Et si on lisait un western ?

Si le western est un genre cinématographique incontournable sur la conquête de l’Ouest américain, il est moins fréquent en littérature. Pourtant, certaines de nos lectures (plus ou moins) récentes nous ont donné envie de remettre à jour la sélection Indiens et cow-boys publiée il y a presque dix ans. En selle !

*

Tout a commencé avec notre lecture commune de La longue marche des dindes. Nous y avons trouvé des marqueurs du western avec le grand trajet à effectuer, les rencontres, les dangers. Et, surtout, cette adaptation en BD du roman de Kathleen Karr par Léonie Bischoff faisait la part belle aux paysages grandioses !
Nous avons adoré suivre le périple de Simon qui mène à bien une idée à priori folle et prend confiance en lui au fil du chemin et des rencontres, mais aussi le contexte historique fort dans lequel l’histoire prend place.

La longue marche des dindes, adapté par Léonie Bischoff à partir du roman de Kathleen Karr, Rue de Sèvres, 2022.

Les avis d’Isabelle, Linda, Blandine et Lucie.

******

Roman que nous vous recommandons d’ailleurs pour aller plus loin dans la découverte mais aussi parce que le format se prête idéalement à la lecture à voix haute.
La longue marche des dindes est un récit initiatique original au cours du quel on fait des rencontres parfois surprenantes, parfois problématiques mais qui, toujours, viennent pimenter un récit d’aventure intelligent et bourré d’humour. L’auteur nous entraîne dans une longue marche à travers l’Amérique, à la découverte des turkeyboys, moins connu que les cowboys, et de la difficulté d’un voyage de mille kilomètres avec des volatiles.
Le récit rappelle par certains aspects l’Amérique de Tom Sawyer avec ses chercheurs d’or, ses brigands, l’esclavagisme ou encore les chasseurs de bisons.

La longue marche des dindes de Kathleen Kaar, L’école des loisirs, 2018.

Les avis d’Isabelle et Linda.

******

Lucie a aussi eu l’occasion de découvrir Et le ciel se voila de fureur dans le cadre du Prix Vendredi 2022. La vengeance est au cœur de cette histoire, comme de nombreux westerns cinématographiques, et Taï-Marc Le Thanh y a malicieusement glissé un certain nombre de personnages iconiques. Si cette lecture n’a pas tout à fait été le coup de cœur escompté, l’ambiance du western y est bien présente et apporte une réelle épaisseur au récit. D’autant qu’il est agrémenté de magnifiques croquis.

Et le ciel se voila de fureur, Taï-Marc Le Thanh, L’école des loisirs, 2022.

Les avis Lucie et d’Isabelle

******

Plus récemment encore, c’est avec une grande curiosité que certaines branches du Grand Arbre se sont penchées sur Pony. Après avoir aimé Wonder, elles avaient très envie de découvrir ce que leur réservait le nouveau roman de R. J. Palacio. Et cela a été un nouveau coup de cœur ! La quête de Silas, parti à la recherche de son père enlevé sous ses yeux par des bandits, l’entraîne à travers les grand espaces américains. Lui aussi fera un certain nombre de rencontres qui l’amèneront à grandir et à en apprendre plus sur ses origines. L’auteure a su mêler paysages, découvertes techniques (notamment en photographie), suspens et une ambiance très particulière qui flotte sur un roman qui ne ressemble à nul autre.

Pony, R. J. Palacio, Gallimard Jeunesse, 2023.

Les avis de Lucie et d’Isabelle.

******

Calamity Jane n’a pas toujours été l’héroïne du Wild West Show de Buffalo Bill, alternant performance équestre impressionnant un public peut habitué à voir une femme armée de colts! Calamity Jane veut être maîtresse de son destin : « Très vite, elle adopte l’habit de daim et le pantalon, le colt à la hanche et la cigarette à la bouche. Sous son chapeau de feutre brillent un regard crâne, un esprit farouche, une âme rebelle. » Voilà, il n’y a pas d’autre choix pour gagner cette liberté des grands espaces ancrés en elle. Mais Calamity aime trop et bouscule les codes, veut aider les plus faibles : justicière et généreuse! Cet album relate une histoire, une légende, une ode à la liberté. Cette liberté et la souffrance de cette femme que l’on retrouve dans les mots d’Anne Loyer. Le courage, l’indomptable Calamity-rouge comme l’amour qu’elle porte à sa fille. Cette touche de couleur si vive qui illumine les illustrations de Claire Gaudriot.

Calamity Jane, Anne Loyer & Claire Gaudriot, A pas de loup, 2019

******

Ab Stenson est libre, libre d’avoir choisi son destin, du moins celui qu’on lui a imposé dès son plus jeune âge. Sauvage? Dur et solitaire? Ab Stenson s’habille comme un homme, s’agite comme eux. Elle vit, vol les banques… jusqu’au jour où elle croise la route du jeune Garett qu’elle prend en otage un matin comme un autre pour celle dont la tête est mise à prix. Bien vite Garett est fasciné par cette femme « sans foi ni loi » et découvrira des sentiments qu’il n’a jamais connu : l’amour et la liberté : « Je n’ai jamais été amoureux d’Abigaïl Stenson. La fascination qu’elle exerçait sur moi était d’un autre ordre. Peut-être que j’aurais aimé lui ressembler, peut-être qu’elle incarnait tout ce qu’on m’avait appris à détester. Je ne sais toujours pas exactement. »

Marion Brunet revient sur une période où l’homme connaît toute domination. A travers son personnage d’Abigaïl Stenson, elle donne la parole à toutes les femmes libres et conquérantes. Etre sans foi, ni loi pour tenir, pour survivre, pour ne pas trop aimer et se protéger. Le personnage de Garett la rend plus forte et indomptable. Le lecteur ne s’émeut jamais pour elle, elle n’en a pas besoin. En revanche, un peu comme Ab, le lecteur prend Garett sous son aile pour lui faire oublier son passé et faire de lui un homme loyal et aimant.

Sans foi ni loi, Marion Brunet, Pocket jeunesse, 2019

L’avis d’Isabelle

******

Celle qui venait des plaines, c’est Winona. Si Charlotte Bousquet nous invite à suivre Virgil Wyatt dans sa quête de vérité, elle est la figure centrale de cette histoire. Et quelle figure ! Fille d’une soldat et de la sœur de Crazy Horse, elle a été à la fois l’amante et l’ennemie jurée du père de Wyatt, a survécu aux sévices du pensionnat, côtoyé hors-la-loi et U.S. marshals, appris à leurs côtés à soigner et à tuer… Tout comme Virgil, le lecteur se retrouve envoûté par la fameuse Vipère de l’Oklahoma. Mais raconte-t-elle la vérité ?
« On est dans l’Ouest, ici. Quand la légende dépasse la réalité, on publie la légende ! »
Charlotte Bousquet propose une réflexion sur la vérité et le mythe (un peu à la manière de « L’homme qui tua Liberty Valance » de John Ford, d’où est tirée cette citation), mais s’appuie aussi sur des faits historiques pour évoquer la place des femmes au Far West et les atrocités commises dans les pensionnats où étaient retenus de force les enfants indiens jusque dans les années 80.

Celle qui venait des plaines, Charlotte Bousquet, Gulf Stream éditeur, 2017.

******

L’époustouflante couverture des contrées salées annonce la couleur : celle de la rencontre du western et de la magie. Ce roman graphique semble d’abord s’inscrire dans un registre historique ancré dans l’Oklahoma de 1919. Depuis qu’Elber est rentré des tranchées, sa petite sœur Vonceil ne le reconnaît plus. Moins insouciant, plus adulte, voilà qu’il se met en ménage avec l’insipide Amelia. Mais un jour débarque une envoutante dame blanche qui exige qu’Elber la suive. Furieuse de son refus, elle empoisonne la seule source d’eau potable des environs. Pour lever le sort, Vonceil n’hésite pas à se lancer tête baissée vers les contrées salées. Ses aventures nous font brusquement basculer dans une autre dimension… Entre enquête, épopée et fantasy carrollienne, cet album ne cesse de nous prendre de court. L’intrigue merveilleuse et le contexte historique se nourrissent réciproquement dans une symbiose étonnante. L’épopée s’appuie par exemple sur des éléments historiques comme les difficultés des fermiers américains, les traumatismes des survivants de la guerre ou la prohibition. Étonnant !

Les contrées salées, de Hope Larson et Rebecca Mock (Rue de Sèvres, 2022)

L’avis complet d’Isabelle

******

Conquête de l’ouest, vengeance, voyage initiatique et quête d’identité sont les thèmes centraux de ce western qui nous entraîne dans un Far West digne des meilleurs films du genre. Porté par des personnages attachants, le récit alterne les scènes violentes et d’autres plus contemplatives. Ces dernières permettent de découvrir les personnages, leur histoire et de vraiment saisir la complexité d’appartenir à deux cultures différentes, à deux mondes qui s’opposent, surtout quand l’une est persuadée d’être dans son bon droit en faisant disparaître l’autre. Natifs américains et irlandais puisent leur force dans le désir de garder leur identité et de sauver ce qu’il leur reste d’humanité.
Avec des thématiques très actuelles, ce roman graphique s’inscrit dans l’actualité en interrogeant notre rapport aux autres et à la nature. Par ces personnages attachants, il interroge nos actions et notre Histoire, car s’identifier à un personnage et vibrer avec lui, c’est aussi apprendre à se mettre à la place de l’autre.

Hoka Hey ! de NEYEF, Label 619, 2022.

L’avis complet de Linda.

******

C’est aussi le point de vue des natifs qu’adopte Nathalie Bernard dans Le dernier sur la plaine. S’inspirant de personnes et de faits réels, l’auteure nous emporte dans la seconde moitié du 19ème siècle, ce moment de bascule où les rangers traquent les dernières tribus refusant de se faire enfermer dans des réserves.
A travers le point de vue de Quanah Parker, dernier chef Comanche, elle montre le combat qu’il mena toute sa vie pour tenter de sauver la culture, les croyances et les terres de son peuple. Ce personnage est magnifique, sensible et solide, d’une humanité désarmante et bouleversante. Et le contexte historique n’est pas en reste : on voit sous nos yeux le paysage transformé par le développement des lignes de chemin de fer et de l’agriculture ; le quotidien des amérindiens qui vivent, survivent, tentent de s’adapter ; la condition des femmes, dans les deux camps ; la nature façonnée par le rythme des saisons et la guerre.

Le dernier sur la plaine, Nathalie Bernard, Editions Thierry Magnier, 2019.

Les avis d’Isabelle et de Lucie.

******

Cela fait déjà dix ans que Blandine a lu Western Girl d’Anne Percin et son souvenir de lecture demeure intact et toujours aussi bon! Présentation :
Ce roman nous transporte dans le Middle West américain, au cœur d’un groupe de 12 « frenchies », cinq garçons et sept filles, partis trois semaines en stage dans un ranch au milieu d’un élevage de races [de chevaux] américaines, et principalement auprès d’Elise Bonnel, rousse flamboyante de 16 ans qui adore western et country depuis ses 6 ans, allant même jusqu’à prendre des cours d’équitation.
Le roman est très bien écrit et propose, en alternance avec les déboires relationnels (plutôt classiques) de la jeune fille, une description géographique, une analyse historique et sociologique des Etats-Unis. On découvre une Réserve, de hauts lieux de batailles, nous roulons sur les immenses Interstate, ces routes linéaires presque sans fin du centre des Etats-Unis, on écoute de la musique dans un snack diffusé par un juke-box, etc. Il est aussi question du préjugé, de la différence, du racisme, notamment avec Derek B. Johnson, un jeune Noir venu de Philadelphie.

Un roman exaltant qui donne envie d’écouter de la country, de faire du rodéo et de boire des ginger beers!

Western girl. Anne PERCIN. Editions du Rouergue,

L’avis de Blandine.

******

États-Unis, 1884. Les bisons sont en voie d’extinction. Un grand musée d’histoire naturelle dépêche un jeune taxidermiste pour ramener des cornes, des sabots et des peaux avant que l’espèce ne disparaisse. Ce dernier ne se doute pas qu’il va vivre un moment de grâce, l’une de ces expériences qui marquent à jamais et donnent un sens à notre existence… Rascal et Louis Joos abordent le drame du massacre de millions de bisons par les colons venus d’Europe sous l’angle lumineux de l’initiation d’un homme qui trouve bonheur et sens au contact de la nature. Le texte lyrique et les illustrations à l’encre et à l’aquarelle subliment la beauté des grandes plaines, du soleil couchant et de la nuit qui s’empare de la forêt, où les humains et leurs machines industrielles semblent des intrus. Et pourtant, on assiste dans cet album à une communion bouleversante entre l’homme et la nature. On aime retrouver des saveurs qui nous avaient transportées dans Le voyage d’Oregon : celle du voyage (ici de New-York vers le Kansas puis le Canada) et surtout celle de la liberté. Un immense bol d’air, cet album !

Buffalo Kid, de Rascal, illustré par Louis Joos (Pastel, 2023)

L’avis complet d’Isabelle

******

Et si on allait toujours plus à l’Ouest? Alors à l’Ouest, que se passe-t-il ? Eh bien, comme nous le dit le titre, rien de bien nouveau à l’ombre des cactus ! Au Far West, on rencontre toujours les mêmes personnages : shérif, danseuse de cancan, Indiens comme cowboys qui se font toujours la guerre à base d’or convoité, de passage au saloon, de poursuite dans le désert… Mais à l’Ouest, il y a quand même du nouveau ! Car Anne-Sophie Tilly a glissé dans son texte autant de rebondissements et de situations cocasses que de nombreuses références et multiples clins d’œil qui raviront les petits comme les grands lecteurs!

A l’Ouest, rien de nouveau. Anne-Sophie TILLY et Fabienne BRUNNER. Frimousse, 2016

L’avis de Blandine

******

Et pour terminer, un indémodable: Billy, un hamster!

Un papa hamster, bandit de métier, aimerait bien que son fils le soit aussi. Mais il se rend bien compte que Billy est bien trop gentil pour le devenir. Il décide néanmoins de lui offrir sa première, et plus importante, leçon ! A savoir, brandir son arme devant un animal et tonner d’une voix forte : « Haut les pattes ! » Billy s’en va…Et bien sûr, rien ne se passe comme son père l’avait prévu. Mais c’est peut-être mieux ainsi?!
Derrière son décor de Far West (où tout y est!), cet album aborde les désirs paternels pour le fils, l’amitié, l’entraide et la fierté ! Une réussite!

Hauts les pattes de Catharina Valckx. Ecole des Loisirs, 2010

L’avis de Blandine

******

Et vous, aimez-vous les westerns ? En avez-vous déjà lu ? Lesquels nous recommanderiez-vous ?

Lecture commune : les trois « romans-fleuve » de Davide Morosinotto

Impossible de résister à l’appel de l’aventure des romans de Davide Morosinotto : par la vivacité de sa plume et de ses dialogues, la qualité de ses intrigues menées tambour battant, le charme fou de ses personnages et des décors historiques époustouflants, l’auteur italien apporte quelque chose de frais et de réjouissant à la littérature jeunesse. Il réinvente l’idée de série avec trois romans qui ne se suivent pas à proprement parler, mais qui sont apparentés à plusieurs égards, comme nous le verrons. De quoi susciter des échanges à l’ombre de notre grand arbre, comme vous pouvez l’imaginer ! Alors, êtes vous du voyage ? Embarquez dans votre bateau à aube, votre paquebot ou votre pirogue, c’est parti !

Le célèbre catalogue Walker & Dawn (L’école des loisirs, 2018). L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges (L’école des loisirs, 2019). La fleur perdue du chaman de K (L’école des loisirs, 2021).

Isabelle : Le célèbre catalogue Walker & Dawn, L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges et La fleur perdue du chaman de K peuvent se lire indépendamment. Lesquels avez-vous lus et comment les avez-vous découverts ?

Lucie : Je commence juste ma découverte et encore une fois c’est grâce à vous. J’ai lu ta critique sur La fleur perdue qui m’a interpellée. Mais à la bibliothèque il n’y avait que Le célèbre catalogue Walker & Dawn donc je commence par là !

Colette : Et bien je n’ai lu que L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges que j’ai découvert parce que tu m’as promis, Isabelle, une belle lecture ! C’est donc également sur tes conseils que j’ai foncé l’emprunter à la médiathèque !

Pépita : J’ai aussi lu les trois mais pas dans l’ordre de leur parution. J’ai commencé par Le célèbre catalogue, mais je ne me souviens plus du tout comment il a atterri dans mes mains. Depuis, je suis cet auteur car il a une façon bien à lui de raconter ses histoires. Toujours un duo d’enfants, qui vivent des aventures incroyables ! Et d’autres enfants qui font l’aventure avec eux. C’est assez simple dit comme ça mais en fait, ces histoires ont vraiment quelque chose en plus. Dans la forme. Ou l’élément déclencheur. Ou les enjeux historiques. De vrais page-turners ! Et combien j’aurais voulu les lire enfant, on ne doit pas du tout en avoir la même perception qu’adulte. En plus, ils pèsent lourds, alors on sent qu’on en a pour son content de lecteur !

Isabelle : Moi aussi, j’ai lu les trois. C’est grâce au grand arbre que j’ai découvert Le célèbre catalogue et comme Linda, ça a été un tel coup de cœur, peut-être le plus grand des dernières années, que je me suis précipitée sur chacun des deux tomes qui ont suivi. Nous avons même relu (à voix haute !) le premier, après avoir terminé La fleur perdue !

Quand on lit le résumé de ces livres, ils n’ont a priori rien à voir : le premier se passe aux États-Unis en 1904, le deuxième en Russie pendant la deuxième guerre mondiale, le troisième au Pérou dans les années 1980. Et pourtant, les fils conducteurs sont multiples, non ?

Pépita : À première vue effectivement, ce n’est pas une trilogie ! Mais il y a toujours un fond historique, la grande Histoire, dans laquelle des enfants vivent des aventures incroyables. Toujours un couple d’enfants et d’autres qui gravitent autour, les aident, les soutiennent. Des enfants de la rue, en précarité aussi pour la plupart, et très débrouillards. Toujours un objectif aussi qu’il se donnent et toujours un voyage loin de chez eux, des cartes à lire, du repérage d’espace, de la jugeote et un sacré coup de chance, que je devrais mettre au pluriel !

Linda : Ce n’est clairement pas une trilogie au sens où on l’entend habituellement. Mais cela reste une série dans laquelle l’auteur s’amuse à placer des personnages déjà rencontrés dans un autre livre. Il explique d’ailleurs très bien cela à la fin de la fleur perdue du chaman de K , cette envie qu’il avait d’une série de romans qui placerait l’action autour d’un grand fleuve.

En fond, l’album Histoires de fleuves, de Tim Knapman, paru chez Sarbacane.

Lucie : J’ai beaucoup aimé les illustrations qui jouent sur le côté documents d’archives du « Catalogue » et je me demandais : les autres romans de Morosinotto ont-ils tous ce côté graphique ou pas du tout ?

Pépita : Le travail graphique sur ces trois tomes est aussi un fil conducteur et cela donne une unité narrative à cette collection. Je préfère dire collection que série car ce n’en est pas une, au sens de trilogie. Je trouve que cela modernise drôlement le concept !

Isabelle : D’après moi, l’un des aspects qui font de ces romans des lectures inoubliables ! Chaque tome donne lieu à un travail graphique que j’ai trouvé merveilleux : comme on le disait, Le Catalogue intègre des documents d’époque dans le texte – extraits de catalogue, coupures de presse, photographies, cartes…

Le célèbre catalogue Walker & Dawn. Extrait

On retrouve cette résonance entre texte et graphismes dans les tomes suivants, mais à chaque fois sur un mode différent. Morosinotto déborde de créativité en la matière : L’éblouissante lumière se lit comme des cahiers d’enfants dûment annotés à la matin par un commissaire soviétique ! Et le troisième volet est peut-être le plus inventif : il fait littéralement s’entrechoquer texte et illustrations…

Colette : Dans L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges, le côté graphique est très important. Il est même au fondement de la narration. Ce roman raconte l’histoire de jumeaux Nadia et Viktor, qui vivent à Leningrad quand la seconde guerre mondiale éclate. Obligés de quitter leur famille, leur père va leur offrir une série de carnets rouges à spirales dans lesquels les enfants s’engagent de noter tout ce qui va leur arriver pendant leur exil forcé. Le roman est donc rythmé par la rédaction des carnets. Il n’y a donc pas de chapitres dans ce roman mais des carnets qui s’enchaînent au fil des mésaventures de nos deux personnages principaux. Dans ces carnets, les enfants collent des photos, des documents divers, et surtout des cartes qui certes orientent leurs itinéraires mais aident précieusement les lecteurs/lectrices à se repérer ! Entre chaque carnet, on trouve les rapports du commissariat du peuple aux affaires intérieures, qui forment une sorte de récit cadre à la narration que l’on peut lire dans les carnets. La structure narrative est donc complètement nourrie par le structure graphique du livre.

L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges. Extrait

Pépita : Quand même, c’est assez inégal. Je m’explique : j’ai trouvé le principe des carnets dans Les étoiles rouges hyper-classique (l’écriture rouge pour Viktor m’a vraiment gênée pour lire !), dans La fleur perdue c’est déjà plus élaboré, puisque le jeu se déplace sur plusieurs formes (typographies, pages noires,) et dans Le catalogue, c’est là que j’ai trouvé ce graphisme le plus dynamique.

La fleur perdue du chaman de K. Extrait

Linda : Je suis complètement d’accord avec Pépita pour dire que cela donne une unité narrative à la série malheureusement inégale. Certains choix faits dans La fleur perdue m’ont vraiment posé problème entre le fait qu’il fallait parfois tourner le livre dans tous les sens, la taille très petite de certaines lignes ou l’aspect flouté du texte. Clairement c’est un concept intelligent et les idées sont bien pensées mais ce n’est pas toujours très pratique. J’ai par contre adoré les carnets de L’éblouissante lumière plus traditionnels, certes, mais tellement bien faits. A la lecture, on en arrive à se demander si ce ne sont pas de vraies pages retrouvées des années plus tard.

Lucie : C’est un peu pareil avec Le catalogue, ce jeu sur le document authentique est très intriguant, je trouve. Mais il dévoile ce qu’il en est dans ses remerciements, en tout cas pour Le catalogue !

Linda : Oui absolument, c’est présent dans chaque livre.

Isabelle : Pour ma part, je ne saurais pas dire laquelle de ces trois propositions j’ai préférées. Le jeu consistant à utiliser les lettres comme des images dans le troisième tome est original, ça m’a fait penser à certains textes dadaïstes ! Dans Le catalogue, il y a eu un immense bonus lié à la surprise de découvrir ces documents magnifiques alors que je ne m’y attendais pas. Exactement comme le disait Colette pour L’éblouissante lumière, il y a une imbrication entre texte et iconographie qui fait forte impression. On entre presque dans un rôle face à ces documents qui semblent d’époque : dans le premier cas, on vibre d’excitation en tournant les pages de ce catalogue d’un autre temps et on peut ressentir la fascination qu’il devait susciter un siècle avant Amazon ! Dans le deuxième, on se retrouve presque dans la peau du commissaire soviétique qui découvre les carnets de Victor et Nadia et qui doit se faire une idée des tenants et aboutissants de leur « affaire ». J’ai trouvé vraiment drôle de lire ses annotations et de voir les différents points de vue qu’on peut avoir sur les péripéties vécues par les deux enfants. Je te rejoins, Colette, pour trouver que dans les trois cas, ces documents, cartes, etc. sont aussi utiles pour planter le décor et aident à se repérer dans des époques très différentes de la nôtre.

Un autre point commun à ces trois romans concerne la narration à plusieurs voix. Avez-vous une idée des motivations de l’auteur pour opter pour cette formation de narration ? Est-ce quelque chose que vous avez apprécié ?

Pépita : J’imagine que pour l’auteur ce principe de narration lui permet plusieurs points de vue dans les aventures. Et comme son fil rouge est de donner la voix à plusieurs enfants à chaque fois, c’est un bon moyen. Pour le lecteur, c’est agréable de monter l’histoire dans sa tête à travers ce principe. En plus, pour ne pas le lasser, il a à chaque fois modifié la forme de ce principe de narration. Oui, j’ai réellement apprécié cette façon de faire, de manière inégale dans chaque roman, mais globalement, c’est fort réussi, ça donne une belle dynamique, ça surprend, ça attise la curiosité. De plus, il a su aussi le valoriser dans les illustrations, et ça, ça donne vraiment une autre perspective ! Je trouve qu’il a carrément modernisé ce principe.

Linda : L’intérêt réside dans la multiplicité des points de vue. Chaque enfant raconte l’histoire selon ce qu’il en perçoit ce qui est intéressant dans la dynamique du récit mais aussi et surtout quand les enfants vivent des aventures différentes. C’est un choix qui me plait toujours car il permet aussi d’éviter les longueurs et les temps morts au maximum. Comme Pépita, j’ai beaucoup aimé l’utilisation de l’illustration pour notifier le lecteur du changement de personnage. Le côté visuel permet toujours de situer les évènements et de plus, cela enrichi l’objet-livre.

Le célèbre catalogue Walker & Dawn. Extrait

Lucie : Honnêtement, je trouve que la narration à plusieurs voix est souvent une astuce de l’auteur pour faire dire à un personnage quelque chose qu’un autre narrateur ne pourrait pas dire de lui-même. Ce n’est pas toujours très bien fait et c’est d’autant plus gênant que ce « stratagème » est très fréquent en littérature jeunesse. MAIS, Morosinotto justifie et utilise parfaitement ce ressort, en tout cas dans Le célèbre catalogue. Le fait que le roman soit en fait le récit de leurs aventures par les enfants à une journaliste justifie cette succession de voix, et chaque personnage a vraiment un ton et une dynamique que l’on retrouve dans l’écriture. C’est très bien fait !

Isabelle : Je vous rejoins totalement sur la façon dont Morosinotto joue des changements de narrateurs pour construire son récit, entretenir le suspense et révéler à petites touches ce que les différents narrateurs perçoivent. Avec à chaque fois un ton propre au personnage ! J’y ai aussi vu le moyen de livrer une lecture subtile d’époques historiques particulièrement complexes en multipliant les points de vue. Par exemple, dans L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges, on sent bien que les choses ne sont pas perçues de la même manière quand c’est Victor qui raconte, lui qui aspire à être un « bon camarade » (sans hésiter à enfreindre les lois lorsqu’il s’agit de retrouver sa soeur), quand c’est Nadia, plus distanciée vis-à-vis du régime – et évidemment quand on lit les annotations du colonel Smyrnov qui incarnent tout ce qu’il peut y avoir d’arbitraire dans l’exercice de la justice dans un régime non-démocratique et en période de guerre. L’ensemble brosse un tableau différencié et très intéressant !

Colette : Dans L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges, les deux narrations se justifient complètement puisqu’en fait chaque enfant vit une histoire différente avec cependant un objectif final similaire pour les deux personnages principaux : se retrouver (même si ce n’est pas la même dynamique qui anime les deux enfants : l’un, Victor, fait tout pour retrouver sa sœur, l’autre, Nadia, attend d’être retrouvée par son frère). Comme l’a souligné Isabelle, cette double narration permet d’accéder à différentes manières de vivre le régime politique en place. Elle permet aussi de suivre les étapes de l’invasion de l’URSS par l’armée allemande de plusieurs postes stratégiques, ce que j’ai trouvé particulièrement ingénieux et enrichissant car on apprend vraiment beaucoup de choses sur cette terrible page de l’Histoire à travers la myriade d’endroits traversés par les deux enfants. Quant aux pages dédiées au colonel Smyrnov, elles sont tellement en décalage avec la foule de précisions, d’anecdotes des pages écrites par les enfants, elles respirent tellement le « confort » quand les deux enfants sont accablés par tous les dangers, qu’elles nous font surtout sentir ce qu’il y a d’arbitraire dans le pouvoir politique, de complètement ubuesque même à vouloir à ce point s’aveugler. Une critique subtile mais efficace du régime communiste.

Isabelle : Ces remarques sur le régime communiste dans L’éblouissante lumière l’illustrent, chacun des « romans-fleuves » nous plonge dans un contexte historique bien particulier. Qu’est-ce qui vous a le plus marquées, interpellées, amusées à cet égard ?

Lucie : Ta question me fait immédiatement penser à la mise en garde sur laquelle s’ouvre Le catalogue. Elle souligne avec humour l’évolution des mœurs et l’écart entre ce que l’on peut attendre d’un roman de littérature jeunesse et le vécu des enfants de cette époque.

Le célèbre catalogue Walker & Dawn. Prologue

Pépita : J’ai trouvé la construction de L’éblouissante lumière « plus classique » à travers les deux cahiers des enfants dans un contexte historique vérifiable. Le célèbre catalogue est une aventure collective époustouflante qui part de pas grand’chose, comme si l’aventure pouvait surgir n’importe quand, avec alternance des quatre voix des quatre enfants qui racontent. Les cartes et illustrations sont sublimes ! Et plonge le lecteur dans une époque des États-Unis et la course au progrès. Et La fleur perdue nous fait vraiment entrer dans un univers chamanique mystérieux et ésotérique, mais là l’histoire est plus imbriquée. Le contexte historique est celui du sentier lumineux, l’époque du terrorisme au Pérou et là, c’est contemporain. A chaque fois, l’auteur a su insuffler un univers graphique qui colle à l’ambiance mais aussi des éléments historiques véridiques.

Colette : J’ai appris plein de choses sur le siège de Leningrad et l’incroyable initiative de la « route de la vie » passant par le Lac Dagoda. Finalement l’Histoire enseignée aux élèves de l’hexagone est très franco-française (l’était en tout cas) et par conséquent je ne connaissais pas toutes ces opérations militaires notamment la stratégie qui a consisté à affamer la population de Leningrad.

L’éblouissante lumière des deux étoiles rouges. Extrait

Isabelle : Tout à fait ! Même en tant qu’adulte, on découvre des pages d’histoire qu’on ne connaissait pas forcément, avec la multiplicité de points de vue que permet la littérature. Je n’aime pas trop qu’on sente l’intention didactique dans une fiction, mais c’est génial d’avoir l’impression, dans le cadre d’une lecture-plaisir, de voir son horizon élargi. Et là, ça fonctionne très bien, je trouve. On est pris par l’intrigue et l’aventure, mais on profite au passage à fond d’un décor historique peaufiné dans les moindres détails : avec mes garçons, nous avons adoré par exemple remonter le Mississippi dans un bateau à aube fourmillant d’ouvriers, de musiciens et de joueurs de poker ! J’ai trouvé drôle de voir, en lisant La fleur perdue, que les années 1980 pendant lesquelles j’ai grandi pouvaient sembler une époque historique un peu exotique du point de vue de mes enfants (« c’est quoi, un walkman ? »). Même si bon, nous sommes au Pérou et j’ai découvert des choses aussi sur l’histoire de ce pays que je connaissais mal.

Je voulais vous poser une question dont il ne sera peut-être pas aisé de parler sans divulgâcher. Qu’avez-vous pensé de la façon dont Morosinotto « dénoue » ses intrigues ? J’ai trouvé que c’était assez peu classique, j’ai eu le sentiment à chaque fois qu’au moment du dénouement, on a l’impression que l’essentiel n’était finalement pas là où on le pensait pendant toute la lecture, un peu comme si le voyage comptait finalement plus que la destination, vous voyez ce que je veux dire ? Qu’en avez-vous pensé ?

Lucie : Tu as lu mon avis : concernant Le célèbre catalogue pour moi on ne peut pas divulgâcher la fin puisque l’éditeur s’en charge directement sur la couverture ! Je suis d’accord sur le fond : évidemment, comme souvent, le chemin compte plus que la destination. C’est ce qui lie les personnages, les fait évoluer et grandir. Mais tout de même, j’aime aussi découvrir la résolution et j’ai un peu eu l’impression d’avoir été spoliée par le spoil si vous m’autorisez un jeu de mot facile. Clairement, j’ai aimé lire les aventures rocambolesques des personnages, mais du fait de cet énorme indice, je m’attendais au moins à une fin en deux temps. J’ai été déçue que le suspense retombe. Sans ôter à la qualité d’ensemble du roman, connaître la fin a quand même un peu gâché le dernier tiers de ma lecture.

Linda : Comme le dit Lucie, on connait le dénouement avant la lecture donc oui le chemin compte plus que la destination. C’est tellement formateur pour les enfants ce voyage avec ses rencontres et ses aventures. On est vraiment sur du récit initiatique avec comme principal objectif une évolution du/des personnage(s) vers une compréhension de soi et/ou du monde qui les entoure.

Pépita : Je n’ai pas du tout vu ce message comme ça ! Je l’ai vu plus comme un appel à le vérifier à travers cette grosseur du pavé et on se dit qu’on va en avoir pour son « argent » (si vous permettez…). C’est bien raccord avec le style du livre je trouve un peu « western ». Quant à l’exergue, je la trouve formidable ! Un enfant qui lit ça doit se dire : chouette ! Du transgressif ! Des trois, j’ai trouvé que c’était le plus novateur, le plus avec du suspense jusqu’au bout. Ces romans sont clairement dans la veine aventure initiatique et comme vous le dites, c’est la façon d’y arriver qui compte mais pas la fin en soi. Je les trouve extrêmement positifs malgré les embûches avec de belles valeurs.

******

Nous espérons que cet échange le laisse pressentir : les centaines de pages de ces romans-fleuve se dévorent (beaucoup trop) vite et c’est le cœur serré que l’on voit irrémédiablement approcher le moment de débarquer. Si ce cycle est présenté comme achevé, les arbronautes seraient ravies de repartir un jour en voyage avec Davide Morosinotto. Autour du Nil, pourquoi pas ?

En attendant, n’hésitez pas à poursuivre l’exploration de l’univers de Morosinotto avec nos avis :

Le célèbre catalogue Walker & Dawn. Extrait

Lecture d’enfant #34 : Nous sommes l’étincelle

Antoine est un collégien qui adore se plonger dans de longues lectures. Comme beaucoup d’autres lecteurs de sa génération, il aime les romans d’anticipation, les dystopies et le suspense qui fait tourner les pages. Il a accepté de répondre à quelques questions sur son dernier coup de cœur : Nous sommes l’étincelle, de Vincent Villeminot.

Nous sommes l’étincelle, Vincent Villeminot, paru en 2019 chez Pocket Jeunesse

Qu’est-ce qui t’a donné envie de lire ce livre ?

Le résumé m’a intéressé, mais je trouve qu’il ne résume pas très bien l’histoire. Mais ce roman avait l’air captivant et la couverture m’intriguait. J’aime bien les histoires qui jouent dans le futur et les dystopies, donc j’ai pensé que ça pouvait me plaire.

De quoi ce roman parle-t-il d’après toi ?

De plusieurs époques futures et de plusieurs personnages qui en avaient marre du système et qui ont décidé de vivre dans la forêt. Enfin vivre, c’est parfois aussi juste survivre. Par exemple pour les trois enfants qu’on voit au début de l’histoire, qui se font enlever par des braconniers.

Qu’as-tu aimé dans cette histoire ?

L’intrigue était très prenante et j’avais toujours envie de tourner les pages pour savoir ce qui arriverait aux enfants. Je l’ai lu d’un seul trait ! C’était très intéressant et bien écrit. Ce futur semble très crédible.

Qu’est-ce que tu penses de cette idée de quitter la société pour vivre dans la forêt ?

Elle n’est pas mauvaise, je pourrais me l’imaginer. Cela me ferait envie de revenir à l’état sauvage, pour ne plus être contraint par la société moderne et polluer moins.

Ça ne te ferait pas peur ?

Non, pas trop. Bon, les sauvages du livre n’ont pas l’air cool, ça me ferait quand même un peu peur de tomber sur eux.

Tu as eu l’impression de comprendre des choses sur le monde en lisant ce livre, ou tu l’as lu comme une histoire ?

Je l’ai lu comme une histoire.

Quel est ton personnage préféré ?

Pib, car son histoire est passionnante : il participe à des manifestations, rejoint le village dans la forêt où il va rester pendant longtemps.

Quel est ton passage préféré ?

La scène du début avec les trois enfants qui pêchent dans la forêt m’a fait rêver. Sinon, j’ai bien aimé le chapitre sur les grandes manifestations, j’avais envie de savoir ce que ça allait donner.

As-tu envie de recommander ce livre à quelqu’un ? Que lui dirais-tu ?

Oui, à ma grand-mère qui aime que je lui donne des conseils de lecture ! Je lui dirais que c’est un livre captivant.

Pour en savoir plus sur ce roman, n’hésitez pas à consulter les avis de Pépita, Linda et Isabelle !

Lecture commune : Alma, tome 1. Le vent se lève

Il y a des lectures qui font bruisser d’émotion toutes les branches de notre grand arbre ! Alma, le nouveau roman de Timothée de Fombelle, fait indéniablement partie de celles-là. Avant même sa sortie, nous brûlions de découvrir ce livre et après l’avoir dévoré et refermé, l’envie était là de prolonger la lecture en échangeant nos impressions…

Alma, le vent se lève. Gallimard Jeunesse, 2020

Lucie : Cette couverture foisonnante, on en parle ? Que vous a-t-elle inspiré ?

Isabelle : Les illustrations plantent bien le décor. Elles ont quelque chose des gravures des livres anciens, non ? Et pourtant, les lettres orange du titre claquent, Alma trône sur cette couverture avec son arc tendu, le sous-titre annonce que le vent va se lever, les détails nous font pressentir l’ampleur des péripéties à venir !

Pépita : Tout à fait, un style désuet avec des dessins comme des vignettes-moments clés et Alma et sa détermination ! Les petits oiseaux dorés aussi, très symboliques ! Un vent d’aventures en une seule couverture.

Frédérique : Je n’ai pas trop fait attention à la couverture, je n’ai pas trop regardé de peur que les détails m’en dévoilent trop sur l’histoire… Comme pour un film, je ne lis jamais rien avant d’aller en voir. Ayant terminé la lecture, je m’y suis penchée et comme un bon album jeunesse : l’histoire commence avec la 1ere de couv ! Je m’en rend compte lorsque je ferme le livre et cela m’aide dans mon analyse pour faire la p’tite chronique qui suivra.

Lucie : J’aime bien l’idée de Frédérique de revenir à la couverture après la lecture pour y retrouver des indices. Mais je suis définitivement trop curieuse pour ça. La taille du roman, mes précédentes lectures de Timothée de Fombelle et ce foisonnement en couverture m’avaient placée dans l’attente d’une grande fresque d’aventures. Je partage ton avis Isabelle, le contraste entre ces « presque gravures » vertes et ce titre orange claque. On attend une certaine énergie, un tourbillon de péripéties. Je dois dire que j’ai été agréablement surprise de retrouver François Place pour les illustrations, et de constater dès la couverture que le tandem (et l’éditeur) prenaient le contre pied de la couverture (à juste titre) minimaliste de Tobie Lolness.

Lucie : Une fois n’est pas coutume chez Timothée de Fombelle, le roman s’ouvre dans un lieu paradisiaque, une sorte d’Éden protégé du reste du monde. On sent rapidement qu’une menace plane mais au début, tout est calme, idyllique. Vous souvenez-vous de ce que vous avez imaginé de cette famille et de son mode de vie, quand vous l’avez découverte ?

Frédérique : Je n’ai pas senti la menace comme toi, peut-être pour me protéger et savourer ce moment de pure quiétude familiale… Trop de naïveté sans doute, je voulais égoïstement me délecter de tous ces moments de bonheur. Un mode de vie proche de la nature, en osmose et surtout respectueuse de ce qu’elle offre. Des enfants aimants et aimés, joueurs et en même temps sérieux (surtout Alma très protectrice avec son frère). Une grande paix intérieure !

Pépita : J’ai adoré ce début, ce regard d’enfance sur le merveilleux, cette attention si particulière de Timothée de Fombelle aux moindres détails : la grande sœur qui guette les réactions de son frère, cette ombre de « zèbre » bienveillante, les dialogues si purs entre les deux enfants, la description de cet Éden. Du coup, j’ai éloigné la menace qui semble poindre en effet. Je n’ai voulu que le meilleur de ce moment magique. Et puis ce n’est que le début, je voyais bien que l’épaisseur du livre allait me faire vivre moult péripéties !

Isabelle : C’est drôle que tu poses la question, Lucie, c’est une réflexion que je me suis faite aussi en lisant ces pages : Timothée de Fombelle m’avait habituée à un démarrage sur les chapeaux des roues, au cœur de l’action et souvent au milieu de l’intrigue – les premières pages de Vango et de Tobie Lolness sont assez incroyables de ce point de vue ! Là, on voit tout de suite que c’est différent, une atmosphère de calme avant la tempête. Comme vous, j’ai été gagnée par la tendresse qui unit cette famille et par la beauté de l’écrin de nature où elle vit. Et soufflée par la poésie avec laquelle Timothée de Fombelle nous y entraîne : ses mots évoquent le grésillement des gouttes de pluie au contact de la terre brûlante, un figuier sycomore, le chant des cigales, et le décor semble prendre vie.

Lucie : Je suis tout à fait d’accord avec toi, Isabelle. J’ai une passion pour les descriptions de Timothée de Fombelle. En quelques mots choisis et souvent avec des images très poétiques il nous emporte dans un pays, un univers… C’est un talent dont je suis très admirative. Bizarrement, alors qu’ils sont en pleine nature, en lisant ce début de roman cela m’a renvoyée au confinement. Cette vallée coupée du monde, ce cocon familial central et toujours cette espèce de menace venue de l’extérieur… Les points communs m’ont sauté aux yeux.

Pépita : C’est un peintre des mots TDF ! Au contraire de toi, ce roman m’a procuré paradoxalement un immense vent de liberté dans ses premières pages. Je ne me lasse pas de la beauté de ce premier chapitre. Il renferme tout en fait. Déjà. C’est d’une beauté !

Frédérique : Je suis du même avis : un réel envoûtement, j’ai savouré ces premiers chapitres, tellement transportée par ce vent de liberté !

Lucie : Justement, cette liberté ouvre sur la suite, puisqu’elle permet au petit frère d’Alma de partir sans prévenir personne. J’ai trouvé très jolie cette idée d’une sœur qui invente un ailleurs pour faire rêver son petit frère, et lui qui y croit tellement fort qu’il veut le découvrir. Les parents ont une confiance absolue en leurs enfants. C’est très beau la manière dont la mère d’Alma, bien que consciente de ce qu’elle va trouver, la laisse partir à la recherche de son frère. Qu’en avez-vous pensé ?

Frédérique : Cette liberté est à son apogée dès le départ et se renforce avec l’intrépide Alma partant chercher son frère. Malgré eux, les parents d’Alma sont rattrapés par leur passé et ne veulent pas enfermer leur fille. Ils la laissent partir comme eux sont partis pour retrouver la liberté.

Isabelle : Il me semble clair qu’avec ce sujet de la liberté, vous mettez précisément le doigt sur le cœur de ce roman – c’était déjà le cas dans les livres précédents de l’auteur, mais ici plus encore. Le prénom Alma signifie « libre », dans le langage Oko inventé par Timothée de Fombelle qui précise : « ce genre de liberté n’existe dans aucune autre langue. C’est un mot rare, une liberté imprenable, une liberté qui remplit l’être pour toujours. Le père d’Alma raconte que chez lui, ce nom pourrait se dire ‘marquée au fer rouge de la liberté’. » Une liberté brandie par les protagonistes du roman face à l’horreur de l’esclavage. Pour revenir à ta question, je me dis que c’est peut-être parce qu’Alma a grandi ainsi qu’elle ne plie pas face à cette entreprise d’asservissement et en révèle tout l’arbitraire et toute l’absurdité.

Pépita : LIBERTÉ, oui, un thème fort à Timothée de Fombelle, qui traverse chacun de ses romans. Malgré l’esclavage et ses horreurs, cette liberté traverse tout ce premier tome. Malgré l’asservissement, il y a toujours un interstice pour la retrouver : les souvenirs, le chant, le cheval, des rencontres aidantes.

Isabelle : À ce propos, j’ai été très impressionnée par le travail historique et littéraire de Timothée de Fombelle qui évoque cet âge sombre de l’esclavage avec une rare justesse. On sent à la fois qu’il a réalisé un immense travail de documentation et qu’il « vit » cette histoire douloureuse avec les captifs entassés dans les navires, non ? Je trouve qu’Alma témoigne de façon remarquable de la capacité de la littérature et du romanesque à parler d’un sujet comme le commerce triangulaire. Qu’en pensez-vous ?

Pépita : Je te rejoins, Isabelle, sur la documentation de l’auteur. Il a dit que ce sujet le hantait depuis ses 13 ans quand en Guinée, il a ressenti cet appel de l’Histoire. Et il s’est fait cette promesse de la raconter. On le sent en effet très engagé et pour ma part, j’ai appris beaucoup, notamment que des noirs ont participé aussi à la servitude de leurs frères. Comme dans tout drame historique, la soif de pouvoir et la lâcheté qui va avec ressurgit toujours.

Lucie : C’est aussi à ce récit de la visite de l’auteur d’un de ces forts à l’adolescence que j’ai pensé en lisant la question d’Isabelle. Timothée de Fombelle dit clairement qu’il porte ce récit depuis lors, ce qui n’enlève rien à son travail de documentation. Et je te rejoins complètement sur cette thématique de la liberté qui traverse son œuvre. Moi aussi j’ai apprécié cette volonté de montrer que tout n’est pas noir ou blanc (dans la peau comme dans l’âme) et qu’il y a eu des noirs victimes et des bourreaux, comme des blancs inhumains et d’autres terriblement affectés par ce commerce triangulaire. Ne pas tomber dans le manichéisme était probablement l’écueil principal d’un roman sur l’esclavage. Même s’il y a de vrais méchants (encore qu’il nous reste deux tomes pour en savoir plus sur eux aussi), les personnages sont nuancés, ils sont tiraillés entre leurs objectifs et leur conscience et je trouve cela très riche. Je trouve aussi que de (bons !) romans sur ces sujets douloureux ne peuvent qu’aider au travail de mémoire. Se divertir tout en s’informant c’est vraiment le pouvoir de la littérature. Après, à chaque lecteur d’en faire ce qu’il veut…

Isabelle : Je trouve que vous mettez le doigt sur deux apports singuliers de la littérature pour parler du monde, de l’histoire et surtout de ses pages les plus sombres : la construction d’une intrigue placée sous tension vient chercher le lecteur qui tournera les pages de façon plus avide qu’en lisant un documentaire. Et le fait d’incarner cette histoire à travers des destins individuels nous touche, forcément, différemment.

C’est, je trouve, quelque chose qui marche très bien, ici, tant les personnages sont vivants et bien campés. Et il y en a une multitude qui évoluent dans une sorte de chassé-croisé : lesquels vous ont le plus marquées ? Les femmes sont sur le devant de la scène, non ?

Lucie : Mais oui, c’est vrai ! Les femmes ont souvent un vrai rôle chez Timothée de Fombelle et c’est encore le cas ici. Sur trois personnages « principaux », deux sont des filles. Et des forts caractères qui plus est. Entre Alma qui est la détermination incarnée et Amélie qui est si attachée à son éducation et à son indépendance, les femmes sont bien servies. J’aime aussi beaucoup le personnage de Mme de Lô, le « gouvernail » d’Amélie. J’espère qu’elle prendra encore de l’importance dans la suite. Je trouve Timothée de Fombelle toujours très efficace dans la caractérisation de ses personnages. En quelques phrases il esquisse une personnalité, des enjeux… Et je suis accrochée. Heureusement d’ailleurs, parce que comme il multiplie les personnages sans cela on serait rapidement perdus. Le père d’Alma est aussi très intéressant. Je ne veux rien divulgâcher mais Mosi / Moïse est d’une ambiguïté remarquable. Et sur la Douce Amélie, mes chouchous sont évidemment le trio Joseph Mars, Abel Bonhomme et Poussin qui oscillent sans cesse entre méfiance et complémentarité. Et vous ?

Pépita : J’ai aimé tous ces personnages ! Les femmes ont du caractère, et ça me plait. J’ai été immensément bouleversée par le chant de la maman d’Alma, j’ai même dû refermer le livre… Il y a toujours un côté merveilleux que TDF sait distiller et puis cette façon de ne jamais donner la totalité des facettes d’un personnage. Le lecteur attend donc, et là d’autant qu’il sait qu’il y a deux autres tomes qui arrivent. Ils sont incroyablement vivants, ces personnages : j’ai aimé aussi les différentes générations qui se croisent, se décroisent, vont-elles se retrouver ? C’est une aventure au sens large du terme et TDF a vraiment l’envergure pour mener sa barque… et son lecteur là où il veut. Le plus fort aussi, c’est qu’il arrive à « cacher » ce travail immense de documentation par une écriture si fluide avec des personnages très incarnés. Je vous rejoins donc totalement.

Isabelle : Oui, ces personnages incarnent l’histoire et nous la font vivre « de l’intérieur », mais ils nourrissent aussi l’intrigue. Lucie, tu parle du père d’Alma, je trouve qu’il n’est pas le seul qui semble avoir ses secrets, sa part d’ombre. Il y a plusieurs protagonistes dont je ne suis pas sûre de savoir quoi attendre – le charpentier Poussin par exemple, qui en sait manifestement long, Nao, la mère d’Alma qui semble cacher une telle force sous sa tranquillité. Ou même Amélie, fille d’esclavagiste, dont on ne sait pas si elle est menaçante ou menacée…

Pépita, tu évoque un côté merveilleux. Il y a de la poésie dans Alma, et même un peu de magie. Qu’en avez-vous pensé ?

Frédérique : Pour moi la poésie se retrouve dans la relation qu’Alma entretient avec ses parents. Elle est belle et à son apogée lorsque Nao partage ce chant évoquant la magie de son peuple. La magie de ce peuple éteint ou chaque personne possède un pouvoir. Je me demande comment TDF va exploiter ce détail ?

Lucie : La magie est essentielle dans les romans de Timothée de Fombelle, je le soupçonne d’ailleurs d’être passé à la littérature jeunesse justement pour avoir cette liberté là – les éléments merveilleux sont plus facilement acceptés dans les romans dits « jeunesse ». Il y a du merveilleux à plusieurs niveaux dans Alma : cette vallée de départ qui est idyllique, la rencontre des parents d’Alma, ces oiseaux, dont on ne connaît pas vraiment le rôle mais qui sont omniprésents autour des Okos et, évidemment, ces « traces ».
J’adore quand des indices sont semés avant qu’on ait des réponses : les chansons Nao, qu’Alma se mette à avoir un talent inné pour la chasse dès qu’elle quitte sa vallée, cette mousse qui pousse sous Soum ; et ensuite vient le récit de ces traces. La magie opère parce que ses effets font déjà partie de l’intrigue. Et puis la manifestation de ces talents est tellement poétique… J’adhère sans savoir où cela va nous mener ni comment cela va être utilisé, parce qu’un peu de magie enchante le quotidien et que celui d’Alma n’est pas rose !

Isabelle : Tout à fait. Cette part de magie, c’est peut-être ce qui permet par ailleurs de dire à de jeunes toute l’horreur qu’a été l’esclavage sans que cela ne devienne insupportable ? J’ai trouvé que c’était très bien dosé, Alma n’est pas un roman de fantasy ; pour moi, cette magie est plutôt celle des contes. Je l’ai perçue comme une façon de dire la force du courage, de l’entraide, de la dignité affirmée face aux oppresseurs. J’ai d’ailleurs lu quelque part que l’auteur s’était inspiré de faits documentés : on aurait laissé une captive chanter sur un navire négrier parce que on chant apaisait les velléités de révolte. Comme vous le dites, ces dons des Okos, qui restent à l’arrière-plan pour l’instant, contribuent aussi à nourrir notre curiosité.

Lucie : J’aime bien ton parallèle entre la magie des contes et celle d’Alma, c’est très bien vu ! Et cette hypothèse qu’elle permet de « faire passer » les atrocités de l’esclavage… Ça correspond tout à fait à la vision de l’imagination de J. K. Rowling dont je viens de terminer La meilleure des vies. Pour elle, c’est notre imagination qui nous permet de nous mettre à la place des autres bien que l’on n’ait pas traversé les mêmes épreuves, et donc qui nous permet de faire preuve d’empathie.

Pépita : J’ajouterais juste que l’échappée dans le merveilleux nous permet de mieux supporter l’horreur au sens où cela la met à distance. « Une des fonctions essentielles du conte est d’imposer une trêve au combat des hommes » (Daniel Pennac). TDF a une façon bien à lui de faire cohabiter le bien et le mal sans qu’ils s’opposent forcément. On le voit particulièrement avec les zones d’ombre de ses personnages. On est alors à la fois dans un roman historique et un parcours initiatique. Car ces personnages vont se révéler au lecteur mais aussi en même temps à eux-mêmes.

Isabelle : « Le vent se lève » n’est que la première pierre d’une trilogie. Une forme qui fait écho aux trois pôles du commerce triangulaire, mais qui exige de renouveler l’intrigue pour garder le lecteur sur plusieurs centaine de page. Qu’en avez-vous pensé ?

Pépita : Je ne suis pas allée au-delà du premier tome ! J’attends la suite car je sais qu’elle va nous surprendre bien au-delà de ce qu’on pourrait imaginer.

Lucie : Trois tomes pour trois continents, trois personnages (Alma bien sûr, mais aussi Joseph et Amélie) et probablement trois étapes : capture, esclavage et abolition. C’est comme ça que je l’imagine, mais je n’ai pas d’attente particulière pour l’intrigue. D’abord parce qu’il va falloir attendre encore un moment avant le deuxième et le troisième (!) tome. Et puis parce que j’aime tellement me laisser porter par les trouvailles et les détours de Timothée de Fombelle, qui va de toute façon toujours bien au delà de ce que je pourrais imaginer. Je ne trouve pas que ce premier tome ait un « ventre mou ». Il y a un moment un peu long sur le bateau, mais cela correspond bien à la durée et à la dureté du trajet, donc cela ne m’a pas gênée. Et toi, qu’en as-tu pensé ?

Isabelle : J’ai apprécié l’ampleur de cette fresque, il fallait probablement une trilogie pour y parvenir. L’histoire commence en 1786, trois ans avant la Révolution, je m’attends comme toi à de grands bouleversements que je brûle de découvrir.

Pépita : J’avais une petite question sur la forme : vous avez dû remarquer le petit « jeu » de l’auteur avec ses fins de chapitres et les noms des chapitres ? Vous en avez pensé quoi ?

Isabelle : C’est drôle que tu parles de ça, Pépita, j’y pensais aussi quand nous parlions de poésie. Quand nous avons lu Alma à voix haute, mon fils n’a pas mis deux chapitres à se rendre compte qu’effectivement, le titre de chaque chapitre correspond à ces derniers mots (j’aurais mis plus de temps à le remarquer sans lui, je pense !). Cela a nourri notre curiosité car on se demande souvent comment le chapitre en arrivera à ces mots-là !

Lucie : J’ai récemment lu Victoria rêve, et je me suis aperçue que Timothée de Fombelle y jouait déjà avec les derniers mots des chapitres utilisés en titre. Je trouve étonnant de voir comme ça fonctionne bien, à chaque fois. Comme toujours, je serai curieuse de savoir comment ça se passe « en cuisine » : ça semble simple et évident quand on le lit, mais ça demande certainement un travail complexe.

Isabelle : Pour conclure, j’avais envie de vous demander quelle émotion a prédominé chez vous à la lecture de ce roman

Lucie : L’émotion qui a prédominé chez nous a été l’excitation. De retrouver Timothée de Fombelle pour un roman en plusieurs tomes tout d’abord (la lecture de Tobie Lolness était encore fraîche), et de découvrir sans cesse ce qu’il nous avait réservé dans le chapitre suivant. C’est vrai que ce jeu sur les titres crée une attente, mais elle est aussi alimentée par les changements de personnages qui nous laissent en suspens. En conséquence, les vacances aidant, on l’a lu en très peu de temps malgré le nombre de pages.

Pépita : L’émotion ? Mais il y en a tant ! Ce qui prédomine chez moi, et cela va vous paraitre paradoxal, c’est le sentiment de liberté. Liberté de suivre un cheval, de suivre son instinct, de chanter, de mener sa barque, de désobéir, de garder ses secrets… Je crois vraiment que c’est un fil rouge du roman et qu’il n’a pas fini de nous surprendre.

******

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter les billets d’Isabelle, de Lucie, de Pépita et Frédérique, ainsi que le billet consacré à Timothée de Fombelle dans notre série « classiques de la littérature jeunesse », qui vous donnera certainement envie de lire ses autres livres. N’hésitez pas non plus à nous donner votre ressenti sur Alma : ce roman vous fait-il envie ? Peut-être l’avez-vous déjà lu, qu’en avez-vous pensé ?

Lecture d’enfant #31 : Catch, tournevis et lutins-robots

Le roman coup de cœur d’une jeune lectrice passionnée par les livres.

Je m’appelle Louisa, j’ai 10 ans, je suis en CM2 et j’ai envie de vous parler du livre : 

Catch, tournevis et lutins-robots

Ça parle de quoi ?

Le petit frère de Pénélope vient de se faire enlever par des lutins-robots – malpolis, qui plus est ! Va-t-elle le laisser disparaître dans une dimension parallèle ? Sûrement pas : elle part à la poursuite des kidnappeurs avec Dounia, sa meilleure amie catcheuse. Et si sur le chemin, elle doit faire équipe avec ce-crétin-de-Léopold, son rival, affronter une reine (bleue) complètement cinglée, gagner un combat de catch géant, ou déclencher une révolution robotique, qu’à cela ne tienne ! Personne ne lui pique son frère : elle a besoin de lui comme cobaye pour ses expériences scientifiques…

Auteure : H. Lenoir
Illustratrice : Marie Morelle
Sarbacane p.192

Pourquoi as-tu choisi ce livre en particulier ?                                                                                                                  
J’ai découvert ce roman en participant à un groupe de lecteurs, Mes premières 68 qui propose une sélection de premiers ou deuxièmes romans jeunesse d’auteurs francophones (concept : livres voyageurs). C’est une lecture qui m’a permis de quitter ma zone de confort : lire des romans plus volumineux et m’intéresser à une catégorie que je ne connaissais pas trop (Aventure/humour).

Qu’as-tu aimé dans cette histoire ?

J’ai aimé découvrir les illustrations au fil des pages, elles sont d’ailleurs très réussies. J’ai aimé tous les personnages. J’avais l’impression d’être à leurs côtés et même parfois, je m’identifiais à eux. Ce qui m’a plu aussi, c’est que chaque personnage a une passion bien à lui. Il y a énormément d’actions, de rebondissements et de surprises. 
L’histoire est rythmée, touchante et à la fois amusante.
J’avais toujours envie de continuer ma lecture car je voulais connaître la suite de leurs aventures.

Quelles sont les points forts de cette lecture ?

J’ai particulièrement aimé la morale de ce livre : Apprendre à connaître les autres, ne pas s’arrêter à des jugements et croire jusqu’au bout, à ses rêves ou à ses projets. 

Quel est ton personnage préféré ?

J’adore Pénélope, c’est une fille intelligente, rebelle et qui n’a peur de rien. Elle est très attachée à son petit frère et elle fera tout pour le sauver.  

Un dernier conseil ?

Ne pas s’arrêter à la couverture et au titre qui semblent être plus l’univers 
des garçons car ce n’est pas du tout le cas. 

Parole de maman :

J’espère que Louisa vous aura donné envie de découvrir ce roman d’aventure drôle.

Il est parfait pour les petits lecteurs qui commencent à lire des romans. Un bon compromis pour appréhender un certain volume de pages sans se décourager.

Merci Louisa !