De la Page à l’écran : La troisième vengeance de Robert Poutifard

Adaptation du roman de Jean-Claude Mourlevat, Les vengeances de Maître Poutifard par Pierre-François Martin-Laval est un film familial que Colette et Linda ont vu avec leur enfant. Théodore et Juliette ont accepté de répondre à quelques questions autour de cette adaptation d’un roman qu’ils aiment beaucoup.

La troisième vengeance de Robert Poutifard, de Jean-Claude Mourlevat, folio junior, 2009 (pour la présente édition)
  1. Pourriez-vous nous présenter ce fameux Robert Poutifard inventé par Jean-Claude Mourlevat ? 

Juliette : Robert Poutifard est un enseignant retraité qui n’a jamais aimé les enfants. Il vit encore chez sa mère d’où il élabore son plan de vengeance.

Théodore : C’est un professeur des écoles à la retraite qui n’a pas vécu sa carrière dans les meilleures conditions notamment lorsqu’une année un groupe de 4 élèves lui a mené la vie dure et au moment de sa retraite il cherche à se venger de ceux-ci. 

  1. Qu’avez-vous pensé de l’interprétation qu’en a fait Christian Clavier dans le film de Pierre-François Martin-Laval ? Correspondait-elle à ce que vous aviez imaginé ? 

Théodore : j’ai trouvé que c’était une très bonne interprétation, un personnage peu dynamique, dont toute la vie tourne autour de l’enseignement alors qu’il n’aime pas les enfants. 

  1. Outre les enfants dont nous parlerons plus tard, un autre personnage est primordial dans cette fiction, c’est la mère de Robert Poutifard : comme pour son fils, pourriez-vous nous la présenter et nous dire si le personnage interprété par Isabelle Nanty correspondait à ce que vous vous étiez imaginé ? 

Juliette : Je pense que le personnage de la mère a été assez bien interprété, cela correspond assez à ce que j’imaginais.

Théodore : la mère de Robert Poutifard est une vielle femme qui est proche de son fils qui n’a jamais quitté la maison. Elle parle souvent de son mari dont Robert semble être le portrait craché – père qui par contre dans le film n’est pas évoqué.  Dans le roman, la mère est beaucoup plus gentille que dans le film où elle apparaît au début très sarcastique avec son enfant. La comédienne a été bien vieillie – vive le maquillage – et elle m’est apparue crédible pour incarner la mère de Robert. 

  1. Comment comprenez-vous les modifications apportées au titre du roman dans le titre du film ? 

Théodore : le titre du roman met l’accent sur la dernière vengeance de Poutifard lors de laquelle il comprend que personne n’a la vie facile et que ses élèves regrettent les farces dont leur maître a été victime. 

  1. Quoiqu’il arrive, il est ici question de vengeance : mais de quoi se venge ce pauvre Robert ? Qu’avez-vous ressenti en découvrant ses stratagèmes ? Les avez-vous approuvés ? 

Juliette : Il se venge de quatre de ses anciens élèves, les plus pénibles. Les stratagèmes sont plus fous les uns que les autres, toujours autant d’excitation. Je les approuve toutes même si la deuxième vengeance n’est pas exactement la même dans le film.

Théodore : On ne peut jamais approuver une vengeance mais il y a une forme de satisfaction à voir ces petits monstres punis. Et même si Valentin et les jumelles ne sauront jamais qui leur a fait vivre ces mauvais moments, Poutifard semble comme délivré. Pour Audrey, c’est une autre histoire. 

  1. Quelle a été votre vengeance préférée ? 

Juliette : La première avec le chien dans le restaurant. Le chien ne tenait pas en place !

Théodore : comme Juliette, c’est la vengeance du chien dans le restaurant que j’ai préférée car c’est la plus drôle et la plus ridicule car un grand chef qui tenait un restaurant étoilé se retrouve à tenir un simple food truck à cause d’un animal joueur ! 

  1. Personnellement, la fin du film m’a laissé perplexe : qu’en avez-vous pensé ? 

Théodore : non, pour moi c’est comme dans le roman. 

Affiche du film de Pierre-François Martin-Laval
  1. Au final, avez-vous trouvé que le film de Pierre-François Martin-Laval était une “bonne” adaptation ? 

Juliette : Oui, c’est vraiment une bonne adaptation. Même si quelques détails changent, ce n’est pas grave, on y retrouve le plus important.

Théodore : Oui, c’est une très bonne adaptation même s’il y a des petits trucs un peu différents : la vengeance d’Anthony dure longtemps aux dépens des autres vengeances, c’est la vengeance la plus préparée et la mieux détaillées dans le film. Dans le film, la vengeance contre les jumelles est un peu expédiée. 

  1. Et qu’avez-vous pensé de la brève apparition de Jean-Claude Mourlevat dans le film ? 

Théodore : Comme nous avons la chance de rencontrer Jean-Claude Mourlevat à 4 occasions, nous l’avons tout de suite identifié et nous avons apprécié cet hommage à l’auteur jeunesse à l’origine de l’histoire qui a servi de scénario au film.

Juliette : Tu as de la chance de l’avoir rencontré ! Comme je ne savais pas à quoi il ressemblait, j’aurais été bien incapable de le reconnaître. Ha ! Ha ! Mais je trouve ça sympa de l’avoir mis dans le film.

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Avez-vous vu Les Vengeances de Maître Poutifard ? Qu’avez-vous pensé de cette adaptation ?

Nos classiques préféré.e.s : s’émerveiller avec Jean-Claude Mourlevat !

Jean-Claude Mourlevat est un auteur prolifique qui se renouvelle de façon étonnante : ses écrits revisitent les genres du conte, de la fable, du polar et de la dystopie. Il ravit ses lecteur.ice.s dans tous les registres grâce à sa plume vive, son art de conteur et son talent pour nous interroger sur les sujets les plus percutants. À tel point qu’il a reçu récemment le prix Astrid Lindgren, considéré comme le Prix Nobel de littérature jeunesse (nommé d’après une autrice dont nous avons d’ailleurs eu l’occasion de parler par ici). Un prix qui contribue à rendre visible à l’international la richesse inouïe de la littérature jeunesse francophone, mais qui nous invite surtout à (re-)découvrir les livres de cet auteur. Un billet s’imposait dans notre série sur les « classiques » de la littérature jeunesse !

Vous connaissez le principe : chacune de nous choisit un titre qu’elle a particulièrement aimé et vous dit pourquoi.

Jean-Claude Mourlevat, source : son site Internet

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Lucie a envie de mettre en avant La Troisième Vengeance de Robert Poutifard. Voilà pourquoi !

La Troisième Vengeance de Robert Poutifard de Jean-Claude Mourlevat, Gallimard Jeunesse, 2004.

– Parce que c’est le roman de Jean-Claude Mourlevat préféré par son fils (pour le moment !)
– Que l’on soit élève ou enseignant, ce roman est un délicieux jeu de massacre.
– Parce que Robert Poutifard ne déteste pas seulement ses élèves mais aussi ses collègues, et que ses commentaires in petto sont hilarants.
– Parce que les enfants peuvent se montrer particulièrement cruels et que les effets de la méchanceté ne sont pas anodins.
– Pour les trois machinations mises en place, qui sont tout simplement diaboliques.
– Pour Bourru, le chien du cousin garagiste de Robert, à pleurer de rire.
– Parce que Poutifard a beau être animé par la vengeance, il est humain et particulièrement attachant.
– Parce que la vengeance qui compte réellement, comme le titre l’indique, c’est la troisième qui apporte compréhension et pardon.

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Comment ne pas braquer tous les projecteurs sur Cornebique et entonner en cœur sa ballade ? Pour Isabelle, les arguments sont multiples et convergents !

La ballade de Cornebique, Jean-Claude Mourlevat, Gallimard, 2003.

– Pour l’irrésistible bouc Cornebique, gaillard tout en jambes, doté d’un solide appétit, d’une bonne dose d’auto-ironie et d’un cœur tendre à souhait.
– Par ce que Jean-Claude Mourlevat est un conteur hors-pair qui place ce récit sous haute tension.
– Pour les émotions fortes qui nous font passer du rire aux larmes…
– … et pour le son entraînant et émouvant du banjo qui fait écho à nos états d’âme et nous donne envie de danser.
– Pour les frasques de Cornebique dont l’esprit de compétition, la fantaisie et la liberté vont droit au cœur des enfants (même ceux qui sont adultes).
– Pour les dialogues, trésors d’humour et de répartie.
– Évidemment, pour le savoureux concours d’insultes.
– Et pour la convivialité de ce roman où tout s’arrange toujours autour d’un repas chaud.

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Pour Linda, la fable animalière Jefferson est une invitation à voyager, à rêver, à penser mais aussi à rire. Voilà quelques raisons de le mettre en avant.

Jefferson de Jean-Claude Mourlevat, Gallimard jeunesse, 2018.

– Parce que c’est le roman préféré de ma fille, celui qu’elle relit régulièrement, qu’elle chérit comme un doudou,
– Pour cette couverture toute simple qui nous présente Jefferson, et son résumé qui dévoile juste ce qu’il faut de l’intrigue (avec humour) pour donner envie d’en savoir plus,
– Pour son intrigue policière qui prend la forme d’un voyage parfois terrifiant,
– Pour les valeurs d’amitié et de joie de vivre qui dominent,
– Pour ses personnages animaliers qui, caricaturant les humains, dressent des portraits touchants et drôles,
– Pour le questionnement sur notre rapport aux animaux et sur leurs droits,
– Parce que derrière ce questionnement humaniste et écologique, l’histoire n’en reste pas moins bourrée d’humour,
– Parce qu’un bon polar c’est aussi une enquête qui nous entraîne à l’aventure en laissant de la place au suspens,
– Enfin, parce que Jean-Claude Mourlevat, tout simplement.

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Pour Liraloin, l’épopée contée du roman Le Chagrin du Roi Mort emporte très loin l’imagination du lecteur aventurier !

Le Chagrin du Roi Mort de Jean-Claude Mourlevat, Gallimard jeunesse, 2009

– Pour cet incipit : « Je dédie ce roman, une fois n’est pas coutume, à mes camarades de littérature, celle qu’on dit «de jeunesse ». »
– Pour ce titre, genèse de ce conte qui va se dérouler sous vos yeux.
– Pour l’amour, ce sentiment humain dont l’essence enveloppe nos héros.
– Pour la sorcellerie, ligne directrice parfaitement orchestrée.
– Pour les deux parties de l’histoire : l’enfance si douce et mystérieuse / la guerre : combats fraternels et l’amour possible ou impossible ?
– Pour le sort tragique d’une mère légitime ou non.
– Pour le combat d’un père qu’il soit légitime ou non.
– Pour le souffle court d’Aleks lorsqu’il évoque Lia (une série de chapitres dont les voix résonnent très longtemps)
– Pour les quelques pages impossibles à terminer par peur de la chute, d’un réveil trop brutal.
– Pour cette histoire qui restera longtemps à vibrer.

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Pour Colette, Mourlevat c’est la magie de La Rivière à l’envers avant tout !

La Rivière à l’envers, Jean-Claude Mourlevat,PKJ, 2009

– Parce que les quelques mots du prologue sont juste… parfaits ! « L’histoire que voici se passe en un temps où l’on n’avait pas encore inventé le confort moderne. Les jeux télévisés n’existaient pas, ni les voitures avec airbags, ni les magasins à grande surface. Or ne connaissait même pas les téléphones portables ! Mais il y avait déjà les arcs-en-ciel après la pluie, la confiture d’abricot avec des amandes dedans, les bains de minuit improvisés, enfin toutes ces choses qu’on continue à apprécier de nos jours. Il y avait aussi, hélas, les chagrins d’amour et le rhume des foins, contre lesquels on n’a toujours rien trouvé de vraiment efficace. Bref, c’était… autrefois.
– Parce que tout commence dans une épicerie, une épicerie qui est un véritable petit royaume de poésie.
– Pour l’incroyable foisonnement du merveilleux qui se niche entre ces pages : de la Forêt de l’oubli à la prairie des Parfumeurs, ce récit explore le moindre recoin du pays des merveilles !
– Parce qu’il y est question d’amour, d’amour naissant, un amour qui ne se dit jamais explicitement, mais un amour qui engage et qui emmène.
– Parce que Tomek est le héros par définition : courageux, vaillant, droit, sincère.
– Parce que son pendant féminin, Hannah, est l’héroïne par définition : courageuse, vaillante, droite, sincère.
– Parce que le style de Mourlevat y est précis, limpide, d’une clareté aussi lumineuse que celle de l’eau de la rivière Qjar.
– Parce que la chapitration du roman a permis à nombreux de mes élèves, même petits lecteurs, de se lancer dans une lecture longue, un défi qui n’est pas mince à relever !
– Pour ce processus ingénieux de la double narration, celle de Tomek, dans un livre, celle d’Hannah dans l’autre, un processus qui nous invite à changer de point de vue, à relire sans cesse, à ne jamais être trop sûr de soi. Une belle leçon d’humilité en somme. De poésie aussi.
– Pour les moments précieux que sa lecture à voix haute m’a permis de vivre au côté de mon fils aîné qui en avait livré, jadis, ici même, sa lecture d’enfant.

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Et vous, avez-vous lu Jean-Claude Mourlevat et lequel de ses romans auriez-vous choisi de mettre en avant ?

Nos coups de coeur de mars

Le mois de mars aura été un peu particulier. Les circonstances actuelles ont, pour certains et certaines, freiné toute envie de lire ou de faire autre chose quand, pour d’autres, c’est l’occasion de se plonger dans les livres, pour oublier le malaise ambiant, pour voyager, autrement.

Même si nous sommes tous et toutes chamboulé.es, la vie continue. Comme chaque mois, nous vous proposons quelques idées de lecture, nos coups de cœur à noter pour l’après, ou à lire dès maintenant si cela vous est possible.

Prenez soin de vous.

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Pour HashtagCéline, c’est un double coup de cœur pour un même titre. Comment est-ce possible? Avec la parution de Miss Charity, le roman de Marie-Aude Murail adapté par Anne Montel et Loïc Clément chez Rue de Sèvres, HashtagCéline a enfin pris le temps de lire le roman original paru à l’école des loisirs et illustré par Philippe Dumas.

Dans les deux cas, le coup de cœur était là !

Son avis ici.

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Pour Pépita et son Méli-Mélo de livres, c’est Bamba qui a fait boum en ce mois de mars. Anne Loyer signe là un roman fort, plein de vie, sur une jeune fille qui mène sa barque envers et contre tous. Un roman qui m’a permis de renouer avec la lecture en cette période mouvementée.

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Double coup de coeur, car c’est aussi Bamba qu’à choisi Alice ce mois-ci ! Il y a tellement d’émotions dans ce bouquin rythmé ! Et comme Paul, vieux bougon au grand coeur, elle a juste envie de tendre la main à cette jeune fille sans concession qui revendique et assume de sortir d’une vie toute tracée. La vie arpès tout, c’est une histoire de rencontres !

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Pour Bouma et son Petit Bout de Bib, c’est également l’adaptation en bande-dessinée d’un roman qui a gagné son cœur. Devenu un incontournable de la littérature jeunesse contemporaine La Rivière à l’envers de Jean-Claude Mourlevat se voit offrir une nouvelle version par Max l’Hermenier et Djet, dans un diptyque dès plus réussis !

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L’évasion par les livres n’a peut-être jamais été aussi nécessaire. Isabelle et ses flibustiers ne s’y sont pas trompés et ont adoré relire la BD Les Vermeilles, de Camille Jourdy. Cette aventure d’une ampleur impressionnante nous entraîne dans une sorte de quatrième dimension où le monde des contes percuterait celui des années 1970. Quelle vermeille quand les livres repoussent les frontières de ce que nous pouvions imaginer ! On en oublierait presque que nous sommes coincés entre quatre murs…

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Et en roman, leur coup de cœur va à très joli roman qui nous vient du Canada : Partis sans laisser d’adresse, de Susin Nielsen. Un concentré de sagesse et d’humour sur la thématique de la perte de logement, avec des personnages inoubliables !

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