvent, se remplissent, transforment les paysages. Et le lien indubitable entre tous sur Terre se fait évident.
La mer nous unit, nous permet de nous rencontrer, mais colporte également ce que nous y laissons…
Cet album permet une prise de conscience et un débat écologique plus que nécessaire.

Bulle ou la voix de l’océan. René FALLET. Folio Junior, 1987

Bulle est un magnifique coquillage de l’Océan Indien qui vit dans le Quartier de Lune.
S’il est doué de pensées, Bulle ne peut se déplacer seul et s’en désepère.
Par un extraordinaire concours de circonstances, Bulle, arrive sur un bateau pirate avant d’être amenée sur la terre ferme où elle est vendue, volée, reprise, achetée, choyée, oubliée, délaissée puis comprise avec Petit-Pierre.

Bulle ou la Voix de l’Océan est un très beau roman d’aventures, d’apprentissage et d’amitié, du temps de la flibuste, qui regorge de métaphores et de réflexions sur le besoin d’avoir, sur les apparences et les illusions, l’espoir et l’évidence, sur les relations entre les hommes et avec la nature, et notamment la mer.
L’écriture est tendre, facétieuse, parfois cruelle, toujours poétique.

Son avis complet ICI.

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Pour clore cette sélection, Blandine vous propose deux films, des adaptations aussi belles que réussies de deux romans.

Sur les chemins noirs. D’après le roman éponyme de Sylvain Tesson. Avec Jean Dujardin (2023)

Suite à une chute de plusieurs étages qui le laisse un peu diminué, Pierre remet sa vie en perspective.
Ecrivain à succès, flambeur et fêtard à qui tout sourit, il décide d’entreprendre un long voyage à pied : traverser la France du Mercantour au Cotentin. Seul.
Ce voyage, c’est celui de la renaissance, du nouveau départ, et de sa reconnexion à l’essentiel et à lui-même.
Pierre est bourru et pas spécialement attachant, mais il s’attendrit. Il est parfois rejoint dans sa marche, ce qui l’ouvre.
Les paysages sont magnifiques, Jean Dujardin tient parfaitement son rôle, et le film est vraiment émouvant.

L’Improbable voyage d’Harold Fry (2023) D’après le roman de Rachel Joyce, La lettre qui allait changer le destin d’Harold Fry arriva le mardi…

Harold Fry, retraité, reçoit un matin une lettre de son ancienne collègue Queenie qui lui annonce qu’elle est gravement malade.
Tant bien que mal, il rédige une réponse, forcément maladroite et qui ne le satisfait pas. C’est aussi pourquoi il n’arrive pas à poster sa lettre. Aussi va-t-il de boite postale en boîte postale jusqu’à appeler d’une cabine téléphonique la Maison de Santé où se trouve Queenie pour annoncer qu’il arrive, qu’il se met en marche dans l’instant et qu’elle doit tenir bon. « You will not die. Die you will not. » sera désormais son mantra.
Et il part comme ça, avec juste sa veste sur le dos et ses mocassins, son portefeuille et sans prévenir sa femme.
Le voyage sera long, 800 km, mais il va en sortir transformé.
Seul face à lui-même, il repasse le film de sa vie, ses échecs surtout, et fait des rencontres mémorables et empreintes d’humilité.
En parallèle, nous sommes aussi avec sa femme, laissée ainsi. Et nous comprenons comment ils en sont arrivés à vivre dans un quotidien sans aucun éclat, minuté, triste.

Jim Broadbent (qui a incarné le Professeur Horace Slughorn dans Harry Potter) livre ici une magnifique, émouvante et sincère prestation.

Son article complet sur le roman ICI

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La semaine prochaine, c’est Colette qui vous emmènera en voyage. D’ici là, retrouvez les billets de Linda qui prend le train, de Liraloin qui nous invite au voyage intérieur, et de Lucie qui nous emmène en Amazonie.

Nos coups de coeur d’Avril

Le mois d’avril est terminé et les blogueuses d’A l’ombre du grand arbre vous ont montré leurs tables de chevet et leurs PAL (Pile à Lire) et PAC (Pile à Chroniquer). Découvrez cette semaine leur coup de cœur mensuel.

Aurélie a profité d’un réveil très matinal pour lire dans son jardin et se plonger dans le roman « La vie dure trois minutes » d’Agnès Laroche chez Rageot. Une histoire sur la reconstruction suite un drame et sur la danse, le tango précisément.  Automne, une lycéenne, a eu un choc un jour de juin. Depuis ce jour, elle reste cloîtrée chez elle et a éteint son téléphone. Elle décide d’écrire ce qui s’est passé pour surmonter cette épreuve. Nous sommes plongés dans ses pensées entre le présent et le passé. Un texte court et intense.

Son avis

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Bouma a dévoré le dernier Prix BD Jeunesse du Festival d’Angoulême à savoir Le Prince et la Couturière de Jen Wang. Ce gros comics propose une histoire originale où les protagonistes cherchent à se définir dans une société qui le fait pour eux, le tout sur fond de podium de la mode. Une très belle proposition qui ne plaira pas qu’aux filles malgré le sujet et la couverture qui pourraient le suggérer.

Son avis.

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HashtagCéline a eu la chance de faire une virée dans les années 60 sur les routes américaines en compagnie d’un trio attachant et très touchant. Avec Toffee Darling de la talentueuse Joanne Richoux paru chez Sarbacane, HashtagCéline est rentrée de ce road trip la tête pleine de souvenirs, « les yeux liquides », le vague à l’âme et la sensation que le voyage avait été trop court…

Son avis.

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Isabelle et ses deux flibustiers, sur leur île aux trésors, ne résistent jamais à l’appel d’une robinsonnade ! Ce mois-ci, ils s’en sont donnés à cœur joie avec Robot sauvage, de Peter Brown (paru en 2017 chez Gallimard Jeunesse). Roz, robot naufragé, doit s’adapter à la vie sauvage. Un roman original qui donne à réfléchir, fait beaucoup sourire et vibrer pour des « personnages » vraiment attachants ! Vivement le tome 2 !

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Pépita et son Méli-mélo de livres ont regorgé de pépites en ce mois d’avril mais si je ne devais n’en retenir qu’un, c’est celui-ci car sa forme et son fonds peuvent toucher tout un chacun. C’est l’immense force de la littérature jeunesse ! Un bijou de narration que cette balade de Koïshi d’Agnès Domergue et Cécile Hudrisier chez Grasset jeunesse, petit grain de riz qui suit le fil de sa vie. Un magnifique écrin pour ces aquarelles si légères et si poétiques.

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Sophie de La littérature jeunesse de Judith et Sophie voit la vie en 133 couleurs avec ce nuancier encyclopédique ! Une page + une couleur + une anecdote sur son origine, son utilisation, sur un objet qui la symbolise… Voilà le pari réussi de Cruschiform pour Colorama, cet imagier multicolore chez Gallimard jeunesse.

Son avis

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Chloé (Littérature enfantine) s’est plongée avec bonheur dans les mystères du développement du langage du jeune enfant avec La la langue, un album qui explique aux enfants comme aux adultes comment le petit humain devient doué de parole. Une lecture à la fois ludique et instructive.

Son avis

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Alice d’A lire aux pays des merveilles est tombée sous le charme d’un roman ado dont l’histoire est aussi dure et poétique que l’annonce son titre.

Toute la beauté du monde n’a pas disparu de Danielle Younge-Ullman ou l’histoire d’une reconstruction personnelle au milieu d’une nature hostile pour enfin accepter l’inacceptable. Une juste dose de réalité et de légèreté pour ne plus décrocher de cette lecture dont on ne ressort pas indemne. De route beauté !

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Bonnes lectures à vous et rendez vous le mois prochain !