Lecture commune : Les mystérieux enfants de la nuit, de Dan Gemeinhart

C’est par hasard que Lucie et Héloïse – Helolitla se sont rendu compte qu’elles lisaient le même roman au même moment. Une belle occasion à ne pas manquer pour en faire une lecture commune !

Héloïse : On va commencer simplement : est-ce que tu connaissais cet auteur, et si non, qu’est-ce qui t’a donné envie de lire ce livre ?

Lucie : Oui, je connaissais Dan Gemeinhart pour avoir lu L’incroyable voyage de Coyote Sunrise et La vérité vraie. Je crois que ce sont ses seuls romans traduits en français. Et toi ?

L’incroyable voyage de Coyote Sunrise, Dan Gemeinhart, Pocket, mars 2020.

Héloïse : J’ai adoré L’incroyable voyage de Coyote Sunrise, je ne pouvais pas passer à côté de celui-ci ! Je viens d’ailleurs de découvrir qu’une suite, Coyote perdue et retrouvée, allait paraître en octobre 2024. J’ai hâte ! Je me note La vérité vraie, je ne l’ai pas lu. 

Lucie : Donc, comme moi, tu es un peu à l’affût des nouveaux romans de cet auteur ? Et quelle a été ta première impression face à la couverture ?

Héloïse : Oui, il fait partie des auteurs que je compte suivre assidûment ! J’aime beaucoup la façon dont il aborde la thématique de la famille, et l’aspect foufou de ses histoires (tout en délivrant de beaux messages). La couverture est mystérieuse, comme le titre… et très poétique, je trouve, avec ces lucioles.

Les mystérieux enfants de la nuit, Dan Gemeinhart, Pocket jeunesse, mai 2023.

Lucie : Justement, entrons dans le vif du sujet : cette histoire s’ouvre sur une épigraphe qui s’adresse directement au lecteur et parle de son âme. Qu’as-tu pensé de cette entrée en matière ?

Héloïse : J’ai trouvé que Dan Gemeinhart commençait de manière onirique, presque philosophique. D’ailleurs, les « âmes » sont mentionnées tout au long du roman…

Lucie : Il est en effet beaucoup question d’âmes et de choix dans ce roman. L’auteur a choisi de souligner certaines péripéties en interpellant le lecteur et en lui suggérant des “leçons” à retenir des aventures des personnages. Je suis curieuse de connaître ton ressenti sur ces à apartés.

Héloïse : Je les ai appréciés, un peu comme un refrain qui évolue, et qui progresse petit à petit.  C’est comme si, d’une certaine manière, l’auteur voulait donner un ton universel à cette histoire, ne se contentant pas de donner des noms de personnages… Enfin, ce n’est que mon ressenti.
On a des âmes perdues, qui se sentent seules, se cherchent, et se trouvent. C’est positif, plein d’optimisme, un peu comme cet épigraphe qui invite à croire en soi.

« Toutes les âmes, sans exception, méritent d’avoir un chez-soi et une famille. Même la tienne. Particulièrement la tienne. Toutes les âmes méritent amour et amitié. Oui, même la tienne. Toutes les âmes méritent de trouver leur place. Tous les oiseaux, un nid. Mais parfois, il faut chercher un peu. Au fond, c’est peut-être de ça que parlent toutes les histoires.
Celle-ci ne fait pas exception à la règle. »

Et toi, qu’en penses-tu ?

Lucie : Pour être honnête, j’ai trouvé ces passages vraiment trop nombreux. Ils sont jolis et pleins de bons sentiments. L’idée semble clairement être de donner confiance à des jeunes lecteurs qui en manquent, et c’est important de le faire. Mais en tant que lectrice adulte (et donc pas public visé, il faut le rappeler), j’ai trouvé que cela plombait un peu le récit. J’aurai préféré qu’il y en ait moins !

Héloïse : Cela peut se comprendre !

« […] parfois, une âme ignore sa propre grandeur. Jusqu’à ce qu’elle soit forcée de la découvrir. »

Héloïse : Et qu’as-tu pensé des titres à chaque début de chapitre ? Je les ai beaucoup aimés, je trouve que cela amène de l’humour, et cela m’a aussi fait penser aux anciens textes…

Lucie : Oui, moi aussi ! On en a rigolé avec mon fils qui a comparé ce procédé à ce que fait Jules Verne : il annonce systématiquement ce qu’il va se passer dans le chapitre qui arrive, quitte parfois à divulgâcher. Dan Gemeinhart fait cela de manière plus légère, en laissant du suspens, alors cela m’a plu. Il m’est parfois arrivé de revenir vérifier le titre du chapitre après l’avoir terminé parce que je n’avais pas réussi à anticiper ce qui allait se passer. Donc, c’est bien fait !

Le Tour du monde en 80 jours, Jules Verne, éditions Hetzel, 1872.

Héloïse : Oui ! Je pensais aussi à Candide de Voltaire.

Lucie : Tout à fait ! Entrons dans l’histoire à proprement parler à présent : dès le premier chapitre, l’ambiance est très particulière. Il fait nuit, le héros a été réveillé par un puissant sentiment de solitude, des enfants qui donnent l’impression de se cacher emménagent… et les noms de ville (Bourg-Boucherie) et de rue (Sanguinistre) sont particulièrement évocateurs. Te souviens-tu de tes impressions en découvrant cela ?

Héloïse : J’ai trouvé tout ceci bien sombre du départ et puis, assez vite, j’ai pensé aux contes : un héros solitaire, qui se sous-estime, sept enfants (ce chiffre !) perdus, livrés à eux-mêmes, qui débarquent mystérieusement dans la forêt… Pas toi ? Il y a un aspect sanglant avec tous ces noms, j’ai repensé à notre lecture commune du dernier roman de Flore Vesco – même si on part ensuite dans une toute autre direction. 

Lucie : Tout à fait, tu as raison ! Je n’y avais pas pensé mais maintenant que tu le dis c’est évident. D’ailleurs, comme dans un conte, les personnages jouent des rôles prédéfinis et s’y tiennent un long moment avant d’en dévier ; et les méchants sont un brin manichéens. As-tu été gênée par ce côté “figé”, avant qu’il ne devienne l’un des ressorts dramatiques de l’histoire ?

Héloïse : A vrai dire, je n’y avais pas prêté attention, il faut dire que j’ai lu ce roman très rapidement… Mais le grand méchant (loup) est effectivement très “caricatural” : un prédateur dangereux, borné, froid et insensible.

Lucie : Je pensais aussi à Donnie, l’autre méchant qui harcèle Ravani et ne semble jamais vouloir évoluer même si l’auteur lui accorde quelques excuses pour son comportement. En fait, pour moi, ces personnages un peu caricaturaux sont une réponse au jeu d’acteurs des Vagabonds qui se glissent dans un rôle et jouent la comédie de la normalité. L’écart entre les deux fait sens, il me semble. Tout comme ces habitants de Bourg-Boucherie qui sont dans une tradition un peu étouffante : tous répètent inlassablement les mêmes gestes, les mêmes postures, sans tenir compte de leurs envies profondes.

Héloïse : Oui, cela crée un équilibre, en quelque sorte. Et les sept Vagabonds, en entraînant Ravani, vont bousculer ce “train-train”, cette routine mortifère. 

Lucie : Justement, nous n’avons pas encore parlé de Ravani. As-tu envie de présenter le personnage principal ?

Héloïse : C’est un garçon sensible, attentif, qui vit seul avec ses parents. Il déteste la violence, n’aime pas se rendre à l’abattoir (où travaille son père). Ce qu’il aime, c’est créer des nichoirs à oiseaux. C’est un enfant très solitaire, très seul. 

« Ce garçon est le héros de notre histoire. Ou plutôt, l’un de ses héros. Nul n’aurait été plus surpris de l’apprendre que lui. Il aurait eu du mal à imaginer quelqu’un de moins héroïque. »

Lucie : Je trouve que la construction des cabanes à oiseaux est une très belle trouvaille. Elle dit immédiatement la minutie et la solitude de Ravani, mais aussi l’attention qu’il porte aux êtres fragiles.

Héloïse : Oui, elle montre son attachement aux animaux. C’est d’ailleurs un ouvrage qui dénonce la souffrance animale. Les passages dans l’abattoir sont assez sanglants, je ne le conseillerai pas aux plus jeunes…

Lucie : C’est vrai, même si en fait on ne “voit” rien concrètement, l’imagination de Ravani ne nous épargne pas grand-chose. De ce point de vue (dénonciation de la souffrance animale), il m’a fait penser au premier Jefferson, de Jean-claude Mourlevat.

Jefferson, Jean-Claude Mourlevat, Gallimard Jeunesse, mars 2018.

Lucie : Il y a d’autres personnages importants (et vraiment très chouettes) dans ce roman : les Vagabonds Virginia, Colt, Annabel, mais aussi Tristan, Beth, Benjamin, sans oublier les habitants du bourg Hortense Wallenbach, Fred Frotham et Lee Chin. As-tu un préféré ?

Héloïse : J’aime beaucoup Ravani et Virginia, même si les autres sont chouettes, et le boulanger, M. Chin. J’aime beaucoup son évolution. Et toi ?

Lucie : Évidemment Ravani et Virginia l’emportent, leur binôme fonctionne tellement bien ! Mais j’avoue un petit faible pour Hortense Wallenbach, figure de l’auteure frustrée qui tient la gazette d’un bled où il ne se passe rien, mais se plaît à inventer chaque jour des péripéties délirantes. J’aime aussi l’évolution des autres habitants et le fait qu’ils parviennent à sortir du rôle figé dans lequel ils étaient piégés.

Héloïse : Oui, c’est un ouvrage qui montre que tout le monde – ou presque – peut changer, et trouver sa voie. 

Lucie : Malgré mes critiques sur le côté “âmes” (sans aucun sous entendu religieux ni de la part de l’auteur ni de la mienne d’ailleurs), c’est un message qui m’a beaucoup plu. Surtout qu’il est associé à la récurrence du “Bienvenue dans ce jour. Tu y es déjà” : le côté on attend un jour propice pour réaliser nos rêves, nos projets, etc., mais il faut aussi savoir saisir les occasions qui se présentent de se lancer !

Héloïse : Tout à fait !

Le truc, c’est que ce monde est peuplé de toutes sortes de gens, et que tu n’y peux pas grand chose […]. Tout ce que tu peux faire, c’est décider le genre de personne que tu es, toi, et t’y tenir. Ne te préoccupe pas des autres.


Héloïse : Ce roman nous apporte une belle dose de rebondissements farfelus, y en a-t-il un qui t’a marquée ? Personnellement, j’ai adoré l’idée de la course sur l’eau… et du moyen de transport choisi ! C’est délicieusement irrévérencieux. 

Lucie : Tu as raison, les péripéties sont inhabituelles pour la plupart ! Mais le tout garde tout de même une certaine cohérence et cela va moins loin que dans certains contes (encore que…). Je suis d’accord avec toi, la course est extra. J’ai aussi beaucoup aimé la leçon de chasse à la grenouille qui est une entrée en matière très jolie pour créer un lien entre Ravani et les Vagabonds.

Lucie : Je saute sur l’occasion de parler un peu des Vagabonds. Qu’as-tu pensé de leur histoire et du fonctionnement de leur groupe ?

Héloïse : Leur histoire est triste, touchante aussi. Difficile de ne pas trop en dire, mais ce concept de la famille de cœur, celle que l’on se choisit (le fameux trope de la “found family”) me parle beaucoup. J’aime cette idée d’entraide. Et toi ?

« Une famille qu’on a trouvée, c’est aussi beau qu’une famille dans laquelle on est né. Peut-être même davantage. Après tout, les histoires parlent de choix, et choisir de devenir une famille, c’est la plus belle fin à laquelle on puisse arriver. »

Lucie : C’est même plus que de l’entraide, ces enfants sont liés d’une manière étonnante, il faut lire le roman pour la découvrir et en saisir toute la beauté. Comme tu le disais en introduction, la thématique de la famille, et plus particulièrement de la famille de cœur est centrale dans les romans de Dan Gemeinhart (en tout cas dans tous ceux que j’ai lus). J’ai d’ailleurs beaucoup aimé la relation qui lie Ravani à ses parents bien qu’elle soit assez peu développée. 

Héloïse : Un passage m’a beaucoup touchée, entre Ravani et son père. Celui où ce dernier lui explique comment réparer le nichoir. J’ai trouvé ses mots très beaux. La notion de famille est centrale dans ses romans, avec la confiance en soi. Tout s’organise autour de ces clés. Non ? 

Lucie : Je vois très bien de quel passage tu parles, il est très touchant ! J’ai aussi aimé le nouveau regard que jette Ravani sur la toile peinte par sa mère suite à une remarque de Virginia. Ces personnages de parents sont à peine esquissés mais pourtant très incarnés. Je trouve que c’est l’un des grands talents de l’auteur de donner quelques clés sur des personnages mais qu’ils nous touchent immédiatement. Et oui, je suis d’accord avec toi, la confiance tient une place importante aussi dans ces romans.

Héloïse : Effectivement, on “visualise” très vite les personnalités chez ses personnages. Et pourtant, il y en a beaucoup ! Le tout sans longues descriptions non plus. C’est très fort. 

Lucie : Pour finir, la question traditionnelle : à qui conseillerais-tu cette histoire ?

Héloïse : Ahah ! Et bien, à tous ou presque, à partir du collège. Et toi ?

Lucie : Oui, pas trop tôt à cause des passages dans l’abattoir (surtout les derniers) comme tu l’évoquais, mais je crains que chez les plus âgés (lycée) les fameux passages sur les âmes soient mal perçus. Ou alors à des lecteurs qui s’y attendent et sont prêts pour ça. Quoiqu’il en soit, c’est une très jolie histoire et ce serait dommage de s’arrêter à un gimmick, d’autant qu’il n’est pas répétitif dans le contenu.

Héloïse : Dans tous les cas, il est parfait pour le niveau collège !

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Et vous, avez-vous lu ce roman ou d’autres titres de Dan Gemeinhart ? Vous tente-t-il ?

Lecture commune : Ce que diraient nos pères

Ce que diraient nos pères, l’un des derniers romans de Pascal Ruter (Didier Jeunesse, 2019) est une chronique sociale sombre et saisissante. Ce roman nous dresse un portrait émouvant d’un adolescent confronté à une trop dure réalité. Avec une question qui nous tient tout au long de cette lecture : notre héros va-t-il trouver la force de ne pas sombrer complètement ?

Pépita, Alice et HashtagCéline ont été très touchées par ce texte et forcément, cela leur a donné envie d’en discuter par ici.

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Pépita : Ce que diraient nos pères : avant même d’ouvrir le roman, que vous a inspiré ce titre ? 

Alice : Ah ben tu vois, je crois que je ne me suis pas posée la question avant lecture. J’avais surtout envie de lire ce roman car je le voyais beaucoup circuler dans les revues professionnelles, sur des blogs littéraires…etc…
Maintenant que tu me poses la question, me viennent 3 mots : repère-transmission-intimiste.

Pépita : Je me suis demandée ce que pouvaient bien cacher ces mots et j’ai pensé de suite à la transmission. Et puis ce jaune vif sur le gris de la couverture, ça m’ a vraiment attirée. Comme une espèce de renaissance.

HashtagCéline : Bizarrement, j’ai un peu occulté cet aspect, pourtant très important. Je me suis plutôt interrogée sur la couverture assez sobre associé au nom de l’auteur. Après Dis au revoir à ton poisson rouge, je ne m’attendais pas forcément à autant d’austérité de sa part… Comme Alice, j’y ai réfléchi en refermant le livre… Avec le recul, je le trouve très fort et il correspond à l’esprit du roman. Il nous fait prendre conscience de la portée de nos actes.

Pépita : Tu parles à juste titre des conséquences de nos actes, et en effet c’est une thématique au cœur de ce roman : on s’essaye à un petit résumé sans trop en dévoiler ?

Alice : Ce roman, pour le lecteur, c’ est un mouvement, … comme les vagues sur la mer…. des moments lumineux, apaisants… et des moments de tensions , brutaux, on l’on a peur de la force de la vague qui va venir s’éclater sur un rocher. Antoine avance dans ce va et vient, essayant de trouver la paix intérieure tout en se laissant entraîner malgré lui dans un crescendo de délinquance par une bande d’ados.
Ce roman, c’est l’histoire d’un ado, hyper touchant, en perte de repère, enfoncé dans son mutisme qui va pourtant trouver la force et le courage de rebondir.

Pépita : Je te rejoins sur ton résumé : oui Antoine est hyper touchant, on s’attache à lui car on sent chez lui une fêlure, une révolte sourde, une envie même je dirais de ne pas se conformer aux autres mais il n’y arrive pas, il essaie, il lutte, et puis un jour le déclic.

HashtagCéline  : Attendiez-vous Pascal Ruter sur un tel registre?

Alice : Pascal Rutter est surprenant. Son ton est habituellement plus léger, plus humoristique. En proposant ici un roman »social », je trouve qu’il a su faire évoluer son écriture. Elle est montée d’un cran. Intimiste, remplie d’émotions, douce, sensible, engagée, …. elle colle aux personnages et à l’histoire.

Pépita : Le registre de l’auteur ? je ne parlerais pas de registre en fait car déjà dans ses précédents romans, il a cette touche particulière qui touche à l’intime de ses personnages. Là je dirais qu’elle est concentrée sur un personnage. Ce qui a évolué je trouve, c’est cette écriture qui alterne description des paysages et émotions de ses personnages. Il l’avait déjà tenté dans son précédent roman Cut the line mais dans celui-ci , c’est encore plus incisif, plus visuel aussi. J’ai beaucoup aimé.

Pépita : Avez-vous eu peur pour Antoine ? Cette dérive dans la délinquance ? Finalement, elle lui a permis de « retrouver » son père non ? Et aussi d’avoir un déclic ?

Alice : Oui bien sur que j’ai eu peur, je me suis demandé jusqu’où irait ce désastre ! On lit bien la faiblesse d’Antoine et on tremble pour lui car on voit bien que cette délinquance ne lui ressemble pas et qu’il est utilisé.
Mais ce n’est pas toujours le plus fort qui triomphe. La volonté, le courage, la détermination, l’honnêteté sont bien plus honorables ! Et c’est ce que va nous démontrer Antoine dans toute sa maturité.

HashtagCéline : Je me suis beaucoup inquiétée durant cette lecture, projetant des peurs que j’ai au plus profond de moi. Comme celle d’être là au mauvais moment, avec les mauvaises personnes dans un état de faiblesse ou d’égarement et de faire une erreur irréparable, comme Antoine. Car, nous lecteurs, on sait qu’Antoine est ébranlé dans sa confiance en soi, en la vie. Et on sent qu’il est toujours entre deux : entre l’envie de tout stopper mais en même temps celle de braver les interdits. Alors, oui, j’ai tremblé pour Antoine, voyant que la situation prenait une tournure incontrôlable et voulant à tout prix qu’il s’en sorte.

Tu parles de déclic… C’est vrai qu’il faut parfois tomber pour pouvoir se relever et voir la vie différemment. C’est effectivement ce qui va se produire pour Antoine qui, finalement, l’a échappé belle.

HashtagCéline : Antoine se laisse entraîner par trois garçons : Arnaud, Stéphane et Gaëtan. S’ils poussent Antoine dans ses retranchements, pour eux aussi, la vie est loin d’être rose, non? 

Pépita : Oui c’est vrai que la vie n’est pas rose pour eux mais pour Antoine non plus à vrai dire. Je refusais qu’il les suive au départ, sans doute pour s’intégrer, pour se sentir vivant. Mine de rien, cela l’a rapproché de son père et de son engagement. Stéphane m’a beaucoup intriguée : une carapace et un rêve. Il m’a beaucoup touchée à sa façon et il a su emmener Antoine dans son absolu. Toujours cette adolescence à la limite pour tester ses limites. C’est fort dans ce roman à des degrés divers. Et puis il y a ce besoin de vengeance de ce garçon par amour pour sa mère, bouleversant.

HashtagCéline : Antoine a aussi un autre sujet de préoccupation, plus de son âge, plus saine… Lucia. Qu’avez-vous pensé de la relation entre Antoine et elle? 

Pépita : J’ai beaucoup aimé leur relation faite de silences, de timidité mais aussi d’engagement. Lucia illumine Antoine, le responsabilise, le fait devenir ce qu’il est vraiment. Ce qui lui manquait. Et si c’était ça aimer ?

Alice : Oui, je crois que c’est Lucia qui va guider Antoine vers plus d’apaisement. C’est une ado à la fois posée, réfléchie mais aussi décidée et engagée. Il y a quelque chose de doux et rassurant quand Antoine est à ses côtés. Une chouet’ fille !

HashtagCéline : Ce roman, au-delà de l’histoire d’Antoine, aborde un thème d’actualité. On en parle un peu, sans tout dévoiler…?

Pépita : Sans trop en dévoiler ? pas facile. Disons qu’Antoine va faire une rencontre décisive (en plus d’une autre mais là c’est encore un autre point !) dans un bunker. Lui qui se sent paumé va rencontrer un être humain arrivé par la mer. Son image va le hanter. Jusqu’à lui faire prendre conscience qu’il doit agir. En bien.Pour le sauver lui. Et lui-même aussi. Pour se sentir enfin à sa place. Vivant. Et renouer avec son père.

Alice : Oui difficile de ne pas trop en dire et en même temps, le point de vue abordé est intéressant. Sûrement parce qu’il n’y a rien des moralisateur et que notre ado est dans l’action, qu’il fait confiance à son bon sens et qu’il est très honorable.

HashtagCéline : Au final, que retiendrez-vous de Ce que diraient nos pères?

Pépita : Ce que j’en retiens, c’est que nos vies ne sont jamais linéaires, qu’elles sont façonnées par les épreuves et les personnes qu’on rencontre, c’est un peu bateau dis comme ça mais en fait, c’est ce que découvre Antoine de plein fouet. Ce que je retiens aussi c’est malgré tout l’espoir et la lumière qui restent dans cette histoire, à l’image de ce jaune de la couverture dans tout ce gris. Et enfin, ce si beau titre.

Alice :  J’en retiens aussi que l’adolescence est une période pleine de rebondissements, d’incertitudes, de dérapages faciles, de réflexions… un moment de quête qui peut aussi être rempli d’engagement et d’humanité.

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Découvrez les avis de Pépita et de HashtagCéline sur leurs blogs respectifs.

Harcelés, harceleurs…

L’école est un lieu d’apprentissage et de sociabilisation. Mais pour certains, l’école est aussi un lieu de souffrance. Le constat est terrible mais le harcèlement scolaire peut  aujourd’hui toucher chaque élève, surtout dans notre société actuelle où l’apparence prime sur le reste et où les réseaux sociaux sont omniprésents…

Alors, pour combattre ce phénomène, il faut en parler, toujours et encore. Et en littérature jeunesse, de nombreux textes abordent ce sujet pour que les harceleurs comprennent la bêtise de leur comportement et que surtout, les victimes puissent trouver le courage de parler…

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Dans Rattrapage paru chez Actes Sud dans la collection d’Une seule voix, Vincent Mondiot nous parle du harcèlement, à sa façon : sans filtre. C’est très juste, assez glaçant mais très parlant.

L’avis de HashtagCéline et de Pépita.

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Dis non, Ninon ! de Lisa Chopale paru chez Gulf Stream parle de ce sujet… avec humour. Ce qui est, je l’avoue pour le moins original. Au final, l’autrice délivre un message plutôt positif grâce à l’intervention d’un double du personnage principal tout à fait farfelu. A découvrir !

L’avis de HashtagCéline.

 

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Paru dans la collection Presto chez Magnard, Six contre un de Cécile Alix s’adresse à un lectorat un peu plus jeune ( à partir de 11 ans). Ici, on suit le harcèlement de l’intérieur avec un texte à la première personne qui nous plonge au coeur de la détresse du jeune héros. Très touchant.

L’avis de HashtagCéline et de Sophie.

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Un court roman très positif qui, en plus d’aborder le sujet du harcèlement, offre de nombreuses pistes de réflexion. Le courage d’être soi de Marianne Rubinstein paru chez Nathan est un texte à découvrir !

L’avis de HashtagCéline.

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Rackette-moi si tu peux de Sophie Adriansen illustrée par Clerpée paru dans la collection Les Graphiques chez Gulf Stream vise ici les élèves de primaire. Sous forme de BD, on découvre l’histoire d’Enzo, victime de racket. Une histoire à hauteur d’enfants qui met bien en évidence que le harcèlement peut prendre bien des formes, quel que soit l’âge…

L’avis de HashtagCéline.

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Un chouette roman illustré qui aborde la thématique de cette sélection avec plus de profondeur qu’il y paraît au premier coup d’oeil. Les Z’héros de cette histoire sont bien décidés à ne pas rester sous le préau de la honte ! Le Préau des Z’héros d’Estelle Billon-Spagnol est paru aux éditions Alice Jeunesse dans la collection Primo.

L’avis de HashtagCéline, de Pépita et d’Alice.

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Attention ! Si ce texte aborde le harcèlement, il l’aborde d’une façon plutôt sombre. Guenon de Pierre Brossaud paru au Rouergue Jeunesse sonne juste mais offre un dénouement complètement… vous verrez. Un coup de coeur !

L’avis de HashtagCéline.

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Une lecture marquante que ce roman La file seule dans le vestiaire des garçons de Hubert Ben Kemoun chez Flammarion, dans lequel la tension monte sur fond de harcèlement et de surenchère. Quand rien ne semble pouvoir arrêter cette escalade. Terrifiant et poignant.

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L’avis de Pépita et de Alice.

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Ce roman Les regards des autres d’Ahmed Kalouaz au Rouergue se place du côté des conséquences du harcèlement sur la victime mais il aborde aussi une question cruciale : celui d’oser se confier à des adultes pour dénoncer et se reconstruire. Se dire que c’est possible, cette confiance-là.

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L’avis de Pépita

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Ils sont rares les albums qui abordent ce sujet : Rouge de Jan de Kinder chez Didier jeunesse pose le vrai problème du harcèlement : la solitude face à la force du groupe et aussi le rôle important de l’adulte. Un album fort sur une situation vue à hauteur d’enfant, sur la solidarité et le courage de dire non.

L’avis de Pépita

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Dans ce roman, La plus grande peur de ma vie (Ecole des Loisirs), Eric Pessan a su aborder ce sujet d’une manière subtile car lui aussi détruit et tue à petits feux. Les camarades de Norbert vont prendre conscience de sa souffrance et de leur lâcheté à son égard. C’est un roman sur la responsabilité de chacun face aux autres.

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L’avis de Pépita

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L’album « ça suffit ! » de Barroux et Claude Stanké chez 400 coups aborde le quotidien d’un louveteau harcelé à l’école. Il ne suffirait qu’à prononcer deux mots mais ils sont si durs à prononcer…

L’avis d’Aurélie

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L’album de Grosse baleine de Davide Cali chez Sarbacane montre la résilience d’une jeune fille traitée de baleine.

L’avis d’Alice.

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Edgar en marre de se faire enquiquiner à l’école, pour se protéger rien de mieux que d’adopter un lion. Un album pour évoquer le harcèlement aux plus petits.  Edgar et son lion chez les éditions les minots  de Céline Person  illustrée par Cécile Vangout.

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P’tit nez de cochon raconte les moqueries sur le physique. Mais certains savent voir au travers, l’union fait la force. P’tit nez de cochon de Pog  et Annette Boisnard chez Les braques.

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Un album plus édité mais qui traitait du harcèlement : ça chauffe à la récré de la série Marco et Zélie de Arnaud Alméras et Robin chez Amaterra.

 

 

Coups de cœur de mai

À chaque fois que cette rubrique du 1er lundi de chaque mois arrive, on se dit déjà ?!

Eh oui, le joli mois de mai est terminé mais il a été riche de lectures par ici : l’occasion de sortir de ses murs, de lire dehors, de sortir chaises longues et tables de jardin, pour savourer le plaisir de dénicher des pépites aussi en extérieur.

Alors, les voici ces merveilles du mois de mai !

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Chez Pépita dans son Méli-Mélo de livres, ce n’est pas un mais deux coups de cœur et impossible de se résigner à n’en mettre qu’un !

Les Emerveillements de Sandrine Kao chez Grasset jeunesse continuent à m’habiter et me nourrir de leur ineffable beauté. Mon avis ici.

Et puis il y a eu aussi la rencontre avec Victor et Yazel dans Nos mains en l’air de Coline Pierré au Rouergue et ces deux-là sont devenus mes amis. Mon avis ici.

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Chez Alice, la tendresse et l’humour de Marie Pavlenko résonnent encore après la lecture d’Un si petit oiseau : touchée en plein cœur par 400 pages d’émotion pure. L’avis de Pépita ici et celui de HashtagCéline ici.

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Chez Sophie de La littérature jeunesse de Judith et Sophie, c’est le roman de Agnès Laroche La vie dure trois minutes qui a livré son lot d’émotions le temps d’un tango et bien plus ! Son avis ici et chez Aurélie ici.

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Chez Solectrice, c’est la tendresse du jeune Ari pour son ami Dante et toutes ces questions que l’on se pose, quand on découvre ceux qui nous entourent, qui ont charmé ce mois de mai avec Aristote et Dante découvrent les Secrets de l’Univers de Benjamin Alire Saenz. Chez Pépita ici.

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Chez HashtagCéline, c’est le nouveau livre de Flore Vesco qui a « enluminé » son mois de mai. Ecrit à la manière « du temps jadis », L’Estrange Malaventure de Mirella (Ecole des Loisirs) nous ramène quelques siècles en arrière, à l’époque médiévale. Ce roman est une réussite sur le fond et la forme. Son avis ici ainsi que ceux de Pépita et d’Isabelle ici et .

 

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Sur leur île, Isabelle et ses chasseurs de trésors ont pris beaucoup de plaisir à relire un roman culte de la grande Astrid Lindgren: Karlsson sur le toit (Livre de Poche). Délicieusement subversif et d’une saveur intemporelle ! Un must-read en Europe du Nord qui gagnerait à être plus connu en France… Son avis ici.

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Sur les étagères du Petit Bout de Bib(liothèque) de Bouma, c’est une aventure hors du commun dans le Marseille des années 60 qui a retenu toutes les attentions. Dépaysement garanti avec Charlie Fisher et le gang des Whiz. Son avis ici.

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Chez Aurélie, ce fut un coup de cœur pour un éditeur : les éditions format.

Des albums philosophiques et un documentaire, venus tout droit de Pologne. Découvrez son article ici

 

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Pour Yokolulu, le livre qui l’a charmée ce mois-ci est un roman graphique racontant l’exil d’un jeune Nigérien vers l’Europe. On y trouve un beau graphisme et un héros attachant, plein de belles qualités. A découvrir : Migrant de Eoin Colfer, Andrew Donkin et Giovanni Rigano aux éditions Hachette. L’avis de Yokolulu ici.

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Sur la Pile de Livres à Chroniquer de la collectionneuse de papillons, gros coup de coeur pour un livre prêté par Pépita : Autour de Jupiter de Gary D. Schmidt publié par Bayard Jeunesse.

Un roman d’une extrême sensibilité qui nous fait entendre la voix de Jack, jeune adolescent dont la famille va accueillir le temps d’une année scolaire un jeune homme rejeté de tous, Josef, dont l’histoire, que nous découvrons au fil des pages, est absolument bouleversante.

Pour en savoir plus l’avis de Pépita par là.

En espérant que ces coups de coeur vous auront donné des idées..

Nos coups de coeur d’Avril

Le mois d’avril est terminé et les blogueuses d’A l’ombre du grand arbre vous ont montré leurs tables de chevet et leurs PAL (Pile à Lire) et PAC (Pile à Chroniquer). Découvrez cette semaine leur coup de cœur mensuel.

Aurélie a profité d’un réveil très matinal pour lire dans son jardin et se plonger dans le roman « La vie dure trois minutes » d’Agnès Laroche chez Rageot. Une histoire sur la reconstruction suite un drame et sur la danse, le tango précisément.  Automne, une lycéenne, a eu un choc un jour de juin. Depuis ce jour, elle reste cloîtrée chez elle et a éteint son téléphone. Elle décide d’écrire ce qui s’est passé pour surmonter cette épreuve. Nous sommes plongés dans ses pensées entre le présent et le passé. Un texte court et intense.

Son avis

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Bouma a dévoré le dernier Prix BD Jeunesse du Festival d’Angoulême à savoir Le Prince et la Couturière de Jen Wang. Ce gros comics propose une histoire originale où les protagonistes cherchent à se définir dans une société qui le fait pour eux, le tout sur fond de podium de la mode. Une très belle proposition qui ne plaira pas qu’aux filles malgré le sujet et la couverture qui pourraient le suggérer.

Son avis.

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HashtagCéline a eu la chance de faire une virée dans les années 60 sur les routes américaines en compagnie d’un trio attachant et très touchant. Avec Toffee Darling de la talentueuse Joanne Richoux paru chez Sarbacane, HashtagCéline est rentrée de ce road trip la tête pleine de souvenirs, « les yeux liquides », le vague à l’âme et la sensation que le voyage avait été trop court…

Son avis.

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Isabelle et ses deux flibustiers, sur leur île aux trésors, ne résistent jamais à l’appel d’une robinsonnade ! Ce mois-ci, ils s’en sont donnés à cœur joie avec Robot sauvage, de Peter Brown (paru en 2017 chez Gallimard Jeunesse). Roz, robot naufragé, doit s’adapter à la vie sauvage. Un roman original qui donne à réfléchir, fait beaucoup sourire et vibrer pour des « personnages » vraiment attachants ! Vivement le tome 2 !

Son avis

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Pépita et son Méli-mélo de livres ont regorgé de pépites en ce mois d’avril mais si je ne devais n’en retenir qu’un, c’est celui-ci car sa forme et son fonds peuvent toucher tout un chacun. C’est l’immense force de la littérature jeunesse ! Un bijou de narration que cette balade de Koïshi d’Agnès Domergue et Cécile Hudrisier chez Grasset jeunesse, petit grain de riz qui suit le fil de sa vie. Un magnifique écrin pour ces aquarelles si légères et si poétiques.

Son avis

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Sophie de La littérature jeunesse de Judith et Sophie voit la vie en 133 couleurs avec ce nuancier encyclopédique ! Une page + une couleur + une anecdote sur son origine, son utilisation, sur un objet qui la symbolise… Voilà le pari réussi de Cruschiform pour Colorama, cet imagier multicolore chez Gallimard jeunesse.

Son avis

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Chloé (Littérature enfantine) s’est plongée avec bonheur dans les mystères du développement du langage du jeune enfant avec La la langue, un album qui explique aux enfants comme aux adultes comment le petit humain devient doué de parole. Une lecture à la fois ludique et instructive.

Son avis

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Alice d’A lire aux pays des merveilles est tombée sous le charme d’un roman ado dont l’histoire est aussi dure et poétique que l’annonce son titre.

Toute la beauté du monde n’a pas disparu de Danielle Younge-Ullman ou l’histoire d’une reconstruction personnelle au milieu d’une nature hostile pour enfin accepter l’inacceptable. Une juste dose de réalité et de légèreté pour ne plus décrocher de cette lecture dont on ne ressort pas indemne. De route beauté !

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Bonnes lectures à vous et rendez vous le mois prochain !