Lecture commune : Charbon bleu d’Anne Loyer

Chaque année vos arbonautes préférées s’engagent avec beaucoup de joie et d’empressement à lire les romans en lice pour le Prix Vendredi. Lucie et Liraloin ont profité de cette sélection 2024 pour lire Charbon bleu et en faire une lecture commune pour votre plus grand plaisir. Un roman justement récompensé par un jury de sept jeunes adultes âgés de 15 à 19 ans pour le Prix Vendredi.

Charbon bleu, Anne Loyer, illustrations de Gérard DuBois, éditions D’Eux, 2023.

Liraloin : Est-ce que tu connaissais Anne Loyer avant de te lancer dans cette lecture ? 

Lucie : En regardant sa bibliographie je me rends compte qu’elle a écrit 105 livres ! J’ai lu Bamba, et certaines des aventures de Kimamila parce que c’est la méthode de lecture que j’utilise avec mes CP. Donc j’ai beaucoup aimé Charbon bleu mais on ne peut pas dire que ce soit une auteure dont je suis le travail. Je vais être nettement plus attentive dorénavant !

Liraloin : De mon côté, je connais bien cette autrice notamment à travers des albums publiés chez A pas de loup : Christine de Pizan, Calamity Jane. J’ai également lu son roman adulte La petite coriace que j’ai bien apprécié. Anne Loyer est très prolifique et autant à l’aise dans l’écriture des romans que des albums.

Liraloin : Même question pour l’illustrateur Gérard DuBois ? Nous reviendrons plus tard sur la pertinence de ses dessins.

Lucie : J’ai un peu honte de l’avouer : non, je ne connaissais pas du tout de Gérard DuBois mais j’aime beaucoup. Je me suis un peu renseignée sur ce qu’il a fait depuis, et je trouve notamment son travail sur Moby Dick magnifique ! 

Liraloin : C’est au SLPJ que j’ai découvert cet illustrateur, il y avait une exposition de ses illustrations et je trouve son procédé très intéressant. Je l’ai découvert tardivement et c’est seulement l’année dernière que j’ai réalisé que je le connaissais à travers une illustration tirée de son livre Enfantillages. Et puis, j’ai lu la chronique de Linda sur l’album On aurait dit qui m’a donné envie de le découvrir.

Liraloin : Parlons de la couverture : qu’en as-tu pensé ? Est-ce que cette illustration te touche ? 

Lucie : Oui, je dois avouer que c’est ce qui m’a attirée vers ce roman. Ce noir et blanc un peu brut, et le regard de cette jeune fille qui se détache d’une foule. C’est très puissant je dois dire, et tout à fait en accord avec le texte. Uniquement sur la base de la couverture, c’est vers ce titre de la sélection du Prix Vendredi que je serais allée le plus spontanément.

Liraloin : Contrairement à toi je n’ai pas été attirée de suite par cette couverture surtout que nous sommes plutôt – et depuis un moment – sur des couvertures de romans pour ados un peu “clinquantes”. Le sujet m’a intéressé sans doute car j’ai vécu à Lille… et comme j’aime Anne Loyer, hop je l’ai emprunté. L’illustration est très forte et il y a quelque chose de magnétique dans ce visage féminin. On est obligé de s’attarder sur ce regard je trouve.

Liraloin : Entrons dans le vif du sujet. Le livre commence avec ce texte en préambule, écrit en italique : « Elle ferme les yeux, c’est l’appel du néant. Son corps, pris en tenaille par des milliers de mains – celles de ceux qui l’ont précédée, celles de ceux qui lui succéderont – s’enfonce sans fin, aspiré par les entrailles avides de la terre. Il est englouti par une force supérieure qui ne lui laisse aucune chance. Une chute invincible qui l’entraîne, poids mort avant l’heure, direction l’abîme. »
Que t’évoque ce texte ? 

Lucie : Ce préambule donne immédiatement le ton. Il est question de déterminisme, de tradition pesante, de quelque chose de très organique aussi il me semble et de dramatique. On sent tout de suite que le texte ne va pas enjoliver la réalité du destin de ces mineurs, et c’est précisément ce pourquoi j’ai eu envie de le lire. Mais je me dis en le relisant que c’est “gonflé” de la part de l’auteure car cela peut aussi rebuter certains jeunes lecteurs.
Qu’en as-tu pensé, toi ?

Liraloin : En relisant ce préambule je trouve qu’il est complètement raccord avec l’illustration de première de couverture. On sent ce moment compliqué de se rendre dans cet ascenseur qui “aspire vers les entrailles avides de la terre”. Comme toi, et ton terme est bien trouvé, il y a quelque chose d’organique, cette terre broie les mineurs, les rend malades et les tue. Après j’ai été très étonnée que ce roman remporte le Prix Vendredi des jeunes lecteurs, je m’y attendais pas du tout car tout comme toi je ne pensais pas que ce sujet plairait autant aux jeunes. Comme quoi….

Lucie : C’est une très bonne surprise cependant, et c’est très positif que des jeunes lecteurs acceptent de découvrir un milieu et une époque qui est éloignée d’eux. Qu’ils adhèrent à un texte qui fait la part belle à la poésie et à un certain lyrisme.

Liraloin : Oui effectivement il y a une poésie que l’on retrouve dans cette écriture. D’ailleurs on en parlait avec une collègue, et finalement on en a conclu que ce sont les auteurs-autrices qui écrivent sur des sujets sociétaux très actuels qui emportent pas mal de prix et des mises en avant… D’ailleurs, petite parenthèse, La Chasse a reçu le Prix Cendres en plus du Prix Vendredi.

La Chasse, Maureen Desmailles, Thierry Magnier, 2023.

Liraloin : L’histoire débute avec la perte du père de cette famille. Outre le chagrin de Gervaise, sa femme enceinte, cette mort impose à Ermine une analyse de la situation très lucide. Est-ce que tu te rappelles de la dureté de cette ouverture ?

Lucie : Je me souviens en effet avoir été saisie par le désespoir d’Ermine. Elle a cru pouvoir échapper à son destin de mineur car son instituteur, convaincu par ses capacités, avait insisté auprès de ses parents pour qu’elle poursuive ses études. Mais voilà qu’un double drame la cueille : le décès de son père signifie aussi qu’elle va devoir travailler pour aider sa mère car il n’y a plus que le salaire de son frère pour nourrir la famille. Au passage : que la maman s’appelle Gervaise est un joli clin d’œil à Zola !

Germinal, Emile Zola, Pocket, 2018 pour cette édition.

Liraloin : Oui, merci Anne Loyer pour ce joli clin d’œil à Germinal. Ce passage est vraiment terrible et très noir. Le chagrin accable toute cette famille et on sait que peu d’espoir est envisageable. Je trouve que ce n’est pas évident en tant que lectrice de se dire qu’à un moment la “lumière” viendra !
Il y a ce paragraphe qui m’a marqué. Ermine doit aller travailler pour la survie du foyer et voici le regard de Gervaise sur sa fille :

« Gervaise lève péniblement les yeux vers sa fille. Elle voudrait lui dire un mot gentil, un encouragement quelconque. Mais rien ne sort. Elle a honte. Honte de lui avoir promis la lune, honte de lui avoir fait entrevoir l’impossible, honte de lui avoir fait miroiter un autre destin. Ernest et elle l’ont trompée. L’ont même trahie. Ils ne cherchaient qu’à la protéger et ils n’ont rien fait que retarder l’échéance. Juste au moment où elle allait décrocher le certificat d’étude, ce sésame pour un autre futur, tout se brise… »

Comment analyses-tu ce paragraphe ? 

Lucie : En tant que lecteur, on se met très facilement à la place de Gervaise. Ou peut-être est-ce parce qu’on est mamans aussi ? Cette honte, même si elle n’y est pour rien, est parfaitement compréhensible. C’est un peu comme si elle avait trahi sa fille en lui laissant apercevoir un avenir différent de la mine. Avenir dont elle va finalement être privée à cause de la disparition de son père. Est-ce que la situation aurait été “moins pire” si Ermine était allée à la mine dès le début ? C’est vraiment une ouverture de roman très dure et très noire, tu le disais. Et c’est d’autant plus courageux de la part d’Anne Loyer d’oser y aller franchement et de proposer un texte sans concession à ses jeunes lecteurs.

Liraloin : Oui et d’ailleurs ta question rejoint celle-ci. J’ai trouvé que le destin d’Ermine était fragile dès le départ, pas franchement net concernant ses projets d’études comme si l’autrice voulait nous préparer à cette chute. Ta vision est juste car nous sommes bouleversées par la honte qui saisit Gervaise, cette culpabilité envahissante. C’est d’autant plus difficile à “digérer” car pour une fois, un membre de cette famille aurait connu autre chose que la mine. Pour moi il y a cette prise de conscience de cette mère complètement atterrée par la perte de son mari et ce destin qu’elle brise malgré elle. Le champ lexical de la lumière est pourtant présent et sera le fil conducteur tout le long du récit. Pour le moment la lumière est juste atténuée et forcément pas franche (lune, miroir…).

Lucie : Je me demandais justement : trouves-tu que le supplément d’instruction qu’a reçu Ermine apporte quelque chose au roman ? 

Liraloin : Oui énormément, cette instruction lui permet de supporter sa nouvelle vie à la mine en s’échappant dans ses rêveries. Elle est complètement à part et les autres lui font bien sentir sauf un personnage…
C’est justement là qu’apparaît Firmin. Est-ce que ce personnage t’as plu ? 

Lucie : Je ne vois pas comment on peut ne pas aimer Firmin. Il apporte tellement de lumière (on y revient, je n’avais pas conscience du champ lexical de la lumière mais maintenant que tu le dis ça me saute aux yeux) et de douceur dans ce monde noir, étouffant, sans espoir… Un phare dans la nuit ! J’adore son surnom de Firmament d’ailleurs, quelle trouvaille ! Je suis curieuse de savoir ce que tu as ressenti lors de la première rencontre entre le jeune homme et Ermine ?

Liraloin : Il est le rayon d’une lumière qui n’existe plus, son intelligence se caractérise par sa poésie, cela touche également Ermine qui est transporté ailleurs d’où l’illustration (p.53). J’aime beaucoup ce personnage, d’une grande sensibilité. Ermine le surnomme Firmament rien que pour elle et comme toi j’ai trouvé que ce surnom était une belle trouvaille. Il y a une alchimie qui se fait très vite et naturellement. 

Lucie : Je me disais que c’était peut être grâce à son « instruction » qu’Ermine était si rapidement touchée par cette rencontre. Car Firmin n’est pas vraiment le mineur typique. Leur lien se crée au niveau intellectuel : ils aiment les mots, les sonorités, cela les anime et les aide à supporter leur quotidien. Qu’en penses-tu ?

Liraloin : Tout à fait ! je suis d’accord avec toi en ajoutant que le lien que le jeune homme établit avec les animaux ajoute à son empathie. 
Mais le rêve n’est pas la vie. Même si Ermine parle de Firmin et de son caractère à sa mère, cela fait rêver également sa petite sœur de 4 ans, Martine. Que penses-tu de l’autre membre de cette fratrie, le frère aîné d’Ermine ? 

Lucie : Guy… Lui pour le coup c’est la caricature du mineur. Brutal, rugueux, il n’est pas très aimable. Heureusement qu’Anne Loyer prend le temps de nous expliquer le ressentiment qu’il a pour Ermine, et ainsi de le rendre plus humain. Parce qu’il aurait le profil idéal pour être le “méchant” de l’histoire. On comprend tout de même qu’il a été forcé de grandir très vite, d’assumer des responsabilités très jeune et qu’il s’est forgé une “carapace” pour s’en sortir. Mais il reste extrêmement désagréable.

Liraloin : Tout à fait, et ce n’est pas un exercice facile pour une autrice d’échapper à la caricature car Guy en a tous les aspects. Cette profonde tristesse qu’il a en lui se transforme en brutalité, il ne sait réagir autrement. Oui, tu as raison, il est imbuvable. 

Lucie : A propos de la famille d’Ermine,que penses-tu de son rôle dans l’évolution de ce personnage ? 

Liraloin : Dans cette famille, Martine la petite sœur apporte du bonheur et permet à Gervaise de garder le sourire, l’innocence de la petite est palpable. Cette joie enfantine permet à Ermine de sortir un peu la tête de son quotidien harassant. Elle aime le rire grelot de sa petite sœur. Pourtant c’est tout de même Guy qui est pour moi comme une ombre qui s’étend de plus en plus sur ces femmes, le patriarcat est présent et il n’est pas atténué. Le foyer et donc la famille n’est plus un refuge pour Ermine, les obligations ont noyé le reste. 

Lucie : Tu as raison, ce patriarcat est très net et correspond évidemment à l’époque puisque ce roman se passe au 19ème siècle. Quand le père meurt, Guy prend le pouvoir sur la famille. Pouvoir dont il se passerait bien à mon avis mais qu’il assume avec la dureté qui le caractérise.

Liraloin : Oui merci de le préciser. L’époque est importante. Il en veut à cette famille, la mort de son père retarde aussi sa vie et son avenir.

Lucie : Nous avons une fois de plus utilisé le champ lexical de la lumière avec cette ombre que Guy étend sur la famille. C’est le moment de parler des illustrations qui répondent parfaitement au contraste entre ombres et lumières qui irrigue le texte, non ?

Liraloin : Ce contraste est très puissant et les 12 illustrations sont bien choisies. Elles alternent entre le rêve et la réalité. Il y a des planches qui apportent cette note d’espoir et en même temps quelques pages après on redescend du terre avec un dessin qui accentue la dureté de la vie. C’est une belle idée que d’avoir choisi d’illustrer ce roman. 

Lucie : La technique utilisée est particulièrement pertinente je trouve. Ces aplats noir qui laissent filtrer le blanc… cela correspond tellement bien à l’histoire d’Ermine et Firmin !

Liraloin : Puis tout s’accélère lorsqu’on approche de la fin. D’après toi, pourquoi Anne Loyer a choisi de précipiter (dans le bon sens du terme), son histoire ? D’ailleurs qu’en as-tu pensé de cette chute ? 

Lucie : Cette fin. On la voit venir, elle est annoncée et pourtant qu’il est difficile de s’y résoudre ! Une nouvelle fois, je trouve Anne Loyer courageuse d’avoir assumé jusqu’au bout sa résolution de véracité. Au risque de décevoir les lecteurs fleur bleue, la réalité de la mine était difficile, exigeante, et nous l’avons bien dit l’auteure ne cache rien des douleurs physiques, ni de la fatigue ou de la peur de ses personnages lorsqu’ils sont sous terre. La fin est donc triste, mais logique. 

Liraloin : Je suis complétement raccord avec toi et je trouve également qu’Anne Loyer y ajoute de la poésie malgré tout. C’est cela que je trouve très fort chez elle, la dernière illustration y est pour beaucoup. Est-ce que la liberté n’est pas justement dans cette fin et cette tragédie? 

Lucie : Oui, tu as raison. Ce roman ne fait pas dans l’optimisme forcené mais Anne Loyer parvient malgré tout à insuffler de l’espoir quelque soit la situation – aidée par Gérard DuBois et notamment comme tu le disais de sa magnifique dernière illustration. C’est très fort. Et c’est peut-être aussi ce qui a plu aux jeunes lecteurs ? Cet espoir dans une situation qui semble désespérée cela peut faire écho à ce qu’ils ressentent face à l’actualité ?

Liraloin : Oui car après tout cette histoire parle de cette liberté d’aimer.
Pour terminer, à qui conseillerais-tu ce roman ?

Lucie : Et bien sans surprise, parce que c’est toujours le cas des bons romans, à plein de lecteurs très différents. Je suis persuadée qu’il plairait à mon fils de 13 ans, mais aussi à des copines et je suis presque certaine que ma mère va me demander de le lui prêter. Le panel de lecteurs est donc étendu : ceux qui aiment l’histoire, qui veulent en apprendre plus sur l’univers minier, qui ont envie de découvrir un texte poétique et nuancé, avec une jolie histoire d’amour entre deux âmes blessées… J’ai oublié quelqu’un ? 

Liraloin : Ahahaha non, tu n’as oublié personne. Tout comme toi je pense que ce roman peut attirer un large lectorat. Je le conseillerais autant aux adultes qu’aux ados !

Lucie : Pour les plus curieux de nos lecteurs, je trouve que Charbon Bleu fait fortement écho à un autre titre de la sélection du Prix Vendredi : Vindicte met aussi en scène une femme dans une situation désespérée (c’est l’une des “tondues” de la Libération) confrontée au regard et au jugement des autres et particulièrement des hommes. Je les ai lus à la suite et j’ai trouvé ce parallèle stimulant.

Vindicte, Gildas Guyot, In8, 2024.

Liraloin : Je n’ai pas encore lu ce roman. Justement je trouve que c’est essentiel que des autrices et auteurs s’emparent de faits historiques pour ce devoir de mémoire que nous devons transmettre de génération en génération… Et le fait qu’ils plaisent comme nous avons pu le voir avec l’attribution du prix Vendredi des jeunes est très chouette !

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Pour conclure, la réaction à notre discussion de deux copinautes originaires de régions minières.

Linda : En bonne nordiste que je suis, j’avais envie de dire que la mine fait partie intégrante de notre patrimoine et les enfants grandissent avec des histoires de la mine. Les mineurs n’existent plus et il n’en reste guère de survivants aujourd’hui mais la mémoire collective est entretenue par les associations et les récits des enfants et petits-enfants de mineurs. Tous les enfants d’ici visitent au moins une fois dans leur vie le musée de la mine de Lewarde qui marque les esprits et donne vraiment à réfléchir sur cette vie, cette époque. Je ne connais pas un enfant ou ado qui soit ressorti déçu de cette visite et cela ne m’a donc pas étonné que les jeunes aient choisi ce titre…

Séverine : Je pourrais très exactement reprendre le propos de Linda en remplaçant Lewarde par « Puits Couriot » à Saint -Etienne ! Ici, c’est exactement cela aussi. En ce qui me concerne, j’essaie de transmettre à ma fille un bout de l’histoire locale, grâce notamment aux livres, mais c’est vrai qu’il me semble que la littérature jeunesse pèche un peu en la matière, en particulier pour les plus jeunes. Dernièrement, un album pour petit.e.s s’est démarqué : Mille mineurs, écrit et illustré magnifiquement par Evelyne Mary.

Nous espérons vous avoir donné envie de découvrir l’histoire d’Ermine, d’autres romans d’Anne Loyer et, pourquoi pas, de visiter ces lieux d’histoire !

Ces livres qui parlent de livres : pour les parents

Que l’on soit parent ou accompagnant il n’est jamais simple de choisir des livres pour un enfant et encore moins de trouver un ouvrage abordable qui puisse être de bon conseil ou une mine de références littéraires. Vos arbonautes, qui s’interrogent régulièrement sur le bien fait de la lecture, ont choisi quelques ouvrages permettant de s’y retrouver que l’on soit prescriptrice pour le tout-petit ou les grands ados.

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Au sujet de la lecture en général

Ouvrage conséquent, Faites-les lire ! est composé de plusieurs parties, que le lecteur pourra lire intégralement ou survoler selon ses besoins et intérêts du moment. Dans la première partie « La lente agonie de la lecture », Michel Desmurget expose son amer constat : les enfants lisent de moins en moins, perdent en vocabulaire, en compréhension et donc en capacité de réflexion. Et l’école ne pourra pas y remédier faute de temps et de moyens humains. Dans la deuxième partie, joliment intitulée « L’art de lire », l’auteur explicite les mécanismes complexes d’acquisition de la lecture, qui expliquent les difficultés rencontrées par les enfants face à cette tâche pour le moins complexe. Mais c’est dans la troisième partie que le chercheur propose quantité d’idées de jeux et d’activités à faire avec son enfant pour développer sa reconnaissance des lettres et des sons.

Et en lisant les effets considérables qu’ont sur le cerveau de nos enfants quelques minutes de lecture quotidienne agrémentées de divers petits jeux, il y a de quoi se motiver et s’y tenir ! D’autant que, des études le montrent, tous les enfants (petits et grands) aiment écouter des histoires. Cet ouvrage passionnant nécessiterait un complément plus court, à destination des familles moins portées sur l’objet livre, reprenant seulement les idées-clé et les situations pratiques.

Faites-les lire ! Pour en finir avec le crétin digital, Michel Desmurget, Seuil, 2023.

La chronique grand public de Séverine sur sa page Facebook .

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Comment jouir de la lecture, petit essai de Clémentine Beauvais publié dans la collection ALT chez La Martinière, est à la fois une déclaration d’amour à la lecture et une invitation à prendre encore plus de plaisir à lire. À lire ces lignes vives et malicieuses, on comprend que cultiver la jouissance de lire, cela demande un certain travail pour déconstruire nos penchants naturels et les discours dominants qui les corsettent, tenter des choses nouvelles, identifier et mettre en mots ce qui nous fait vraiment prendre notre pied. Ce manifeste est vraiment à lire, ne serait-ce que pour la manière réjouissante dont il évoque mille et une manières dont un texte peut nous extasier. Certains nous parlent et nous rappellent de mémorables moments de lecture, d’autres donnent envie de lire plus et mieux. Vous l’aurez compris, ces pages composent un réjouissant programme. Pour 3,50€, on aurait tort de se priver. Faites-vous plaisir avec cette lecture stimulante et voluptueuse qui en appelle tant d’autres !

Comment jouir de la lecture, de Clémentine Beauvais. ALT, La Martinière.

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Petit recueil compilant des témoignages et des réflexions de 50 auteurs de livres jeunesse, Lire est le propre de l’homme est tout simplement fabuleux. On pourrait dire qu’en défendant la lecture ils prêchent pour leur paroisse. Mais leur réflexion va tellement plus loin et porte tant d’espoir pour les nouvelles générations que l’on ne peut douter de leur bonne foi. En quelques lignes ou quelques pages, ils invitent tour à tour à se plonger dans ses souvenirs de lectures offertes, ses premières lectures autonomes, à réfléchir sur la place de la lecture dans sa vie et surtout à celle que l’on lui laisse dans la société. Nous en sommes convaincues : la lecture et les histoires sont les plus beaux cadeaux que l’on peut faire à un enfant (les textes de Malika Ferdjoukh et Xavier-Laurent Petit l’expriment à merveille). En 200 pages, tout est dit. Un recueil d’utilité publique mais aussi un grand moment d’émotion.

Lire est le propre de l’homme, collectif, L’école des loisirs, 2017.

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Recueils de titres

Quel bonheur de sillonner les mille et uns chemins de la littérature jeunesse en compagnie de Sophie van der Linden ! Tout, vous saurez tout sur l’histoire de cette littérature, ce qui la définit dans sa diversité, ou encore sur comment transmettre le goût de lire. Vous prendrez aussi la mesure de sa richesse en faisant un tour exhaustif des types de livres (éveil, abécédaires, albums avec et sans texte, BD, différents types de romans, etc.) et des genres (conte, humour, littératures de l’imaginaire et du réel, documentaire, théâtre), revenant pour chaque sur sa constitution, ses titres marquants, ses caractéristiques et les débats qui le traversent. Un guide très complet qui, forcément, donne envie de lire ! Et pour vous mettre le pied à l’étriller, vous y trouvez même des « bibliothèques idéales » organisées par grandes tranches d’âge et types de livres. What else ?

Tout sur la littérature jeunesse, de Sophie van der Linden. Gallimard Jeunesse.

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En quête d’un grand peut-être, c’est un ouvrage écrit par deux passionnés, Tom et Nathan Lévêque, autour d’une thématique : la littérature ado. Dans ce qui est le premier ouvrage scientifique à aborder ce thème, ils reviennent d’abord sur l’émergence de cette littérature, sur ses frontières, si difficiles à définir, sur les thématiques qu’elle aborde. De nombreux questionnements affleurent, autour de l’identité, de l’évolution de ce genre, mais ce qui ressort le plus, c’est la créativité des œuvres présentées. Car des œuvres, il y en a beaucoup qui sont citées ici ! On y trouve même de textes inédits (12 nouvelles).

C’est donc un ouvrage à la fois instructif, pédagogique et ludique, qui se dévore avec un crayon en main, pour noter toutes les futures lectures passionnantes qui nous attendent dans ce domaine. A noter : la liste des 100 incontournables de la littérature ado, une liste de 100 titres à lire et à relire, créée par un collectif d’auteurs, de blogueurs…

En quête d’un grand peut-être : guide de littérature ado, de Tom et Nathan Lévêque, Ed. Du Grand Peut-être, décembre 2020

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Dans Petits enfants grands lecteurs, Joëlle Turin et Nathalie Virnot dressent un constat à travers de multiples observations et témoignages recueillis sur le « terrain ». Ces deux spécialistes invitent également le parent ou l’accompagnant à reconnaître et analyser un bon album en proposant des titres précis.

Tous les spécialistes de la petite enfance s’accordent sur une chose primordiale : la lecture. Que l’on soit bibliothécaire, libraire, auxiliaire de puériculture, assistante maternelle… le livre est essentiel pour le bon développement cognitif du jeune enfant.

Cet ouvrage est une bonne porte d’entrée pour les parents qui s’interrogent sur le bienfait de la lecture à voix haute, sur l’importance que l’on accorde au texte et à l’image et se veut rassurant dans la façon d’appréhender tel ou tel titre.

Petits enfants grands lecteurs de Joëlle Turin et Nathalie Virnot, Mémo, 2023

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Et vous, quels titres vous guident dans votre quête de lectures incontournables ?

Nos coups de cœur de l’année 2024

Nous sommes très heureuses de vous retrouver pour une nouvelle année de partage, d’échanges et – on l’espère ! – de chouettes découvertes littéraire. Pour démarrer sous les meilleurs auspices, nous avons sélectionné les titres que nous avons préférés en 2024.

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Outre la fantastique clôture de la trilogie Alma (dont vous pouvez retrouver son avis et celui d’Héloise – Ileautresor) par Timothée de Fombelle qui a eu les honneurs de nombreux médias, Lucie a eu envie de rappeler deux coups de cœurs certes déjà cités (respectivement en juin et en septembre) mais qui lui ont laissé une impression durable.

Le premier est l’autobiographie romancée de l’auteur-illustrateur Eugene Yelchin, Un génie sous la table. Véritable plongée dans le quotidien d’une famille sous le régime communiste de l’URSS des années 1960, ce roman est un témoignage précieux. D’autant que les événements sont racontés avec un vrai sens de la formule et beaucoup d’humour.

L’espionnage et la promiscuité au quotidien, la pression des parents très conscients que seul un talent exceptionnel permettra à leur fils de se sortir d’une situation misérable, mais surtout le regard que pose cet enfant sur son environnement en font une histoire drôle et marquante à la fois. À découvrir !

Le génie sous la table d’Eugène Yelchin, l’école des loisirs, 2024.

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Le second est Le gang des 11, un album très intelligent de Rocio Bonilla sur le phénomène de groupe. Si l’on peut le lire comme une simple aventure de Benjí, petit poisson invité à rejoindre un gang pour jouer, lorsque l’on s’arrête sur les douces illustrations le propos gagne en profondeur.

Les poissons sont tous gris, les yeux fermés, et suivent aveuglement les jeux de leur chef. Sauf que ces activités ne sont pas vraiment appréciées par les poissons qui en sont victimes. Où s’arrête le jeu et où commence le harcèlement ? Est-il possible de garder sa personnalité dans un gang ? Si le groupe fait quelque chose qui nous semble mal, comment y résister ? Peut-on pardonner à quelqu’un qui a fait du mal ? Voici certaines des questions que cet album peut soulever, avec délicatesse et bienveillance. Brillant !

Le gang des 11, Rocio Bonilla, Éditions du Père Fouettard, 2023.

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Pour Liraloin le premier roman On ne dit pas sayonara d’Antonio Carmona est une excellente surprise jusque là toujours un peu déçue des lauréats du concours d’écriture organisé par les éditions Gallimard jeunesse.

Pourquoi ne dit-on pas sayonara ? car la signification de cet au revoir n’est pas vraiment compatible avec ce que va ressentir la lectrice/le lecteur. Elise et son étoile Stella : celle qui va l’accompagner, la faire réfléchir sans brusquer, tout en étant respectueuse. Elise et sa grand-mère Sonoka celle qui va enfin prononcer le prénom d’une maman disparue, celle qui va honorer sa mémoire. Des rencontres qui font changer, évoluer et enfin peut-être accepter l’inacceptable. Tout ce petit monde va graviter, se connecter autour d’Elise et c’est un bonheur dans faille qui en restera.

On ne dit pas sayonara d’Antonio Carmona, Gallimard jeunesse, 2023

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Un album a particulièrement fait mouche auprès de cette grande sensible : il s’agit de Demain dans une demi-heure de Thomas Scotto, illustré par Claire Gaudriot.

ll est des albums qui empoignent le cœur si fortement que le souffle devient trop faible pour continuer sa lecture. Thomas Scotto possède cette qualité rare d’écrire si généreusement (dans sa poésie) qu’on ne peut que lire et ressentir également cette puissance de l’écrit entre les lignes. Dans cette histoire à l’étrange allure de conte fantastique, un enfant ressent le monde extérieur. Un monde en attente d’une rencontre unique, si bouleversante pour les parents. Quant à Claire Gaudriot, elle réussit à transmettre tous les désirs de cette attente en offrant un dessin méticuleux et subtil. Bravo à ce fabuleux duo d’auteur-illustratrice ainsi qu’à Laurence Nobécourt de nous livrer cet album si fin et émouvant.

Demain dans demi-heure de Thomas Scotto, illustré par Claire Gaudriot, A pas de loup, 2023

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Celui de Séverine.

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Pour Séverine, l’un de ses plus grands coups de cœur, c’est La fin de Velvet, petit roman à destination des tous.tes jeunes lecteurs.ices – collection Mouche de l’ Ecole des loisirs- qui, selon elle, allie finesse du texte et illustrations prodigieuses, pour un effet bouleversant d’émotions antagonistes. Le sujet principal est grave, il faut déployer une fantaisie délicate, une générosité et une ampleur hors normes, pour que le drame ne vire pas au mélo, ni les questions à l’angoisse. Ici, c’est de la maladie, puis de la mort imminente d’une toute jeune fille, dont il est question. Or, Nastasia Rugani et Marc Boutavant réussissent la prouesse d’en faire un récit lumineux, teinté d’espoir, malgré le caractère définitif, douloureux et irréversible de la séparation. Les deux sœurs que nous suivons tout au long de leur dernière nuit ensemble, sont puissantes de complicité joyeuse, de souvenirs et de secrets partagés, et dans l’amour qui les unit, ici-bas et peut-être au-delà… Transcendé par les illustrations extraordinaires de Boutavant qui démontre, du sombre au jaune éclatant, de câlins en regards, qu’il sait faire plus que les chiens sans collier et les ânes pas bâtés, ce conte fantastique où se croisent les registres métaphorique et fantomatique, dans une ambiance empreinte de douceur et de sensibilité, se révèle d’une profondeur rare. La fin de Velvet, plus qu’une histoire de mort, c’est une histoire d’enfance, de rires et de larmes, de secrets et de promesses, de peurs et de défis, de rêves et de soleils. C’est l’histoire de ceux qui partent et ceux qui restent. C’est la vie, à n’en plus finir.

La fin de Velvet, de Nastasia Rugani, illustré par Marc Boutavant, Ecole des Loisirs, 2023

Son avis complet ICI.

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Son autre énorme coup de cœur de lecture en 2024, c’est La grande école, de Nicolas Mathieu et Pierre-Henry Gomont. Cet album au grand format à l’italienne, aux illustrations malicieuses, aux tons légèrement nostalgiques qui l’émeuvent si souvent, est une tranche de vie d’un père divorcé et son fils, entre la fin des vacances et l’entrée au CP, débordant d’humour et de tendresse. Il se conclut sur une déclaration d’amour, qui est à peu près ce qu’elle a lu de plus beau de toute sa vie sur le temps qui prend nos enfants et fait de nous des marchands de souvenirs et des camelots de promesses à tenir. « […] Je t’attends à l’autre bout. Ne t’en fais pas. Ton enfance est en lieu sûr. Tu peux devenir qui tu voudras.« 
Avec cette lecture, elle s’est posé et reposé une question à laquelle tous les livres du monde auront du mal à répondre : Comment les regarder s’éloigner sans douter des bagages qu’on leur a donnés ?
Elle savait l’auteur pour grands fortiche pour écrire les liens qui se font et se défont, humour, dérision, poésie et émotion en bandoulière (Elle a d’ailleurs retrouvé ce texte dans Le ciel ouvert, recueil du même auteur, qui en littérature pour adultes, est à peu près ce qu’elle a lu de plus beau de toute sa vie sur les familles murailles et fissures à la fois). Désormais, c’est sur le ring des livres pour enfants, qu’il la met KO à chaque ligne !

La grande école, de Nicolas Mathieu, illustré par Pierre-Henry Gomont, Actes Sud jeunesse, 2020

Sa chronique complète (et très personnelle) ICI.

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De nombreuses lectures font figures de gros coups de cœurs pour Linda pour qui il n’a pas été facile de faire un choix. Elle a finalement choisi de mettre en avant deux titres qu’on voit finalement assez peu présentés sur la toile.

Tout d’abord, il y a ce roman superbement écrit par Antonin Sabot découvert lors de la sélection du Prix Vendredi 2024 qui, d’une plume magnifique entre narration à la troisième personne et vers libres, livre un hymne puissant à la nature et à la liberté !

La Louve de Sébastien Sabot, Talents Hauts, 2024.

Son avis complet est ICI.

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Ensuite, il y a le bel album au charme désuet d’André Marois, déjà présenté comme son coup de cœur en mai dernier, qui célèbre l’enfance et ses jeux au travers de l’imagination sans limite qui vaut bien plus que tous les jouets du monde.

L’histoire nous plonge dans l’imagination débordante de deux enfants envoyés au jardin pour prendre l’air et s’amuser. Bien loin des bacs à sable, le potager et les animaux de la ferme ouvrent sur une aventure gourmande et pleine de rebondissements qui donnent aussi l’illusion du danger et confrontent les enfants à leur propre peur.

On ferait comme si d’André Marois & Gérard DuBois, Grasset, 2023.

L’avis de Lira Loin.

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Pour Colette, c’est une autrice fétiche qui a encore cette année remporté son coup de cœur ! Il s’agit de l’indétrônable Marie-Aude Murail à qui nous avions d’ailleurs consacré une très belle sélection « Nos classiques préféré.e.s » en 2020. Ce n’est pas un de ses derniers titres que Colette a découvert cette année (même si Francoeur est dans sa PAL depuis début décembre ) mais le fabuleux Miss Charity dont elle vous parlait déjà cet été.

Miss Charity, Maire-Aude Murail, L’école des loisirs, 2016.

Suivre Charity de son enfance à l’âge adulte est un ravissement ! D’ailleurs les œuvres qui embrassent toute une vie, c’est un peu le dada de notre collectionneuse de papillons (vous, vous souvenez, on avait fait un super article sur le sujet : les livres-de-toute-une-vie : quintessence de papier) alors là voyager à travers le XIXe siècle au fil des aventures créatives, littéraires, théâtrales, amoureuses, amicales et familiales de Miss Charity, ce fut absolument parfait ! Impossible de lâcher ce livre pourtant lourd de 480 pages.

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Du côté des albums, Colette adore partager autour d’elle ceux que Baptiste Beaulieu écrit avec Qin Leng. Les Gens sont beaux, On a deux yeux pour voir et Je suis moi et personne d’autre sont devenus des phares dans la bibliothèque familiale. Il faut le dire, dans la famille de Colette on a tout particulièrement aimé cette année On a deux yeux pour voir parce qu’il a un petit côté magique, il nous relie à notre pouvoir intérieur, à notre pouvoir d’enfant, le pouvoir de voir avec notre « oeil en forme d’étoile tout ce qui est triste, mauvais ou cruel » et notre « oeil en forme de lune, ce qui est bon et joyeux ». On suit donc la narratrice à l’aube de la découverte de son pouvoir et on (ré) apprend, avec elle, à regarder le monde autrement, complètement, entièrement. Y compris les émotions qui nous assaillent. Ces émotions qui nous font tel.le.s que nous sommes si nous prenons la peine de les accueillir.

On a deux yeux pour voir, Baptiste Beaulieu, illusrations Qin Leng, Les arènes, 2023.

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Blandine a eu beaucoup de coups de cœur en 2024, très variés, très éclectiques. En albums, en romans, en BD. Avec toutes sortes de thématiques, de graphismes, de découvertes et d’évasions..

Voyez plutôt… en images !

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2024 a été l’occasion pour Helolitla et ses enfants de débuter de nouvelles séries jeunesse prometteuses, comme Les Whisperwicks, ou encore les Chroniques de Nim. L’occasion aussi de continuer des séries chouchoutes, Aurora, de Vashti Hardy en tête. Mais s’il ne faut en choisir que deux, Helolitla retient celles qu’elle a terminé, et qui l’ont happée du début à la fin.

Pallas, de Marine Carteron, pour commencer. Une réécriture envoûtante de la guerre de Troie, qui replace les femmes au centre de l’histoire. Un récit épique et poétique en trois tomes, féministe et sanglant, qui aura su la transporter du début à la fin. Un travail documenté titanesque et moderne, cruel et lyrique, à lire si ce n’est déjà fait !

Pallas, tome 3 : Sous l’œil de l’Olympe, de Marine Carteron, édition du Rouergue. Mai 2024

Son avis complet ICI.

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2024, c’est aussi l’année qui a vu se clôturer le Mécaverse, d’Adrien Tomas, avec la parution en octobre dernier de l’ultime tome Neige et Poussière. Helolitla, qui adore le steampunk et la fantasy, a a-do-ré relire tous les tomes précédents de cet univers riche et complexe, pour se plonger dans un final qui réunit tous les personnages croisés précédemment.

Encore une fois, Héloïse s’est laissée charmer par la complexité de l’intrigue, les trahisons et autres complots, la densité des personnages et des pays traversés. Pour elle, c’est un dernier tome qui se termine avec le goût amer de l’au revoir aux personnages adorés, mais aussi et surtout de manière très réussie. Un univers à découvrir, sans conteste !

Neige et Poussière, d’Adrien Tomas, Rageot. Octobre 2024.

Son avis complet ICI.

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Nous souhaitons à toutes et tous une très belle année 2025 ! N’hésitez pas à partager vos coups de cœur de l’année avec nous.

SWAP de fin d’année

Parce que sous le Grand Arbre nous aimons échanger autour des livres mais aussi nous faire mutuellement découvrir des titres ; parce que les fêtes de fin d’année sont l’occasion de penser aux autres et de chercher comment leur faire plaisir ; et parce qu’on aime tout simplement préparer des colis et en recevoir, nous avons décidé de conclure l’année 2024 avec un SWAP. La consigne était « un livre, une carte, une douceur ». Voici ce que les unes et les autres ont envoyé et reçu !

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Lucie (Leslivresdavril)

Ce que j’ai envoyé… Ayant eu la chance de rencontrer récemment l’immense Gilles Bachelet, j’en ai profité pour faire dédicacer l’un de ses albums à l’intention d’Helolitla. Pour sa première participation à un swap sous le Grand Arbre, j’ai choisi Une histoire qui… comme un clin d’œil à notre passion commune et à notre expérience de mamans attachées à la lecture avec nos enfants.

J’y ai joint un marque-page de MinaLima, une création d’un fameux chocolatier lyonnais à base de praliné et de sablé en espérant que cela plairait aux palais nordistes. Et une carte de saison réalisée à la main par une amie.

Ce que j’ai reçu… Séverine m’a beaucoup gâtée. Elle m’a envoyé la très belle édition collector du Combat d’hiver, un roman de Jean-Claude Mourlevat que j’adore.

Ce roman était accompagné de caramels, d’une bougie, d’un magnifique marque-page, de nombreuses cartes très originales (dont une avec un message adorable) et d’une suspension pour mon sapin de Noël. Mille mercis Séverine !

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Linda (Ladythat)

Ce que j’ai envoyé… Connaissant le goût de Colette pour les joli.es mots et émotions, j’ai de suite été inspirée par l’album de Jake Biggin Quelques mots d’amour qui m’a attirée par la douceur de sa couverture et son thème.
J’y ai ajouté une carte de vœux et, n’étant pas fan des marchés de Noël et autres lieux surpeuplés, je me suis tournée vers un commerce d’artisanat français pour choisir un chocolat décoré pour les fêtes de fin d’année et des sucres d’orge.

Ce que j’ai reçu… Frédérique (LiraLoin) m’a surprise avec son joli colis coloré dans lequel j’ai trouvé un bel album sur l’amitié A & B Bons Amis, dédicacé par l’autrice, joliment emballé dans un papier sur lequel Frede a laissé parler ses talents d’artiste 😉
A côté, il y avait une carte et un mini puzzle assorti ainsi qu’une boîte Les carnets de l’apothicaire remplie de thé japonais. Un très, très grand merci Frede !

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Séverine

Ce que j’ai envoyé… Je participais pour la première fois à un SWAP avec les copinautes d’A l’ombre du grand arbre, alors j’ai eu envie de marquer le coup et de rajouter 2 ou 3 bricoles à mon colis pour Lucie. La sachant grande admiratrice, tout comme moi, de mon « voisin » Jean-Claude Mourlevat, et ayant craqué, moi-même, pour l’édition collector de son plus grand roman (à mon sens), je me suis dit que le lui offrir serait une bonne idée. J’ai rajouté des cartes d’illustrateur.ice.s et artistes locaux (Ella et Pitr, Gaëlle Boissonnard) – on a décidément du beau monde dans la Loire ! – des caramels achetés dans l’épicerie bio de ma ville, un marque page au nom de l’écrivain qui m’a donné le goût de la lecture quand j’étais enfant, ainsi que deux babioles de saison. J’ai pris autant de plaisir à préparer ces surprises qu’à recevoir les miennes !

Ce que j’ai reçu… C’est sûr, Blandine a confondu le Grand Arbre avec un sapin ! 😉 En effet, elle m’a permis de vivre avant l’heure l’excitation qui accompagne l’ouverture des cadeaux de Noël… l’émotion et le sourire, aussi ! Quelle joie de découvrir dans son beau colis un roman ado, This place is still beautiful, aux sujets prometteurs : quête d’identité, préjugés, racisme (tout ce que j’aime), un adorable mini puzzle avec un chat et le Père Noël (tout ce que j’aime), un ballotin de chocolats et des thés gourmands (tout ce que j’aime), ainsi qu’un beau carnet de lecture pour écrire sur les livres que j’ai lus (tout ce que j’aime). Enfin, je dois avouer que les mots qui accompagnaient ces cadeaux m’ont touchée plus que de raison… Merci du fond du cœur, Blandine !

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Frede (Liraloin)

Ce que j’ai envoyé… J’étais très heureuse d’envoyer un p’tit présent à Linda. Les idées ne manquaient pas et le Salon du livre de Montreuil m’a donné l’occasion de lire ce bel album sur l’amitié que je me suis empressée de faire dédicacer. Sachant Linda lectrice de mangas, une boîte à thé et son contenant japonisant allait compléter ce colis. J’ai flashé sur cette carte puzzle représentant l’immense Frida Khalo au détour d’une balade. C’est toujours un régal que de pouvoir gâter une copinaute !

Ce que j’ai reçu… Quelle surprise que de recevoir un colis et le swap de Noël est une belle occasion ! J’ai reçu une jolie carte avec un petit mot adorable ! J’ai été heureuse de recevoir un livre pop-up sur le Roitelet huppé, j’aime beaucoup observer les oiseaux qui cheminent dans mon jardin lorsque je déguste une bonne tasse de thé. Un bonheur que je pourrais réitérer grâce à la touche gourmande ! Merci Héloïse pour ces agréables attentions.

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Blandine (Vivrelivre)

Ce que j’ai envoyé… J’ai eu le grand plaisir de concocter une petit colis mystère pour Séverine, nouvelle branche du Grand Arbre. Séverine est dotée d’un dynamisme communicatif, elle est une amoureuse des mots, est drôle et punchy, et je n’ai pas hésité longtemps sur la thématique du roman, choisi au feeling, comme souvent. Pour l’accompagner, chocolats et thés. Et pour se poser un peu, un joli carnet d’une entreprise de papeterie bretonne (dont j’adore tout le travail) afin que Séverine y note ses lectures, ainsi qu’un petit puzzle de Noël, acheté auprès d’une entreprise bretonne (elle aussi) (et que j’adore aussi !). Petit colis et grandes pensées pour un moment fort en émotions !

Ce que j’ai reçu… Est une ode au Renard, envoyée par Colette. Une carte avec une belle histoire rêvée, un album au dessin délicat, un tampon très mimi. Et parce qu’il faut être engagé.e, du café (j’aime tellement le café !!) saveur pain d’épices (rien que l’idée est délicieuse !) et un tract signé Clémentine Beauvais, une autrice que j’apprécie particulièrement, comme mes copinautes du Grand Arbre ! Je suis ravie, mille mercis <3

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Colette


Ce que j’ai envoyé… Un petit bout de forêt, quelques poils de renardeau, des grains de café, une douce odeur de pain d’épice, des petits cailloux de mon imaginaire et un texte pour cultiver l’espoir d’un monde où les enfants seront enfin considéré.e.s comme des humains.e.s comme les autres.

Ce que j’ai reçu… de Linda était doux comme une journée de Noël au milieu des siens. Dans l’album de Jake Biggin Quelques mots d’amour, on se promène comme sur un chemin enneigé dans une forêt chérie. Et les petites merveilles sucrées qui accompagnaient ce petit livre ont rejoint notre sapin de Noël.

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Héloïse (Helolitla)

Ce que j’ai envoyé… Quand j’ai vu que j’avais tiré au sort mon homonyme, cette chère Héloïse Ileautresor, j’étais ravie ! Je savais déjà que ce serait un plaisir de lui offrir un album, elle qui les adore. En cette période agitée, j’ai choisi de recentrer sur la magie de Noël, avec le dernier album d’Ellie S. Green dont j’adore la plume : un Noël tombé du ciel. Et pour ajouter un peu de douceur, je me suis rendue chez mon boulanger pâtissier, lui commander un sachet de jolis mendiants. Enthousiasmée (j’adore envoyer des lettres et des colis), j’y ai ajouté quelques petites surprises, dont des origamis papillons pour leur touche colorée.

Ce que j’ai reçu… J’ai été très gâtée par Lucie, qui m’a offert un très bel album de Gilles Bachelet, dédicacé en plus ! Un album que nous nous sommes empressés de lire et de relire en famille. Elle m’a également offert un superbe marque-page Minalima, une magnifique carte de Noël, ainsi qu’un très bon sablé au praliné (moi qui adore les sablés, je me suis régalé !). J’étais comblée !

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Nous espérons que vous avez été aussi entourés et gâtés pendant les fêtes et nous sommes très heureuses de vous retrouver en 2025 pour de nouvelles lectures. Belle fin d’année à tous !

Un livre à partager en famille pour Noël !

Après vous avoir proposé successivement un article sur un conte de Noël écrit par nos soins, des lectures pour un Noël généreux puis un Noël décalé, nous avons décidé cette année de choisir chacune un livre cher à notre cœur susceptible de plaire à toutes les générations réunies autour du sapin. Voici donc notre sélection de livres à partager, à lire sans modération !

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Si les classiques sont des valeurs sûres, c’est un titre récent que Lucie a envie de partager. Car tous les membres de sa famille, de 64 à 5 ans ont craqué pour Coboye !

Parce que l’enfance touche tous les cœurs quelque soit leur âge officiel, la bande dessinée de Cécile, qui contient très peu de texte, saura ravir les petits et les grands. La bédéaste y relate sa jeunesse dans un far west imaginaire avec beaucoup de douceur et d’imagination. Petits et grands sont happés par les grandes illustrations et rient de bon cœur aux « carabistouilles » réalisées si naïvement. Avec aussi la pointe d’émotion qui sied à la période, cette BD est parfaite.

Coboye de Cécile, Éditions Delcourt, 2024.

Son avis complet ICI.

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Chez Séverine, seules deux personnes sur cinq sont accros à la lecture…Sa fille de 9 ans, et…elle ! Pourtant, malgré le goût peu prononcé des trois autres pour la chose littéraire, s’il est un livre qui fait l’unanimité, c’est bien celui-ci : Quelqu’un m’attend derrière la neige. A mi-chemin entre l’album illustré et le roman de premières lectures, son format est idéal pour un court moment hors du temps, porté.es par la plume délicate et passionnante de Timothée de Fombelle, et les illustrations chaleureuses de Thomas Campi. Ainsi, chaque année, à la période des fêtes de fin d’année, sa lecture à voix haute donne l’occasion à la famille de resserrer les liens autour de ses valeurs (liberté, fraternité, hospitalité, etc.), de partager une empathie commune et de se souvenir, ensemble, que cette période n’est pas, pour tou.stes, synonyme de joie et de lumières scintillantes. Grâce à une belle histoire, entre mélancolie, poésie, et triste réalité, l’auteur, conteur hors pair, nous rappelle qu’elle est aussi des jours parfois sombres pour les êtres privé.es de la chaleur d’un foyer, des rires, des festins, des cadeaux, bref, de la « magie de Noël ». Pourtant, pour ses trois personnages, il imagine une autre issue : être attendu.e, ou celui/celle qu’on attendait… C’est un récit très touchant, dont les thèmes -l’exil, la solitude, la précarité matérielle ou sociale et le monde qui va trop vite- sont de ceux qui interrogent notre humanité, et appellent à notre vigilance, plus encore à cette période de l’année, où tout est exacerbé. Ils nous invitent à la générosité, mais pas exclusivement consumériste. Sans la dévoiler, la fin, très émouvante, mouille, à chaque fois, les yeux de tous les membres de la famille, enfants ou adultes, même les plus coriaces…

Quelqu’un m’attend derrière la neige, de Timothée de Fombelle, illustré par Thomas Campi, Gallimard jeunesse, 2019

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Pour Liraloin les fêtes de fin d’années sont le moment propice pour se reposer et lire mais aussi partager des lectures à voix haute dès que possible. Il y a un titre chouchou et très certainement que ce dernier parle à toutes les générations de lectrices et lecteurs qui aiment les contes classiques avec un pointe d’humour ! Un titre qui a une place toute particulière car il a été lu pour la première fois à voix haute il y a plus de 10 ans devant un large public d’oreilles captives. Forte de cette expérience ce premier roman m’accompagne souvent. Mais quel est ce titre, me direz-vous ? Il s’agit de la Bergère qui mangeait ses moutons d’Alexis Lecaye et Nadja : un conte détourné où, et tout est dans le titre, la personne qui normalement doit prendre soin de ses animaux en réalité…. les déguste ! Cette histoire est un pur bonheur de lecture à voix haute : suspense, humour, retournement de situation pour s’amuser un maximum durant la digestion d’une bonne bûche au chocolat ! Bonne découverte et joyeuse lecture sous un grand sapin vert aux mille couleurs scintillantes.

La bergère qui mangeait ses moutons d’Alexis Lecaye et Nadja, Ecole des loisirs, collection : Mouche, 1991

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Linda est une enfant « Ernest et Célestine« , elle a découvert les albums de Gabrielle Vincent à l’école maternelle et en a fait profité tous ses enfants. C’est l’incontournable de Noël, celui qui réunit toute la famille, très certainement séduite par la simplicité de la fête et la mise en avant des valeurs du partage et de la générosité. Il se dégage de l’histoire et de ses personnages la magie de Noël délicatement emballée dans la chaleur de l’amitié.

Noël chez Ernest et Célestine de Gabrielle Vincent, Casterman, 2011 (pour la présente édition).

Son avis complet est ICI.

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Chez Héloïse – Helolità, c’est un album récent qui fait l’unanimité et qui a charmé toute a famille : Trölls, d’E. S. Green. Un ouvrage superbement illustré par Lisa Ghisquier, qui revient sur les origines des lutins du Père Noël.

En plein folklore scandinave, entre froid et mythologie, nous suivons les trölls du roi Rotinmir dans une aventure envoûtante et passionnante. C’est un album qui invite à faire le bien autour de soi, aux belles valeurs d’entraide et à la féerie certaine. Un titre à lire, et à relire !

Trölls, d’Ellie S. Green, Gulfstream éditeur, Octobre 2022.

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Et vous, autour de quelle lecture aimez-vous vous retrouver en famille ?