Débat sur le livre numérique : troisième partie

SophieLJ : Le livre numérique propose une plus grande interactivité, c’est certain. Mais du coup, peut-on encore parler de livres ? Pourquoi ?

Gabriel : Justement je n’arrive pas à dire « livre » dans ce cas… Je suis toujours embêté quand je parle de ces… choses !

Kik : Certains sont des livres, du texte qui défile, chapitre après chapitre. Mais c’est vrai que l’intérêt du numérique, réside dans les livres « hybrides ». Ces « choses » qui sont à la fois jeu/livre/application/film. Des mots naissent année après année pour faire vivre la langue, le texte et donc les livres, ces « choses » en font partie. L’avenir nous dira dans quel sens ces « choses » évoluent.

Carole : Ah justement je crois que c’est là que réside la problématique ! Le terme  » livre  » n’est pas approprié pour moi… Un texte qui défile, avec ou sans illustration, n’est pas à proprement parlé un livre. Quant à ce qui fait le charme d’un livre, la texture, l’odeur de l’encre, le plaisir de tourner les pages, les corner, souligner etc… rien ne peut remplacer le livre-papier, et surtout pas ces  » choses  » froides et sans âme, sans odeur que sont les tablettes ou liseuses !

Céline : Pour nous, c’est clair, l’objet-livre est irremplaçable car lié à toutes nos expériences sensorielles passées. Sensations que son ersatz virtuel ne pourra jamais nous procurer ! Par contre, en sera-t-il de même pour la nouvelle génération, qui naît avec ce type de machines dans les mains, pour qui, lire de cette manière, deviendra la norme ?

Nathan : J’étais entièrement d’accord avec Kik mais Carole a soulevé le point le plus le plus important pour moi : l’objet-livre ! Une tablette qui se cassera au moindre choc (et mettra des dizaines (voire des centaines pour ce genre de tablette qui a une pomme derrière…) d’euros en l’air) n’est, pour moi, rien face à ces Dieux de papier que j’adule. Le contact, les pages qui tournent, les couvertures auxquelles les éditions peuvent ajouter plus que du graphisme : des lettres qui ressortent, une couverture cartonnée, ou effets en tout genre. Et plonger son nez entre les pages pour se régaler de l’odeur qu’elle soit neuve ou vieille, qui arrive parfois même à m’évoquer des souvenirs d’enfance, on le retrouve dans les tablettes ? Un livre ça peut tomber, quelques pages ou la couverture peuvent se déchirer, se tordre, on peut renverser de l’eau ou du café dessus, ça vit toujours. Pour certains c’est même encore plus vivant. Une tablette ça tombe et c’est mort. Et un livre numérique est interactif… mais tous ces albums pour enfants vous en faites quoi ? Les volets à soulever, les languettes à tirer, les sons à écouter… J’ai même encore mieux, quelque chose que le livre offre et que ces « choses » n’offrent pas : le toucher, la découverte de divers contacts pour les plus petits et encore mieux : la 3D ! Si vous ne me suivez pas, demandez un pop-up à votre libraire !

Hérisson08 : Et pourtant il y a des livres numériques qui m’ont presque plus charmé que les livres-papier ! Car effectivement le terme livre devient un peu décalé, presque obsolète pour ces « choses » numériques comme dit Gabriel. Ces ouvrages numériques dirons-nous offrent pour moi des aspects qu’on ne peut pas retrouver dans les livres-papier, notamment les hypertextes qui sont devenus une façon de lire des jeunes actuels à ne pas négliger. L’apport de son, d’animation, de vidéo, peut tout à fait justement remplacer les tirettes et autres de Nathan…
Selon moi la vraie thématique ne peut donc pas être le « terme » livre, même s’il faudrait en effet définir de nouveaux mots, ni le coût puisqu’il tend à se réduire, mais bien les habitudes de lecture !

BONUS

L’émission de radio Écoute ! Il y a un éléphant dans le jardin parle des applications numériques.

Pépita vous parle des applications numériques. Et une seconde fois dans un cadre plus professionnel !

Débat sur le livre numérique : deuxième partie

SophieLJ : Pour vous, le livre numérique est-il un gadget technologique ou présente t-il un véritable intérêt pour la lecture ?

Pépita : Lire autrement, c’est sûr ! J’ai eu l’occasion de lire des extraits de romans sur iPad et c’est vraiment très agréable : confort de lecture évident, ce n’est pas du tout comme sur un ordinateur, luminosité et grandeur des caractères à sa convenance, plus de poids du livre, on peut lire en pleine nuit sans déranger la personne à côté, etc… J’avoue avoir été bluffée ! Après, il y a les liseuses et les tablettes, ce n’est pas du tout le même usage. Ce qui me gêne un peu là-dedans, c’est l’aspect très commercial (je pense en particulier aux applications…). En a-t-on vraiment besoin ? Qu’un homme d’affaires ou des personnes qui se déplacent beaucoup les utilisent en déplacement, oui je comprends tout à fait (pour lire des romans, les journaux, etc…). Je pense aussi que ces outils peuvent être très profitables aux situations de handicap ou de difficultés scolaires par exemple. Après, c’est un peu du gadget non ? Pour utiliser un peu l’iPad dans mon travail de bibliothécaire (parce qu’on nous le demande…), j’en suis un peu revenue au bout de deux ans…

Drawoua : Si je m’en tenais à un point de vue sensuel, le livre papier, le livre en vrai, celui avec des pages à tourner est mon ami. Dois-je donner un avis sur un support que je ne pratique pas encore ? J’aime les notions de complémentarité et de lire autrement qui s’y rattachent. Et ce sont plus celles-ci que je souhaiterai mettre en avant plutôt que placer les livres papiers et les livres numériques en opposition. D’ailleurs, si on relisait Pennac et la liste des droits du lecteur qu’il dresse dans Comme un Roman, ajouter le prisme du livre numérique colle parfaitement.

Nathan : Pour moi le livre numérique n’est qu’un gadget technologique bien pratique… Pour ce qui est des byook ou autres divertissements dans ce genre ce sont pour moi plus des applications (ou livres-application)…

Gabriel : Gadget pour moi aussi. Quand je vois des « livres » comme Les contes du haut de mon crâne (chez La souris qui raconte), c’est chouette, il y a plein de trucs sur lesquels on peut cliquer… mais pour moi c’est un gadget… C’est sympa mais on peut aussi s’en passer. Mais une fois de plus je parle en tant qu’adulte, les enfants eux adorent… après moi j’aime que ma fille imagine les choses dans sa tête plutôt que de les voir sur un écran.

Carole : Je pense que tous les supports sont bons pour amener les enfants à la lecture. Et instinctivement, ils sont doués pour manipuler l’iPad. Après, comme pour le livre-papier, il y a du bon et du moins bon. C’est aux adultes de trier, de choisir et surtout d’accompagner. Toutefois, l’iPad reste quand même un gadget ! Enfin, pour l’instant concernant les livres numériques jeunesse, la qualité est encore peu répandue (La souris qui raconte est l’exception).

Bouma : Je pense qu’il faut aussi parler du support du livre numérique. Vos réponses ne les distinguent pas et pour moi selon le support la forme du livre numérique n’est pas la même. Il y a des liseuses qui permettent une lecture linéaire, contiennent énormément de romans et peuvent être très utiles pour ne pas se casser le dos. Et il y a les tablettes qui permettent d’aller un peu plus loin qu’un livre papier car elles permettent une interaction ou tout du moins une action du lecteur sur l’objet « livre ». Après c’est comme le reste de la littérature, il y a du bon et du moins bon. Pensez à « Un livre » de Hervé Tullet. C’est un petit chef-d’œuvre de la littérature jeunesse (selon moi). L’application « Un jeu » permet d’aller plus loin, d’explorer l’univers de l’auteur. Elle a d’ailleurs reçu le Prix Pépite de la création numérique au salon de Montreuil en 2011. Pour moi, le livre numérique relève du gadget quand l’aspect technologique est mal exploité.

Nathan : C’est comme ça que je vois les choses. Les livres numériques deviennent intéressants quand ils permettent d’approfondir un univers ou d’être interactifs avec le lecteur. Après petite réflexion à part qui montre toujours pourquoi je suis contre les livres numériques: j’ai lu une BD (520 km) en numérique et pour le faire dédicacer à Montreuil, je vais devoir l’acheter…

Carole : Entièrement d’accord avec toi Bouma ! Notamment Un livre de Tullet est très chouette sur iPad aussi ! Et j’aime aussi beaucoup Le livre des bruits de Soledad Bravi, qui pour le coup, prend beaucoup d’ampleur (sonore) en version numérique.

Céline : Pour repartir de la distinction de Bouma, de mon côté, j’apprécie notamment lire les nouvelles numériques sur une liseuse (par exemple celles proposées par Storylab) : c’est à la fois simple et pratique. Par contre, n’en déplaise à mon dos, pour le reste, je préfère de loin la version papier. Les applications numériques ont, c’est vrai, un aspect ludique et permettent d’aller plus loin dans la découverte de l’univers créé par l’auteur mais cela ne remplace jamais le contact quasi charnel du papier. Maintenant, les deux peuvent coexister… et cette poussée du numérique amène le livre à se réinventer. Je pense notamment à la série Skeleton Creek de Patrick Carman qui propose des liens vidéos à regarder sur le net…

Pépita : Complètement d’accord : si le numérique apporte un plus, une complémentarité, un prolongement, c’est bénéfique. Pour avoir expérimenté en accueils petite enfance Un livre (le livre) et Un jeu (l’appli) d’Hervé Tullet dans une séance pensée autour des couleurs, ou Le Livre des bruits (livre + appli) , ça apporte vraiment une ouverture, surtout vis-à-vis de populations pour lesquelles le livre n’est pas évident. Je vais tenter bientôt la tablette pour des comptines. Ces séances sont d’abord construites à partir du livre. Pour moi, c’est important. Le numérique devient gadget s’il perd cette dimension-là. Le numérique a aussi une dimension ludique très forte, c’est pour cela que ça attire beaucoup les enfants. Et comme pour la télé ou l’ordinateur, il faut un accompagnement. ça vaut aussi pour la lecture !

Carole : Pepita, je plussoie ta volonté d’accompagnement de l’adulte avec le numérique et aussi avec le papier ! Et oui, quand la version numérique a une valeur ajoutée, alors oui je suis pour son utilisation par les enfants !

La réponse de Nathalie : Il faut impérativement ici distinguer différents types de lecture :
– la lecture « savante » des étudiants, des professeurs, des professionnels, pour lesquels la lecture est un moyen d’obtenir les informations dont ils ont besoin pour construire connaissances et expertise. La lecture numérique est ici une évidence. Bien installée, utile, efficace, probablement en voie de généralisation. Pourtant elle est très entravée, notamment par certains « encapsulages », par les problèmes d’interopérabilité, par les DRM, par le manque de fonction dans les dispositifs et les logiciels de lecture, etc.
– la lecture « plaisir » du quotidien. Sans être péjoratif, on parle là des romans, nouvelles et essais un peu « jetables », qu’on lit dans les transports et les salles d’attente, qui participent à l’élaboration de notre culture quotidienne, mais qui n’ont pas plus vocation à être conservés ad vitam aeternam que les quotidiens ou les magazines. Pour ces ouvrages, la lecture numérique est une alternative très intéressante au papier : pas de problème de poids, pas de problème de stockage, un usage en mobilité évident. Moi je lis comme ça depuis 15 ans déjà, et je ne risque pas d’arrêter.
– ensuite il y a la lecture « encyclopédique ». Certains lecteurs (dont je fais partie) aiment à se constituer leur bibliothèque mobile, avec tous les grands classiques, mais aussi tous les textes « à relire » rencontrés au fil des lectures. Cette lecture là a les DRM en horreur, et il n’est pas rare, dans ce cadre, de ne pas trouver les livres que l’on cherche, malheureusement.
– enfin, la lecture numérique ne représente qu’un intérêt moindre pour les lectures enfantines. Parce que la dimension physique est ici essentielle (à trois ans, un bon livre, ça se dévore… littéralement…). Pourtant, c’est aussi là que se trouve la plus grande part de créativité, avec des propositions qui se démarquent de ce qui peut se faire en papier. Je dirais donc que le livre numérique a aussi sa place en lecture enfantine, mais pas à la place de la lecture papier, en complément.
Donc, pour résumer, selon moi, la lecture en numérique est
– indispensable dans un contexte d’enseignement ou de travail ;
– très utile et efficace (mais c’est une question de goût personnel) pour la lecture plaisir quotidienne (romans, essais, etc.) ;
– incontournable pour se constituer une bibliothèque mobile (en complément de sa bibliothèque physique, moins mobile, ou bien à la place, en fonction des goûts de chacun) ;
– intéressante à explorer pour les propositions créatives qui sont faites dans le secteur de la jeunesse.
Enfin, dernier point important : la tablette peut être une ruse pour aider à amener un jeune non ou peu lecteur à la lecture. Il y a des enfants qui ne liraient jamais un livre de poche (trop proche d’un livre pour adulte) mais qui vont le lire sur liseuse ou tablette, déjà parce qu’il est possible d’agrandir la police. C’est un point essentiel.

BONUS

L’avis de SophieLJ sur Un livre d’Hervé Tullet
L’avis de Carole sur Un livre d’Hervé Tullet
L’avis de Bouma sur Un livre d’Hervé Tullet
L’avis de Drawoua sur Un livre d’Hervé Tullet

L’avis de Hérisson08 sur Skeleton creek de Patrick Carman
L’avis de Céline sur Skeleton creek de Patrick Carman

Kik a lu Mon chemin de Vincent Gaudin et Sandra Poirot-Cherif en version papier et numérique.

Va-t’en grand monstre vert en numérique.

Débat sur le livre numérique : première partie

Depuis quelques années, la lecture numérique est une pratique de plus en plus courante mais qui pose encore beaucoup de questions. En tant que blogueurs, nous sommes de plus en plus confrontés au livre numérique qu’on se laisse tenter ou bien qu’on l’évite.
Cette semaine, sous notre arbre, nous vous proposons de suivre notre vif débat sur la question du livre numérique dans la littérature jeunesse.

Et pour agrémenter un peu notre discussion, Nathalie du site Déclickids a accepté de répondre à ces quelques questions et nous l’en remercions. Ces réponses sont intégrées à la suite des blogueurs de l’Arbre.

SophieLJ : Pour commencer, est-ce que chacun peut me donner, en une phrase, son avis sur le livre numérique ?

Bouma : Je vais répondre comme une vraie normande : ça dépend… Je comprends le réél intérêt du livre numérique, surtout quand il y a une « qualité augmentée » mais je reste attachée au livre-papier.

Gabriel : En fait comme je disais l’autre jour à Françoise de La souris qui raconte, je pense que nous, en tant « qu’ancienne génération » nous avons du mal, mais nos enfants adorent… Moi je suis assez hermétique (mais je déteste lire sur un ordinateur).

Céline : Book sniffer depuis l’enfance, je reste moi aussi viscéralement attachée au livre- papier comme, dans mon boulot, je résiste tant bien que mal à l’offensive du tableau blanc interactif ; je sais pourtant que je vais tôt ou tard devoir y passer !

Hérisson08 : Le livre numérique est extrêmement pratique pour gagner de la place, tant dans les étagères que dans le sac, pour moi c’est donc la solution parfaite pour les romans !

Dorot’ : J’ai essayé de lire le numérique… Je suis assez accro aux nouvelles technologies, smartphone, tablette, mais décidément je n’y arrive pas pour les livres… Rien de comparable avec l’odeur du papier neuf…

Pépita : Étant de l’ancienne génération, je suis aussi très attachée au livre-papier et je pense qu’il a encore de beaux jours devant lui. Mais cette révolution numérique est en marche, et il faut vivre avec son temps, d’autant que la génération actuelle nous y pousse. Je pense qu’en matière de lecture numérique, il faut réfléchir en terme de besoins : pour quels usages ?

Carole : De l’ancienne génération aussi, attachée au livre-papier, et n’étant pas très douée concernant les nouvelles technologies, je pense toutefois que c’est un support intéressant aux avantages multiples. On y est de plus en plus confrontés, et surtout je crois que le débat numérique vs papier est vain : ils ne s’opposent pas, ils sont complémentaires.

Kik : Lire autrement. Plus de romans dans un petit sac à main ; un livre étranger là, tout de suite maintenant, sur sa tablette quelques secondes après l’achat ; une interaction dans les livres. Lire autrement.

Nathan : Personnellement je suis contre, bien qu’il y ait certains avantages comme la place, mais je reste offusqué du prix qu’affichent les éditeurs, puisque ceux-ci sont supérieurs aux livres de poches et je reste attaché à l’objet-livre…

Drawoua : Si c’est une manière d’amener des enfants, des ados, à la lecture, je suis plus que favorable au livre numérique. A titre personnel je ne l’utilise pas pour l’instant. D’ailleurs, quand je reçois un livre en service presse en PDF, j’ai du mal à entrer dans l’univers.

Gabriel : Oui moi je suis carrément incapable de lire un pdf… Mon esprit par ailleurs, je ne rentre pas dedans…

La réponse de Nathalie : En une phrase ? Oops déjà perdu. Pour moi, il y a deux sortes de livres numériques. Il y a le livre qu’on qualifie souvent d’homothétique ou de livre numérisé, et qui correspond en réalité au fichier informatique (pdf, ePub) du livre papier. Dans ce cas, la seule caractéristique spéciale du livre numérique, c’est d’être imprimé sur un écran au lieu de l’être sur du papier. Il perd certaines caractéristiques (épaisseur, odeur, poids, feuilletabilité, etc.) et il en gagne d’autres (mobilité, légèreté, cherchabilité, citabilité, etc.) Et puis il y a l’oeuvre numérique qui n’est plus un livre, qu’on appelle livre enrichi ou livre applicatif. Celui là embarque le texte comme l’une de ses dimensions, parfois comme point de départ mais pas forcément. Cette oeuvre là, même quand elle a des « pages » qui se « tournent » en référence au livre n’est pas tout à fait un livre, mais une oeuvre multimédia se matérialisant sur un écran, mobile ou non.

BONUS

Le nombre de lecteurs d’ebook a plus que doublé en six mois. Article de Livres hebdo

Débat : Peut-on dire du mal des livres lorsqu’on est blogueur ? (dernière partie)

Quel est d’après vous l’effet d’une mauvaise critique publiée sur votre blog ?

Lucie (Un petit bout de Bib(bliothèque)) : Elle mettra autant en valeur le livre critiqué qu’un billet dithyrambique.
Après tout ne dit-on pas que toute publicité est bonne à prendre…

Za (Le cabas de Za) : Restons modeste… Je ne sais pas, en moyenne, combien de personnes lisent un de mes articles – et j’avoue que cela ne m’intéresse pas vraiment. Mais je ne pense pas qu’une mauvaise critique de ma part serait très préjudiciable à la carrière d’un album.

Gabriel (La mare aux mots) : Je pense exactement comme toi Za… voire même plus. Je pense qu’une mauvaise critique peut quand même donner envie d’aller voir le livre en question et finalement faire que les gens l’achètent. Dans tous les cas je ne pense pas que quelqu’un qui pensait l’acheter se dise en voyant ma chronique « tiens je ne vais pas l’acheter finalement ». Même une mauvaise critique fait plus vendre que pas de critique du tout (parfois dans une librairie on se dit « tiens j’ai vu ce livre là » sans savoir ce qu’on en a dit et finalement on y prête plus attention qu’aux livres qu’on avait pas vus sur les blogs).

Pépita (Méli-Mélo de livres) : Une mauvaise critique : c’est une critique mal écrite ou une critique qui « descend » un livre ? parce que soyons modestes : nous ne sommes que des blogueurs et nos avis ne sont que nos avis…le seul risque, c’est d’avoir des commentaires qui critiquent à leur tour notre manière d’écrire ou notre façon de voir. Quant à la « carrière » d’un livre, il y a tellement de paramètres qui entrent en ligne de compte ! Et « tous les goûts sont dans la nature » comme on dit…

Dorot’ (Les livres de Dorot’) : L’effet d’une critique qui n’est pas flatteuse pour un livre sur mon blog? Peut être quelques commentaires des personnes qui ont aimé le livre. Peut être la curiosité de ceux qui ne l’ont pas lu.
Souvent ces commentaires disent: « je vais le lire quand même pour me faire mon propre avis ».
Des fois ceux qui ont aimé reconnaissent qu’il y avait une incohérence, ou des passages moyennement écrits, ou trop longs.
Vu le jeune age de mon blog, l’influence sur le destin d’un livre s’arrête là.

Gabriel (La mare aux mots) : Je confirme que les mauvaises critiques ramènent plus de commentaires que les bonnes critiques…

Céline (Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait LIVRESse) : Une critique « négative » comme « positive » DEVRAIT avoir le même impact! Le tout est de rester sincère et d’expliciter ses choix en veillant tant sur le fond que sur la forme! Bien évidemment, il y aura toujours des blogueurs qui chercheront à créer le buzz en rédigeant des chroniques assassines comme il y aura toujours des lecteurs qui se sentiront personnellement attaqués – comme si, en critiquant le livre qu’ils ont aimé, on remettait en cause leur propre qualité de lecteur! En toute chose, il faut raison garder! Partager nos lectures doit rester un moment de plaisir où chacun reste capable d’écouter et de respecter les avis d’autrui!

Nathan (Le carnet de lecture de Nathan) : Je suis d’accord avec Sophie ! Une critique négative est censée avoir le même impact. Selon moi elle peut amener à des discussions, à des débats mais en toute politesse. Le tout est que la critique doit être constructive comme on le disait à la question précédente …

Merci à tous d’avoir participé à ce débat.

Débat : Peut-on dire du mal des livres lorsqu’on est blogueur ? (quatrième partie)

Deux questions en une, pensez-vous qu’une critique doit être constructive et que pensez-vous des gens qui disent qu’un adulte ne peut pas critiquer un livre pour enfant car il n’est pas « la cible » ?

Za (Le cabas de Za) : Qu’entend-on par constructif ? Ce serait le genre de critique qui permettrait à un auteur d’avancer, d’évoluer ? Je ne suis ni écrivain ni illustratrice. Pour aller jusqu’à la caricature, je ne me vois pas faire une critique constructive, d’un album de Ponti que je n’aurait pas aimé ! Argumenter, en revanche, c’est autre chose.
Quant à la deuxième partie de ta question, il ne faudrait pas être naïf, les vraies cibles de nombre de livres pour enfants ne sont pas les enfants eux-même mais leurs parents. Qui a déjà vu un minuscule de deux ans réclamer un album sur le pot ? Un petit bout de trois ans faire un gros caprice pour avoir un livre qui traiterait la mort d’un proche ? On peut, on doit, en tant qu’adulte, critiquer les livres pour enfants, ne serait-ce que pour mettre les petits lecteurs à l’abri de la médiocrité…

Hérisson (Délivrer des livres) : Comme Za je ne me vois pas faire une critique constructive dans le sens où je donne des conseils à un auteur par exemple sur son écriture… après mes avis peuvent être constructifs dans le sens où ils apportent quelque chose aux lecteurs ou futurs lecteurs, et c’est plus cela mon objectif!
Les critiques de livres jeunesses par adulte sont parfois décriées et pourtant le monde du livre jeunesse ne peut pas se passer des adultes. De l’auteur à l’acheteur tous les intermédiaires sont adultes, même si le consommateur final, celui qui est la vraie « cible », est un enfant. Quand un adulte donne un avis sur un livre jeunesse il le fait bien sûr avec son expérience et son regard d’adulte, mais je crois que tous les adultes qui donnent leur avis sur des livres jeunesses le font parce qu’ils ont une sensibilité particulière envers cette littérature. Etude, métier ou simplement expérience familiale, les blogueurs « jeunesse » ne sont pas si éloignés que ça de la cible de ces livres!

Lucie (Un petit bout de Bib(bliothèque)) : D’abbord, constructif rime avec objectif. C’est pour moi le seul leitmotif.
Ensuite, l’adulte n’est pas la « cible » de l’histoire mais il est le réel prescripteur. Le porte-monnaie pour acheter le livre appartient à l’adulte et de ce fait cela lui donne un droit de regard sur les lectures des petits bouts. Et nous dans tout ça ? En tant que bloggueurs adultes ? Dans ce cas on revient à la question de la légitimité de la littérature jeunesse ? Ce sont des adultes qui écrivent et illustrent les histoires, pourquoi n’aurions nous pas le droit de les lire. Quand est-il du magnifique travail de La Joie par les Livres devenue le département jeunesse de la Bibliothèque Nationale de France ? Il publie des critiques, des essais, des analyses sur la littérature de jeunesse… et ce sont des adultes !
Et puis ceux qui posent cette question n’ont pas gardé leur âme d’enfant et c’est fort regrettable.

Pépita (Méli-Mélo de livres) : Constructif veut dire faire preuve d’esprit critique pour moi. Et un esprit critique se doit de peser le pour et le contre, de mettre en avant le positif et le négatif. Donc, oui, une critique doit être constructive et nuancée. Et c’est un art difficile ! Car il peut être banalisé.
Quant à la légitimité d’un adulte à critiquer les livres pour enfants, elle est pour moi normale. Ce sont d’abord des adultes qui les imaginent, les conçoivent et les fabriquent. Et quand on aime la littérature jeunesse, on aime aussi les enfants, le public dit « cible » de cette littérature. Cela pose aussi le débat récurrent sur la littérature jeunesse : est-elle une vraie littérature ? J’aurai envie de dire que tous les adultes devraient lire de la littérature jeunesse, cela changerait leur regard sur la lecture tout simplement.

Dorot’ (Les livres de Dorot’) : Lucie dit que le constructif rime avec l’objectif…
Pas forcement…nos critiques sont purement subjectives, et c’est ça qu’on revendique autant qu’un « lecteur-non-formé-à-la-critique-de-la-littérature-jeunesse ». On revendique la possibilité de dire du mal des livres, suivant notre ressenti personnel, donc subjectif. J’espère, que nos critiques sont en même temps constructives pour les auteurs…
Ensuite, je ne pensais même pas qu’il y avait des personnes qui trouvent que des adultes ne devraient pas juger les livres pour les enfants.Comme vous l’avez déjà dit , c’est les adultes qui choisissent la plupart de temps les lectures de leurs enfants. Et les albums pour les enfants peuvent toucher tout le monde, petits et grands. Une belle occasion d’échange avec les enfants.
Ensuite,quand on parle de romans jeunesse c’est parce qu’on les lit, on les aime ou pas, tout comme les ados qui lisent les romans estampillés « adulte » .

Gabriel (La mare aux mots) : Je suis d’accord avec Za, moins avec Dorot’ sur le sujet d’être constructif. Je n’ai pas à faire une critique constructive, je ne suis pas un prof, et le livre est déjà « construit » il ne va pas être modifié parce que j’ai dit telle chose… et qui suis-je pour vouloir le changer ? En quoi mon regard serait plus important que celui de l’auteur ? En quoi je serai mieux placé. Certaines de mes mauvaises critiques ont eu le droit à ce commentaire « ce n’est pas une critique constructive » mais tant mieux ! C’est mon ressenti, c’est tout.
Pour ce qui est de « tu es un adulte donc tu ne peux pas critiquer un livre pour enfants » je l’ai lu plusieurs fois… et toujours sur des critiques négatives, c’est drôle… Quand on dit du bien on est tout de suite plus légitime ! Sur le blog du cimetière des lénifiants par exemple je l’ai lu à plusieurs reprises. Moi on me l’a dit aussi… Comme je dis toujours de la même façon que nous éduquons leurs goûts en terme de nourriture (les enfants, s’ils n’y avaient qu’eux à choisir, ne mangeraient que des pâtes ou des frites !) nous nous devons d’éduquer le goût des enfants en matière de littérature (ils ont quand même souvent tendance à aller vers les livres qui « clignotent » quand même…).

Sophie (La littérature de Judith et Sophie) : Constructive, pas nécessairement. Argumentée oui. Pour moi, une critique constructive viserait à conseiller l’auteur sur son style par exemple. Hors en tant que lecteur, le blogueur peut se permettre de n’être que dans le ressenti si il le justifie un minimum.
Pour ce qui est de cette question sur la cible des livres pour enfants, je rejoins les autres qui disent que la cible, c’est avant tout les adultes. C’est bien connu que les éditeurs pensent le livre pour plaire aux acheteurs, qui sont rarement les enfants. Pour ce qui est du blogueur en littérature jeunesse, je pense que c’est comme tout. Certes les livres sont destinés aux enfants, mais en tant qu’adultes, on peut aussi acquérir une véritable culture dans ce domaine qui nous permet de pouvoir les critiquer. A mon avis, nombre de blogueurs en littérature jeunesse sont prescripteurs par ailleurs : parents, bibliothécaires, instits… ; et donc on a souvent un minimum de contact avec les enfants qui nous permettent de dire ce qui fonctionne ou non.

Céline (Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait LIVRESse) : Un avis est forcément subjectif! Maintenant, pour rester crédible et humble, il s’agit de l’étayer le plus possible en se référant au maximum au texte lui-même, en relevant les points positifs et négatifs, en rappelant qu’il ne s’agit que de « notre » avis et que les autres apprécieront peut-être, sans doute, certainement, tel ou tel aspect. Pour moi, c’est ça, « être constructif »!
Quant à savoir si l’adulte a le droit de critiquer, bien oui! Entre le livre et l’enfant, il n’y a d’ailleurs que des adultes: l’auteur, l’illustrateur, l’éditeur, le distributeur, le libraire, le bibliothécaire, le parent, l’enseignant! Chacun, à son niveau, fait sa critique et décide de promouvoir tel titre qu’il juge de qualité. Le rôle du blogueur s’inscrit dans cette optique, celle du « passeur ». Comme le proclame l’éditeur François Ruy-Vidal:
« Il n’y a pas d’art pour l’enfant, il y a de l’Art. Il n’y a pas de graphisme pour enfants, il y a le graphisme. Il n’y a pas de couleurs pour enfants, il y a les couleurs. Il n’y a pas de littérature pour enfants, il y a la littérature. En partant de ces quatre principes, on peut dire qu’un livre pour enfants est un bon livre quand il est un bon livre pour tout le monde. »

Sandra (Maman Baobab) : J’adhère totalement aux propos de Za, relayés ensuite par quelqu’uns d’entre vous. Je vois mes chroniques comme mon point de vue, je peux éventuellement relayer celui de mes enfants. Il me semble aussi que je n’ai ni vocation ni prétention à remettre en question le travail d’un auteur ou d’un illustrateur. Je ne vois donc ni en quoi ni surtout pourquoi ma critique serait ou devrait être constructive, et pour qui ? Elle peut être utile pour mon lecteur par contre. Ceci dit, libre à moi de picorer, de butiner dans les rayons livres pour enfants, dans les livres pour enfants tout court, de me sentir bien, de me sentir émue, de me sentir vibrer, d’aimer, de ne pas aimer, de ne pas adhérer à un livre, à un thème, à un univers, à des idées. Qu’on ne me dise pas qu’il n’y a pas d’idéologie dans les livres pour enfants. Ils en sont vecteurs, nous en sommes porteurs, receveurs. Ou pas. J’utilise le livre. J’utilise le livre parfois pour faire passer un message, une idée, un point de vue. Le livre pour enfant est donc bien fait aussi (peut-être pas seulement, mais aussi) pour moi, parent. POur moi, adult. Pour moi, blogueuse, croqueuse de livres pour… enfants ! Je constate aussi, qu’on ne se dirige pas forcément vers les mêmes livres, mes enfants et moi, dans une librairie ou dans une bibliothèque. Nos points de vue convergent ou divergent, ils ont leur liberté de lecteur, moi aussi. Vient ensuite ma liberté de blogueuse, encore une étape.