Lecture commune : Les mystérieux enfants de la nuit, de Dan Gemeinhart

C’est par hasard que Lucie et Héloïse – Helolitla se sont rendu compte qu’elles lisaient le même roman au même moment. Une belle occasion à ne pas manquer pour en faire une lecture commune !

Héloïse : On va commencer simplement : est-ce que tu connaissais cet auteur, et si non, qu’est-ce qui t’a donné envie de lire ce livre ?

Lucie : Oui, je connaissais Dan Gemeinhart pour avoir lu L’incroyable voyage de Coyote Sunrise et La vérité vraie. Je crois que ce sont ses seuls romans traduits en français. Et toi ?

L’incroyable voyage de Coyote Sunrise, Dan Gemeinhart, Pocket, mars 2020.

Héloïse : J’ai adoré L’incroyable voyage de Coyote Sunrise, je ne pouvais pas passer à côté de celui-ci ! Je viens d’ailleurs de découvrir qu’une suite, Coyote perdue et retrouvée, allait paraître en octobre 2024. J’ai hâte ! Je me note La vérité vraie, je ne l’ai pas lu. 

Lucie : Donc, comme moi, tu es un peu à l’affût des nouveaux romans de cet auteur ? Et quelle a été ta première impression face à la couverture ?

Héloïse : Oui, il fait partie des auteurs que je compte suivre assidûment ! J’aime beaucoup la façon dont il aborde la thématique de la famille, et l’aspect foufou de ses histoires (tout en délivrant de beaux messages). La couverture est mystérieuse, comme le titre… et très poétique, je trouve, avec ces lucioles.

Les mystérieux enfants de la nuit, Dan Gemeinhart, Pocket jeunesse, mai 2023.

Lucie : Justement, entrons dans le vif du sujet : cette histoire s’ouvre sur une épigraphe qui s’adresse directement au lecteur et parle de son âme. Qu’as-tu pensé de cette entrée en matière ?

Héloïse : J’ai trouvé que Dan Gemeinhart commençait de manière onirique, presque philosophique. D’ailleurs, les « âmes » sont mentionnées tout au long du roman…

Lucie : Il est en effet beaucoup question d’âmes et de choix dans ce roman. L’auteur a choisi de souligner certaines péripéties en interpellant le lecteur et en lui suggérant des “leçons” à retenir des aventures des personnages. Je suis curieuse de connaître ton ressenti sur ces à apartés.

Héloïse : Je les ai appréciés, un peu comme un refrain qui évolue, et qui progresse petit à petit.  C’est comme si, d’une certaine manière, l’auteur voulait donner un ton universel à cette histoire, ne se contentant pas de donner des noms de personnages… Enfin, ce n’est que mon ressenti.
On a des âmes perdues, qui se sentent seules, se cherchent, et se trouvent. C’est positif, plein d’optimisme, un peu comme cet épigraphe qui invite à croire en soi.

« Toutes les âmes, sans exception, méritent d’avoir un chez-soi et une famille. Même la tienne. Particulièrement la tienne. Toutes les âmes méritent amour et amitié. Oui, même la tienne. Toutes les âmes méritent de trouver leur place. Tous les oiseaux, un nid. Mais parfois, il faut chercher un peu. Au fond, c’est peut-être de ça que parlent toutes les histoires.
Celle-ci ne fait pas exception à la règle. »

Et toi, qu’en penses-tu ?

Lucie : Pour être honnête, j’ai trouvé ces passages vraiment trop nombreux. Ils sont jolis et pleins de bons sentiments. L’idée semble clairement être de donner confiance à des jeunes lecteurs qui en manquent, et c’est important de le faire. Mais en tant que lectrice adulte (et donc pas public visé, il faut le rappeler), j’ai trouvé que cela plombait un peu le récit. J’aurai préféré qu’il y en ait moins !

Héloïse : Cela peut se comprendre !

« […] parfois, une âme ignore sa propre grandeur. Jusqu’à ce qu’elle soit forcée de la découvrir. »

Héloïse : Et qu’as-tu pensé des titres à chaque début de chapitre ? Je les ai beaucoup aimés, je trouve que cela amène de l’humour, et cela m’a aussi fait penser aux anciens textes…

Lucie : Oui, moi aussi ! On en a rigolé avec mon fils qui a comparé ce procédé à ce que fait Jules Verne : il annonce systématiquement ce qu’il va se passer dans le chapitre qui arrive, quitte parfois à divulgâcher. Dan Gemeinhart fait cela de manière plus légère, en laissant du suspens, alors cela m’a plu. Il m’est parfois arrivé de revenir vérifier le titre du chapitre après l’avoir terminé parce que je n’avais pas réussi à anticiper ce qui allait se passer. Donc, c’est bien fait !

Le Tour du monde en 80 jours, Jules Verne, éditions Hetzel, 1872.

Héloïse : Oui ! Je pensais aussi à Candide de Voltaire.

Lucie : Tout à fait ! Entrons dans l’histoire à proprement parler à présent : dès le premier chapitre, l’ambiance est très particulière. Il fait nuit, le héros a été réveillé par un puissant sentiment de solitude, des enfants qui donnent l’impression de se cacher emménagent… et les noms de ville (Bourg-Boucherie) et de rue (Sanguinistre) sont particulièrement évocateurs. Te souviens-tu de tes impressions en découvrant cela ?

Héloïse : J’ai trouvé tout ceci bien sombre du départ et puis, assez vite, j’ai pensé aux contes : un héros solitaire, qui se sous-estime, sept enfants (ce chiffre !) perdus, livrés à eux-mêmes, qui débarquent mystérieusement dans la forêt… Pas toi ? Il y a un aspect sanglant avec tous ces noms, j’ai repensé à notre lecture commune du dernier roman de Flore Vesco – même si on part ensuite dans une toute autre direction. 

Lucie : Tout à fait, tu as raison ! Je n’y avais pas pensé mais maintenant que tu le dis c’est évident. D’ailleurs, comme dans un conte, les personnages jouent des rôles prédéfinis et s’y tiennent un long moment avant d’en dévier ; et les méchants sont un brin manichéens. As-tu été gênée par ce côté “figé”, avant qu’il ne devienne l’un des ressorts dramatiques de l’histoire ?

Héloïse : A vrai dire, je n’y avais pas prêté attention, il faut dire que j’ai lu ce roman très rapidement… Mais le grand méchant (loup) est effectivement très “caricatural” : un prédateur dangereux, borné, froid et insensible.

Lucie : Je pensais aussi à Donnie, l’autre méchant qui harcèle Ravani et ne semble jamais vouloir évoluer même si l’auteur lui accorde quelques excuses pour son comportement. En fait, pour moi, ces personnages un peu caricaturaux sont une réponse au jeu d’acteurs des Vagabonds qui se glissent dans un rôle et jouent la comédie de la normalité. L’écart entre les deux fait sens, il me semble. Tout comme ces habitants de Bourg-Boucherie qui sont dans une tradition un peu étouffante : tous répètent inlassablement les mêmes gestes, les mêmes postures, sans tenir compte de leurs envies profondes.

Héloïse : Oui, cela crée un équilibre, en quelque sorte. Et les sept Vagabonds, en entraînant Ravani, vont bousculer ce “train-train”, cette routine mortifère. 

Lucie : Justement, nous n’avons pas encore parlé de Ravani. As-tu envie de présenter le personnage principal ?

Héloïse : C’est un garçon sensible, attentif, qui vit seul avec ses parents. Il déteste la violence, n’aime pas se rendre à l’abattoir (où travaille son père). Ce qu’il aime, c’est créer des nichoirs à oiseaux. C’est un enfant très solitaire, très seul. 

« Ce garçon est le héros de notre histoire. Ou plutôt, l’un de ses héros. Nul n’aurait été plus surpris de l’apprendre que lui. Il aurait eu du mal à imaginer quelqu’un de moins héroïque. »

Lucie : Je trouve que la construction des cabanes à oiseaux est une très belle trouvaille. Elle dit immédiatement la minutie et la solitude de Ravani, mais aussi l’attention qu’il porte aux êtres fragiles.

Héloïse : Oui, elle montre son attachement aux animaux. C’est d’ailleurs un ouvrage qui dénonce la souffrance animale. Les passages dans l’abattoir sont assez sanglants, je ne le conseillerai pas aux plus jeunes…

Lucie : C’est vrai, même si en fait on ne “voit” rien concrètement, l’imagination de Ravani ne nous épargne pas grand-chose. De ce point de vue (dénonciation de la souffrance animale), il m’a fait penser au premier Jefferson, de Jean-claude Mourlevat.

Jefferson, Jean-Claude Mourlevat, Gallimard Jeunesse, mars 2018.

Lucie : Il y a d’autres personnages importants (et vraiment très chouettes) dans ce roman : les Vagabonds Virginia, Colt, Annabel, mais aussi Tristan, Beth, Benjamin, sans oublier les habitants du bourg Hortense Wallenbach, Fred Frotham et Lee Chin. As-tu un préféré ?

Héloïse : J’aime beaucoup Ravani et Virginia, même si les autres sont chouettes, et le boulanger, M. Chin. J’aime beaucoup son évolution. Et toi ?

Lucie : Évidemment Ravani et Virginia l’emportent, leur binôme fonctionne tellement bien ! Mais j’avoue un petit faible pour Hortense Wallenbach, figure de l’auteure frustrée qui tient la gazette d’un bled où il ne se passe rien, mais se plaît à inventer chaque jour des péripéties délirantes. J’aime aussi l’évolution des autres habitants et le fait qu’ils parviennent à sortir du rôle figé dans lequel ils étaient piégés.

Héloïse : Oui, c’est un ouvrage qui montre que tout le monde – ou presque – peut changer, et trouver sa voie. 

Lucie : Malgré mes critiques sur le côté “âmes” (sans aucun sous entendu religieux ni de la part de l’auteur ni de la mienne d’ailleurs), c’est un message qui m’a beaucoup plu. Surtout qu’il est associé à la récurrence du “Bienvenue dans ce jour. Tu y es déjà” : le côté on attend un jour propice pour réaliser nos rêves, nos projets, etc., mais il faut aussi savoir saisir les occasions qui se présentent de se lancer !

Héloïse : Tout à fait !

Le truc, c’est que ce monde est peuplé de toutes sortes de gens, et que tu n’y peux pas grand chose […]. Tout ce que tu peux faire, c’est décider le genre de personne que tu es, toi, et t’y tenir. Ne te préoccupe pas des autres.


Héloïse : Ce roman nous apporte une belle dose de rebondissements farfelus, y en a-t-il un qui t’a marquée ? Personnellement, j’ai adoré l’idée de la course sur l’eau… et du moyen de transport choisi ! C’est délicieusement irrévérencieux. 

Lucie : Tu as raison, les péripéties sont inhabituelles pour la plupart ! Mais le tout garde tout de même une certaine cohérence et cela va moins loin que dans certains contes (encore que…). Je suis d’accord avec toi, la course est extra. J’ai aussi beaucoup aimé la leçon de chasse à la grenouille qui est une entrée en matière très jolie pour créer un lien entre Ravani et les Vagabonds.

Lucie : Je saute sur l’occasion de parler un peu des Vagabonds. Qu’as-tu pensé de leur histoire et du fonctionnement de leur groupe ?

Héloïse : Leur histoire est triste, touchante aussi. Difficile de ne pas trop en dire, mais ce concept de la famille de cœur, celle que l’on se choisit (le fameux trope de la “found family”) me parle beaucoup. J’aime cette idée d’entraide. Et toi ?

« Une famille qu’on a trouvée, c’est aussi beau qu’une famille dans laquelle on est né. Peut-être même davantage. Après tout, les histoires parlent de choix, et choisir de devenir une famille, c’est la plus belle fin à laquelle on puisse arriver. »

Lucie : C’est même plus que de l’entraide, ces enfants sont liés d’une manière étonnante, il faut lire le roman pour la découvrir et en saisir toute la beauté. Comme tu le disais en introduction, la thématique de la famille, et plus particulièrement de la famille de cœur est centrale dans les romans de Dan Gemeinhart (en tout cas dans tous ceux que j’ai lus). J’ai d’ailleurs beaucoup aimé la relation qui lie Ravani à ses parents bien qu’elle soit assez peu développée. 

Héloïse : Un passage m’a beaucoup touchée, entre Ravani et son père. Celui où ce dernier lui explique comment réparer le nichoir. J’ai trouvé ses mots très beaux. La notion de famille est centrale dans ses romans, avec la confiance en soi. Tout s’organise autour de ces clés. Non ? 

Lucie : Je vois très bien de quel passage tu parles, il est très touchant ! J’ai aussi aimé le nouveau regard que jette Ravani sur la toile peinte par sa mère suite à une remarque de Virginia. Ces personnages de parents sont à peine esquissés mais pourtant très incarnés. Je trouve que c’est l’un des grands talents de l’auteur de donner quelques clés sur des personnages mais qu’ils nous touchent immédiatement. Et oui, je suis d’accord avec toi, la confiance tient une place importante aussi dans ces romans.

Héloïse : Effectivement, on “visualise” très vite les personnalités chez ses personnages. Et pourtant, il y en a beaucoup ! Le tout sans longues descriptions non plus. C’est très fort. 

Lucie : Pour finir, la question traditionnelle : à qui conseillerais-tu cette histoire ?

Héloïse : Ahah ! Et bien, à tous ou presque, à partir du collège. Et toi ?

Lucie : Oui, pas trop tôt à cause des passages dans l’abattoir (surtout les derniers) comme tu l’évoquais, mais je crains que chez les plus âgés (lycée) les fameux passages sur les âmes soient mal perçus. Ou alors à des lecteurs qui s’y attendent et sont prêts pour ça. Quoiqu’il en soit, c’est une très jolie histoire et ce serait dommage de s’arrêter à un gimmick, d’autant qu’il n’est pas répétitif dans le contenu.

Héloïse : Dans tous les cas, il est parfait pour le niveau collège !

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Et vous, avez-vous lu ce roman ou d’autres titres de Dan Gemeinhart ? Vous tente-t-il ?

Nos coups de coeur de février

Qui dit février, dit toujours beaucoup de bouquins dévorés (y’a pas que les crêpes dans la vie !).

A l’ombre du grand arbre, nos piles à lire n’ont pas diminuées, mais on a toujours des coups de coeur à vous partager !

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C’est en profitant de la douceur de quelques journées ensoleillées qu’Alice  s’est envolée vers le Grand Ouest pour suivre les aventures d’Abigaël Stenson, femme hors-la-loi indomptable ! Kidnapping, règlements de compte, chevaux au galop, poussière, saloon, … pour au bout du compte prôner une seule vérité, celle de la liberté.

Marion Brunet ne se contente pas de l’a-peu-près, rien à dire, tout est parfait !

Sans foi ni loi de Marion Brunet. PKJ, 2019

(Pépite du Salon de Montreuil)

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Pépita dans son Méli-Mélo de livres a encore bien du mal à choisir car être déjà sélectif dans ses lectures, c’est toutes les aimer ! Mais quand même, le dernier roman de Gary D. Schmidt a encore fait mouche à travers cette relation hors-norme et pleine de subtilités entre un majordome anglais et un jeune garçon américain. Ajoutez une dose de cricket et le charme opère !

Le majordome et moi, Gary D. Schmidt, École des loisirs, 2020

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Après un mois de janvier placé sous le signe de La Passe-Miroir, la tétralogie de Christelle Dabos parue chez Gallimard Jeunesse, HashtagCéline s’était concoctée une PAL très variée pour le mois de février. Au final, c’est le roman d’Alexandre Chardin paru aux éditions Casterman qui va l’avoir le plus marquée. Le cercueil à roulettes est un texte difficile et émouvant, tendre et décalé qui aborde la mort et le deuil d’une façon assez inédite. Déroutant mais très touchant.

Le cercueil à roulettes d’Alexandre Chardin, Casterman, 2020

Son avis ICI.

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Bouma s’est plongée dans les zones les plus profondes de la mer avec des personnages marins aux ressources insoupçonnées. Entre Rencontre du troisième type et Sauvez Willy, Sigrid Baffert emmène ses lecteurs dans une aventure peu commune.

La Chose du MéHéHéHé de Sigrid Baffert, MeMo, 2019

Son avis ICI

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Que de trésors en ce mois de février ! Isabelle a adoré se faire prendre de court par ce road-trip captivant qui nous partage entre l’envie de tourner les pages pour connaître le fin mot de l’histoire de l’improbable duo de protagonistes, et celle de ralentir la lecture pour goûter la poésie de cette grande vadrouille, les dialogues ciselés et des personnages qui font voler en éclat tous les stéréotypes…

Nos mains en l’air, de Coline Pierré, Le Rouergue, 2019

Son avis ICI

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Et vous ? Quels sont les livres qui vous ont fait vibrer, trembler, rêver en février ?

Coups de cœur de mai

À chaque fois que cette rubrique du 1er lundi de chaque mois arrive, on se dit déjà ?!

Eh oui, le joli mois de mai est terminé mais il a été riche de lectures par ici : l’occasion de sortir de ses murs, de lire dehors, de sortir chaises longues et tables de jardin, pour savourer le plaisir de dénicher des pépites aussi en extérieur.

Alors, les voici ces merveilles du mois de mai !

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Chez Pépita dans son Méli-Mélo de livres, ce n’est pas un mais deux coups de cœur et impossible de se résigner à n’en mettre qu’un !

Les Emerveillements de Sandrine Kao chez Grasset jeunesse continuent à m’habiter et me nourrir de leur ineffable beauté. Mon avis ici.

Et puis il y a eu aussi la rencontre avec Victor et Yazel dans Nos mains en l’air de Coline Pierré au Rouergue et ces deux-là sont devenus mes amis. Mon avis ici.

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Chez Alice, la tendresse et l’humour de Marie Pavlenko résonnent encore après la lecture d’Un si petit oiseau : touchée en plein cœur par 400 pages d’émotion pure. L’avis de Pépita ici et celui de HashtagCéline ici.

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Chez Sophie de La littérature jeunesse de Judith et Sophie, c’est le roman de Agnès Laroche La vie dure trois minutes qui a livré son lot d’émotions le temps d’un tango et bien plus ! Son avis ici et chez Aurélie ici.

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Chez Solectrice, c’est la tendresse du jeune Ari pour son ami Dante et toutes ces questions que l’on se pose, quand on découvre ceux qui nous entourent, qui ont charmé ce mois de mai avec Aristote et Dante découvrent les Secrets de l’Univers de Benjamin Alire Saenz. Chez Pépita ici.

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Chez HashtagCéline, c’est le nouveau livre de Flore Vesco qui a « enluminé » son mois de mai. Ecrit à la manière « du temps jadis », L’Estrange Malaventure de Mirella (Ecole des Loisirs) nous ramène quelques siècles en arrière, à l’époque médiévale. Ce roman est une réussite sur le fond et la forme. Son avis ici ainsi que ceux de Pépita et d’Isabelle ici et .

 

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Sur leur île, Isabelle et ses chasseurs de trésors ont pris beaucoup de plaisir à relire un roman culte de la grande Astrid Lindgren: Karlsson sur le toit (Livre de Poche). Délicieusement subversif et d’une saveur intemporelle ! Un must-read en Europe du Nord qui gagnerait à être plus connu en France… Son avis ici.

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Sur les étagères du Petit Bout de Bib(liothèque) de Bouma, c’est une aventure hors du commun dans le Marseille des années 60 qui a retenu toutes les attentions. Dépaysement garanti avec Charlie Fisher et le gang des Whiz. Son avis ici.

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Chez Aurélie, ce fut un coup de cœur pour un éditeur : les éditions format.

Des albums philosophiques et un documentaire, venus tout droit de Pologne. Découvrez son article ici

 

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Pour Yokolulu, le livre qui l’a charmée ce mois-ci est un roman graphique racontant l’exil d’un jeune Nigérien vers l’Europe. On y trouve un beau graphisme et un héros attachant, plein de belles qualités. A découvrir : Migrant de Eoin Colfer, Andrew Donkin et Giovanni Rigano aux éditions Hachette. L’avis de Yokolulu ici.

Résultat de recherche d'images pour "muguet brin"Sur la Pile de Livres à Chroniquer de la collectionneuse de papillons, gros coup de coeur pour un livre prêté par Pépita : Autour de Jupiter de Gary D. Schmidt publié par Bayard Jeunesse.

Un roman d’une extrême sensibilité qui nous fait entendre la voix de Jack, jeune adolescent dont la famille va accueillir le temps d’une année scolaire un jeune homme rejeté de tous, Josef, dont l’histoire, que nous découvrons au fil des pages, est absolument bouleversante.

Pour en savoir plus l’avis de Pépita par là.

En espérant que ces coups de coeur vous auront donné des idées..

Lecture commune: « Wonder »de R.J.Palacio

wonder pocket« Je m’appelle August. Je ne me décrirai pas. Quoi que vous imaginiez, c’est sans doute pire. »
Il y a des livres qui nous interpellent dès la couverture. Après vient la lecture, la magie opère ou pas. « Wonder » nous a plu, il a même été un coup de cœur pour certaines d’entre nous.

Sophie-La Littérature jeunesse de Judith et Sophie, Kik-Les lectures de Kik et Pépita-Méli-Mélo de livres ont accepté d’en discuter avec moi

Dorot’: Qu’est-ce qui vous a donné envie de lire ce livre?

Sophie: Ce qui m’a donné envie de lire c’est bien sûr l’avis unanime des blogueuses ici présentes. Leur enthousiasme était tel que j’ai été curieuse de savoir ce que ce livre avait de si bien. J’avais quand même une petite réserve parce que la quatrième de couverture annonçait un récit sur un enfant avec des malformations et j’avais peur qu’il soit trop dur par rapport à mes envies du moment.

Pépita: En faisant des recherches sur les nouveautés à paraître, je suis tombée sur ce livre et j’ai eu tout de suite envie de le lire : ma fibre maternelle sans doute…mais je suis aussi très sensible à tout ce qui touche à la différence.

Kik: J’ai vu cette couverture ça et là sur internet. Puis après quelques temps, j’ai lu la quatrième de couverture, et puis je me suis dit: « Je dois le lire. » En dehors du monde de la littérature pour la jeunesse, je vois des enfants toute la journée pour les soigner, notamment leur bouche. Alors pour moi, c’était comme une évidence. je devais lire ce livre, pour en discuter avec des enfants qui pourraient aborder le sujet avec moi. Je devais lire ce livre, car la personne principale pourrait être un de mes patients. Je devais lire ce livre, car il semblait être un livre incontournable en version originale. Je devais lire ce livre… Je l’ai lu. Il y a des dizaines d’autres raisons de lire ce livre, mais celles-ci étaient largement suffisantes pour l’apporter en vacances.

Dorot’: Un sujet difficile, malformation… en fait, il parle de quoi ce roman?

Pépita: Ce roman nous parle d’un jeune garçon, August, dit Auggie, qui effectivement souffre d’une malformation faciale depuis sa naissance. Il a subi de très nombreuses interventions chirurgicales et le fait qu’il soit en vie tient du miracle. Il n’a jamais été scolarisé. Cette année, il va entrer en sixième dans le collège de son quartier…Se confronter au regard des autres, c’est déjà très difficile mais là, c’est l’année du grand saut pour lui et sa famille, car il est très entouré.
Au-delà de cette malformation, c’est avant tout un livre qui nous dit à tous, car on est tous concernés, de ne pas juger sur les apparences. De voir au-delà. D’aimer les gens pour ce qu’ils sont. A l’intérieur. D’aimer avec son cœur et non pas avec ses yeux.

Sophie:  Pépita l’a très bien résumé. Je rajouterais juste que c’est un livre qui montre le pire comme le meilleur de l’être humain.

Kik: Le résumé de l’histoire a été fait. Sur ce point je n’ai rien à ajouter. Au delà des faits, il y a l’idée de gentillesse et d’altruisme (kindness en version originale). La fin du roman très poignante, mais dont je ne révélerai rien, fait ressortir ce lien entre les personnages. Ce roman fait réfléchir sur ses propres actes, et sur le regard que l’on peut porter sur les autres.

Dorot’: L’entrée au collège d’August ne se fait pas sans les préparations…Les trois collégiens choisis par le proviseur sont censés l’encadrer et  l’aider. Ça vous a plu cette façon de procéder?

Pépita: Dans l’esprit, j’ai trouvé cela plutôt louable de sa part, disons que ça part d’un bon sentiment. Mais on se rend bien compte que ça ne colle pas bien entre eux et pour Auggie, c’est assez terrible…Au lieu de les choisir lui-même, le volontariat aurait peut-être été préférable. C’est ce que m’a affirmé ma fille collégienne qui a lu le livre aussi… Je pense que pour certains, c’était plus qu’ils ne pouvaient assumer. Pas assez préparés ou alors aussi une question d’éducation (on le voit pour Julian). Pour d’autres,au contraire, cela leur a permis de s’affirmer par rapport aux autres et à eux-mêmes, je pense en particulier à celui qui va devenir le meilleur ami d’August. On peut difficilement juger ceci dit. Car soi-même, comment aurions-nous réagi ou nos propres enfants ? C’est une question que je n’ai pas cessé de me poser durant cette lecture.

Sophie: Comme Pépita, j’ai trouvé cette idée plutôt bonne. Ça aurait pu être une entrée en matière plus douce si ça s’était bien passée. Malheureusement, les élèves n’étaient vraisemblablement pas les bons.

Kik: Je n’y avais pas spécialement pensé en réalité. Ça ne m’a pas surprise. Je trouve bien de faire découvrir les lieux à un nouvel élève, comme les CM2 qui peuvent se rendre aux journées portes ouvertes du collège. Les relations entre enfants ne sont pas souvent ce que prévoient les adultes. Cela ne se passe pas si bien, mais d’un autre côté, comment cela aurait pu se passer parfaitement ? Il était évident que le sujet de son physique serait abordé, enfin pour moi, cela était évident.

Dorot’:  Kik l’a dit, l’inscription d’August au collège ne pouvait pas passer inaperçue, même si pas mal d’élèves le connaissaient déjà de vue…En même temps on l’a jamais préparé à ça…on ne lui a pas dit bien avant qu’il va falloir y aller…c’est un peu une surprise…bonne ou mauvaise pour Auggie?

Pépita: C’est vrai : tu as raison de soulever ce point Dorot. En même temps, je me dis que si ses parents n’avaient pas provoqué cette inscription au collège, Auggie n’y serait sans doute jamais allé. Sa première réaction, et on le comprend, est de refuser, surtout que ses parents lui ont caché leur démarche. C’est donc une mauvaise nouvelle pour lui. Mais très vite, il finit par accepter de rencontrer le directeur. C’est dur pour lui. Il sait qu’en faisant ce pas-là, il enclenche un changement dans sa vie, un changement important. Il veut encore reculer après cette entrevue si je me souviens bien. Mais ses parents insistent avec tact. Et il accepte. A contre cœur, mais il accepte. Comme si tous pressentaient que ce choix-là, très difficile, sera bénéfique pour lui. Lui y compris: il sait bien au fond de lui-même que ses parents ont « raison » même s’il préfère la sécurité de son cocon familial. N’est-ce pas le rôle des parents parfois que de savoir ce qui est bon pour leurs enfants par devers-eux, même s’ils savent les mettre en difficulté ?

Sophie: Je pense qu’au fond de lui, Auggie savait que c’était bon pour lui. Et puis c’est un pas de plus vers la normalité qu’il souhaite tant qu’on lui reconnaisse. Ne pas être scolarisé, c’était mettre l’accent sur la différence.
Mais Auggie avait aussi conscience des difficultés. C’est un garçon très intelligent, il connaissait le regard des gens dans la rue et il savait qu’à l’école, ce serait pareil et même pire, c’est pour cela que sa première réaction fût négative.
En fait, aller au collège, pour Auggie, c’était à la fois être un peu plus comme les autres enfants et en même temps se confronter aux regards sur sa différence.

Dorot’: La première année d’école d’August est racontée par des personnes différentes. Plus au moins proches de lui. Cette narration vous a plu?

Pépita: Oui, beaucoup car en alternant les points de vue, le lecteur peut faire des recoupements, et cela donne un rythme intéressant à l’histoire. On n’est pas focalisé aussi toujours directement sur August mais la voix des autres donne un éclairage particulier. Par exemple, j’ai beaucoup aimé les passages sur la souffrance culpabilisante de sa grande sœur. Et on s’aperçoit du coup que chacun, à sa façon, souffre dans son entourage.

Sophie: J’ai beaucoup aimé ce mode de narration aussi. Déjà j’ai trouvé intéressant que les passages se croisent. Ainsi on n’a pas x fois la même scène vu par des personnes différentes. Par contre, l’auteur a su doser, certains passages sont vus par plusieurs personnages avant de continuer l’histoire. En plus d’un point de vue autre que celui d’August, j’ai trouvé que ça permettait aussi d’alléger un peu ! Il faut l’avouer, la vie d’August n’est pas simple et peut-être que le roman entier vu par lui aurait été trop chargé d’émotions (qui ne manquent déjà pas).
En tout cas, cette narration est très bien menée et vraiment pertinente.

Kik: Comme Sophie, je pense qu’une narration avec le seul point de vue d’August, aurait été moins forte. Dans ce roman, l’alternance des points de vue, qui sont complémentaires et pas redondants, donne de la dynamique et un intérêt supplémentaire. Tous les lecteurs peuvent se retrouver dans au moins un personnage. J’ai bien aimé lire les narrations des amis, qui donnent un regard encore différent de celui de la famille.
Cette particularité du roman est quelque chose qui m’a beaucoup plu, lors de la lecture.

Dorot’: Les chapitres racontés par Olivia, la sœur d’August, m’ont beaucoup émue. J’ai trouvé qu’elle était un peu abandonnée à elle-même dans cette histoire…Le handicap d’August justifie tout ça selon vous?

Pépita: Tout comme toi, ces chapitres m’ont beaucoup émue aussi. Je les ai trouvés très juste. Ce n’est déjà pas simple une fratrie ! Olivia espérait une nouvelle vie pour elle au lycée, ne plus être la sœur de …Elle culpabilise énormément de prendre ce virage-là. Mais en même temps, c’est vital pour elle. Il me semble que sa mère ne l’a pas très bien compris (passage où elle s’aperçoit qu’Olivia ne leur a pas parlé du théâtre). Spontanément, on se dit que non, ce n’est pas justifié, pas à ce stade-là : August est plus grand, son état de santé s’est stabilisé semble-t-il, il serait normal que la grande sœur puisse aussi avoir sa place. Dans toutes les familles confrontées à la maladie ou au handicap d’un des enfants, les autres enfants en souffrent toujours. Dans mon entourage, j’en connais et c’est toujours le cas.

Kik: C’est difficile à dire. Je préfère ne pas me prononcer sur ce point car je n’ai pas dans mon entourage familial proche, de personnes atteintes d’une malformation corporelle aussi importante que celle d’August.
Personnellement même s’il est court et un peu inattendu, j’ai aimé le chapitre donnant le point de vue du petit copain de la sœur. Il n’est pas vraiment de la famille, mais il ressent le mal-être de la sœur et un besoin de protection né.

Dorot’ Un petit bilan de cette année de sixième d’August? Une bonne initiative de la part de ses parents? Un échec complet? Une année mitigée?

Sophie:  Les choses ne se sont pas faites sans mal mais cette année de sixième est un premier pas finalement assez positif dans son intégration sociale. Je concluerais en disant que les choses les meilleures pour nous ne sont pas toujours les plus faciles à réaliser.

Pépita: Je dirai que malgré les obstacles, oui, c’est une bonne année pour August. Il a non seulement réussi à faire changer le regard des autres sur lui mais il s’accepte aussi mieux lui-même.Cette année l’a fait grandir ainsi que son entourage.

Kik: Son visage n’a pas changé. Il a toujours les mêmes déformations. Il est toujours le même. Et pourtant les autres élèves de son école ne le regarde plus de la même manière. Il n’est plus la bête curieuse. Il est lui. Il a des amis. Il a mis le nez à l’extérieur de sa maison, et de sa famille.
La confrontation a été rude, mais il a franchi le pas. Malgré les difficultés je pense que cela valait le coup.
Une année forte en émotion pour toute la famille. Il ne doit pas être évident pour les parents de « lâcher ainsi dans la nature », un enfant protégé pendant plusieurs années.
Pendant les semaines et même mois passés à l’hôpital, ils devaient se dire: « On fait tout ça, pour qu’il puisse un jour aller à l’école et avoir une vie sociale ».
Ce jour était arrivé. Il fallait se lancer. Il l’a fait.
Et ça donne une histoire, très forte.

Dorot’: Une belle conclusion, Kik. Pour finir, en quelques mots, quelle serait une bonne raison pour lire ce livre?

Kik: La découverte de l’autre, de la différence .

Pépita: Une leçon de tolérance.

Sophie: C’est une belle expérience humaine.

Merci les filles !
A lire également: la chronique de Pépita, Sophie, Dorot’