Souvenirs


Avant de changer d’année, des souvenirs pleins la tête, explorons quelques lectures qui nous ramènent en arrière. Voilà un thème qui traverse de nombreuses fictions jeunesse, qu’il soit seulement évoqué ou au centre de l’histoire. Entre réminiscences familiales et moments durs à digérer, ces fenêtres ouvertes sur le passé nous touchent souvent.

 

Dans Le Tiroir à histoires

June et Jo – les souvenirs de Séverine Vidal et Amélie Graux

La maison en petits cubes de Kunio Katô et Kenya Hirata

 

Lire les avis de Bouma, Sophie et de Pépita.

 

Bouche Cousue de Marion Muller-Collard

Ce récit tourne autour d’un souvenir de jeunesse qui remonte à la surface suite à un événement.

Lire l’avis de Pépita

 

 

Sur Méli-Mélo de livres

 

Le jardin des ours Fanny Ducassé. Thierry Magnier.

Quand se souvenir de ses deux grands-pères, aujourd’hui disparus, donne un album d’une rare sensibilité et aux illustrations magnifiques.

Lire aussi les avis de Céline et Sophie

 

L’armoire Anne Cortey, illustré par Claire de Gastold. Grasset jeunesse.

Une armoire, métaphore de la grand-mère disparue et dont la présence angoisse une petite fille. Quand les souvenirs rattrapent les générations qui suivent, une approche bien vue.

 

La couverture : une histoire en petits carreaux (de tissu) Isabel Minhos Martins Yara Kono. Editions Notari.

Une histoire qui sublime le souvenir, le partage, la transmission entre générations.

 

Sur les Lectures Lutines

Le Jardin de Minuit d’Edith. Editions Noctambule.
Quand un enfant partage mystérieusement les souvenirs d’une demoiselle dans un fabuleux jardin.
Lire aussi les avis de Bouma et Sophie

La belle histoire d’une Vieille Chose, de Louis Emond et Steve Adams.

Quand une voiture se souvient de ce qu’elle a été avant de n’être plus qu’une vieille chose.

 

Les bruits chez qui j’habite de Claire Cantais et Séverine Vidal.

Des souvenirs sonores que l’on goûte délicieusement. De petites portes qui s’ouvrent vers un monde de l’enfance que l’on n’a pas oublié.

 

 
A lire au Pays des Merveilles
La mémoire en blanc de Isabelle Colombat. Thierry Magnier, 2015
Quand pour se réconcilier avec sa propre histoire, Léonie se construit sur de de bouleversants souvenirs et nous oblige à (re)découvrir un épisode récent de l’Histoire du Rwanda. N’oublions pas…

Après la peine / Ahmed Kalouaz. Rouergue, 2014.

 

Un tête à tête mélancolique entre un père et son fils entre souvenirs et révélations.

Lire aussi les avis de Pépita et de Bouma.

Vide-grenier / Davide Cali, Marie Dorléans. Sarbacane, 2014
Bric à brac de souvenirs entassés dans le grenier ; il suffit de remettre le nez dans les cartons oubliés pour retomber en enfance et décidé .. de ne plus s’en séparer !
Lire aussi l’avis de Chlop.
Sur Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait Livresse
Les souvenirs, ça se construit aussi ! Ou comment transformer le malheur en bonheur ? Une belle illustration de résilience avec une galerie de personnages hauts en couleur.
Lire aussi les avis d’Alice et de Pépita.
Souvenirs de papier de Baptistine Mesange et Jessica Lisse.
Dans cet « album-souvenir », le narrateur revient sur les amis de papier qui ont peuplé son enfance : un ours en peluche à qui il a offert une partie de son cœur, une jolie poupée et son amie imaginaire, un coffret pour y glisser tous ses secrets… Un album très psychologique voire philosophique qui aborde avec beaucoup de justesse, de tendresse et une petite pointe de mélancolie le passage de l’enfance au monde adulte.
Dans Un Petit bout de Bib(liothèque)
Mon grand-père de Christine Schneider et de Gilles Rapaport.

Un livre sensible qui rappelle tous ces moments de l’enfance passés avec son grand-père, ceux qui restent malgré la disparition de l’être cher.
Lire l’avis de Pépita
Le Marchand de souvenirs de Ghislaine Biondi.
Quand on n’a pas eu de père, difficile de s’en souvenir. C’est pourtant ce que propose ce marchand de souvenirs…
Un album intemporel qui rappelle que chaque être humain est passé par mille vies avant de devenir celui que l’on connaît. Avec tout le talent de Lane Smith, en plus.
Chez La Collectionneuse de Papillons
Quelqu’un qu’on aime de Séverine Vidal.

Partir à la recherche de ses souvenirs, une quête qui n’a pas de prix, surtout quand elle permet à une jeune homme de construire le lien avec son grand-père.
Lire l’avis de Pépita
La Gigantesque petite chose de Béatrice Alemagna.
Béatrice Allemagna signe un album gigantesque pour évoquer ces moments infiniment précieux que nous chérissons tous au fond de notre mémoire.
Dans la Littérature enfantine de Chlop
 
Guirlandes de poupées, J. Donaldson R. Cobb Kaléidoscope
Entre réel et imaginaire, une fillette joue avec une guirlande de poupées. Jusqu’au moment où elles croisent une paire de ciseaux bien réels, et c’en est fini de la guirlande de poupée… Mais il reste toujours quelque chose des bons moments passés, une place attend les poupées disparues dans la mémoire de la fillette.
Dans la maison de ma grand-mèreAlice Melvin, Albin Michel jeunesse
Nous suivons une petite fille qui traverse la maison de sa grand-mère, dans la quelle chaque pièce, chaque objet, lui évoque un doux souvenir.
Lire l’avis de Pépita
Dans l’Atelier de Cœurs
Mon bison de Gaya Wisniewski chez Mémo
L’histoire d’une amitié entre une petite fille et un bison racontée par une vieille femme.
Une somme de souvenirs de Thomas Scotto et Annaviola Faresin chez Notari
L’histoire d’un homme qui décide de se séparer de ses souvenirs et qui ignore qu’ils ont aussi du sens pour les autres.
Le grenier de Mona Leuleu chez Seuil Jeunesse
Des souvenirs à découvrir à l’aide d’une torche à lumière bleue.
Mamie est partie de POG et Lili la Baleine chez Gautier Langereau
Une petite fille qui arrive à faire le deuil de sa grand-mère grâce aux souvenirs qu’elle lui rapportait de ses voyages.
Sur l’île aux trésors
Mémoire en eaux troubles de Joëlle van Hee
 
Un roman qui évoque à la fois les souvenirs de la deuxième guerre mondiale, à travers le grand-père du protagoniste, et la perte de mémoire suite à la maladie d’Alzheimer.

 

 

Bons souvenirs de 2018 !

En attendant nos coups de cœur de l’année qui vient de s’écouler, toute l’équipe A l’Ombre du Grand Arbre vous souhaite un joyeux réveillon !

Mais… qu’y-a-t-il au delà de la forêt ?

Qu’y-a-t-il au-delà ? Au-delà de ma chambre, de ma ville, de mes amis, de ma famille ? Au-delà de la Terre ? De la voie lactée ? De l’univers ? Voilà une question existentielle qui vient tous nous tarauder un jour ou l’autre ! C’est pour répondre à cette ancestrale question que la père d’Arthur se lance dans un projet insensé : il décide de monter, pierre après pierre, une immense tour qui lui permettrait de voir… Au-delà de la forêt. Il entraîne alors son jeune fils dans son incroyable projet. A force de volonté, à force de travail, à force de soutien, notre famille de lapins semble parvenir à ses fins…

Au-delà de la forêt de Gérard Dubois et Nadine Robert.-Seuil jeunesse

Colette : Au seuil de l’album, une couverture qui nous accueille avec son titre énigmatique, précieuse invitation au voyage : Au delà de la forêt… Et deux lapins anthropomorphisés qui gravissent un je-ne-sais-quoi de pierres sombres. Sur quelles hypothèses de lecture êtes-vous parties en découvrant ce livre ?

Pépita : Je suis partie sur une aventure entre un parent et un enfant. Mais aussi à une ascension difficile et ardue avec ce fil d’attache qui les relie dans l’escalade.

Isabelle : Toutes les hypothèses sont possibles avec cette couverture qui instaure immédiatement le suspense ! Puisque le titre annonce, comme tu le rappelles, qu’il s’agit d’aller « au-delà de la forêt », mais la couverture ne nous montre pas grand-chose avec cette focale très resserrée sur les deux héros… Cela nous place un peu dans la même situation qu’eux : on devine l’ampleur de l’obstacle à franchir, mais notre regard est cantonné à l’horizon limité des deux lapins. Au-delà, tout est donc envisageable, du plus merveilleux au plus terrifiant… J’ai trouvé cela très intriguant et la curiosité a aussi gagné tout de suite mes garçons avec qui j’ai lu cet album !

Bouma : Pour moi, le titre comme la couverture ont tout du livre d’aventure. Je m’attendais donc à traverser une épaisse forêt aux mille dangers, à naviguer entre les arbres… pour atteindre un monde mystérieux.

Colette : Et effectivement aventure il va y avoir dans un endroit que nous découvrons dès les premières pages : une forêt dense et obscure présentée comme « habitée par des loups, des ogres et des blaireaux ». A quoi avez-vous associé cette forêt ?Pépita : Je l’ai clairement associée aux légendes à cause des mots « loups » et « ogres », mais le mot « blaireaux » m’a fait sourire car on peut le prendre à différents niveaux. Cela rajoute de la légèreté au coté obscur de cette forêt. Quoique l’animal blaireau ne soit pas très sympathique non plus !

Isabelle : La forêt représentée sur l’album est effectivement pour le moins sombre et dense. De quoi frissonner et voir défiler immédiatement dans sa tête toutes sortes de forêts effrayantes issues des contes et histoires de notre enfance – surtout à l’évocation des « loups et des ogres » ! Mais la référence teintée d’ironie aux « blaireaux géants » a tout de suite détendu l’atmosphère ! D’un point de vue symbolique, ce thème m’a beaucoup parlé car j’y ai vu une manière de parler de tous les obstacles qui semblent d’autant plus infranchissables qu’on ne s’en est jamais approché.

Bouma : Je rejoins mes camarades sur le jeu de mots autour des contes (avec le côté malicieux-méfiant sur les blaireaux). Mais je trouve vraiment qu’elle incarne quelque chose à elle toute-seule, comme une entité entière et pleine de laquelle émergeraient ces habitants pas comme les autres.

Colette : La petite famille que nous découvrons est composée d’un jeune lapin, de son père et de leur chien Danton. Qui avez-vous préféré ? Et pourquoi ?Pépita : Ouh là ! Difficile à dire ! J’ai bien aimé de suite leur relation pleine de confiance, de complicité et d’entraide.

Bouma : Difficile de dissocier les personnages de cette famille tant ils sont solidaires les uns des autres. Après, comme Pépita, je me suis plus identifiée au narrateur, le jeune lapin, et j’ai admiré la détermination et l’espoir qui se dégageait de la figure paternelle.

Isabelle : Découvrant l’histoire à travers les yeux du jeune lapin, il est difficile de ne pas ressentir de tendresse à l’égard du père : curieux, hardi et volontaire, il développe une idée folle, littéralement « gigantesque », du type de celles que peuvent en réalité seulement avoir les enfants – de quoi susciter l’enthousiasme de ses petits lecteurs ! Le jeune héros est très sympathique également : on sent toute l’admiration qu’il a pour son père, mais aussi son souci de l’aider et de le soutenir dans son projet.

Colette : Quant à moi justement c’est la figure du père que j’ai vraiment trouvée enthousiasmante : le père a un projet et met tout en œuvre pour aller jusqu’au bout de son projet, avec une simplicité et une sincérité si vraies qu’il peut entraîner son fils avec lui entièrement, intensément. Il y a une complicité rare entre le père et le fils, une complicité que je trouve précieuse, à offrir comme un trésor à nos jeunes lecteurs et à leurs parents. Que diriez-vous du projet qui guide leur quotidien le temps de l’album ? Comment avez-vous interprété l’ambition du père de l’histoire ?

Bouma : Pour moi, il est apparu comme une échappatoire, un but à atteindre coûte que coûte, de celui dans lequel on est capable de se lancer pour oublier. L’absence d’une mère, la rudesse de la vie ou les choix de l’existence, peut-être ?

Pépita : Oui c’est ça : une envie de se prouver quelque chose ou bien de retrouver son rêve d’enfant et de le partager avec son fils. De se confronter à ses limites aussi pour les repousser.

Isabelle : Comme vous, j’y ai vu une dimension de défi, de dépassement, avec aussi un petit côté subversif : ce père qui ne s’arrête pas aux histoires qu’on raconte et qui décide de faire ce qu’apparemment personne n’a jamais osé entreprendre jusque-là. Ce que j’ai trouvé sympathique, c’est qu’il n’agit pas en héros tout-puissant, mais s’efforce plutôt de fédérer de plus en plus largement autour de son idée.
Et il y a quelque chose de délicieusement enfantin dans cette idée de tester, voire de repousser ses limites, comme le dit Pépita. Quel enfant ne s’est pas lancé dans la construction de la tour la plus haute, du collier le plus long, etc.? En tout cas, les miens se sont immédiatement identifiés au projet qui les a littéralement enthousiasmés !

Colette : Et ce qui m’a semblé tout à fait génial et intéressant dans le projet du père, c’est que ce projet se base sur le TRAVAIL, une valeur dont il est finalement peu question dans l’album contemporain, surtout qu’ici c’est une valeur très positive. Le travail a en effet une place centrale dans cet album : avez-vous adhéré à l’image qui en est donnée ?

Pépita : Oui tu as raison de le souligner car quelle entreprise tout de même ! Oui j’ai beaucoup aimé car au début, il y a l’idée, puis son partage et puis l’ébauche de plan à deux. Enfin, on s’y met et on découvre la fatigue et le découragement. Puis vient le rebond et la solidarité via l’idée de ce troc qui se rajoute. J’ai trouvé que cela allait plus loin que la simple démonstration du travail. C’est un système qui est décrit là…vers quoi tendre à nouveau ?

Bouma : Moi je n’en ai pas du tout fait cette lecture. La persévérance et l’effort ne sont pas forcément liés au travail pour moi. D’autant plus que ce père est boulanger en premier lieu. Par contre, j’y ai lu la force que représentent une foule, une société quand elles se mettent à avancer ensemble. On pourrait presque y voir une métaphore de l’expression « déplacer les montagnes ».

Isabelle : Tout ce que vous dites est vraiment intéressant et vos interprétations me parlent toutes énormément. Je n’y ai pas réfléchi sur le moment, mais la lecture de cet album nous a laissé, à mes garçons et à moi, un sentiment intense de bien-être et d’accomplissement. Rétrospectivement, je pense que cela vient à la fois de la satisfaction de voir ce projet prendre forme et progresser efficacement, de l’ivresse d’avoir repoussé des limites qui semblaient infranchissables et du bel élan collectif suscité par cette entreprise… Tout cela fait vraiment du bien ! Et c’est vrai, ce que tu dis Pépita : ce travail n’est pas seulement enthousiasmant parce qu’il est achevé avec brio, mais aussi parce qu’il s’organise dans un esprit d’entraide qui n’a rien à voir avec l’organisation du travail dans les entreprises traditionnelles.

Colette : Comme vous le soulignez toutes, cet album offre une symbolique très très riche : on y parle de solidarité, de famille, de coopération, de société, d’idéal à atteindre, de rêve à construire… de l’autre aussi, cet étranger si semblable à nous. Quel aspect de cette fable vous a le plus touchée ?

Isabelle : En effet, tu as tout à fait raison de le souligner ! Pour ma part, j’ai été avant tout emballée par le côté presque révolutionnaire de ce que tu appelles joliment « rêve à construire ». Mais aussi très touchée par la belle solidarité et les formes de partage qui émergent dans le village autour de ce rêve. Des valeurs qui font trop souvent défaut, mais qui parlent spontanément aux enfants !

Pépita : Ce qui m’a vraiment le plus touchée, c’est la réponse du fils lapin à l’épuisement de son père et l’élan de solidarité qui suit : ça met du baume au cœur de voir que tous œuvrent pour une construction dont ils ne connaissent finalement pas l’issue, seulement être là sans arrière pensées. C’est très positif !

Isabelle : Ce qui met aussi du baume au cœur, façon madeleine de Proust, c’est le côté « vintage » des illustrations qui m’ont évoqué ma propre enfance. L’objet-livre est très beau, avec sa couverture rigide et texturée et un côté rétro des illustrations, travaillé jusque dans les moindres détails – graphismes, couleurs un peu estompées… Cela donne au livre des allures de contes et un effet réconfortant – on croirait presque retrouver un album de Beatrix Potter, non ?

Bouma : une belle image effectivement et des valeurs qui parlent à tous, petits et grands. Et comme Isabelle, j’ai craqué pour l’aspect vintage de cet album aux couleurs surannées.

*****

Et si vous souhaitez en savoir plus :

Et sur nos sélections thématiques sur le thème de la forêt : Forêts fabuleuses et Forêts magiques et mystérieuses.

*****