Coups de coeur de septembre

La rentrée est passée, le froid s’installe déjà – trop tôt !
Heureusement, A l’ombre du Grand Arbre, nous avons quelques coups de cœur à partager… Pour faire durer le beau temps ou nous préparer à affronter l’automne !

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Lucie a découvert la collection “Court Toujours” de Nathan avec un certain plaisir. Défi lancé à de grands noms de la littérature jeunesse : écrire un texte court (à lire ou à écouter en moins d’une heure), adapté au mode de vie des 18-25 ans. Ces romans sont disponibles en format papier mais aussi numérique et audio.
Pour le moment, ses “chouchous” sont J’entends des pas derrière moi de Jo Witek et Miettes (humour décalé) de Stéphane Servant.

Son avis sur J’entends des pas derrière moi, Miettes (humour décalé) et Tu reverras ton frère.

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Hasard de calendrier, c’est aussi ce mois-ci qu’elle a lu la suite de deux romans coup de cœur mettant en scène des animaux.
D’un côté, Jefferson fait de son mieux, “suite” de Jefferson, par Jean-Claude Mourlevat. Et quel plaisir de retrouver le petit hérisson, enquêteur malgré lui pour sauver l’une des “Ballardeau” embrigadée dans une secte ! Humour, aventures et réflexion sur la détresse face à la solitude. Un très beau roman.

Jefferson fait de son mieux, Jean-Claude Mourlevat, illustrations d’Antoine Ronzon, Gallimard Jeunesse, 2022

Retrouvez les avis d’Isabelle, Linda, Théodore (chez la Collectionneuse de papillons) et Lucie sur le premier tome, et ceux d’Isabelle et de Lucie sur le second.

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De l’autre, Pax, Le chemin du retour, suite de Pax et le petit soldat de Sara Pennypacker. Le premier tome ayant laissé un goût d’inachevé malgré sa grande qualité, suivre les traces de Pax et Peter, chacun de leur côté, est un soulagement. L’occasion aussi de répondre aux questions restées en suspens : Pax oubliera-t-il Peter ? Saura-t-il se débrouiller dans la nature ravagée par les conflits des hommes ? Comment Peter fera-t-il face à la disparition de son père ? Une reconstruction sera-t-elle possible suite à tous ces drames ?
Un roman sur l’amitié et le deuil, dans lequel l’écologie tient une place primordiale.

Pax, Le chemin du retour, Sara Pennypacker, illustrations de Jon Klassen, Gallimard Jeunesse, 2022.

Retrouvez les avis de Linda, d’Isabelle et Liraloin sur le premier tome, et celui de Lucie sur le second.

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Pour Liraloin, il était une fois une belle histoire : celle de Berta Hansson. Un album aux magnifiques illustrations relatant l’enfance de cette artiste-peintre suédoise.

L’oiseau en moi vole où il veut, Sara Lundberg, La Partie, 2022

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Pour Linda, la visite de cette maison hantée s’est faite les yeux pétillants de plaisir à la recherche de petits fantômes cachés sur des feuilles de papier calque qui jouent sur la transparence et l’effet de superposition pour créer des éléments de surprise.

Cette maison est hantée de Oliver Jeffers, kaléidoscope, 2022.

Son avis complet est à lire ICI.

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Et puis il y a ce premier roman de Ninon Dufrénois, véritable ode à la famille qui véhicule de si belles valeurs familiales. Le texte est touchant, l’histoire est une grande aventure, l’ensemble donne un récit “première lecture” poétique pour toute la famille.

Rosalie de Ninon Dufrénois, illustré par Julien Martinière, VoceVerso, 2022.

Critique complète de Linda.

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Isabelle a ri toute seule en dévorant le nouveau roman de Clémentine Beauvais, Les Facétieuses. Un roman déguisé en enquête (à moins que ?) sur les traces du jeune Louis XVII et surtout de sa marraine la bonne fée : comment a-t-elle pu l’abandonner à son sort atroce ? L’enquête nous conduit de librairies confidentielles en placards secrets du château de Versailles, recoins parisiens et farouches bibliothèques. Vers des mondes insoupçonnés où frémissent la limonade à la rose et les plumes de paon, peuplés d’historiens féministes ou réactionnaires, de brocanteurs et même de gardes de la couronne britannique. On rit beaucoup mais on n’en découvre pas moins d’où viennent les inégalités d’hier et d’aujourd’hui ! C’est complètement foisonnant et fantaisiste, mais d’une logique imparable : on brûle de connaître le fin mot de l’histoire. 

Les Facétieuses, de Clémentine Beauvais, Sarbacane, 2022.

Son avis complet ICI

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Et en BD, Isabelle et ses moussaillons ont adoré se lancer dans un périple avec mille dindes dans le Far West de 1860, grâce à l’adaptation BD du roman La longue marche des dindes par la talentueuse Léonie Bischoff. Simon Green compte bien faire fortune en conduisant un convoi de mille volatiles jusqu’à la ville florissante de Denver où on se les arrache pour au moins cinq dollars pièce. Seul détail, le chemin de fer n’existe pas encore et le voyage de 1000 km devra donc se faire… à pied. Aventures, rencontres et découverte de soi dans une Amérique peuplée de chercheurs d’or et d’Indiens, de brigands et d’exploiteurs d’esclaves, de fermiers affamés et de chasseurs de bisons. Les illustrations sont colorées, pleines de mouvement et d’expressivité. On glousse de plaisir !

La longue marche des dindes, de Léonie Bischoff (adapté du roman de Kathleen Karr), Rue de Sèvres, 2022.

L’avis d’Isabelle et celui de Lucie.

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Bien que très différentes, les deux lectures coup de cœur de Blandine ont des thèmes similaires, et l’ont beaucoup émue.

La Baleine la plus seule au monde. Kim CRABEELS et Sebastiaan Van Doninck. Alice Jeunesse

Ce très bel album lie deux solitudes. Celle d’une petite fille, Lila, qui se trouve en bout de monde. En attendant sur son phare son papa océanographe parti en aventures pour oublier et combler, elle collectionne les coquillages.
Et celle d’une baleine esseulée par sa différence acoustique.
Un récit métaphorique et magnifiquement illustré sur le deuil, la différence et l’amitié, basé sur une histoire vraie, et qui, forcément, fera écho.

La nuit où les étoiles se sont éteintes. Nine GORMAN et Marie ALHINHO. Albin Michel, 2021

Finn, ado rebelle et cabossé, débarque à la Nouvelle-Orléans chez son oncle maternel qu’il ne connaît pas. Il ne le sait pas encore, mais ce sera pour lui, après avoir connu et en affronter d’autres, l’occasion de se (re)construire, d’avoir un but dans la vie ainsi que des amis. Une bande de potes extravagante, parfois agaçante, mais finalement toujours présente. Et l’amour, aussi inattendu que soudain.

La nuit où les étoiles se sont éteintes est un roman qui emporte et émeut. Beaucoup de thèmes s’entremêlent entre quête identitaire et initiatique, amitié et amour, sexualité et homosexualité, parentalités plurielles, violences et (re)construction, deuil et avenir… C’est beau, c’est juste et c’est fort!

L’avis de Blandine ICI.

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Colette s’est plongée dans la magnifique BD de David Sala, intitulée Le Poids des héros. L’auteur explore son enfance mais à l’aulne de ce que ses grands-pères, héros de guerre et de résistance, ont laissé comme empreintes indélébiles dans les récits qui se transmettent de générations en générations. Et c’est non seulement à un voyage à travers l’histoire d’une famille que l’auteur nous invite mais aussi à un fabuleux voyage à travers la couleur et l’imaginaire. Les images de Sala sont lumineuses même quand elles abordent cette histoire parfois méconnue de ce côté des Pyrénées, celle de la dictature de Franco, de l’exil des Républicains espagnols en France, du camp de concentration d’Argelés-sur-mer…

Le Poids des héros, David Sala, Casterman, 2021.

Vous pourrez feuilleter la BD par ici pour vous faire votre petit avis avant d’aller l’emprunter dans la médiathèque la plus proche !

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Et vous, quels sont les coups de cœur de votre rentrée ?

Prix A l’ombre du Grand Arbre 2022 : Petites Feuilles

Comme annoncé lors de l’anniversaire de notre grand arbre, nous vous proposerons au fil de l’été notre sélection pour le prix A l’ombre du grand arbre 2022. Ainsi vous pourrez, au fil de vos lectures estivales, égrainer les petites perles de la littérature jeunesse que nous avons sélectionnées pour vous, les savourer, les humer, les caresser puis venir voter ici pour vos titres préférés ! Les votes sont ouverts à partir d’aujourd’hui et jusqu’au 20 août. Les gagnants seront annoncés dans la foulée, lundi 22 août.

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Après la sélection Brindilles présentée la semaine dernière, voici le trio de tête pour la catégorie “Petites Feuilles” qui célèbre nos albums préférés destinés à des lecteur.ice.s un peu plus grand.e.s !

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Esther Andersen

Esther Andersen surgit comme un titre de film au doux parfum de carte postale envoyée lors des vacances. Un album sur l’été qui ne semble ne jamais finir, les premiers émois amoureux et les rencontres estivales bouleversantes. L’écriture du texte épouse parfaitement les illustrations d’où émanent une légèreté enfantine amoureuse.

Esther Andersen de Timothée de Fombelle et Irène Bonacina, Gallimard jeunesse, 2021

Retrouvez les avis de Lucie Livres d’Avril, Linda, Isabelle et Frédérique

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Les idées sont de drôles des bestioles

Bienvenue dans le monde de l’imaginaire. Quels chemins prennent nos pensées pour construire nos idées ? Des idées qui se métamorphosent en bestioles hybrides incomplètes ou inattendues. Ici, les mots et les images permettent de restituer ce qui aurait pu être insaisissable. Un album à mettre entre les mains d’enfants qui aiment créer, inventer et attraper des idées au vol.

Les idées sont de drôles de bestioles d’Isabelle Simler, Editions Courtes et Longues, 2021

Retrouvez notre lecture commune et les avis de Lucie Livres d’Avril, Isabelle et Linda

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Peut-être

Trébucher, rêver, être humain… Essayer, réussir… ou non ! Et si chacune et chacun avait en soi un potentiel insoupçonné ? Pas besoin d’être un super-héros pour essayer de réaliser ses rêves. Dans cet album les dessins illustrent bien la poésie d’un texte positif. Une lecture qui fait du bien aux petits comme aux grands.

Peut-être de Kobi Yamada et Gabriella Barouch, Le Lotus et l’Éléphant, 2021

Une sélection créatrice, poétique et rêveuse !

Alors, alors !

Quel est votre titre préféré dans la sélection “Petites feuilles” ?

  • Les idées sont de drôles de bestioles d'Isabelle Simler, Editions Courtes et Longues, 2021 (53%, 20 Votes)
  • Esther Andersen de Timothée de Fombelle et Irène Bonacina, Gallimard jeunesse, 2021 (29%, 11 Votes)
  • Peut-être de Kobi Yamada et Gabriella Barouch, Le Lotus et l'Éléphant, 2021 (18%, 7 Votes)

Total Voters: 38

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Lecture commune : Rois et reine de Babel

Sous le Grand Arbre, nous aimons beaucoup le travail de François Place. Qu’il soit auteur, illustrateur ou les deux, il a le pouvoir de nous emporter vers des mondes merveilleux. C’est donc avec enthousiasme que Colette et Lucie ont lu et discuté de Rois et reines de Babel !

Rois et reines de Babel de François Place, Gallimard Jeunesse, 2020

Lucie : En récupérant cet album à la bibliothèque, j’ai été surprise par sa taille, qui sort de l’ordinaire. T’attendais-tu à un livre aussi grand ?

Colette : C’est un format très original que François Place explore pour la première fois me semble-t-il. J’étais habituée au format paysage de plusieurs de ses livres, mais là en effet on ouvre les portes en grand d’un univers foisonnant !

Lucie : J’avoue que ce grand format m’a vraiment plu à moi aussi. En voyant sa taille et en le soupesant j’ai pensé que ça allait être une œuvre à la hauteur de mes attentes : élaborée, foisonnante… J’étais prête pour le voyage auquel François Place me conviait, quel qu’il soit !
Et comme je sais que ses illustrations sont toujours pleines de petits détails, j’ai pensé que ce grand format me permettrait de les apprécier pleinement.
L’illustration en couverture est déjà impressionnante. Te souviens-tu de tes premières impressions ?

Colette : Wouahh ! Que c’est beau ! Du grand François Place ! Voilà ce que je me suis dit ! Une couverture à la fois classique dans sa mise en page et d’une richesse architecturale et géographique incroyable. Un bijou pour les yeux à observer minutieusement.
Et toi, qu’en as-tu pensé au premier abord ?

Lucie : Je suis d’accord avec toi, elle est magnifique. Cette couverture a renforcé mon premier sentiment : très clairement, elle annonce l’œuvre ambitieuse qu’est Rois et reines de Babel. Une fresque dense et élaborée pour mener une réflexion sur la culture et le rôle des dirigeants.
Ça a d’ailleurs été une autre surprise, à la lecture : comme les premières pages sont consacrées au prince Nemrod, je ne m’attendais pas à ce que l’histoire couvre tant de temps. Qu’as-tu pensé de cet aspect “dynastie” ?

Colette : J’ai toujours eu un goût certain pour le mythe de Babel dont j’ai déjà exploré les adaptations au fil d’albums et autres romans jeunesse dédiés à cet épisode biblique particulièrement riche. Mais en effet ici le point de vue est tout à fait original puisque François Place décide d’en explorer l’histoire à travers le temps, quand dans le texte biblique la tour de Babel ne survit pas longtemps à la bêtise des hommes. L’artiste en livre une vision beaucoup plus positive et poétique que celle que l’on peut retrouver dans le texte ancien.

Lucie : J’ai trouvé intéressant, justement, que la construction perdure malgré les rois incapables ou cruels. Comme si la vision du fondateur était tellement puissante que ses successeurs pouvaient ralentir sa réalisation mais pas la détruire totalement. L’espérance reste possible, notamment pour le peuple.
J’aime bien la manière dont tu analyses l’appropriation du mythe par François Place. C’est vrai que sa vision est beaucoup plus positive que dans la Bible !
Cet aspect positif passe principalement par des figures féminines : le rôle des femmes et de la culture est essentiel dans l’évolution de Babel. J’imagine que ces thématiques ont trouvé écho chez toi, souhaites-tu en parler ?

Colette : “La femme est l’avenir de l’homme” écrivait Aragon. Pour moi cet album en est une illustration ambitieuse, presque épique. Après Nemrod “Le bref”, “Le Taciturne”, “l’Etourdi”, “Le Gras”, “Le Paresseux”, “Le Plaintif”, “L’Indécis”, “L’endormi”, “le Hardi”, “Le Fléau”, “Le Ténébreux” et “Le roi de fer” quel ravissement de découvrir la politique de Bérénice “Reine de Cannelle” puis de Bérénice “La Lumineuse”, puis celle de Bérénice “L’Enchanteuse” et enfin celle de Bérénice “La Rêveuse”. Cette manière de passer le relais aux femmes après des années sombres de politique patriarcale est une ode au pouvoir féminin et à l’espoir qu’il incarne, un espoir que nous n’avons pas encore goûté dans la majorité des pays du monde… 
Est-ce que nous en disons plus sur les choix de ces reines de Babel qui vont transformer la vie de leur peuple ?

Lucie : Mais oui, bien sûr !
Cela commence avec une première reine qui épouse un marchand. Ce faisant, elle ouvre Babel au commerce, aux échanges et donc à la culture. C’est vraiment le moment de bascule à mon avis : avec ce pouvoir féminin, cette ouverture et aussi ce mariage avec un homme d’un autre milieu, d’une origine sociale différente. En une page la “Reine de la Cannelle” remet en cause un patriarcat qui durait depuis des générations. Patriarcat qui me semble être à l’origine des difficultés de Babel, parce que la femme du premier roi semble avoir eu un rôle important dans la construction, c’est après que les choses se gâtent.
Même si c’est un peu caricatural, et que je ne crois pas qu’une femme gouvernerait nécessairement mieux qu’un homme du fait de sa supposée sensibilité, je trouve intéressant que ce soit une femme qui ouvre la cité au reste du monde et qui amorce le cercle vertueux.
On a vraiment l’impression que cette succession de femmes a un but, une vision commune de ce qui est bon pour le peuple. Cet aspect m’a beaucoup plu. Est-ce que tu veux parler de ses effets?

Colette : En effet on a vraiment l’impression qu’elles œuvrent toutes dans le même sens : donner à leur peuple les moyens de se libérer de toute forme de tutelle. Je ne dirai pas que c’est une mission autour de laquelle elles se sont concertées car elles appartiennent toutes à des générations différentes mais chacune prend soin de s’appuyer ce que ses prédécesseures ont bâti. Cela me fait penser à ce que nous reprochons souvent à nos dirigeant.e.s : ne pas tenir compte des réformes qui ont été initiées avant elles-eux, ne laissant pas le temps aux changements de faire ses preuves…

Lucie : Tu as raison, elles n’ont évidemment pas pu se concerter. Mais chacune d’entre elle comprend (probablement grâce à l’éducation reçue de mère en fille) et partage la vision de sa prédéceure et la poursuit. Cela permet à chaque génération d’apporter sa pierre à l’édifice et donc au projet de prendre une telle ampleur.
Le parallèle que tu fais avec nos dirigeants est très pertinent. Du côté des rois on avait l’impression que chacun faisait en fonction de sa personnalité et de ses intérêts, ce qui est appuyé par leurs noms, et explique la “chute” de Babel.
À propos de chute, mais au sens propre cette fois, j’avais envie d’évoquer ce peuple qui se sert de ses cheveux pour s’arrimer, tellement représentative de l’imaginaire de François Place !
T’a-t-il évoqué d’autres créations de ce type dont tu aurais envie de parler?

Colette : J’ai comme toi beaucoup aimé ces hommes maçons aux chevelures- grappins ! La manière brutale et arbitraire dont ils sont rejetés de cette société qui est pourtant allée les chercher m’a rappelé la violence de la fin des Derniers géants (et toutes les formes de violence exercées contre les populations immigrées qui viennent travailler pour un autre pays que leur pays d’origine). Je n’ai pas lu d’autres livres de François Place, donc je ne vois pas d’autres références.
Et toi, est-ce que cela t’a évoqué d’autres créations de ce type ?

Lucie : Je pensais effectivement aux Derniers géants mais aussi à Angel l’indien blanc, qui correspond aussi à ce que tu dis de l’oppression d’un peuple par un autre puisque le personnage principal est un indien réduit en esclavage. J’aime beaucoup quand François Place invente un peuple, avec ses traditions et ses mystères !
Mais en réalité, bien qu’il soit moins audacieux, j’ai plus souvent pensé au Sourire de la montagne pendant la lecture de Rois et reines de Babel parce que ces deux albums partagent l’idée centrale d’une construction gigantesque et d’un dirigeant visant le bonheur de son peuple.
La fin de l’album est un peu mystique, qu’as-tu pensé de ce parti pris?

Colette : J’ai adoré la fin : le personnage de “La Rêveuse” répond à mon besoin de poésie même pour parler politique !
Est-ce que tu fais référence au personnage de l’ermite que l’on aperçoit au début du récit, obligé de s’exiler face à l’invasion des habitants de Babel, et qui revient à la fin avec l’apaisement incarné par les choix de notre dernière Reine ?

Lucie : C’est effectivement ce à quoi je faisais allusion. Moi aussi j’ai aimé ce côté merveilleux, un peu magique (ou religieux) mais je n’ai pas trop su comment interpréter cette fin. Je me demandais ce que tu y avais vu. Après un album somme toute assez terre à terre sur la construction, les choix politiques, la vie de la cité… La fin emporte vers une autre dimension avec tout d’abord le retour du cerf blanc qui emmène “La Rêveuse” dans le ciel, puis celui de l’ermite déjà très vieux au début de l’album… Ça m’a surprise !

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Pour avoir une idée des magnifiques illustrations et un aperçu du travail de recherche de François Place, n’hésitez pas à visiter la page consacrée à cet album sur son site internet.

Lecture d’enfant #36 : MASCA

Théo, 9 ans, a beaucoup lu cet été. Il a eu un véritable coup de cœur pour MASCA, Manuel de survie en cas d’apocalypse d’Erik L’Homme et Eloïse Scherrer et souhaite le partager.

MASCA, Manuel de survie en cas d’apocalypse de Erik L’Homme et Eloïse Scherrer, Gallimard Jeunesse, 2019

Qu’est-ce qui t’a donné envie de lire ce livre ?

J’avais déjà lu un livre illustré par Eloïse Scherrer, et j’avais beaucoup aimé les illustrations. Alors j’ai eu envie de découvrir celui-ci.

Qu’as-tu pensé en voyant la couverture ?

J’ai été attiré par le « Manuel de survie ». Ca attire le regard ! J’ai pensé qu’il allait y avoir une fin du monde, un cataclysme, et donc de l’aventure.

Peux-tu résumer l’histoire ?

C’est l’histoire d’un collégien qui est seul dans son appartement parce que sa famille est partie quelques jours. Une nuit, il y a une grosse tempête qui coupe l’électricité et détruit pas mal de choses dans la ville (le réseau de téléphone, les magasins, les feux de signalisation…). Il a peur pour sa famille et il va décider de les retrouver. Il veut être sûr qu’ils vont bien.

Est-ce que tu t’es imaginé à la place de Justin ?

Oui, et ça m’a plu, même si ça me ferait un peu peur d’être dans cette situation : de ne pas savoir si mes parents vont bien, c’est stressant et angoissant.

Est-ce que d’autres choses t’ont plu ?

Ce qui m’a plu, c’est qu’il y a de l’action, du suspense, et que ça finit bien !

Justin nous parle comme s’il parlait à son personnage inventé : Björn. C’est très créatif et ça m’a beaucoup plu. C’est bien écrit. Tu as l’impression d’y être, de vivre l’aventure avec lui, que tu le connais et qu’il te parle.

Il est dans la nature et il se débrouille bien. Il sait pas mal de choses de la nature et c’est ce qui lui permet de survivre.

A la fin, il y a des fiches explicatives pour des méthodes de survie. C’est sympa de comprendre comment Justin a fait et on peut essayer chez soi. Il nous apprend à faire un abri, du feu, à trouver le nord…

J’ai aussi bien aimé que ce soit présenté un peu comme un journal intime. C’est Justin qui raconte son histoire, il y a des petits dessins…

Justement, tu as dit que tu avais choisi ce livre à partir du nom d’Eloïse Scherrer, qu’as-tu pensé de ses illustrations ?

Elle dessine quand même vraiment bien ! Ça fait à la fois réaliste (ça pourrait être dessiné par un enfant qui dessine très très bien) et à la fois très beau.

On s’y croit vraiment, comme si on était en train de lire un vrai journal intime du personnage. Surtout avec les petits brouillons de texte qui accompagnent les dessins. Le fait qu’elle n’utilise que de l’orange et du noir, ça m’a intrigué, mais c’est logique comme il n’a pas beaucoup de matériel.

A qui conseillerais-tu ce livre ?

A toute personne aimant l’aventure, le suspense, un peu l’angoisse et qui a envie de découvrir des stratégies pour se débrouiller dans la nature.

Billet d’été : D’Arbres en Arbres

Dernière arrivée à l’Ombre du Grand Arbre, jeune bourgeon qui souhaite devenir vieille branche, vous parler d’arbres, de feuilles et de racines, m’a semblé évident. Voici donc une sélection pour vous emmener en balade, pour découvrir des arbres d’ici et d’ailleurs, des arbres fascinants ou métaphoriques, des arbres qui suscitent de multiples émotions ou favorisent les imaginations.

Se promener en forêt, en humer les odeurs, observer les différentes ramées… et ne pas toujours les reconnaître ! Avec ces deux albums, il devient aisé d’apprendre à les différencier et nommer.

Je découvre LES ARBRES. Claire LECOEUVRE et Laurianne CHEVALIER. Circonflexe/Millepages, 2016

Après nous avoir présenté ce qu’est un arbre, ce qui le compose, comment reconnaître feuilles et fruits, les autrices nous détaillent en mots et en dessins 24 espèces que nous pouvons facilement retrouver dans nos forêts et balades : érable, if, sapin, bouleau, pommier, robinier…

Chaque arbre se voit mis à l’honneur avec informations descriptives et géographiques, sur son bois, sur son “talent caché” et son “petit secret”. Un petit pas-à-pas nous apprend à dessiner sa feuille ou son fruit.

Regarde ce que j’ai trouvé dans les bois. Moira BUTTERFIELD et Jesús VERONA. Editions Père Castor, – 2020

Cet album nous invite à suivre trois amis qui s’en vont se promener en forêt. Chemin faisant, ils observent, ramassent, comparent ce qu’ils trouvent pour nous permettre de connaître les arbres, leurs particularités et bienfaits, comme la vie qui y fourmille, au fil d’illustrations minutieusement détaillées.

L’histoire se double d’un cherche-et-trouve et s’alterne avec des pages documentaires riches d’informations dessinées sur des feuilles à petits carreaux.

Un album pour apprendre, aimer et donner envie de préserver la forêt.

Mon avis ICI.

Il y a les arbres qui nous sont familiers, et tous ces autres qui parent d’autres contrées, qui forment d’autres légendes ou traditions. Etonnants, passionnants, l’album de Nancy Guilbert et Anna Griot nous emmènent à leur rencontre.

L’Arboretum. Voyage au pays des arbres. Nancy GUILBERT et Anna GRIOT. Courtes et Longues, 2018

Par une nuit étoilée, un enfant est guidé par un oiseau à la découverte des arbres, de leurs formes, de leurs couleurs et de leurs particularités.
Servie par des mots-poèmes et des illustrations chatoyantes, cette histoire onirique se double d’un herbier que remplit l’enfant au fil de son merveilleux voyage.

Un album sensible pour découvrir, partager, respecter et être en lien avec la Nature qui nous entoure.

Mon avis ICI.

Dans le vaste et foisonnant monde des livres, les Arbres occupent toujours une place de choix, bienveillante, salvatrice et gardienne. Ils sont le symbole de l’équilibre et de la verticalité, de la vie, dans son évolution comme dans sa régénération, ce qui leur confère tant de sagesse.

Les livres dont je vous parle ci-après mettent à l’honneur cette vie, ce lien et cette transmission.

Petit-Arbre veut grandir. Nancy GUILBERT et Coralie SAUDO. Éditions Circonflexe, 2015

Dans cet album aux illustrations délicatement travaillées, nous accompagnons un arbrisseau impatient de grandir. Au fil du temps qui passe et de sa croissance, sa confiance en lui s’accroît grâce à l’enseignement du Grand-Chêne comme des animaux qui viennent le solliciter.

Un album aux mots rimés pour aborder l’estime de soi, l’appartenance au monde et le sentiment d’utilité, comme le cycle de la vie et la ronde des saisons.

Mon avis ICI.

Sous les Arbres – Un chouette Été. Dav. Les Editions de la Gouttière, 2021

C’est l’été, il fait beau, il fait chaud, et dans la forêt, résonnent des cris joyeux.
Trois enfants jouent dans un plan d’eau, mais leurs bruits exaspèrent M. Hibou et M. Crapaud qui le font savoir chacun à leur manière.
Pourtant, peu à peu, chacun va s’adoucir et se souvenir.

Une petite BD au format à l’italienne, quasi muette, qui fleure bon l’enfance et sa nostalgie, comme les petits bonheurs estivaux.

Mon avis ICI.

Tobie Lolness. Timothée de FOMBELLE. Gallimard Jeunesse, 2016

Le père de Tobie Lolness a fait une découverte scientifique qu’il refuse de révéler, ayant compris combien son invention pourrait être détournée de manière néfaste pour l’Arbre, ses habitants et leur Monde.
A cause de cela, Tobie est contraint de fuir et nous le suivons dans son périple et ses découvertes.

Timothée de Fombelle nous entraîne dans un passionnant roman d’apprentissage qui entremêle aventure et écologie.
Il a créé toute une société autour de l’Arbre dont ses habitants ne mesurent que quelques millimètres de haut.
Ainsi découvre-t-on sa géographie, sa hiérarchie sociale, ses valeurs, ses croyances, ses craintes, les différents dangers, les ambitions dévorantes de certains, les comportements (humains) dans toute leur diversité, les théories quant à la nature de ces “Hommes” et à celle de l’Arbre.
L’écriture de Timothée de Fombelle s’attache au sens des mots, est immergeante et très visuelle, empreinte de poésie et de clins d’œil.

L’arbre-lit. Silène EDGAR et Gilles FRELUCHE. Éditions La Cabane Bleue, 2020

Valentine a grandi et son père décide de lui fabriquer un nouveau lit. Pour ce faire, il utilise le bois du vieux poirier malade qui se trouve dans le jardin. Lorsqu’il est fini, Valentine est heureuse de s’endormir dedans quand une voix profonde et chaleureuse la réveille doucement.

Chaque nuit, cette voix lui raconte des histoires des temps passés devenues contes et légendes, lui permettant de rencontrer différents êtres et personnages.
Mais voilà qu’un soir, l’arbre se tait. Son absence désempare le rossignol. Son silence soudain attriste l’enfant. Une larme coule de sa joue au bois de son lit. Et durant son sommeil, une branche feuillue grandit jusqu’à surplomber sa tête.
Aussitôt, Valentine la plante dans le jardin.

Depuis, chaque soir, avant d’aller dormir, Valentine conte une histoire à l’arbrisseau pour l’aider à grandir.

Voici une délicate histoire de cycle, de transmission et d’écologie, très joliment illustrée.

Pour conclure ce billet au pays des Arbres, je vous emmène là où leurs symboles prennent sens, forces et formes. Où les feuilles deviennent feuillets et pages, où grâce à eux les histoires commencent et où nous remontons le temps pour découvrir nos racines. Ainsi l’Arbre devient libre, ainsi devient-il généalogique.

archives DÉTECTIVE. Nancy GUILBERT et Anna GRIOT. Editions Courtes et Longues, 2021

Un enfant se rend avec ses parents dans le bâtiment des Archives.
Ses doigts compulsent des documents anciens, sauvegardés, enluminés, restaurés. Ses yeux découvrent des lieux, des noms, des histoires, des identités. Lui n’en recherche qu’une seule.
Au fil des pages du livre que nous tenons, lui remonte les branches du temps et d’un Arbre.

Nancy Guilbert et Anna Griot nous convient à vivre un voyage merveilleux, auréolé de mystères et de découvertes, vibrant de couleurs et de détails.
Avec délicatesse et poésie, elles nous apprennent, ou nous rappellent, toutes les professions qui entourent et font vivre les Archives.
Et nous encouragent, nous aussi, à y mener notre propre (en)quête.

Mon avis ICI.

Je vous souhaite une belle balade auprès des Arbres et des pages.
N’hésitez pas à me/nous dire quels sont vos livres adorés en rapport avec eux.
Bel été,
Blandine