Nos coups de coeur de mars

Le printemps est arrivé. Avec l’arrivée des beaux jours, les premiers bourgeons sortent et chez A l’ombre du grand arbre, c’est aussi le moment de présenter nos coups de cœur mensuels.

 

Pour Aurélie, ce fut la fraîcheur printanière dégagée par la premières lecture d’Emile Cucherousset, dernier opus de la collection polynie et elle fut séduite aussi par le couple du roman de Sara Barnard, qui évoque la rencontre d’un ado sourd et d’une jeune fille « muette ».

Pombo courage d’Emile Cucherousset et Clémence Paldacci-Collection Polynie-Mémo éditions

Et plus si affinités de Sara Barnard chez Casterman

Lire ses avis ici et .

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Pour Sophie, le printemps est signe de zénitude et de doigts de pieds en éventail ! Elle vous propose de découvrir le dernier album de Sandra Le Guen (une ancienne branche de l’arbre) avec vos tout-petits et leurs petons sûrement aussi joueurs que ceux de cette histoire !

« Les pieds en éventail » de Sandra Le Guen et Marjorie Béal chez Les p’tits bérets.

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Pour Bouma, c’est une lecture pleine de compassion qui a retenu son attention. Sophie Adriansen sait parler des sujets difficiles avec délicatesse et empathie. Ici, elle livre l’histoire d’une jeune fille dont le papa, malade, perd peu à peu l’usage de son corps…

Papa est en bas de Sophie Adriansen chez Nathan, 2018

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Pour Pépita, c’est un arbre qui a fait vibrer son cœur de lectrice en mars : un album aux illustrations si délicates qu’elles constituent des tableaux à elles seules et un texte si sensible sur la transmission entre une petite fille et sa grand-mère, autour d’un secret. Autre personnage et pas des moindres : un arbre confident, immuable dans sa beauté tranquille. Et quoi de mieux qu’un arbre sous l’Ombre du Grand Arbre !

L’arbre de Sobo, de Marie sellier et Charlotte Gastaut, Réunion des Musées Nationaux

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C’est sans conteste en lisant le très bel album La balade de Koïshi d’Agnès Domergue et Cécile Hudrisier paru chez Grasset Jeunesse qu’HashtagCéline aura eu ses plus belles émotions. Au gré d’une promenade, sur le chemin de la vie, en compagnie de ce petit personnage né d’un grain de riz, elle s’est émerveillée de la douceur et de la poésie de chaque mot, de chaque illustration. Un livre-objet magnifique à offrir, à s’offrir et à faire découvrir.

La Balade de Koïshi d’Agnès Domergue illustré par Cécile Hudrisier, Grasset Jeunesse

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Sur l’île aux trésors, le coup de cœur a été unanime pour Les sept étoiles du Nord, premier roman de l’autrice écossaise Abi Elphinstone, tout juste paru chez Gallimard Jeunesse. Une lecture qui nous transporte pour des aventures palpitantes dans un univers de glaces, de forêts boréales et de tribus qui évoque la mythologie nordique !

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Souvenirs


Avant de changer d’année, des souvenirs pleins la tête, explorons quelques lectures qui nous ramènent en arrière. Voilà un thème qui traverse de nombreuses fictions jeunesse, qu’il soit seulement évoqué ou au centre de l’histoire. Entre réminiscences familiales et moments durs à digérer, ces fenêtres ouvertes sur le passé nous touchent souvent.

 

Dans Le Tiroir à histoires

June et Jo – les souvenirs de Séverine Vidal et Amélie Graux

La maison en petits cubes de Kunio Katô et Kenya Hirata

 

Lire les avis de Bouma, Sophie et de Pépita.

 

Bouche Cousue de Marion Muller-Collard

Ce récit tourne autour d’un souvenir de jeunesse qui remonte à la surface suite à un événement.

Lire l’avis de Pépita

 

 

Sur Méli-Mélo de livres

 

Le jardin des ours Fanny Ducassé. Thierry Magnier.

Quand se souvenir de ses deux grands-pères, aujourd’hui disparus, donne un album d’une rare sensibilité et aux illustrations magnifiques.

Lire aussi les avis de Céline et Sophie

 

L’armoire Anne Cortey, illustré par Claire de Gastold. Grasset jeunesse.

Une armoire, métaphore de la grand-mère disparue et dont la présence angoisse une petite fille. Quand les souvenirs rattrapent les générations qui suivent, une approche bien vue.

 

La couverture : une histoire en petits carreaux (de tissu) Isabel Minhos Martins Yara Kono. Editions Notari.

Une histoire qui sublime le souvenir, le partage, la transmission entre générations.

 

Sur les Lectures Lutines

Le Jardin de Minuit d’Edith. Editions Noctambule.
Quand un enfant partage mystérieusement les souvenirs d’une demoiselle dans un fabuleux jardin.
Lire aussi les avis de Bouma et Sophie

La belle histoire d’une Vieille Chose, de Louis Emond et Steve Adams.

Quand une voiture se souvient de ce qu’elle a été avant de n’être plus qu’une vieille chose.

 

Les bruits chez qui j’habite de Claire Cantais et Séverine Vidal.

Des souvenirs sonores que l’on goûte délicieusement. De petites portes qui s’ouvrent vers un monde de l’enfance que l’on n’a pas oublié.

 

 
A lire au Pays des Merveilles
La mémoire en blanc de Isabelle Colombat. Thierry Magnier, 2015
Quand pour se réconcilier avec sa propre histoire, Léonie se construit sur de de bouleversants souvenirs et nous oblige à (re)découvrir un épisode récent de l’Histoire du Rwanda. N’oublions pas…

Après la peine / Ahmed Kalouaz. Rouergue, 2014.

 

Un tête à tête mélancolique entre un père et son fils entre souvenirs et révélations.

Lire aussi les avis de Pépita et de Bouma.

Vide-grenier / Davide Cali, Marie Dorléans. Sarbacane, 2014
Bric à brac de souvenirs entassés dans le grenier ; il suffit de remettre le nez dans les cartons oubliés pour retomber en enfance et décidé .. de ne plus s’en séparer !
Lire aussi l’avis de Chlop.
Sur Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait Livresse
Les souvenirs, ça se construit aussi ! Ou comment transformer le malheur en bonheur ? Une belle illustration de résilience avec une galerie de personnages hauts en couleur.
Lire aussi les avis d’Alice et de Pépita.
Souvenirs de papier de Baptistine Mesange et Jessica Lisse.
Dans cet « album-souvenir », le narrateur revient sur les amis de papier qui ont peuplé son enfance : un ours en peluche à qui il a offert une partie de son cœur, une jolie poupée et son amie imaginaire, un coffret pour y glisser tous ses secrets… Un album très psychologique voire philosophique qui aborde avec beaucoup de justesse, de tendresse et une petite pointe de mélancolie le passage de l’enfance au monde adulte.
Dans Un Petit bout de Bib(liothèque)
Mon grand-père de Christine Schneider et de Gilles Rapaport.

Un livre sensible qui rappelle tous ces moments de l’enfance passés avec son grand-père, ceux qui restent malgré la disparition de l’être cher.
Lire l’avis de Pépita
Le Marchand de souvenirs de Ghislaine Biondi.
Quand on n’a pas eu de père, difficile de s’en souvenir. C’est pourtant ce que propose ce marchand de souvenirs…
Un album intemporel qui rappelle que chaque être humain est passé par mille vies avant de devenir celui que l’on connaît. Avec tout le talent de Lane Smith, en plus.
Chez La Collectionneuse de Papillons
Quelqu’un qu’on aime de Séverine Vidal.

Partir à la recherche de ses souvenirs, une quête qui n’a pas de prix, surtout quand elle permet à une jeune homme de construire le lien avec son grand-père.
Lire l’avis de Pépita
La Gigantesque petite chose de Béatrice Alemagna.
Béatrice Allemagna signe un album gigantesque pour évoquer ces moments infiniment précieux que nous chérissons tous au fond de notre mémoire.
Dans la Littérature enfantine de Chlop
 
Guirlandes de poupées, J. Donaldson R. Cobb Kaléidoscope
Entre réel et imaginaire, une fillette joue avec une guirlande de poupées. Jusqu’au moment où elles croisent une paire de ciseaux bien réels, et c’en est fini de la guirlande de poupée… Mais il reste toujours quelque chose des bons moments passés, une place attend les poupées disparues dans la mémoire de la fillette.
Dans la maison de ma grand-mèreAlice Melvin, Albin Michel jeunesse
Nous suivons une petite fille qui traverse la maison de sa grand-mère, dans la quelle chaque pièce, chaque objet, lui évoque un doux souvenir.
Lire l’avis de Pépita
Dans l’Atelier de Cœurs
Mon bison de Gaya Wisniewski chez Mémo
L’histoire d’une amitié entre une petite fille et un bison racontée par une vieille femme.
Une somme de souvenirs de Thomas Scotto et Annaviola Faresin chez Notari
L’histoire d’un homme qui décide de se séparer de ses souvenirs et qui ignore qu’ils ont aussi du sens pour les autres.
Le grenier de Mona Leuleu chez Seuil Jeunesse
Des souvenirs à découvrir à l’aide d’une torche à lumière bleue.
Mamie est partie de POG et Lili la Baleine chez Gautier Langereau
Une petite fille qui arrive à faire le deuil de sa grand-mère grâce aux souvenirs qu’elle lui rapportait de ses voyages.
Sur l’île aux trésors
Mémoire en eaux troubles de Joëlle van Hee
 
Un roman qui évoque à la fois les souvenirs de la deuxième guerre mondiale, à travers le grand-père du protagoniste, et la perte de mémoire suite à la maladie d’Alzheimer.

 

 

Bons souvenirs de 2018 !

En attendant nos coups de cœur de l’année qui vient de s’écouler, toute l’équipe A l’Ombre du Grand Arbre vous souhaite un joyeux réveillon !

Nos coups de cœur de novembre

Décembre est déjà là !

Peut-être que nos choix de coups de cœur de novembre vont-ils vous aider à emplir la hotte du Père Noël ?

En tout cas, nous l’espérons, alors les voici !

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Novembre a été un mois de lecture particulièrement intense sur l’île aux trésors. Mais le trésor du mois est sans aucune hésitation Le célèbre catalogue Walker & Dawn, de Davide Morosinotto (École des loisirs, 2018). Un régal de lecture plein de fraîcheur et d’aventures qui nous a emmené de la Louisiane à Chicago, accompagné de quatre amis aussi intrépides que sympathiques… Pour finir de vous convaincre, jetez donc aussi un œil sur l’avis de Pepita !

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Chloé, de Littérature enfantine, est à la recherche de la perfection, et l’a trouvée sous la plume de Remy Charlip.
Une journée sans contrainte, sous le signe de la complicité père fils, un véritable petit bonbon cet album. Un jour parfait, Remy Charlip, MeMo

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Pépita, de Méli-Mélo de livres, a particulièrement aimé retrouver Flora et Max dans leurs nouvelles vies, après leur folle rencontre. Il y a des romans, comme ça, on y  est bien de suite, on aimerait rencontrer les personnages, et leur dire combien ils nous ont émus. Les nouvelles vies de Flora et Max, un roman écrit à 4 mains par le couple Coline Pierré et Martin Page à l’Ecole des loisirs, collection Médium+.

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Sophie de La littérature jeunesse de Judith et Sophie est tombée (encore) sous le charme du style de Rébecca Dautremer avec son album Les riches heures de Jacominus Gainsborough publié chez Sarbacane. Avec douceur, elle y raconte la vie simple de Jacominus qui pourrait être n’importe qui d’entre nous.
« Ce fut une petite vie, vaillante et remplie. Une bonne petite vie qui a bien fait son travail.« 

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Aurélie de l’atelier a eu beaucoup de coups de cœurs ce mois-ci mais si elle ne devait n’en garder qu’un, elle  conseillerait Groléphant & t’it souris de Pierre Delye et Ronan Badel chez Didier Jeunesse. Un duo rafraîchissant autant pour les auteurs que pour les personnages.Cet album sous format BD est rempli d’humour absurde.

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Hashtagcéline vous propose de partir en voyage sur l’île de Sumatra pour y faire la connaissance d’un drôle d’orang-outan. Exotisme, fantaisie, dépaysement et grain de folie garantis !

Laurent le flamboyant, un roman de Karen Hottois illustré par Julia Woignier paru chez Memo dans la collection Petite Polynie.

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Yoko Lulu des Lectures Lutines a découvert un chouette roman de Science-fiction, avec plein de suspense et de rebondissements. La loi du dôme de Sarah Crossan aux éditions Bayard l’a convaincu sur le fait qu’il faut protéger la planète si on veut pas que cette histoire soit prémonitoire.

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Déjà l’automne ! Quels sont vos premiers coups de cœur depuis la rentrée ?

Le temps nous rattrape, les feuilles volent déjà et entre nos mains, les pages ont tourné depuis la rentrée.

Partageons les livres qui nous ont fait vibrer, les récits précieux qui nous ont attachés à leurs êtres de papier.

Cette rentrée, c’est aussi l’occasion d’accueillir trois nouvelles têtes sous le Grand Arbre : Hashtagcéline, Isabelle et Yoko lulu. Bienvenues !

Le Méli-Mélo de livres de Pépita s’est régalée de ce roman plein de fraîcheur, d’humanité… et de responsabilités à la sauce Pëppo !

Pëppo de Séverine Vidal – Bayard

Mais aussi de cet autre roman à l’écriture magistrale de beauté qui embarque le lecteur dans cette histoire étrange entre onirisme et imaginaire, avec des personnages bouleversants, en particulier Milly Vodovc.

Milly Vodovic de Nastasia Rugani – Editions MeMo, collection Grande Polynie

Alice,  dans son pays des merveilles, a été très émue et très touchée par la maternité d’Irène, par sa maturité et par  le trouble qu’elle a su laisser une fois la dernière page tournée. Coup de cœur partagé par Sophie.

Soixante-douze heures de Marie-Sophie Vermot – Thierry Magnier

Le récit des aventures déjantées du groupe de suicidants d’Axl Cendres a particulièrement touché mais aussi beaucoup fait rire HashtagCéline.

Cœur battant d’Axl Cendres – Sarbacane

Aurélie a mis dans son atelier un album plein de tendresse sur l’amitié. Un livre sur la différence, l’école et sur la naissance des sentiments, histoire de bien aborder la rentrée.

Mon ami d’Astrid Desbordes et Pauline Martin – Albin Michel Jeunesse

Grâce à Robinson, Isabelle de L’île aux trésors s’est offert un voyage onirique magnifié par les illustrations splendides de Peter Sis. Un album qui nous invite à assumer nos différences, à voguer vers d’autres horizons et à célébrer les merveilleux pouvoirs de l’imagination…

Robinson de Peter Sis – Grasset jeunesse, 2018

Chez Chloé (Littérature enfantine), le coup de cœur du mois n’est pas une nouveauté, loin de là, plutôt un classique qui n’a pas pris une ride au fil des ans. L’histoire de deux enfants qui entreprennent d’expliquer à leurs parents ignorants Comment on fait les bébés ! C’est drôle et ça décape.

Comment on fait les bébés, Babette Cole – Seuil jeunesse, 1993

Chez Les lectures lutines, deux romans plein d’humanité les ont conquises. Un récit troublant, entre fantastique, fait divers et altruisme, qui a résonné ce mois-ci pour Solectrice.

Dans la forêt de Hokkaïdo, Eric Pessan – Ecole des Loisirs, 2017.

Et pour Yoko lulu, c’est un roman d’une magnifique sincérité, d’une cruelle vérité. Sur l’amour et la différence. Sur l’intégration et l’espérance. Les héros ont un petit quelque chose qui nous attache à eux du début à la fin.

Envole-moi, Annelise Heurtier. Casterman, 2017.

 

Chez Bouma (Un Petit Bout de Bib), c’est un album intrigant, mêlant enquête, texte en rimes et illustrations presque naturalistes qui est sorti du lot ! Une invitation à s’interroger et à regarder plus loin que le bout de son nez !

Carnivore, Tariel et Peyrat – Père Fouettard, 2018

Et chez Sophie, c’est un roman sur la condition des femmes dans les années 1960 qui l’a conquise. On y découvre l’histoire de Catherine qui raconte comment elle a dû se battre pour vivre sa passion, pourtant simple aujourd’hui : la course à pied !

La fille d’avril, Annelise Heurtier – Casterman, 2018

Et vous, quels sont vos coups de cœur de la rentrée ?

Troubles par Claudine Desmarteaux

Troubles de Claudine Desmarteaux
Albin Michel Jeunesse – Wiz, 2012

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Une Lecture Commune avec Céline – Qu’importe le flacon, pourvu qu’on est livresse, proposée par Bouma – Un Petit Bout de Bib

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Bouma : Aujourd’hui nous vous présentons une lecture commune autour de mon gros coup de cœur du mois de janvier, un roman ado, troublant, comme son titre l’indique. Un sujet inquiétant, une manière d’écrire qui m’a captée, pourtant le sujet de ce roman peut porter à polémique. Aujourd’hui nous parlons du genre de roman que vous n’oublierez pas.

Première question : Comment résumerais-tu ce roman ?

Céline : Sous la forme d’un synopsis, clin-d’œil au cinéma, troisième homme de ce récit :
Paris. Camille et Fred, deux ados, deux amis d’enfance. Tous deux sur le fil, tous deux victimes collatérales de drames familiaux. Chacun sa came. Le cinéma pour Camille. L’alcool, les joints et plus si affinités, pour Fred. Soirée après soirée, voyage au bout de la nuit. Lassitude. Dégoût. Drame.

Bouma : Tu as écrit un résumé qui ressemble vraiment beaucoup à ce roman. Les chapitres sont courts, voire très courts, amenant un rythme effréné, une tension à l’histoire. Cette tension, l’as-tu ressentie comme moi ? Cela a-t-il gêné ta lecture ?

Céline : Oui, cette tension est palpable dès les premiers mots et s’accentuent au fil des pages. On sent dès le départ qu’un drame est en préparation ! Une fois l’effet de surprise passé, ce rythme effréné et ce style saccadé m’ont plutôt donné envie de continuer ! L’écriture et la référence au cinéma contribuent d’ailleurs, pour ma part, au succès de ce titre. Et de ton côté, quels sont les aspects qui t’ont particulièrement plu ?

Bouma : Pour revenir à ce que tu disais, je n’ai pas senti le drame venir. Je me le suis pris en pleine tête, comme les protagonistes. Par contre, j’ai aimé que la trame ne s’arrête pas là, que l’auteur montre que le film comme la vie continue.  J’ai aussi aimé cette description très réaliste (à mon sens) de la réalité quotidienne des adolescents. C’est une période de doutes, de choix et d’affirmations. Ce n’est pas une époque facile et les adultes ont tendance à trop souvent l’oublier à mon sens. D’ailleurs, dans le texte, Camille doute de sa sexualité. Mais Camille est un prénom mixte. Est-ce un garçon amoureux de son meilleur pote ? Une fille attirée par d’autres filles ? Qu’en penses-tu ?

Céline : Je pencherais plus pour un « il »… Il me semble que cette identité collerait davantage avec le titre et les sentiments ambigus que Camille éprouve pour son ami d’enfance. Mais je n’en suis vraiment pas certaine. Quoi qu’il en soit, tu as raison, l’auteure nous laisse K.O. certes mais avec néanmoins une note d’espoir :

« Quand les plaies seront refermées, les blessures cicatrisées, viendra le temps des bourgeons et des promesses. »

Ce qui m’a surprise cependant c’est l’attitude attentiste des adultes ! Tout le long de ma lecture, j’ai eu envie de crier : « Mais bon dieu, quand allez-vous réagir ? ». Et toi, ce manque de réaction t’a-t-il également interpellée ?

Bouma : Je n’ai pas franchement été interpellée par cette absence, ou en tout cas cette « non intrusion » des adultes dans le récit. Claudine Desmarteaux déroule son histoire du point de vue de Camille, un(e) adolescent(e) (parce que moi je voyais plutôt une fille en Camille mais bon bref, passons) et nous montre donc SA VISION de l’histoire. Elle est auto-centrée, et ça ne m’a pas plus étonnée que ça que pour elle/lui les adultes n’aient aucun rôle à jouer dans son quotidien outre celui de réfrigérateur et de distributeur.
Un dernier mot pour la fin ?

Céline : Nos hésitations et interrogations sont symptomatiques je trouve. (L’auteure pourra peut-être en lever certaines ?) Cette lecture est de celles qui remuent, vous emmènent au-delà des conventions, des apparences, des jugements trop rapides… Claudine Desmarteaux apporte un certain éclairage sur une jeunesse désabusée et pourtant pleine d’espoir ! Un paradoxe qui interpelle et rend ce texte particulièrement fort ! Un de ceux qu’on n’oublie pas…

Bouma : Exactement. Un texte troublant dont je suis ressortie chamboulée par tant de beauté dans l’écriture de l’indescriptible.

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Et pour en savoir toujours plus, voici nos avis sur nos blogs : Qu’importe le flacon et Un Petit Bout de Bib.

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Cette lecture commune a soulevé nombre de questions comme vous avez pu le lire, et nous remercions chaleureusement Claudine Desmarteaux d’avoir pris le temps d’y répondre (ainsi que son éditeur Albin Michel Jeunesse pour la mise en relation).

1. Comment vous est venue l’idée de Troubles ? Vous êtes-vous inspirée de faits réels ou d’une situation dans votre entourage ?

CD : Après Teen Song, j’ai eu envie d’écrire encore sur l’adolescence, une période à hauts risques, faite d’exaltations, de découvertes, mais aussi d’une certaine errance, voire d’ennui, parce que la réalité est rarement à la hauteur des attentes immenses qu’on a quand on est ado. On zone, de fêtes en soirées. On se cherche, on cherche l’amour… C’est douloureux, de sortir de l’enfance, on éprouve un sentiment de vide, de perte, d’angoisse morbide, parfois.
Ce texte est une fiction qui s’est nourrie de mon imagination, de bribes de mon expérience personnelle, de celle de mes enfants (j’ai une fille de 19 ans à qui je fais lire tous mes textes en cours d’écriture), de films que j’ai vus et aimés… Il est parti aussi d’une envie de décrire des scènes de cinéma.

2. Ce roman parle en partie de harcèlement. Est-ce un thème qui vous touche particulièrement ?

CD : C’est un thème qui touche chacun d’entre nous. Depuis la première cour de récré jusque dans le monde de l’entreprise, on est confronté à des situations de harcèlement, plus ou moins graves, plus ou moins féroces, qu’on subit ou qu’on inflige (parfois avec une certaine lâcheté, ou de l’inconscience). Ça fait partie du jeu social. En bande, parfois la cruauté peut se déchaîner.

3. Dans cette histoire, les adultes sont plutôt inexistants voire démissionnaires. Est-ce un constat que vous tirez de la vie réelle ?

CD : Non, ce n’est pas un constat et je ne juge personne. Ni les ados, ni leurs parents. S’ils sont défaillants, c’est parce qu’ils ont du mal à faire face à leurs propres problèmes, mais aussi parce que les adolescents s’éloignent d’eux, ne leur confient plus rien. En grandissant, les enfants veulent s’affranchir, couper le cordon, et c’est bien normal. Les parents sont souvent les derniers informés. Ils idéalisent leurs enfants et font parfois preuve de naïveté, ou d’aveuglement.
Dans Troubles, pour se protéger d’une situation pourrissante (ses parents ne s’entendent plus mais sont forcés de cohabiter pour des raisons économiques), Camille prend ses distances. Les parents font ce qu’ils peuvent. Ils sont toujours trop absents, ou trop étouffants… Les parents parfaits, c’est comme la licorne, ça n’existe pas.

4. Aviez-vous l’intention d’écrire pour le public adolescent dès le départ de cette intrigue ?

CD : Pas forcément. Dans tous mes livres jeunesse, je m’adresse aussi aux adultes. Mais je suis heureuse d’avoir publié ce livre en roman ado, j’ai fait de très belles rencontres avec des lycéens sur Troubles.

5. Avez-vous visionné l’intégralité de la filmographie de Camille ? Comment avez-vous choisi ces films ?

CD : J’ai choisi des films que j’ai aimés et qui m’ont marquée. Ils ont tous un lien avec le désir, l’amour, les pulsions… Je les ai visionnés parfois plusieurs fois, pour choisir les scènes, les décrire… Tous ces « morceaux de cinéma » disent à quel point c’est complexe, tout ça, et à quel point cela échappe à notre contrôle. Camille est quelqu’un d’assez introverti, toujours en retrait, qui observe la vie un peu comme un film. Camille décrit avec précisions des plans, des scènes, mais ne dit rien sur ses propres désirs.

6. Pouvez-vous lever l’ambiguïté concernant le sexe de Camille ?

CD : Camille est un prénom mixte. C’est au lecteur de faire son choix. Cette ambiguïté participe au trouble.
Mais si vous tenez à savoir si pour moi, Camille est une fille ou un garçon, je répondrai : un garçon (qui refuse de s’avouer les sentiments amoureux qu’il éprouve pour son meilleur ami Fred).

7. et enfin… avez-vous un autre roman pour les adolescents en préparation ?

Un nouvel opus de la série du petit Gus, Le petit Gus au collège, sort en août 2013. C’est un roman illustré qui s’adresse à tous, et plus spécialement aux 9-13 ans.
Je n’ai pas commencé à travailler sur un autre texte pour l’instant, mais j’écrirai encore pour les adolescents. J’aime ce public, ouvert, fragile et touchant. L’adolescence est une période de la vie riche et complexe, dont on ne sort pas indemne mais qui construit l’adulte qu’on deviendra.

[Cette interview a été réalisée au début de l’été.]

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Nous espérons que cette lecture commune vous aura fortement donné envie de lire ce titre. Bonne lecture.