Lecture commune : Notre histoire, comment nous en sommes arrivés là et où nous pourrions aller

Oliver Jeffers revient régulièrement dans nos coups de cœurs. Nous sommes sensibles à sa vision de l’humanité et aux messages qu’il transmet avec beaucoup de délicatesse. Quelle joie pour Colette et Lucie de découvrir qu’elles avaient toutes les deux adoré le dernier album de cet auteur-illustrateur ! Il ne leur en fallait pas plus pour se lancer dans une discussion à bâtons rompus autour de cet album pas comme les autres.

Notre histoire – Comment nous en sommes arrivés là, et où nous pourrions aller, L’école des loisirs/Kaléidoscope, 2024.

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Colette.- Comment as-tu rencontré l’album Notre histoire, comment nous en sommes arrivés là, et où nous pourrions aller d’Oliver Jeffers ? 

Lucie.- Je suis très très fan du travail d’Oliver Jeffers que je croyais avoir découvert grâce à vous chères copinautes avec Toi et moi ce que nous construirons ensemble qui avait été proposé le premier prix ALODGA auquel j’ai participé. J’ai réalisé plus tard que j’avais déjà L’enfant des livres dans ma bibliothèque (offert par ma grand-mère libraire). Étonnamment, je n’avais pas fait le lien à l’époque. Peut-être parce que L’enfant des livres a un graphisme un peu différent du fait de la collaboration d’Oliver Jeffers avec Sam Winston.

Bref, je suis à l’affût de la sortie de ses titres parce que j’aime beaucoup son style et sa manière d’aborder des sujets sensibles avec tellement d’humanité. Et toi ?

Colette. – Et bien ce dernier album, je l’ai découvert complètement par hasard en me promenant à la librairie Mollat de Bordeaux lors d’une après-midi de liberté imprévue ! Et j’ai été complètement happée par la fin de l’album, par la note de l’auteur que j’ai pris le temps de lire sur place, et qui m’a sincèrement bouleversée. Mais nous aurons l’occasion d’en reparler j’imagine car cette note est vraiment un élément essentiel du livre. Sinon, je connaissais l’auteur grâce au superbe album Rébellion chez les crayons que nous avons lu, relu et rerelu avec mes garçons ! 

Lucie.- Parlons un peu de la couverture : j’avoue avoir été un peu étonnée par l’illustration associée à « Notre histoire » et ne pas avoir bien su à quoi m’attendre en ouvrant ce livre. Et toi, quelles attentes a-t-elle créées chez toi ?

Colette.- Je m’attendais à un documentaire pour tout te dire, un peu dans le style de Nous, notre histoire d’Yvan Pommaux et Christophe Ylla Somers, un album qui reprendrait les étapes de l’histoire de l’humanité. La 4e de couverture m’a induite en erreur d’ailleurs car elle invite à lire “les grandes étapes de notre évolution”.

Mais au final ce n’est pas vraiment le sujet de cet album, non ? Quel est le véritable sujet de ce livre qui semble aux confins de l’histoire, de la philosophie, de la sociologie et de l’anthropologie (même si sans doute l’auteur ne se reconnaîtrait dans aucune de ces sciences humaines !) ? 

Lucie.- Tu as raison, ce livre est au croisement de plusieurs domaines, et c’est ce qui m’a intéressée. Il me semble que le sous-titre est plus explicite, cet album est vraiment en trois temps (quatre avec la longue note de fin dont nous reparlerons) : « comment nous en sommes arrivés là » donc le passé, une pause sur le temps présent et ce fameux « où nous pourrions aller » pour le futur. En tant que professeure de français, j’imagine que tu as été sensible à ce conditionnel ?

Colette.- Très intéressante cette analyse des 3 temps initiée par le titre de l’album ! En effet, il y a déjà la quintessence du projet de l’album contenu dans ce titre (même si au premier abord, je ne l’ai pas trouvé génial ce titre, sans doute un peu long pour moi !) et toute la beauté du projet réside d’après moi dans le conditionnel que tu soulignes ! Un conditionnel qui a plus parlé à la mère et à la citoyenne éco-anxieuse qu’à la professeure de Français ! Car dans ce conditionnel, il y a à la fois la lumière et l’abîme de l’espoir que constituent les chemins que nous choisirons de prendre en temps qu’humanité à l’avenir. Mais revenons à la question du sujet de l’album. Est-ce que tu saurais le présenter en quelques mots ? 

Lucie.- Pour moi, cet album est la réflexion d’un auteur – d’un père de famille, car ce rôle a son importance comme il l’explique dans sa note de fin – sur l’aventure humaine. L’humanité a mis des millénaires pour évoluer, arriver où elle en est. « Et maintenant ? » semble se demander l’auteur. Je l’ai vraiment abordé de cette manière, pour moi Oliver Jeffers nous place à un moment charnière où l’essentiel de l’évolution est accomplie et nous avons un choix à faire quant à notre avenir en tant qu’espèce. Est-ce que cette présentation te convient ou tu l’aurais formulé autrement ?

Colette.- Cette présentation correspond tout à fait à ce que j’ai lu dans ce livre. Et je dirai que la forme du dialogue choisi par l’auteur pour rythmer sa narration va dans le sens de ton analyse. L’échange peut être lu comme celui d’un père avec son enfant. Il est aussi l’échange que l’auteur mène avec nous, lectrice, lecteur. J’ai trouvé que le choix du dialogue était très judicieux et nous engageait vraiment dans la réflexion initiée par l’artiste. Est-ce que tu as été sensible à cette forme ? 

Lucie.- Oui bien sûr. Cela m’a donné l’impression qu’Oliver Jeffers invitait son lecteur à réfléchir avec lui. Même pour des éléments communément « acquis » comme lorsqu’il se penche sur l’histoire de l’évolution, il s’interroge sur ce qui a marqué le début de l’humanité et propose plusieurs pistes successivement. On le sent en chemin, et ça m’a beaucoup plu d’être associée à ce processus en tant que lectrice.

Colette.- D’ailleurs dans ce cheminement, l’auteur interroge la créativité qui semble nous distinguer des animaux non-humains, et bizarrement cette créativité apparaît dans toute son ambiguïté. Je ne m’attendais pas à ça de la part d’un artiste. Comment le comprends-tu ? 

Transférer notre énergie de l’estomac… au cerveau, pour nous permettre de créer des MOTS de percevoir des schémas, de raconter des histoires, d’inventer l’avenir.

Lucie.- Je ne suis pas sûre que ce soit ambigu en soi (je ne l’ai pas pris comme ça en tout cas). Pour moi cela n’a rien de négatif à ce moment-là et ça a contribué à l’évolution. Mais quand on réalise plus tard dans l’album que ce sont aussi ces éléments (les mots, les schémas et surtout les histoires) ont permis de nous séparer, oui cela prend une tournure plus négative. Car si les mots peuvent rassembler, ils peuvent aussi exclure.

Colette.- Tu as raison de le souligner, il n’y a rien de négatif ou de positif au moment où la créativité apparaît et permet d’inventer, raconter, créer. C’est d’ailleurs un aspect de l’album que j’ai beaucoup apprécié : ni jugement, ni dénonciation, ni critique. Contrairement à d’autres livres – jeunesse ou non – sur le sujet, cet album adopte vraiment et sincèrement la posture du doute philosophique. 

Lucie.- Tout en nuances, comme toujours avec cet auteur. J’adore ! Mais on sent quand même qu’il identifie un moment où cela a commencé à déraper : celui où « tout s’est accéléré.”

Colette.- Oui, tout à fait, ce moment où “l’avenir s’est réduit aux limites de notre propre vie”, j’imagine qu’il parle de l’avènement de l’individualisme fortement lié au système capitaliste. Car malgré une belle neutralité de ton, sans dogmatisme, c’est un album pour moi éminemment politique, un album engagé qui au lieu de dénoncer propose de s’interroger ensemble et de raconter ensemble une autre histoire de l’avenir. 

Lucie.- Tu as raison ! Et c’est précisément à ce moment-là qu’il s’interroge avec le lecteur : “Où cela nous mène-t-il ? Où allons-nous ?” Ces questions sont très engageantes avec ce “nous” qui nous met tous dans le même bateau. Est-ce que ses propositions de réponses t’ont convaincue ?

Colette.- L’avenir sera solidaire – ou ne sera pas ! Je suis complètement convaincue que “la recherche de sens et d’amour” est l’unique solution pour ne pas foncer yeux bandés dans l’abîme comme les personnages de l’album à un moment donné ! Ce sont des questions que je me pose tout le temps en fait !!! Sans doute parce que je travaille tous les jours avec des enfants et des adolescent.e.s et que l’avenir est là chaque jour devant moi. J’imagine que tu ressens aussi cette urgence du sens et de l’amour dans ta classe ? 

Lucie.- Ce passage est très fort, il nous met en face de nos responsabilités, des conséquences de nos choix quotidiens. “Ces mêmes mains capables de construire des fusées, nous les utilisons pour tirer les autres en arrière… convaincus, encore et toujours, qu’il est plus important d’avoir raison que de s’améliorer, que le bien est l’ennemi du mieux.” C’est effectivement très politique ! Mes élèves sont plus petits que les tiens, je ressens moins l’urgence du sens que celui du plaisir d’être ensemble et de coopérer qui a besoin d’être construit à cet âge là. J’ai tendance à penser que si on arrive à s’entendre et à se respecter dans une classe malgré nos différences c’est déjà un grand pas accompli. Mais je suis peut-être (sûrement !) optimiste…

Colette.- En tout cas, l’album nous invite à inventer ENSEMBLE une suite à notre histoire, et c’est aussi de ça dont nos élèves – petit.e.s ou grand.e.s – ont besoin pour se projeter. Avant de parler de l’esthétique de l’album, peut-être pouvons-nous évoquer la note de l’auteur, une longue note pour un album jeunesse. Qu’en as-tu retenu ? 

Lucie.- Elle m’a beaucoup intéressée parce qu’il partage son expérience, ses doutes et ses réflexions. On le sent investi, ancré dans la société. Bien loin de certains artistes hors-sol. Le fait qu’il soit irlandais joue, comme il l’explique, dans sa compréhension du monde. Je suis admirative de ces gens qui ont vécu la violence au quotidien et qui trouvent la force de sortir de la revanche, cela donne beaucoup d’espoir !

Colette.- Et son discours sur l’art dans sa note est vraiment très inspirant, je trouve, à une époque où la culture n’est plus trop à l’honneur (je pense que je suis influencée par le gel du pass culture – je ne m’en suis toujours pas remise !). J’adore sa phrase :

L’art, ce n’est pas la cerise sur le gâteau. Ce n’est même pas le gâteau. C’est la table sur laquelle repose le gâteau.

Lucie.- Tellement d’accord avec toi ! Cette phrase est géniale. Effectivement, la place de l’art est centrale, nous en sommes toutes les deux convaincues mais il y a encore du pain sur la planche (le gel du pass culture, je te rejoins, c’est très significatif…) J’aime qu’il étende son propos à l’art en général, mais même dans l’album, j’ai aussi été très sensible à la place centrale qu’Oliver Jeffers donne au récit dans la construction de l’identité personnelle, familiale, nationale et mondiale.

Colette.- Le récit, c’est notre humanité, notre identité. 

Lucie.- Pour le meilleur comme pour le pire, comme il le montre. C’est aussi ce qui nous dresse les uns contre les autres.

Colette.- Mais il faut en effet que ces récits nous unissent, nous rappellent ce qui nous lie. D’ailleurs, l’album fait aussi la part belle au lien, à la recherche de celui-ci. 

Lucie.- Oui, et la note d’espoir à la fin de l’album est hyper importante et bien amenée. Parce qu’après tout cela on aurait été en droit d’être un peu déprimés. Mais non, on peut ralentir, créer de meilleurs récits où chacun a sa place pour garder une place pour l’espoir. Mot de la fin on ne peut plus signifiant !

Colette.- Ah ! L’espoir ! En effet, c’est un joli mot de fin ! 

Lucie.- Fin qui n’en est pas une car il y a des bonus : un poème et cette fameuse note. As-tu envie de parler du poème ?

Colette.- Il est si simple et si juste, ce petit texte poétique. Il rappelle les besoins essentiels de chaque humaine, chaque humain. En quelques mots. Un petit texte puis un long texte, comme si l’artiste avait voulu explorer toutes les manières de dire ce qu’il avait à dire : l’album, la poésie et le texte d’idées. Pour poursuivre notre lecture commune, est-ce que tu aurais envie de parler des illustrations, du choix des couleurs, de l’importance des blancs… ? 

Lucie.- Les illustrations sont très “Jeffers”, il a un style identifiable au premier coup d’oeil ! Mais les couleurs sont différentes cette fois-ci, tu as raison de le souligner. Essentiellement du bleu et du rose, parfois très tranchés, parfois mélangés dans un violet… Je n’ai pas trop réfléchi au sens de tout cela, j’ai choisi de me laisser porter. Tu as une interprétation à proposer ?

Colette.- Non, pas d’interprétation. J’ai été surprise par le choix des couleurs, je ne me souviens pas avoir lu d’autres albums de lui avec si peu de teintes. J’ai surtout été sensible au rythme des pages illustrées et des pages colorées sans illustrations. Je trouve que la composition choisie met en valeur le texte, l’engagement de la réflexion à laquelle l’artiste nous invite. C’est un magnifique objet, ce livre ! Aussi bien pour le fond que pour la forme !

Lucie.- Tout à fait d’accord, tu t’en doutes ! Avant de passer à notre traditionnelle question de fin, je me faisais la réflexion que j’avais lu deux autres albums (qui sont d’ailleurs des documentaires) pour le prix ALODGA m’avaient fait penser à celui-ci bien que très différents : Qu’est-ce qu’une frontière ? et Je suis un citoyen américain. Est-ce que tu crois qu’on assiste à une mouvance de fond en littérature jeunesse, un mouvement qui invite à prendre du recul et à considérer l’espèce humaine dans son ensemble ? Il serait temps !

Colette.- Je constate en tout cas dans les propos d’artistes ou de journalistes dont je suis régulièrement le travail que la question des récits à inventer, collectivement, pour échapper à la catastrophe climatique et politique en vue, est une question très actuelle. Je pense au travail de Cyril Dion notamment dans son livre Petit manuel de résistance contemporaine ou encore au propos de Salomé Saqué dont j’admire l’investissement et dont j’ai offert le livre Résister à mon fils aîné, justement parce qu’elle invite à mettre de la joie dans la résistance politique. 

Lucie.- J’espère que ces graines vont pousser et que nous allons enfin transformer l’espoir qui nous anime en quelque chose de concret ! Et donc, pour finir : A qui conseillerais-tu cet album ?

Colette.- Je pense que je le conseillerai à des familles qui ont plaisir à discuter ensemble politique, philosophie. Je l’ai lu en lecture enregistrée pour une amie très chère et ses deux filles âgées de 15 ans ont adoré l’album. Tu me connais, je ne mets pas de limite d’âge à un excellent livre, je pense qu’on peut l’apprécier à tout âge mais qu’il suscitera débats et réflexions chez les plus grands. Et toi ? 

Lucie.- Tout à fait d’accord avec toi. Je trouverais dommage que des lecteurs réservent cet album aux plus petits en se basant sur son graphisme simple (et non simpliste). Alors que très clairement il invite à la discussion, au débat, à la mise en projet pourquoi pas. Je le recommanderais donc à des familles entières, et notamment à tous ceux qui ne se satisfont pas du récit actuel qui divise plutôt que de rassembler !

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Nous espérons vous avoir donné envie de découvrir ce magnifique album d’Olivier Jeffers, et pourquoi pas les autres titres auxquels il nous a fait penser !

Entretien avec Gilles Bachelet

Vous avez forcément déjà vu, si ce n’est déjà lu, un album de Gilles Bachelet. Un trait reconnaissable entre tous, un humour dévastateur et un sens du décalage remarquable… Inutile de dire que sous le Grand Arbre nous sommes de grandes admiratrices du travail de cet auteur-illustrateur. L’ancienne équipe l’avait interviewé à l’occasion de la sortie de son album Les coulisses du livre jeunesse, album dont elle avait fait une lecture commune ; et nous vous avons présenté nos classiques préférés ainsi qu’une lecture commune de Résidence Beau Séjour. Poussées par une curiosité toujours plus grande, nous avons eu envie de lui poser des questions sur son parcours et son œuvre. Questions auxquelles il a accepté de répondre avec une grande gentillesse !

Gilles Bachelet. Source : site des éditions du Seuil.

De quelle manière êtes-vous arrivé à la littérature jeunesse ?

Ce n’était pas une vocation précoce. Je comptais faire des études pour être vétérinaire. Mon père qui était artiste m’avait fait faire du dessin très jeune, mais je n’avais pas tellement aimé. J’ai fait des études scientifiques mais il s’est avéré que je n’avais pas le niveau en physique-chimie et en mathématiques. Je me suis demandé quoi faire, et comme il y avait beaucoup d’artistes dans les amis de mes parents et je me suis tourné vers des études artistiques.

Durant une longue période vous étiez très prolifique sur les réseaux sociaux. Pourquoi avez-vous arrêté de publier sur ces canaux ?

J’ai été très actif pendant trois ans, et puis j’ai eu l’impression d’avoir fait le tour. Je me suis lassé. J’ai retrouvé des illustrations que j’avais publiées, postées ailleurs sans que je sois crédité ou étant attribuées à quelqu’un d’autre. Mais ce n’est pas nécessairement un arrêt définitif, peut-être seulement une pause.

Comment choisissez-vous les sujets de vos albums ?

C’est ce qui me prend le plus de temps. Je n’ai pas de méthode particulière, je passe beaucoup de temps à chercher l’idée du prochain. Cela peut venir d’une discussion, d’une rencontre… Parfois, c’est un hasard.
Par exemple, Champignon Bonaparte c’est venu d’une discussion avec mon éditeur qui venait de voir un spectacle sur le Premier Empire et il a pensé que ce serait amusant de faire un album situé à cette époque. Le champignon m’est venu rapidement, inspiré par le chapeau de napoléon. Le Chevalier de Ventre-à-terre est né lorsque mon éditrice m’a appelé pour me rappeler que je leur devais un album et qu’elle devait boucler le catalogue. C’est un peu moi ce chevalier, j’ai tendance à procrastiner. Alors j’ai fait un album avec cet escargot.

Vos albums jouent souvent sur le décalage entre le texte et l’illustration. Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce procédé ?

J’ai commencé par illustrer les histoires écrites par d’autres, mais cela m’ennuyait. J’ai eu envie d’inventer mes propres histoires et j’ai commencé avec Le singe à Buffon. Quand j’ai illustré la phrase « Il fait pipi dans sa culotte », le décalage est apparu et cela a été un déclic.

Pour Mon chat le plus bête du monde, j’avais envie de faire un album sur mon chat, et parallèlement c’était une période où je dessinais beaucoup d’éléphants. C’est venu comme cela. Dans Une histoire d’amour, à aucun moment il n’est indiqué qu’il s’agit de gants de vaisselle et d’objets ménagers.

Trouvez-vous que votre style a évolué au cours du temps et de quelle manière ?

Mon style a peu évolué. Certains illustrateurs comme Thierry Dedieu cherchent un style différent pour chaque album. Je travaille de la même façon depuis mes débuts, à l’aquarelle.

Il vous arrive de vous mettre en scène dans vos albums. Y’a-t-il un élément déclencheur pour que cela arrive ou est-ce prévu depuis le départ ?

C’est un peu cabotin de se mettre en scène. J’ai commencé avec Mon chat le plus bête du monde. Comme c’était une histoire inspirée du chat que j’avais à l’époque et qui était réellement très bête, je me suis mis en scène naturellement. Et il m’arrive de le refaire parfois, comme dans Résidence Beau Séjour.

Nous serions très curieuses d’en savoir plus sur la manière dont vous travaillez concrètement. Avez-vous des rituels d’écriture ? Des horaires définis ? Travaillez-vous généralement sur un seul projet ou vous arrive-t-il d’en développer plusieurs en même temps pour qu’ils se nourrissent les uns les autres ?

Je n’ai pas de rituel. Il arrive que je ne dessine pas pendant de longues périodes. J’ai travaillé pendant 20 ans pour la presse et la publicité, puis j’ai enseigné l’illustration et les techniques d’édition à l’Ecole Supérieure d’Art de Cambrai pendant 17 ans. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à écrire mes propres histoires. Je cherchais un sujet pendant l’année, en dehors de mes heures de cours, puis quand je l’avais trouvé je travaillais sur l’album pendant l’été, puis sur une période de 4 ou 5 mois en tout. Je n’enseigne plus mais j’ai gardé ce rythme de travail à fond sur un album.

Quels sont vos outils préférés ? Travaillez-vous sur ordinateur ?

J’utilise l’ordinateur pour me documenter et pour de petites retouches quand j’ai oublié quelque chose. Mais je réalise l’essentiel de mes illustrations à la main.

Vous faites très souvent référence à vos autres albums et au travail de certains autres auteurs. De quelle manière choisissez-vous ces citations ?

Ce sont des hommages à des coups de cœur. Certaines de ces références sont identifiables mais d’autres sont personnelles. Par exemple, il m’arrive d’utiliser des objets ayant appartenu à mon père, ou à mon fils.

Avez-vous un livre de chevet et si oui lequel ?

Je n’ai pas un livre de chevet mais plusieurs. Ce sont surtout les albums que j’ai lu dans ma jeunesse comme Little Nemo, Tintin (par exemple je fais référence à l’univers d’Hergé dans XOX et OXO et dans Hypermarquête), l’époque de Pilote, Gotlib…

Est-ce qu’il y a des illustrateur/trices – auteur/trices qui vous inspirent ?

Les illustrateurs qui m’ont le plus influencés sont probablement Benjamin Rabier et aussi Benito Jacovitti. J’avais vu des bandes dessinées de Jacovitti quand j’étais enfant et je l’ai retrouvé beaucoup plus tard dans Charlie Mensuel. Même chose pour Benjamin Rabier, j’avais découvert les albums de Gédéon chez des amis de mes parents et, des années après, alors que j’étais étudiant aux Ardéco, je suis retombé dessus sur une brocante et j’ai réalisé que ces dessins étaient restés profondément gravés dans ma mémoire…

Lisez-vous d’autres auteurs de littérature jeunesse ou de littérature générale ?

J’aime particulièrement le travail des auteurs-illustrateurs comme Philippe Corentin, Claude Ponti, Tomi Ungerer, Clothilde Delacroix ou Benjamin Chaud…

Avez-vous déjà reçu des sollicitations de certain(e)s qui souhaiteraient travailler avec vous ?

Oui, cela m’arrive mais je les refuse. J’ai fait une exception pour La paix, les Colombes ! avec Clothilde Delacroix mais c’est un album écrit à quatre mains. Nous avions échangé des dessins sur Facebook et les éditions Hélium nous ont proposé d’en faire un album.

La paix, les colombes !, Gilles Bachelet et Clothilde Delacroix, Hélium, 2016.

Avez-vous un lecteur idéal en tête quand vous écrivez ?

Moi-même. Je dois me faire rire. Quand il était petit, mon fils m’a servi de cobaye, c’était mon premier lecteur. Mais je ne veux pas écrire pour une tranche d’âge en particulier, j’aime l’idée d’un album qui parle aussi bien aux enfants qu’aux adultes. Je sais que les enfants ne verront pas certaines références (celle à Shining dans Résidence Beau Séjour par exemple), mais elles m’amusent et j’espère qu’elles amusent leurs parents.

Lors du salon où nous vous avons rencontré, une enfant s’est exclamé « Il est trop cool Gilles Bachelet ! » Quel est votre rapport à vos lecteurs et à partir de quel âge pensez-vous qu’ils parviennent à saisir le second degré inhérent à votre travail ?

Les élèves de maternelle ne perçoivent pas le second degré. Mes albums sont plus destinés à des élèves de CE2, CM1 et CM2. J’ai récemment écrit un album pour les plus petits, Une histoire qui… dans lequel j’ai fait attention à ne pas mettre de références qu’ils ne pourraient pas saisir.

Avez-vous un souvenir à nous partager d’une rencontre particulière avec vos lecteurs ?

Mes souvenirs des rencontres scolaires sont un peu floues, elles se mélangent. Les plus marquantes se sont déroulées dans les classes dans lesquelles les élèves avaient vraiment travaillé sur mes albums. Quand mes albums ont servi de support à des travaux artistiques ou à un spectacle par exemple, cela nourrit les échanges avec les élèves.
L’année dernière, une classe avait réalisé des travaux sur tous mes albums, c’était très touchant. Dans ce cas ce ne sont pas eux qui me rencontrent mais moi qui les rencontre.
Quand je rencontre des enfants et qu’ils viennent ensuite me voir avec leurs parents dans un salon, je me rends compte que ces rencontres sont marquantes pour eux.

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Merci infiniment à Gilles Bachelet pour sa disponibilité et le temps qu’il a accordé à nos questions !
Nous espérons vous avoir donné envie de (re)découvrir tout ses albums. Pour la liste complète, rendez-vous sur la page que lui consacre les Editions Seuil Jeunesse.

Lecture commune : MERCI

Liraloin a eu un énorme coup de cœur pour cet album et l’a proposé pour la sélection Brindilles du Prix ALODGA. Quelle déception lorsque nous nous sommes rendu compte qu’il avait été publié en 2023 et ne pouvait donc pas concourir cette année ! Entre temps Lucie l’avait lu, et adoré, et les deux acolytes ont décidé de vous embarquer dans un voyage au fil d’une lecture commune…

MERCI, Icinori, éditions La Partie, 2023.

Liraloin : Est-ce que tu connaissais Icinori ? Un étrange nom d’artiste pour un couple inventif !

Lucie : Non, je ne connaissais pas Icinori mais j’aime beaucoup ! Encore une découverte que je te dois. Et toi ?

Liraloin : Ça me fait plaisir que mon erreur de date puisse être l’occasion d’une belle découverte pour toi. Oui je connaissais car naturellement en littérature jeunesse et notamment dans les albums je suis attirée par les petits ovnis, ceux qui sortent un peu des sentiers battus. J’avais chroniqué Et Puis il y a quelques années. Je suis super fan de leur travail et comme une “timide” que je suis je n’ai pas encore osé les aborder au SLPJ… ça viendra !

Lucie : Justement, je suis curieuse de savoir pourquoi as-tu proposé cet album pour le prix et finalement pour une lecture commune ? Lui parmi toutes tes découvertes.

Liraloin : Avec les années, cela fait tout de même 15 ans que je suis spécialisée “jeunesse” je suis devenue une “fine gourmet”. Je trouve qu’il y a des jeunes artistes émergeants qui méritent cette attention et Icinori en fait partie. Justement ce couple n’avait encore jamais proposé de titre pour les petits !

Lucie : Comment le qualifierais-tu d’ailleurs ? Album, imagier… pour être honnête j’accepterais même livre d’art ! 

Liraloin : Je dirais qu’à la toute première lecture, je l’ai vu comme un imagier puis en insistant un peu j’ai vu un très bel album sur l’aventure.

Liraloin : Est-ce que cette première de couverture t’as attirée ? 

Lucie : Oui, immédiatement. Aussi bien le titre que l’illustration d’ailleurs. Celle-ci est très graphique et associée à l’idée de gratitude, j’avoue que je n’ai pas hésité longtemps à me plonger dans cette lecture. Et j’y ai effectivement retrouvé la simplicité de ce parapluie-feuille face aux petites contraintes de la vie (pluie), et beaucoup de douceur et de poésie.

Liraloin : Ca me fait super plaisir en même temps tu ne m’étonnes pas car tes lectures sont si variées que la curiosité te pousse à aller vers des titres comme ce dernier. Je te rejoins la couverture est très attirante et puis les éditrices des éditions La Partie sont très très fortes. Le catalogue est d’une richesse… !

Liraloin : En ouvrant le livre et dès la lecture des premières pages, tu avais quelles attentes ? 

Lucie : Au départ, j’ai bêtement pensé ouvrir un très bel imagier sur la gratitude : on dit « merci » à tous les éléments qui nous entourent. J’ai mis un certain temps à le réaliser que ces « merci » suivaient une logique et que le personnage se préparait.
Et, toi, te souviens-tu quand tu as compris – comme tu le disais – que c’était en réalité « un très bel album sur l’aventure » ? 

Liraloin : Mais oui complètement, dès le début on plonge dans des images qui se répondent (“merci matin-merci œil”) ou le matin symbolise l’œil fermé et en même temps le lever du soleil. C’est là que j’ai compris comme tu le dis que les images suivent une logique. 

Lucie : C’est vrai que la deuxième lecture fait surgir un sens qui a pu nous échapper lors de la première. Il faut dire que subjuguée par les illustrations je n’ai peut être pas été hyper attentive lors de la découverte de cet album. En fait, tout bascule à l’apparition de la lettre, dont pour être honnête je n’ai pas saisi tout de suite l’importance.
Te souviens-tu ce que cet élément a fait surgir chez toi ?

Liraloin : Tout comme toi, c’est la carte au trésor qui m’a fait réagir, repartir en arrière car on repart souvent en arrière pour véritablement saisir tous les sens.

Lucie : Tout à fait. Et c’est assez rare dans un album pour être souligné !

Liraloin : Une de mes planches préférées dans ces images qui se répondent c’est « merci cuillère – merci œuf » ? Et toi et pourquoi ? 

Lucie : Je comprends, ce “duo” est particulièrement harmonieux. Mais de mon côté, s’il faut absolument en choisir une (ce qui n’est pas facile, tu es dure avec moi) j’irai vers le savon et la douche pour le côté très rond de l’un et essentiellement vertical de l’autre, avec pourtant quelques rappels de l’un comme de l’autre sur la page opposée. C’est très subjectif !

Liraloin : Oui tout à fait, selon sa sensibilité tu as raison. Ce que j’aime cette main qui tend un objet (ici une cuillère) mais de manière à y plonger tête première, sa couleur laisse penser à un couché de soleil qui plonge dans la mer et sa réponse sur la page de droite avec l’œuf qui s’offre à nous comme un levé de lune. C’est très ingénieux !

Lucie : Je me demandais : sais-tu quelle technique a utilisé Icinori ?
Ça me fait penser à de la sérigraphie mais je n’en suis pas certaine.

Liraloin : Je suis allée voir et j’ai trouvé ceci : “composé en risographie”, c’est un procédé de superposition de couleurs que l’on voit notamment au début de l’album avec le coq. (https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lectures-jeunesse/icinori-reinvente-l-imagier-5265391), 

Lucie : C’est vrai, cela se voit bien surtout dans les premières illustrations. J’aime beaucoup ce côté “pédagogique” en légèreté : tu n’as pas vraiment d’explication mais tu saisis le principe.

Liraloin : En effet, tu te laisses porter par ce procédé et ces choix de couleurs très facilement même si l’univers est hyper graphique.

Liraloin : Au début, as-tu remarqué que chaque succession d’objets conduisent à une double page, comme pour faire avancer l’histoire. Qu’est-ce que tu en penses ? (Exemple : de merci valise à merci clé) cette clé qui ferme cette porte puis ce petit homme qui s’aventure sur la route.

Lucie : Maintenant ça me semble évident mais pas lors de ma première lecture. Tout cela est très subtil. Et même si ça me donne parfois l’impression d’être passée à côté, j’aime la subtilité ! Je trouve que les choix d’Icinori montrent qu’il fait vraiment confiance à l’intelligence et au sens de l’histoire de ses lecteurs et c’est très agréable.

Liraloin : Tout à fait, de nos jours on trouve encore trop d’albums “prémâchés” c’est-à-dire que le texte doit redire exactement l’illustration et là justement Icinori fait confiance à son jeune lectorat ! j’aime beaucoup. Surtout que les enfants même très petits captent énormément les détails.

Lucie : On voit bien au fil de cette discussion que Merci est un ouvrage riche et très particulier, quel aspect te plait le plus ?

Liraloin : c’est cette construction qui est intéressante (le fait que la succession d’objets amènent à plusieurs double page « aventure »), pour moi elle permet à l’enfant de tirer un nouvelle carte objet et toute de suite comprendre à quoi elle va servir dans cette aventure. Est-ce que tu as eu la même sensation à la lecture ? 

Lucie : J’ai aimé partir en voyage alors que je ne m’y attendais pas (puisque je pensais lire un imagier), ne pas savoir où j’allais être emportée. Je n’ai pas le sentiment d’avoir eu les clés comme tu le dis, avec la carte objet dont on sait à quoi elle va servir. Et c’est ce qui m’a plu : partir à l’aventure un peu à l’aveuglette mais sans risque !

Liraloin : J’aime beaucoup ce que tu dis et oui je l’ai lu aussi comme ça. Il y a une grande aventure qui se trame et on voyage de page en page, c’est magique. Digne d’un titre tel que “Le tour du monde en 80 jours” !

Lucie : Oui, ce voyage est d’ailleurs annoncé par la carte qui en indique toutes les étapes. On s’en rend compte en y revenant en fin de lecture. Tu as raison, c’est vraiment la marque des grands albums : ceux que l’on peut lire et relire en y trouvant chaque fois de nouveaux éléments.

Lucie : On peut donc dire que nous sommes toutes les deux très fans de cet album et de ses somptueuses illustrations. Quelle est ta préférée ? Est-ce qu’une double page dans la suite du voyage a détrôné le fameux  « merci cuillère – merci œuf » ?

Liraloin : Oui ! Car là je suis ultra fan de cette page qui m’évoque souvenir et dépaysement, c’est la page “merci nuages”. Et toi? 

Lucie : C’est vrai qu’elle est très belle. C’est aussi l’une de mes préférées, mais j’ai tout de même une petite préférence pour “Merci froid” avec cette nuée d’oiseaux. Chaque page est pratiquement une œuvre d’art que j’accrocherai sans souci sur un mur. C’est fou !

Liraloin : Mais oui quelle merveille cette double page ! Tu as raison, on ne cesse d’admirer ces tableaux qui s’offrent à nous, à nos yeux d’enfant.

Lucie : Pour conclure, la question traditionnelle :  à qui recommanderais-tu cet album ?

Liraloin : Et bien à toute aventurière ou aventurier de 4 à 104 ans tant cet album peut parler à des générations de lectrices et lecteurs.

Lucie : D’accord avec toi ! Je pense que petits et grands pourront y trouver leur compte. A condition toutefois d’accepter d’y consacrer du temps et d’accepter d’embarquer dans un voyage où les sens sont plus sollicités que la raison car la narration est réduite à l’essentiel. 

Liraloin : Oui d’ailleurs, le parent ne va pas aller vers cet album tout de suite car il se mérite (épais, graphisme…) il peut rebuter. Vive la narration qui porte vers l’illustration, je plussoie !

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MERCI au duo d’artistes qui compose Icinori et aux éditions La Partie (dont nous vous invitons à visiter le site et à découvrir le catalogue) pour ce magnifique album ! Nous espérons vous avoir donné envie de le découvrir à votre tour…

Lecture commune : Frères, Marie Le Cuziat & Hua Ling Xu

Saisir la quintessence de ce qui fait les liens d’une fratrie, c’est le petit miracle auquel parvient l’album Frères de Marie Le Cuziat et HuaLing Xu. Un album sur lequel nous avions envie de revenir, de réfléchir et d’échanger. Et c’est ainsi qu’un soir d’été Lucie, Linda et Colette se sont retrouvées pour écouter attentivement ce que le thème de la fraternité faisait résonner en elles.

Frères, Marie Le Cuziat, illustrations de Hua Ling Xi, L’étagère du bas, 2023.

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Lucie : Pour commencer Colette, as-tu envie de nous raconter pourquoi tu as proposé une LC de ce titre ?

Colette : A chaque lecture de cet album, c’est la même émotion ! C’est comme si les artistes avaient saisi la quintessence de ce qui unit des frères. Cet album résonne très fort avec ce que je peux observer à la maison quand je regarde mes deux garçons être ensemble. Quand ce titre a été proposé, c’était à l’occasion du prix A l’ombre du grand arbre et dans l’ensemble de la sélection (dans la catégorie Petites feuilles, pour laquelle il n’a finalement pas été retenu) pour moi celui-ci était vraiment le plus “poignant”, le plus poétique. Il mettait des mots simples sur quelque chose qui est pourtant ineffable. 

Colette : Au seuil du texte, une magnifique couverture. Qu’y avez-vous vu ? 

Linda : Cela peut paraître étrange mais j’y ai vu mes deux aînés. Un brun, un blond. Et cette mer derrière eux qui ramène aux vacances. Dans notre cas, des vacances sur la Côte d’Azur, chez leur grand-parents.

Lucie : Les deux frères du titre, que comme Linda j’ai imaginés en vacances à cause de la mer en fond. Deux frères un peu différents physiquement mais dans la même posture. Un peu comme une photo.

Colette : Comme toi, Linda, j’y ai vu mes enfants ! Même si la différence d’âge est plus prononcée chez nous ! Et dès la couverture j’ai été séduite par le style de l’illustration, il y a quelque chose de très “dense” dans le coup de pinceau de l’artiste. Mais nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir. 

Linda : Oui le style forcément. C’est la première chose qui m’a attiré quand j’ai vu les premiers visuels sur les réseaux sociaux. Il y a un petit quelque chose d’Olivier Desvaux dans la technique et le style.

Colette : Justement, comment décririez-vous le style des images ?

Lucie : Comme vous j’ai été immédiatement attirée par ces illustrations. Cela ressemble à de la peinture à l’huile, on voit les coups de pinceaux, la matière, ce qui donne aux scènes un côté très vivant, presque prises sur le vif.

Linda : Je trouve le trait très réaliste et en même temps la peinture laisse apparaître les coups de pinceaux qui rappellent un peu le style impressionniste. Surtout au niveau des paysages. J’y ai trouvé une vraie profondeur. Et oui, comme le dit Lucie, cela donne l’impression de moments pris sur le vif, à l’instar d’une photographie.

Colette : Parlons plus précisément des frères dont il est question dans cet album. Pourriez-vous les présenter tels que vous les avez rencontrés ? 

Lucie : On voit immédiatement le « grand » et le « petit », Arùn le brun et Rey le blond et, dans un premier temps, le texte met en évidence tout ce qu’ils font de différent.

Linda : On sait par la couverture que ces deux frères sont différents physiquement et le récit nous les décrit différent aussi en caractère. J’ai trouvé très intéressant la façon dont l’auteure, Marie Le Cuziat, a choisi de montrer ce qui les oppose pour mieux nous faire ressentir ce qui les lie. 

Colette : J’ai été particulièrement sensible à cette liste de tout ce qu’ils ne sont pas pour les présenter : “Ils ne sont pas amis, ni simples copains, ils ne sont pas voisins, ni mêmes cousins. Arùn et Rey sont frères.” Je trouve ça très juste. Etre frère c’est un entre-deux, et c’est unique à la fois. Est-ce que vous avez des frères et sœurs ? Je sais que pour moi, c’était toujours un peu compliqué de définir le lien qui m’unissait à ma sœur, ça ressemblait à de l’amitié mais une amitié vraiment particulière, une familiarité, une proximité unique.

Lucie : Ce qui m’a particulièrement interpellée c’est « Ils sont si différents que les gens s’interrogent, jettent des regards en coin. – C’est impossible ! Ces deux-là ne sont pas frères ! » que nous avons aussi beaucoup entendu avec ma sœur tant nous sommes différentes physiquement et psychologiquement. Comme si être de la même famille impliquait d’être semblables. C’est aussi une réflexion que me font beaucoup les parents d’élèves dont j’ai déjà eu les aînés : « Il/elle n’est pas du tout pareil/le que son frère/sa sœur. » Oui, évidemment, c’est un autre enfant, il n’y a pas de raison qu’il/elle soit pareil/le ! 

Colette : C’est tellement intéressant ce que tu dis Lucie ! Avec ma sœur, c’est le contraire, on nous dit souvent qu’on se ressemble beaucoup et je ne trouve pas forcément ça facile à entendre non plus ! Quant aux sempiternelles comparaisons entre les enfants, j’avoue qu’hélas je ne peux m’empêcher de comparer moi aussi mes garçons (même si je ne le fais pas à voix haute !) 

Linda : Je suis fille unique… Je ne connais donc ce sentiment de différence et d’appartenance qu’au travers de mes enfants. L’aîné me ressemble, les quatre suivants ressemblent à leur père mais chacun avec des particularités qui lui sont propres (yeux bleus pour l’un, cheveux bouclés pour l’autre)… et avec les jumelles, le besoin de se distinguer est encore plus marqué par un fort désir de ne pas être comparées. 

Lucie : Probablement parce que je n’ai qu’un enfant, j’ai plus pensé à mon enfance qu’à celle de mon fils en lisant cet album. J’imagine que cela a été le contraire pour toi Linda !

Linda : Oui absolument ! J’ai grandi entouré de nombreus.es cousin.es qui avaient tous une fratrie. C’est quelque chose qui m’a manqué. Vraiment. J’aimais l’attachement qu’il y avait entre eux, malgré les disputes, j’étais jalouse de cet autre qu’ils avaient. Alors qu’eux me jalousaient les privilèges matériels de l’enfant unique.

Colette : Ce qui est intéressant aussi dans cet album, c’est que les différences entre les deux frères vont au-delà du physique, ils ont aussi des activités, des comportements très différents. 

L’un observe, l’autre grimpe. L’un dessine, l’autre danse. L’un marche, l’autre s’envole.

Lucie : C’est aussi ce qui m’a plu : que Marie Le Cuziat ne s’arrête pas au physique, car la même éducation peut donner des personnalités très différentes. On le voit bien ici ! L’un semble beaucoup plus dans l’action et le mouvement que l’autre. Encore que dans ce passage on ne sache pas qui est “l’un” ou “l’autre”, donc les rôles sont peut-être susceptibles d’être parfois inversés…

Linda : Oui et elle parvient à montrer que même s’ils aiment passer du temps ensemble, ils apprécient aussi ces moments sans l’autre.

Colette : Et là où je trouve que l’album réussit à dire des choses particulièrement sensibles, c’est que ce qui va unir les deux frères c’est leur colère face à la remise en question de leur lien : sur ce point là ils se ressemblent. Ils revendiquent leur lien à l’unisson. Je trouve que l’autrice a réussi à créer un rythme particulier dans cet album qui n’est pourtant pas narratif : d’abord souligner les différences pour ensuite faire surgir la définition plurielle de ce qu’est la fraternité. 

Lucie : J’ai beaucoup aimé ce moment où les frères échangent sur leur vision de la fraternité. Qu’ils partagent leur vision de ce qu’est un frère.

L’avantage d’un album qui n’est pas narratif c’est qu’on peut parler de la fin sans craindre de divulgâcher. J’ai évidemment très envie de connaître vos réactions aux deux dernières pages qui voient le soir tomber sur cette journée de vacances des deux frères. Avez-vous envie de partager ce que vous en avez pensé ?

Colette : Ce sont justement ces deux dernières pages qui me bouleversent à chaque lecture parce que c’est exactement comme ça que ça se passe à la maison. La question du lit partagé est une question centrale, qui revient sans cesse depuis que Nathanaël a 6 ans. Pour lutter contre ses terreurs nocturnes, on a demandé à son frère s’il accepterait de dormir dans la même chambre que lui et si ça rassurerait Nathanaël que son frère dorme dans la même chambre. Ils ont accepté et pendant presque 4 ans ils ont dormi dans la même chambre dans des lits superposés. Et encore aujourd’hui, mon grand garçon de 15 ans accepte ponctuellement de dormir avec son petit frère quand il le lui demande. Sans entrer dans tous les détails de l’histoire des 2 frères, l’autrice et l’illustratrice arrivent en quelques mots, quelques images à saisir la beauté de ce qui unit des frères. Jusque dans leur sommeil. 

Linda : Nos jumelles dorment ensemble. On a tenté la séparation mais ça n’a pas tenu longtemps… Juliette a par ailleurs besoin d’être rassuré en permanence et Gabrielle prend souvent le temps d’attendre qu’iel dorme pour poser son livre. Donc forcément ça me parle beaucoup ! Et je trouve que cela suffit à montrer l’attachement qui existe entre ces deux frères de façon intrinsèque.

Colette : Quelle définition donnée par les garçons de la fraternité avez-vous préférée ? 

Linda : Frères, c’est se ressembler et parfois pas du tout. C’est s’éloigner pour mieux se retrouver. Frères, c’est puissant.” Car elle s’appuie sur la force du lien plus que sur sa fragilité. Et parce que c’est ce que j’observe chez mes enfants mais aussi dans la fratrie de mon mari (il est l’aîné de quatre enfants). Ils vivent tous loin les uns des autres et ne se voient pas souvent mais quand ils sont ensemble, c’est naturel, comme s’ils s’étaient quittés la veille. Je trouve ça vraiment beau et puissant !

Lucie : Je crois que c’est cette fin de paragraphe justement « Etre frères c’est puissant« . Le qualificatif « puissant » dans son acceptation la plus large. Parce que les émotions qu’apporte la fraternité sont puissantes quand elles sont positives mais aussi quand elles sont négatives. Ton frère/ta sœur te connaît tellement bien qu’il a la possibilité de t’élever comme de t’abimer. Il me semble que le côté “fragile” évoqué dans la page suivante apparaît plus à l’âge adulte. Comme tu le disais Linda, parfois la vie nous éloigne et il faut alors créer les occasions de se retrouver et d’entretenir ce lien. Et toi Colette, quelle est ta définition préférée ?

Colette : “Frères, c’est être avec ou être à côté”. J’aime beaucoup cette définition. Il n’y a pas d’obligation à partager des confidences, des secrets, pour être intimes, quand on est frères. Parfois juste être assis l’un à côté de l’autre pendant des heures dans une voiture nourrit le lien de fraternité. 

Linda : En effet. Mais je crois que les parents ont un rôle à jouer là aussi. Ils sont le lien qui les lie, ils doivent tenter de le préserver, de le rendre fort, pour que même quand ils ne seront plus là, les enfants-adultes prennent le temps de se retrouver.

Colette : Tu remarqueras Linda que les parents sont complètement absents de l’album. Et je trouve que ça renforce le discours des enfants. Qu’en pensez-vous ? 

Lucie : Je rejoins Linda : les parents bien qu’absents de cet album ont un rôle très important à jouer dans la construction du lien, notamment en évitant de comparer leurs enfants, en n’insistant pas sur les différences, et en ne les mettant pas en concurrence (par exemple sur les résultats scolaires).

Linda : En effet. L’absence des parents permet aux enfants d’exprimer leur ressenti et de parler de leur lien sans avoir à sentir « peser » le regard critique de l’adulte. D’ailleurs le seul moment où on mentionne les adultes c’est bien pour mettre en avant l’aspect comparatif.

Colette : En tout cas je pense pouvoir dire qu’une des forces de cet album c’est qu’il fait résonner en nous nos histoires familiales, aussi bien celles de notre enfance que celles de notre vie de parent !  

Linda : Oui, c’est certain ! Comme quoi le sujet s’adresse à un public large, probablement parce que la fratrie est un peu le cœur de la famille.

Lucie : C’est ce que je me disais aussi : cet album a vraiment été source de discussions et de partage de souvenirs. Je pense que c’est parce que la fratrie est quelque chose de très vivant, mouvant dans le temps et qui prend une grande place dans nos relations familiales. Je suis sûre que vous aussi vous reconnaissez des choses de vos (beaux-)frères et sœurs dans vos enfants, ce qui alimente encore cette relation (parfois à notre corps défendant !)

Colette : Et je pense que cette universalité du sujet abordé est renforcée par l’environnement qui accueille l’histoire de nos deux garçons, la nature, l’horizon, la petite maison chaleureuse… il y a quelque chose d’intemporel dans cet album, quelque chose de “déconnecté” de notre époque (si vous voyez ce que je veux dire !) 

Lucie : Tu as raison Colette. C’est un choix très pertinent de l’illustratrice car, comme nous le disions, la relation évolue dans le temps mais tous les frères – et sœurs – sont passés et passeront par là. J’aime aussi que cela se déroule pendant les vacances, moment où les liens se resserrent grâce au temps retrouvé et partagé.

Linda : Oui. Avez-vous aussi ressenti ce sentiment de nostalgie en observant les illustrations ?

Colette : Exactement ! Le temps partagé est un temps de jeux, de lecture, un temps de baignade, d’exploration dans la nature… Sans écrans !!! Ça m’a frappée, cette absence des écrans et par effet boomerang j’ai pris conscience de la place que les écrans avait pris dans la vie de nos enfants (et dans la nôtre aussi !) quitte à empêcher les liens de se nourrir de notre vraie présence au monde et à l’autre. 

Lucie : Oui, j’ai moi aussi ressenti cette nostalgie. Avez-vous une idée de l’origine de ce sentiment ?

Linda : C’est probablement lié à cette “déconnection” dont parle Colette. Les activités des enfants nous ramènent à notre propre enfance, nos propres activités de vacances… Et puis il y a l’absence de véhicules, cela donne aussi un sentiment de calme et de reconnection à la nature tout en nous renvoyant l’image d’un monde plus désuet.

Colette : J’ai une dernière question : est-ce que vous pensez que le genre des personnages influe sur la réception de l’album, est-ce que des sœurs pourront se reconnaître ?

Linda : Sincèrement, je ne suis pas sûre que cela soit gênant. Les enfants voient ce qu’ils veulent dans les personnages, non ? 

Colette : Je pense comme toi, c’est ce qui est beau dans le lien de fraternité, c’est vraiment un lien universel, qui n’est pas différent selon le genre. 

Lucie : Je ne pense pas que le genre influe, en revanche j’ai personnellement immédiatement pensé à ma sœur plutôt qu’à mon frère. Peut-être que l’on est plus tenté de penser à un frère ou une sœur du même sexe que soi ?

Linda : Oui, comme toi, en ramenant le sujet à mes enfants, j’y ai vu soit mes fils, soit mes filles… Mais jamais les deux.

Lucie : Peut-être parce que sinon la différence saute tellement aux yeux que l’on ne comprendrait pas l’agacement des enfants face aux réflexions des adultes ? Mais je pense que le lien fraternel parlera de toute manière à ceux qui en ont fait l’expérience.

Linda : Je ne sais pas. J’ai un.e enfant qui est souvent pris.e pour un garçon, tout en ne s’identifiant à aucun genre, et pourtant jamais je n’aurais pensé à la.le comparer à un de ses frères. Finalement ce sont les autres, ceux qui ne sont pas de la famille, qui vont se permettre des réflexions. Donc oui, j’imagine que chacun peut s’y retrouver à partir du moment où il.elle a vécu l’expérience de la fraternité que ce soit en tant que frère.sœur, ou en tant que parent.

Lucie : Concluons si vous le voulez bien avec la question traditionnelle : à qui recommanderiez-vous cet album ?

Colette : Suite à nos échanges précédents, je recommanderai ce livre à des enfants entre 5 et 10 ans. Mais comme toujours il me semble qu’adolescent.e.s ou adultes pourront y trouver leur “compte”. 

Lucie : Tout à fait d’accord avec toi. Comme on a pu le dire, cet album peut entretenir ou rappeler des souvenirs à tous ceux et celles qui ont des frères et sœurs et aux parents de fratries. Il prend aux tripes et parle directement à l’enfant en nous.

Linda : Je crois qu’il peut être intéressant de recommander cet album à des enfants encore jeunes mais suffisamment grands pour se retrouver dans les deux frères de l’histoire. Des enfants d’une même fratrie, mais aussi des parents, des adultes…

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Avez-vous lu cet album ? Vous a-t-il, comme nous, plongés dans les souvenirs de vacances de votre enfance tout en jetant un regard ému sur vos enfants ?

Prix ALODGA – catégories Brindilles et Petites feuilles

Voilà quelques semaines que nous avons lancé la nouvelle édition du Prix ALOGDA ! Après les sélections des catégories Belles Branches (roman ado) et Grandes Feuilles (roman jeunesse), puis celle des Branches dessinées (meilleure BD) et des Racines (meilleurs documentaires) voici ATTENTION ! les sélections Brindilles (albums petite enfance) et Petites Feuilles (albums pour les plus grands)

C’est maintenant à vous de jouer : vous avez jusqu’au 5 juin 2024 pour élire votre titre préféré dans chaque catégorie. Alors à vos lectures et à vos votes !

Et soyez prêt.e.s pour l’annonce des lauréats, le 10 juin à 8h !

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Catégorie Brindilles

Départager des albums n’est jamais un exercice facile mais vos arbronautes ont finalement sélectionné des petits trésors à déguster en famille.

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Quel plaisir de laisser place à son imagination débordante lors de jeux d’enfants. Ici nous suivons une fratrie résolument déterminée à s’amuser malgré ce temps pluvieux. Un grand bravo à Anne Cortey qui a su décrire l’émotion de cette journée très particulière. Que dire des illustrations de Thomas Baas qui a fait du gris lumineux une couleur propice à cette joie communicative !

Les Ebouriffés d’Anne Cortey et Thomas Baas, Grasset, 2023

Les avis complets de Linda et Liraloin.

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Un petit garçon qui va pêcher, un petit poisson qui nage par là.
Vous vous doutez de la suite ?
N’en soyez pas si sûrs !!

Un album drôle et étonnant qui nous invite à observer et à changer de perspective!

Sous la glace. Michael ESCOFFIER et Ella CHARBON. Editions Les Eléphants, janvier 2023

L’avis complet de Blandine ICI.

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Nos petits aiment avoir peur et cet album nous est paru comme une évidence pour laisser ce sentiment s’exprimer comme il se doit ! Pour lire cette histoire et frissonner il est obligatoire de se munir de son courage, d’un bonne dose de sang-froid, d’une lampe de poche à piles bien chargées (car le noir total pourrait vous faire défaillir)…

Il y a des monstres dans ma chambre ! de Fanny Pageaud, A pas de loup, 2023

L’avis complet de Liraloin

Présentation de cet album sur le site de Fanny Pageaud

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A vous de jouer pour départager ces titres !

Quel est votre titre préféré dans la catégorie Brindilles ?

  • Il y a des monstres dans ma chambre de Fanny Pageaud (éditions À pas de loups) (86%, 95 Votes)
  • Les ébouriffées de Anne Cortey et Thomas Baas (Grasset) ( (9%, 10 Votes)
  • Sous la glace de Michaël Escoffier et Ella Charbon (Éditions des Éléphants) (5%, 6 Votes)

Total Voters: 111

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Catégorie Petites feuilles

Dans la catégorie des albums destinés aux plus grand.e.s, voici nos 3 coups de cœur.

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Le premier titre que nous vous proposons est un album tout en poésie : nous y suivons un cheminement, celui d’Igor, petit garçon aux baskets rouges et au manteau couleur moutarde qui vit en retrait, à l’orée des bois, avec son père. Et près de leur chalet, il y a un pont, un pont qui mène au Grand Là-Bas. Igor a très envie de traverser le pont. Mais il en a aussi très peur. Alors son père va lui coudre des ailes. Au cas où…

Je suis ton manteau, Angélique Villeneuve, Julien Martinière, Etagère du bas, 2023.

L’avis de Linda.

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Voilà un grand album aux couleurs de la forêt de pins qui borde la côte Atlantique. A travers les feuillages, on distingue une plage. Ou plutôt tout un microcosme qui s’anime au gré des marées. Dès le lever du jour, la vie frémit, s’éveille, s’étire sur cette plage et ce, sans discontinuer, jusqu’à la nuit tombée. Des rencontres y ont lieu, des forteresses s’y érigent, des histoires y commencent. Et les couleurs du ciel, de la mer, du sable, des nuages, sans cesse changent au fil des heures. Voilà un album qui ne raconte rien, rien d’autre que l’infiniment précieux cycle du temps qui passe. Les marées hautes comme les marées basses.

Marée haute, marée basse, Max Ducos, Sarbacane Editions, 2023.

L’avis de Linda.

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Le troisième album en lice dans cette catégorie nous emmène farfouiller dans une mystérieuse boîte métallique contenant les carnets d’observation et la correspondance d’un gardien de phare. Ces lettres sont peuplées d’espions anglais, de naufragées bretonnes, de graines mystérieuses… Nous avons adoré nous laisser surprendre par cet album épistolaire enchâssé dans l’enquête menée par l’autrice qui a trouvé la fameuse boîte, le tout efficacement mis sous tension par la tempête qui monte à l’horizon. On passe de la tendresse à la curiosité, du rire au frisson, tout ça dans une irrésistible atmosphère iodée portée par les collages inimitables de Judith Chomel. Bref, cet album a tout pour faire des vagues !

La vie rocambolesque de Léon Plouhinec (Lettres d’un gardien de phare), Judith Chomel, Atelier du poisson soluble, 2023.

L’avis d’Isabelle.

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A vous de jouer pour départager ces titres !

Quel est votre titre préféré dans la catégorie Petites feuilles ?

  • Je suis ton manteau de Angélique Villeneuve (éditions de L'étagère du bas) (45%, 18 Votes)
  • Marée haute Marée basse de Max Ducos (Sarbacane) (30%, 12 Votes)
  • La vie rocambolesque de Léon Plouhinec (Lettres d'un gardien de phare) de Judith Chomel (Atelier du poisson soluble) (25%, 10 Votes)

Total Voters: 40

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N’oubliez pas de voter dans chacune des catégories et de guetter
l’annonce des lauréats le lundi 10 juin !