Prix À l’Ombre du Grand Arbre 2024 : les lauréats !

À l’ombre du grand arbre célèbre la littérature jeunesse avec un prix qui distingue les titres pour lesquels vous avez votés, parmi ceux que nous avons sélectionnés dans nos toutes nos lectures parues l’année précédente. Ce prix, c’est…

… six catégories regroupant des genres s’adressant de la toute petite enfance aux ados

… trois titres sélectionnés dans chaque catégorie (cliquez sur le nom des catégories pour les retrouver)

… 265 votes donnés, merci à vous !

Et maintenant, roulement de tambour, le grand arbre tremble de fierté des racines à la cime au moment d’annoncer LES LAURÉATS !

Catégorie Brindille : album petite enfance

Un album pour avoir peur et frissonner avec nos « plus petits » comme il se doit !

Il y a des monstres dans ma chambre ! de Fanny Pageaud, A pas de loup, 2023

Catégorie Petites feuilles : album pour « grands »

Un album poétique et d’une belle finesse pour donner confiance à nos « plus grands »…

Je suis ton manteau d’Angélique Villeneuve et Julien Martinière, Etagère du bas, 2023

Catégorie Grandes feuilles : romans jeunesse

Une lecture de haut vol pour ce roman où un jeune homme est repéré, et invité à rejoindre Crookhaven, une mystérieuse école… qui lui permettrait de développer ses talents de voleurs bien évidemment !

CrookHaven-l’école des voleurs de J.J. Arcanjo, Pocket Jeunesse, 2023

Catégorie Belles Branches : roman ado

Guerrière, c’est un roman que nous avons lu en apnée, qui nous a chamboulées, un texte qui bouscule, puissant, émouvant.

Guerrière de Cécile Alix, Slalom, 2023

Catégorie Branches dessinées : BD jeunesse

Une lecture libératrice et savoureuse (nous pesons nos mots) qui vous donne envie d’enfourcher votre vélo et de laisser opérer la magie !

Les petites reines de Magali Le Huche d’après le roman de Clémentine Beauvais, Sarbacane, 2023

Catégorie Racines : Documentaire

Riche en informations, ce documentaire délivre avec humour et un aspect ludique toute la passion de ses auteurs pour le fromage… et les bons mots !

Balade en fromagie de Bernard Friot et Aurore Paillusson, illustré par Thomas Baas et Charlotte Fréreau, Milan, 2023

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Un grand bravo aux lauréats ! Et merci de concentrer tout ce qu’on aime à l’ombre du grand arbre : des couleurs et du rythme, une fenêtre ouverte sur le monde, un souffle de liberté, des perches tendues qui invitent à la réflexion et des plumes vraiment singulières.

Nos coups de cœur de mai

Alors que le printemps joue encore les timides dans certaines de nos contrées, mai se pare de milles couleurs qui se retrouvent dans la diversité de nos lectures. Voici nos derniers coups de cœur !

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Si Linda a moins lu ce mois-ci, elle a cependant craqué pour ce bel album au charme rétro qui nous plonge dans l’imagination débordante de deux enfants envoyés au jardin pour prendre l’air et s’amuser. Bien loin des bacs à sable, le potager et les animaux de la ferme ouvrent sur une aventure gourmande et pleine de rebondissements qui donnent aussi l’illusion du danger et confrontent les enfants à leur propre peur.
On ferait comme si célèbre l’enfance et ses jeux dans lesquels une imagination fertile et sans limite vaut plus que tous les jouets du monde.

On ferait comme si d’André Marois & Gérard Dubois, Grasset, 2023.

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Plusieurs coups de cœur pour Séverine en ce mois de mai.

D’abord, pour le manifeste poétique Fraîcheur. Thierry Cazals a puisé son inspiration dans les haïkus du poète japonais Issa pour inviter à une pause douceur, avec des réflexions à livre ouvert sur le respect à porter au vivant, des histoires d’éphémère, de lumière, d’envol poétique à saisir en beauté… « Et si nous mettions un peu d’air et de souffle dans nos vies ? » Les illustrations réalisées à la pointe sèche par la grande artiste de la sensibilité qu’est Csil, sont emplies de grâce. Goutte à goutte de tendresse, elles accompagnent délicatement un texte puissant et engagé qui ouvre des fenêtres sur un horizon apaisé.

Fraîcheur, de Thierry Cazals et Csil, Editions du pourquoi pas ?, 2024

Son avis complet ICI

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Deuxième coup de cœur pour l’album Indigo. D’une intelligence narrative exceptionnelle, d’une richesse graphique extraordinaire, il raconte la prise de conscience d’un jeune garçon sur cette situation inhumaine qu’est l’esclavage. Ce jeune garçon à l’imagination débordante comprend aussi que la résistance et l’engagement peuvent prendre une forme plus subtile que celle de la lutte frontale. Séverine a été sous le charme du texte original et didactique, pertinent et captivant, rythmé et ciselé, tandis que la richesse de la langue, la poésie et la sensibilité s’invitent quand même à la fête. Les illustrations explosent de couleurs et de détails, elles sont fines et expressives, elles osent le brin de malice qui allège le poids d’un sujet aussi sérieux, parce qu’elles n’oublient jamais qu’elles s’adressent à de jeunes yeux. Ce duo qui n’en est pas à son coup d’essai se permet un nouveau coup de maîtres et n’en finit plus de l’enchanter. Cet album nécessaire, plus que jamais, interpelle et rappelle la nécessité de combattre l’ignominie, chacun à son niveau, avec les moyens dont il dispose.

Indigo, d’Alex Cousseau et Charles Dutertre, Rouergue jeunesse, 2024

Son avis complet ICI

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Enfin, Séverine a été bouleversée par un court roman ado. Avec Des jours comme des nuits, Sébastien Joanniez lui a offert une heure d’émotions très fortes. Son héroïne, Manon est collégienne. Petit frère turbulent. Mère qui cuisine très souvent des pâtes. Elle se souvient. Elle n’est pas d’accord. Elle rêve. Elle pleure. Elle écrit. Elle est triste, souvent, heureuse, parfois. Elle grandit sans père. Elle a trouvé son corps, pendu au poirier de son enfance, le jour où il s’est suicidé. Il y a ses jours qui sont comme des nuits et ses nuits qui seront douces à nouveau, un jour. Il y aura ce jour où la vie gagne à la fin. Dans une trame narrative faisant la part belle aux souvenirs, l’auteur a remarquablement écrit, tout en pudeur et poésie, le manque, l’absence, le vide et le trop-plein de douleur, la présence partout, la reconstruction d’une famille après la pire des tempêtes et surtout, au final, un cri d’amour inoubliable d’une fille pour son père.

Des jours comme des nuits, de Sébastien Joanniez, Rouergue Jeunesse, 2024

Son avis complet ICI

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Pour Liraloin, la venue prochaine de Mary Orchard a ravivé le plaisir de partager le préquel du roman Sous les étoiles de Bloomstone Manor. Il s’agit de l’histoire très intime de Lord Nathanaël Stone bien avant qu’Agathe Langley ne s’établisse comme chercheuse dans ce magnifique lieu. Place au récit de La Première Rose de Bloomstone.

La Première Rose de Bloomstone de Mary Orchard, Casterman, 2024

Son avis complet ICI. Celui d’Helolita ici.

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Lucie a particulièrement apprécié deux livres sur les livres ce mois-ci. Elle a été séduite par le ton et l’amour de la littérature (jeunesse) dont ils témoignent.

Si vous avez aimé le petit bonhomme grognon dans Le livre le plus génial que j’ai jamais lu, vous allez adorer le retrouver dans Happy End ! Comme à son habitude, il râle, s’énerve et interpelle directement l’auteur. Ici, il ose donner des conseils au grand Christian Voltz pour écrire une histoire pour enfants. Deux histoires en une pour un coup de pied dans les clichés, beaucoup de rires et une réflexion sur les attentes des jeunes lecteurs. Extra !

Happy End ! de Christian Voltz, L’école des loisirs, 2023.

Son avis complet ICI.

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C’est dans une bourse aux livres que Lucie est tombée sur Lire est le propre de l’homme. Son sous titre « de l’enfant lecteur au libre électeur » ne pouvait que l’interpeller. Dans ce recueil (malheureusement difficilement trouvable en papier mais disponible en téléchargement epub ici), L’école des loisirs a demandé à une cinquantaine d’auteurs jeunesse de raconter, témoigner de leur rapport à la lecture et à l’écriture. Souvenirs d’enfance, listes, illustrations mais aussi textes engagés forment ce livre petit par la taille mais porteur d’une ambition immense.

Lire est le propre de l’homme, collectif, L’école des loisirs, 2011.

Son avis complet ICI.

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De son côté, Héloïse/Ileautresor a succombé à la Grécomania. Il s’agit d’un album grand format permettant de découvrir la civilisation de la Grèce antique. Celle-ci a inventé la démocratie : A Athènes, les citoyens peuvent s’exprimer sur l’Agora et voter des lois. En revanche, la famille athénienne n’est pas fondée sur l’égalité. La Grèce antique est aussi connue pour sa mythologie. La multitude de dieux grecs est présenté dans ce beau livre avec des rabats colorés. Leur présence permet d’expliquer l’alternance du jour et de la nuit ou celle des saisons. Athéna représente un idéal de perfection lorsqu’elle apparaît dans un temple de marbre, au Parthénon. La Grèce antique a aussi inventé la philosophie, le théâtre, les Jeux olympiques, où des athlètes se défient pour éprouver force et courage dans des épreuves gymniques et hippiques. Un album animé qui permet de mieux comprendre en finesse cette civilisation où « tout doit tendre vers la justice et la beauté ».

Grécomania de Emma Giuliani et Carole Saturno, Éditions Les grandes personnes, 2019.

Son avis complet ICI et celui d’Isabelle LA.

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La poésie, késako ? Voilà bien une question qui taraude La collectionneuse de papillons depuis bien longtemps ! Et quoi de mieux que des métaphores de mots et de couleurs pour y répondre.

Et si la poésie était un passage secret parfois un raccourci parfois un détour pour apprendre à se perdre

ou alors une porte spatio-temporelle pouvant s’ouvrir n’importe où la nuit le jour à la ville à la campagne dans sa chambre ou dans sa cuisine et qui mène tout droit vers la vie

La poésie, Késako ? Thomas Vinau, Marc Majewski,, Gallimard Jeunesse, 2023.

Vous l’aurez compris, cet album explore l’imaginaire l’image l’imagination pour célébrer un genre trop souvent caricaturé voire délaissé. Une invitation au voyage, à ce voyage qui relie notre monde intérieur au vaste monde des mers et des terres inconnues.

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C’est un graphique qu’Héloïse voulait mettre en avant ce mois-ci !

Effie, l’apprentie sorcière de Brooklyn, est envoyée en camp de vacances par ses deux tantes. Un camp réservé aux sorciers et sorcières, qui doit lui permettre de travailler son affinité avec la nature. Et comme toujours avec la jeune fille, c’est l’occasion d’explorer un aspect de ses pouvoirs, et de faire de belles rencontres.

Si Héloïse aime autant cette saga, c’est pour la tendresse qui s’en dégage, et pour les belles valeurs défendues. Ce troisième opus fleure bon l’été, on s’y croirait presque ! C’est aussi l’occasion de se plonger en pleine nature, et de parler amitié et adolescence.

Les personnages sont attachants, les aspects développement personnel et confiance en soi sont abordés avec finesse et délicatesse. C’est donc pour Héloïse une lecture doudou, pleine de belles ondes, de joie et de bonne humeur !

Les sorcières de Brooklyn, tome 3 : Vacances magiques, de Sophie Escabasse, Bande d’ados, Mai 2024

Son avis complet ICI.

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Les lectures de mai de Blandine ont surtout tourné autour de la Deuxième Guerre Mondiale, entre romans, BD et albums, ce sont ces deux-ci qui lui ont particulièrement plu !

Anne Frank. Isabel THOMAS et Paola ESCOBAR. Gallimard Jeunesse, 2019

Cet album documentaire nous présente qui était Anne Frank, avant de devoir se cacher dans l’Annexe, la vie dedans puis sa postérité grâce à son père et la publication de son Journal. Le dessin, tout en pastel, apporte de la légèreté à ce tragique récit de vie.

Son avis complet ICI

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Lebensborn. Isabelle MAROGER. Bayard Graphic, 2024

Dans cet album au titre glaçant, Isabelle Maroger nous relate l’histoire de sa mère, et la sienne bien sûr. Elle traite son sujet avec une grande délicatesse, simplicité et même humour, dans un trait tout en rondeur.

Son avis complet LA et celui de Linda.

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Isabelle s’est régalée avec le dernier roman de Flore Vesco : un texte unique en son genre qui pulvérise un conte que l’on croyait connaître par coeur et que l’on découvre bouche bée. La surprise vient notamment du choix d’une narration chorale qui renverse la perspective en faisant parler celles et ceux qu’on n’a pas l’habitude d’entendre. Et l’invitation d’un personnage inattendu, la Faim, celle qui gronde et tord le ventre, mine de l’intérieur et brouille le discernement au point que le drame semble inévitable. Perturbant, voire dérangeant, mais addictif. Ces pages sont charnelles et organiques, gorgées de sang, de bile, de salive, de larmes et d’entrailles qui crient famine. Outre la résonance malheureusement actuelle du sujet, le roman questionne avec beaucoup d’intelligence les carcans genrés et les cinquante nuances de domination masculine. Il est encore question de l’âge adolescent, ses vertiges et prises de conscience. Et de l’hypocrisie bourgeoise qui boude les corps, s’efforce de les effacer et de dissimuler la bête qui sommeille en chacun de nous sous un vernis de conventions. Saupoudrez l’ensemble de clins d’œil à Saint Nicolas et Tomi Ungerer, Cendrillon et Boucle d’Or, et vous obtiendrez une savoureuse pépite gothique et féministe, à laquelle le rouge et le noir de la couverture siéent à ravir !

L’avis complet d’Isabelle, Lucie, Linda et Héloïse

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Et vous, qu’avez-vous aimé ce mois-ci ?

Nos coups de cœur d’avril

En avril, le temps maussade nous a convié à rester sous notre plaid bien douillet. Quoi de mieux que de belles lectures réconfortantes pour accompagner un petit thé fruité et fumant ?! En attendant de retrouver le soleil, voici nos nombreux coups de cœur !

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Pour Liraloin c’est une déconnexion totale qui s’est opérée après la lecture du magnifique album le Voyage de Shuna de l’immense Hayao Miyazaki.

« Ces évènements ont pu se dérouler il y a fort longtemps, ou bien allaient-ils se produire dans un lointain futur ? Plus personne ne le sait vraiment. » Sur une terre aride la force humaine est mise à rude épreuve, les récoltes ne sont que désolation. Ici vit Shuna, jeune prince héritier de la couronne qui, au détour d’un chemin, recueille un étranger : un vieillard à l’article de la mort. Usant ses dernières forces, ce dernier lui narre son épuisant périple à la recherche d’un trésor inestimable. Une richesse qui pourrait sauver les habitants de toutes les contrées. Intrigué et téméraire, Shuna décide de partir à la poursuite de ce trésor…
Véritable quête initiatique, Shuna se retrouvera plus d’une fois à prendre des décisions qui bouleverseront ses convictions en son for intérieur. Je n’ai pas pu m’empêcher d’y trouver une résonnance avec le fabuleux roman de Damasio : La Horde du Contrevent. Les éléments de la nature, le vent, le sable ne sont que douleurs pour les personnages, les poussant au bout de leurs forces physiques et psychologiques.  Le chemin est infini…

Le Voyage de Shuna de Hayao Miyazaki, Sarbacane, 2023

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De son côté, Lucie avait noté La Parure suite à un billet d’Isabelle et elle n’a pas été déçue ! Cette réécriture du classique de Guy de Maupassant par Annelise Heurtier est extra. Elle répond de manière étonnante à une autre réécriture de l’auteure, Combien de terres faut-il à un homme ?, sur le thème de la pléonexie. Les héros de ces deux albums ne se satisfont pas de leur quotidien et vont le risquer en tenant de s’élever (socialement, financièrement). Ce « plus » était-il indispensable à leur bonheur ? Eux le pensent, le lecteur est invité à y réfléchir. Tout d’abord déstabilisée par les illustrations de Delphine Jacquot qui a fait le choix de l’anthropomorphisme, Lucie a finalement trouvé qu’il permettait d’installer une certaine distance qui aidera sans aucun doute les enfants à entrer dans le récit et à se questionner.

La Parure, Annelise Heurtier d’après Guy de Maupassant, illustrations de Delphine Jacquot, Thierry Magnier, 2022.

Les avis complets d’Isabelle, Linda, Blandine et Lucie.

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Si le premier tome était déjà impressionnant (voir la lecture commune qu’en avaient fait les copinautes ICI), le second tome de la saga Pallas, Sur les flancs de l’Ida est encore un cran au-dessus d’après Lucie. Peut-être parce que les personnages sont plus familiers et que l’échéance de la guerre de Troie approche. Au cœur des intrigues, comme l’a si bien dit Isabelle dans sa critique du premier tome : amours, trahisons, vengeances, c’est « Dallas » dans la Grèce antique. Et les femmes sont bien entendu les premières victimes des hommes comme des dieux. Pas une n’est épargnée par la violence, que celle-ci la touche directement ou soit dirigée vers ses enfants. Cette série est clairement à réserver aux plus grands tant la brutalité irrigue toutes les relations entre les personnages. Ceci posé, Lucie est admirative de la manière dont l’auteure a su créer des liens et des intrigues entre ses célèbres protagonistes. Tout est clair, implacable et brillant. La guerre de Troie approche, elle est inéluctable et nous sommes impatientes de lire de quelle manière Marine Carteron l’utilisera dans le troisième (et dernier) tome de cette série.

Pallas, Sur les flancs de l’Ida, Marine Carteron, Le Rouergue, 2024.

Les avis de Lucie et Frédérique.

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Héloïse (ileautresor) a eu envie de partager son coup de cœur pour Médiévalmania. Cet album grand format avec rabats permet de faire connaissance avec le Moyen-âge. Le château fort apparaît à travers un jeu de volets : le pont-levis se déplie et permet d’accéder au château. Ce livre permet d’aborder la vie des personnes à l’époque médiévale. Au Moyen-âge, se construisent aussi les villes toute en verticalité avec leurs tours et leurs clochers. Elles réunissent de multiples fonctions (politique, économique, militaire, festive, religieuse et créative) et sont bâties en aspirant à la beauté. A la fin, l’album évoque de nombreuses inventions (imprimerie, boussole, poudre à canon, horloge, lunettes, caravelle). Il est aussi question de figures comme Jeanne d’Arc ou le roi Arthur. En bref, Médiévalmania est un album pour mieux comprendre la période médiévale et la saisir dans toute sa finesse à travers toute la beauté de pages animées.

Médiévalmania, Emma Giuliani et Carole Saturno, Éditions Les Grandes Personnes, 2023.

Son avis complet ICI.

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Pour Séverine, le coup de cœur d’avril, c’est pour un roman ados d’un auteur trop peu (re)connu, à savoir Hervé Giraud. Publié chez Thierry Magnier quand il s’adresse aux adolescents, et plus récemment chez Seuil Jeunesse pour la collection « Le grand bain » destinées aux enfants de 8-10 ans, il compte à son actif une dizaine de romans, où se mêlent toujours profondeur et fantaisie, le tout agrémenté d’un humour fin et subtil, y compris dans ses œuvres les plus sombres.

Celui-ci ne fait pas exception, on valse sans cesse entre sourires et émotion. Il est d’autant plus intéressant qu’il traite de sujets peu vus en littérature jeunesse : la vie au sein d’un cirque familial itinérant, la condition animale dans les parcs animaliers, le trafic d’animaux sauvages et plusieurs autres thématiques contemporaines, telle la solitude, la solidarité, le respect… Le roman est plein de rebondissements et de suspense, il est peuplé de personnages hauts en couleur, puisqu’on y rencontre entre autres un yogi philosophe fan de Johnny, une chienne obéissante et une grand-mère qui n’a pas froid aux yeux…Mais surtout, on s’attache énormément à son jeune héros, Angelino, dont le meilleur ami est n’est autre que le  tigre du Bengale avec lequel il a grandi et qui lui est enlevé, parce que les lois ont changé et que les animaux sauvages sont désormais interdits dans les cirques. Révolté par cette situation au début du roman, il fera tout pour pouvoir récupérer KroK, en prenant des risques, en surmontant ses peurs, prise de conscience au passage, et il aura une autre vision sur les animaux privés de liberté à la fin de l’histoire. Il sortira grandi de son aventure, et peut-être même un peu amoureux…

Séverine a retrouvé dans ce roman toute la saveur de la sauce Giraud ! Elle pique un peu, avec une pointe de causticité, juste ce qu’il faut pour donner un goût de reviens-y. Mais son ingrédient secret est cette tendresse omniprésente pour les jeunes gens bousculés par les décisions des adultes, les coups du sort, la solitude parmi leurs pairs, pour des raisons qui tiennent au hors normes, ou la sauvagerie du monde. Bref, elle se délecte à chaque fois de sa plume aiguisée, pointue, mais qui, toujours, sait aussi rentrer les griffes pour se faire poésie, douceur et pattes de velours.

KroK, Hervé Giraud, Editions Thierry Magnier, 2024

L’avis complet de Sev se livre.

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De son côté Linda a fait de bien belles découvertes dont un très joli roman d’apprentissage découvert au hasard de ses pérégrinations libraires. Ainsi, Madou en 5 actes lui a littéralement tendu les bras après que sa couverture lui ait fait pétiller la rétine.
Dans ce roman en cinq actes, Guillaume Nail dresse le portrait d’une adolescente qui porte en elle les doutes et questionnements de se génération, en proie à une inquiétude permanente de trouver sa place dans un monde en plein changement, et à l’intérêt de faire des études qui ne la conduiront nulle part.
Récit initiatique, Madou en 5 actes est un roman qui se révèle exaltant dans les passions de son héroïne et dans l’écriture moderne de son auteur, dont les descriptions de paysages sont une invitation au voyage, et dont la poésie se fait la fenêtre d’une âme luttant avec un puissant désir de liberté.

Madou en 5 actes de Guillaume Nail, Milan, 2024.

L’avis complet de Linda est ICI, et celui de Séverine .

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Mais c’est aussi Une aventure au royaume de porcelaine qui a su la toucher par la puissance de ses illustrations élégantes, exécutées avec une précision incroyable qui donne vie à l’histoire dans une succession d’obstacles et d’étapes à franchir pour parvenir à la suivante.
Album sans texte, on y découvre le parcours de son héros à la poursuite de son chapeau emporté par le vent au-travers d’un service en porcelaine qui enchante par sa diversité et fait voyager par son style asiatique.
Katerina Illnerova a été récompensé du Prix du Silent Book Contest 2022 pour ce premier album, alors qu’elle était encore étudiante.

Une aventure au royaume de porcelaine de Katerina Illerova, Obriart, 2024.

Son avis complet est à lire ICI.

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Pour Colette, le mois d’avril a le goût particulier du silence, un silence noir et blanc, rythmé comme une danse que l’on commence à deux sur un rythme endiablé pour la terminer à la cadence de son propre souffle, alenti par le temps qui creuse rides et cernes au visage comme au cœur. Duo mambo de Wei Middag et Aurèle Arima est un album de peu de mots, qui commence par une naissance et les pirouettes de deux bébés. Puis les bébés se lèvent, grandissent, se rencontrent, leurs mouvements se font glissements, battements, élans, frissons, leurs mouvements se font sensuels, étreintes, embrassades, leurs mouvements se font famille. Puis les corps se courbent, se raidissent, s’éloignent, se séparent. Et commence un voyage à travers le temps. Voilà un petit album qui laisse le souffle coupé. Un album épuré, d’une grande simplicité qui raconte quand il se tait. Un album de toute une vie comme Colette les aime tout particulièrement.

Duo mambo, Wei Middag, Aurèle Arima, La Joie de lire, 2023.

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Pour Héloïse (helolitlà), Avril a été l’occasion d’une belle rencontre printanière, celle d’Auguste, le renard qui n’aime pas les surprises. Or, son amie Suzy, l’intrépide écureuille, lui en a promis une. Le voilà qui stresse, prévoyant le pire…

La grande angoissée qu’est Héloïse a énormément aimé cet album adorable, qui lui a beaucoup parlé. Elle a craqué devant ses couleurs vibrantes, ses illustrations printanières qui rendent hommage à la nature dans toute sa splendeur. C’est pour elle un ouvrage idéal pour dédramatiser ces peurs incontrôlées, pour apprendre à lâcher prise.

Et puis, une surprise… peut aussi se révéler être un joyeux moment de partage !

Je n’aime pas les surprises, Myriam Bos, Bayard Jeunesse. Mars 2024

Son avis complet ICI.

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Côté romans, Héloïse a fait de beaucoup de très belles lectures, dont l’envoûtant De délicieux enfants, de Flore Vesco. Et la lecture-doudou, le roman qui revisite habilement la mythique école de sorciers version pickpocket, ce fut le premier tome de Crookhaven.

Gabriel est un voleur hors-pair. Orphelin, il grandit dans la pauvreté avec sa grand-mère. Repéré pour ses talents hors norme, il est invité à Crookhaven, une mystérieuse école…

Héloïse est retombée en enfance le temps de cette lecture passionnante. Dans cette école de voleurs au grand cœur, elle a retrouvé avec joie tous les ingrédients du genre : cours originaux, amis hauts en couleurs, bibliothèque, épreuves qui sortent de l’ordinaire, grands méchants… et surtout, elle a découvert un texte addicitif qui pose de belles interrogations sur la justice et la répartition des richesses.

Crookhaven, tome 1 : L’école des voleurs, de J.J. Arcanjo, Pocket Jeunesse. Mai 2023

Son avis complet ICI, celui d’Isabelle, de Linda et de Lucie.

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Pour Blandine, ses coups de cœur sont autant affaires de visuels, de visions que d’originalités narratives.

Cet album carré au touché velouté nous permet de connaître les différents noms que l’on attribue aux groupes d’animaux. Entre sobriété et originalité, la découverte est de mise! Et le parti-pris illustratif est génial: Les animaux sont représentés minimalistes, en perles à repasser.

Un troupeau de moutons. Jean DA ROS. La Partie, mars 2024

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Cet album nous permet de voir passer une vie

À travers les barreaux d’un lit, d’une fenêtre
À travers le prisme d’une loupe, d’un télescope
À travers l’écran d’une télévision, d’un ordinateur
À travers le verre d’une serre, de jumelles

À travers le temps qui passe et ses changements
Subtils, délicats, évidents, difficiles, lumineux
À travers les décisions prises, choisies, subies, révélées
À travers l’âge qui change les données
À travers la vie qui se poursuit sous ses différentes formes

La couverture toute en sobriété donne le ton grâce à sa découpe
Entre ses pages, nul autre texte qu’une date qui égrène les années une à une, et un lieu
Chaque double page nous offre deux visions: le personnage principal avec ce qui l’entoure, et ce que lui voit
Une palette de couleurs restreinte, et pourtant très évocatrice, qui permet de fines et ingénieuses mises en perspective, des détails en apparence anodins, une ombre qui veille, d’autres vies qui bruissent
De l’infiniment petit à l’infiniment grand

Un album d’une grande maîtrise, silencieux et pourtant puissamment évocateur.

A travers. Tom HAUGOMAT. Thierry Magnier, septembre 2018

L’avis complet de Blandine ICI

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Ce mois-ci, Isabelle (ileauxtresors) s’est laissé désarmer par un splendide roman graphique venu du Québec. Le pèlerinage d’une jeune femme dans sa maison d’enfance ravive les souvenirs, ceux d’une vie de famille comptant un enfant différent. Son petit frère, surnommé Major Tom – le petit astronaute, c’est lui. Outre le poids du handicap qui entrave la communication et la mobilité du garçon, la société ne facilite pas les choses pour les enfants comme Tom. Ces pages évoquent un sujet douloureux avec beaucoup de poésie (en cela il rappelle le roman S’adapter, de Clara Dupont-Monod, paru la même année). Elles ouvrent notre horizon, serrent le cœur tout en sachant nous réconforter par la tendresse qui les imbibe. Jean-Paul Eid compose notamment un splendide personnage de grande sœur, solaire, dans sa vie de petite fille qui grandit, mais attentive et aimante. Impossible de ne pas être bouleversé en comprenant, au détour de la dernière page, que cette BD lui a été inspirée par sa propre expérience familiale.

Le petit astronaute, de Jean-Paul Eid, La Pastèque, 2021.

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Et vous, qu’avez-vous lu en avril ? Quels ont été vos coups de cœur ?

Nos coups de cœur de mars

En ce lundi de Pâques qui est aussi un premier avril, nous vous proposons un autre genre d’accumulation. Parce que les beaux jours arrivent et qu’il est doux d’en profiter étendu sur l’herbe un livre à la main, voici les titres que nous avons lus et aimés le mois dernier !

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C’est en discutant avec Ludovic Lecomte et Irène Bonacina lors d’un salon que Lucie a eu envie de découvrir La Cabane. L’illustratrice était si enthousiaste au sujet de ce roman qu’il était impensable de passer à côté. Et en effet, l’auteur parvient avec maestria à glisser ses lecteurs dans la tête d’un ado reclus chez lui depuis six mois. Que s’est-il passé ? Quelles sont les conséquences de cette incapacité soudaine à sortir ? Va-t-il parvenir à se tirer de cette situation ? Avec beaucoup de délicatesse, Ludovic Lecomte sème des indices sans tout expliquer, tisse des liens et des incompréhensions entre des personnages nuancés et propose à ses lecteurs de découvrir le cheminement d’Enzo. Une lecture courte mais bouleversante.

La Cabane, Ludovic Lecomte, L’école des loisirs, 2024.

Son avis complet ICI.

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Pour Liraloin c’est un road-movie à la fois très mouvementé et rempli de tendresse qui emporte son p’tit cœur de lectrice !
Saviez-vous qu’en rase campagne, il existe des hôpitaux pour animaux ou plutôt une infirmerie itinérante avec à sa tête une taupe par très douée pour la pose de perfusion ce qui ne manque pas d’agacer le loup. En plus la bouffe n’est pas très exquise (un gâteau à la vanille !), heureusement qu’un lapin n’est pas loin…mais pas le temps d’y planter un croc que les chasseurs débarquent et dans la panique générale à bord, le loup embarque le lapin qui lui vient de lui sauver la vie (sans faire exprès hein) mais pour un loup solitaire, c’est un geste qui compte…

Voyage de malade de Josephine Mark, Gallimard Bande Dessinée, 2023

Son avis complet ICI, et ceux d’Isabelle, de Lucie et de Helolitla.

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Linda avait besoin d’un peu de poésie dans son quotidien et ce sont les mots de Thomas Scotto qui l’ont faite vibrer d’émotions et de nostalgie.
Après s’être fait la voix des Filles du Conte, il revient les bras chargé d’objets de conte auxquels il donne une vie d’éternité. Tout ce qui Conte nous rappelle que nous avons un rôle à jouer dans la sauvegarde de notre patrimoine culturel au travers de la transmission des histoires qui ont bercé des milliers d’enfants au fil des générations. Dans cet inventaire du merveilleux, les mots de l’auteur, les rîmes du poètes nous invite à un jeu d’énigmes dans lequel chaque conte est dissimulé dans ses vers et haïkus, mais également dans un objet réalisé au scotch, technique improbable et impressionnante que Nicolas Lacombe maitrise à la perfection. Le tout forme un ouvrage de grande qualité qui tient visuellement du grimoire magique.

Tout ce qui Conte de Thomas Scotto, illustré par Nicolas Lacombe, Balivernes, 2023.

L’avis complet de Linda et celui de Séverine.

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Héloïse/Helolitla a découvert de superbes romans ado en mars, comme l’envoûtant Pony, de J. R. Palacio, ou encore le percutant Guerrière, de Cécile Alix. Deux titres parus récemment l’ont particulièrement enchantée.
Le premier, c’est Saules de Brume, de Jeff Wheeler, un passionnant début pour une saga de fantasy ado. Des manoirs qui flottent, une société coupée en deux, des luttes de pouvoir et des intrigues, une magie mystérieuse… et surtout une galerie de personnages variés ! Entre aventure, découverte et critique d’une société inégalitaire, c’est un premier tome très prometteur, qui pose les bases d’un univers sombre, complexe et fascinant.

La saga des mystères, livre 1 : Saules de brume, de Jeff Wheeler, Rivka, 2023.

Son avis complet ICI.

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Le second, c’est Népomucène et Eudoxie, de Lucile Caron-Boyer, pour lequel Héloïse a eu un gros coup de cœur.
Népo et Doxie, les deux protagonistes aux prénoms originaux, ont vécu un immense drame. Depuis, ils vivent chacun dans une bulle un peu à l’écart des autres.
Sur fond de deuil et de romance, l’autrice parle avec sensibilité et poésie de résilience, et de ces rencontres qui changent le cours de la vie. C’est doux, délicat, sur un sujet pourtant difficile, et extrêmement touchant.

Népomucène et Eudoxie, de Lucile Caron-Boyer, Scrineo, 2024.

Son avis complet ICI.

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Héloïse/Ileautresor (au singulier) à de son côté été saisie d’emblée par la beauté des illustrations de Balade en forêt. Un album un peu particulier : conçu pour les tout-petits, il s’agit d’un livre à déplier… D’un côté il montre les différentes étapes d’une promenade dans les bois et de l’autre, c’est un imagier sur la forêt avec les différents éléments présentés lors de la balade dans les bois : renard, fougères, raton laveur, biche légère, escargot, hibou, gland, sans oublier le pivert, la libellule et même la fraise des bois. Ce livre-accordéon est idéal à déplier sur le tapis à côté des bébés… dès leurs plus jeunes années. Balade en forêt est un vrai coup de cœur !

Balade en forêt, Charlotte Molas, Amaterra 2024.

Son avis complet ICI.

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Pour la collectionneuse de papillons, le coup de cœur de mars ira à un petit album tout doux : Les couleurs de Dadaji de Rashmi Sirdeshpande et Ruchi Mhasane. Les illustrations aux contours tendres et les couleurs pastels sont vraiment un régal pour les yeux. Il y a quelque chose de très apaisant à parcourir du bout des doigts cet album qui nous conte les tableaux que peignent ensemble un garçon et son grand-père, quelque part dans un petit village d’Inde. Il est ici question de transmission, de ce qui nous reste après la disparition d’un ancêtre, et surtout du temps qu’il nous faut pour réaliser à quel point ce qui nous a été transmis résonne puissamment quelque part à l’intérieur. Et resurgit parfois des années plus tard. Il y a certes quelque chose du conte dans ce récit mais aussi quelque chose qui est très proche du réel, des lentes prises de conscience qui rythment nos existences. Un album précieux donc, à partager en famille, de génération en génération.

Les Couleurs de Dadaji, Rashmi Sirdeshpande, Ruchi Mhasane, Circonflexe, 2022.

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Après Colette et Liraloin, c’est au tour de Blandine de succomber à cet album ! Un album, épais, à la belle couverture toilée et aux pages cartonnées et découpées. Au fil des pages qui se tournent, passent les années de ce bébé en couverture, jusqu’à la vieillesse. Quasiment chacune s’orne d’une découpe figurant un souvenir, quelque chose qui reste en mémoire, parfois pour longtemps, parfois pas du tout. Et ainsi défile sa vie.
C’est un album délicat, pudique et extrêmement fort dans ce qu’il dit, montre, suggère, et laisse imaginer !

Les Printemps, Adrien Parlange, La Partie, 2022.

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Blandine aime passionnément la vie et les œuvres des Brontë, aussi lui fallait-il cet album qui éclaire un pan peu connu de l’histoire de cette fratrie au destin tragique. Cet album revient sur l’enfance des quatre enfants qui se sont nourris d’histoires, de lectures et de poèmes pour alimenter leur imagination et construire les leurs. Histoires d’abord consignées dans de tous petits livres avant de devenir les romans qui sont toujours lus. Les illustrations tout en rondeurs et couleurs offrent des couleurs et de la douceur à des existences que la postérité a toujours représenté sombres. L’album se clôt sur un petit dossier fort riche et intéressant.

Au pays des histoires L’enfance de Charlotte, Branwell, Emily et Anne Brontë. Texte de Sara O’LEARY Illustrations de Briony May SMITH .Gallimard Jeunesse, janvier 2024

L’avis de Blandine ICI.

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Pour sa première contribution à l’ombre du grand arbre, Séverine vous propose le dernier album de Rascal, qui est l’un de ses auteurs jeunesse préférés de tous les temps. Rien que ça !
Encore une fois, ça fonctionne ! Encore une fois, ça la touche. Mais avec ce dernier-né de sa longue union avec Pastel/Ecole des loisirs, il se présente là où elle ne l’attendais pas, à savoir du côté de l’humour et c’est une très belle surprise !
Il faut dire qu’il est ici superbement accompagné par un illustrateur à la bonne humeur contagieuse, qui muscle systématiquement nos zygomatiques, son compatriote Michel Van Zeveren, dont le petit chaperon rouge posant toujours la même question agaçante nous est resté en mémoire.
Impossible, donc, de résister à ce duo qui nous invite à combattre les stéréotypes trop souvent véhiculés dans les histoires que nous racontons à nos chères petites têtes de toutes les couleurs.
L’album est drôle, malin, plein de fantaisie et de malice, et plus profond qu’il n’y paraît, notamment en ce qu’il glisse aussi un message universel entre ses pages : l’enfant venu.e au monde est à lui/elle seul.e la plus belle histoire qui soit.
Il a évidemment beaucoup plu à sa fille de 8 ans, qui n’est jamais la dernière à revendiquer la tolérance et le respect de la personnalité de chacun.e.

Mille et une histoires, texte de Rascal, illustrations de Michel Van Zeveren, Pastel École des loisirs, 2024.

Pour sa chronique complète, c’est ICI ou .

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En mars, l’équipage de L’île aux trésors à NEB, le dernier roman de Caroline Solé illustré par Gaya Wisniewski. NEB, c’est LE jeu en ligne qui fait fureur, attirant toujours plus de joueurs du monde entier. Parmi eux, Alex et ses frustrations, fragilités et rêves d’ado. Comment résister à l’immersion dans cette dimension virtuelle tellement plus exaltante que le quotidien, à l’ivresse d’exister enfin en s’identifiant à un avatar, aux récompenses savamment distillées, à l’envie de connexion avec les autres joueurs, aux pulsions consuméristes, au goût de la compétition ? Mais voilà qu’un jour, l’écran s’éteint. Le jeu aurait été hacké… Pirates, industriels du jeu : qui tire les ficelles et à quelles fins ?

Ce thriller joue sur plusieurs tableaux pour mieux nous accrocher – celui du jeu où on aimerait voir gagner Alex, celui de la vraie vie où l’on s’inquiète un peu pour elle, celui du projet mystérieux des pirates qui se sont emparés du NEB. Tout ce suspense fait que l’on n’a pas conscience de la densité de réflexions développées sur les ressorts de l’addiction et les remèdes possibles. À aucun moment ces réflexions ne prennent le pas sur l’intrigue : elles viennent nourrir l’histoire, nous rendant aussi accro que les joueurs du NEB. Tout cela n’est pas moralisateur pour un sou, impeccablement écrit et servi par une mise en page moderne où font intrusion les gribouillis adolescents, textos, brèves de presse ou captures d’écrans. Sombres et puissantes, les encres de Gaya Wisniewski donnent une profondeur supplémentaire. Fascinant et incontournable par les temps qui courent !

L’avis complet d’Isabelle ICI.

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Et vous, quelles lectures vous ont enthousiasmés en mars ?

Nos coups de cœur de février

Quelques primevères, des tapis de violettes et des bourgeons bien dodus qui virent au blanc, pas de doute, le printemps arrive. Quel bonheur de partager nos coups de cœur qui, encore une fois, sont très riches et diversifiés ! Voici des idées de lectures qui pourraient sans doute vous ravir.

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Parmi de jolies découvertes, deux lectures se sont nettement détachées chez Lucie. Deux coups de cœur ayant pour point commun un merveilleux bienvenu en ce mois de février !

Tout d’abord, La plus grande de Davide Morosinotto. L’auteur nous avaient séduites avec ses trois romans-fleuve dont nous avions fait une lecture commune. Il confirme avec ce roman sa capacité à faire voyager ses lecteurs dans le temps et dans l’espace, en les plongeant dans la Chine du 18ème siècle. S’inspirant librement de la figure de Ching Shih, l’auteur met en scène une femme qui va déjouer les préjugés sur son sexe et son milieu social pour parvenir à la tête de la plus grande flotte de pirates. Le personnage de Shi Yu force l’admiration avec son caractère bien trempé et sa maîtrise du wushu de l’Air et de l’Eau, un art martial légendaire. Epreuves, aventures et trahisons se succèdent sans temps mort au fil des 639 pages, laissant le lecteur à bout de souffle mais ravi !

La plus grande, Davide Morosinotto, L’école des loisirs, 2023.

Les avis d’Isabelle et de Lucie.

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Côté album, Lucie a été séduite tant par la forme que par le fond du Coffre enchanté, issu de la collaboration entre Jean-François Chabas et David Sala. L’histoire est d’une efficacité redoutable : un empereur cupide met tout en oeuvre pour parvenir à ouvrir un coffre lui semblant receler un fabuleux trésor. Mais quelle que soit la méthode employée (force, magie…) celui-ci lui résiste. Les jeux sur la répétition et le vocabulaire sont savoureux et la morale pleine de sagesse. Et comme l’écrin créé par David Sala est aussi beau de le coffre enchanté, il serait dommage de passer à côté !

Le Coffre Enchanté, Jean-François Chabas, illustrations de David Sala, Casterman, 2011.

Son avis complet ICI.

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Pour Liraloin, la douceur est au rendez-vous avec cet album dont les jeunes parents ne pourront plus se passer. Une histoire à lire et à offrir sans modération.

« Dans un coin d’herbes soyeuses, naît aujourd’hui un petit ver », si minuscule dans cet univers si grand. On pourrait croire que le monde pourrait l’absorber et pourtant… « Tout petit et tout nu » qu’il peut être, il va ouvrir un à un « ploc » les yeux et s’émerveiller de la vie qui l’entoure. Peu à peu, en grandissant, le petit ver se pare de belles couleurs, respire le doux parfum des fleurs sous les grands yeux ébahis de ces congénères.
Quelle incroyable douceur dans cet album. Le texte se lit comme une poésie, celle qui accompagne la naissance d’un petit être tout à l’écoute de la silencieuse nature. Un éveil des sens qui se fait au fur et à mesure qu’il grandit. Les illustrations sont le reflet de la quiétude que nous procure cette lecture. Le bleu nuit de la couverture intérieure va laisser place à de somptueuses couleurs allant du vert au jaune et autres belles nuances colorées habillant toute cette famille émerveillée des exploits de ce nouveau-né.

Quelque part sous les étoiles de Ramona Badescu & Amélie Jackowski – La Partie, 2023

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Pour Linda, deux titres se démarquent nettement de ses dernières lectures.
Il y a tout d’abord un classique, plutôt méconnu, d’Emile Zola, valorisé par les illustrations de Timothée Le Véel. On y rencontre un gros matou de salon fatigué du confort que lui offre sa maitresse et désireux de goûter à la liberté des chats de gouttière. Aussi prend-t-il la poudre d’escampette dès que l’occasion s’offre à lui, pour se rendre compte, lorsque son ventre crie famine, que la liberté a un prix… Le texte amène une réflexion intéressante sur la notion de liberté, tout en conservant l’authenticité d’une époque révolue qui se retrouve dans les illustrations aux crayons de couleur et le représentation de la ville de Paris. Timothée Le Véel donne vie aux divers chats du récit d’un trait précis et réaliste, emprunt de références artistiques qui donnent de l’épaisseur à l’univers créé par Zola.

Le paradis des Chats d’Emile Zola, illustré par Timothée Le Véel, L’école des loisirs, 2023.

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Mais Linda a aussi été très touchée par la lecture du premier roman d’Antonio Carmona, vainqueur du Concours premier roman jeunesse des éditions Gallimard.
Depuis la mort de la mère d’Elise, son père a enfermé la douleur et la tristesse derrière une liste de règles absurdes qui tendent à tenir cet être aimé à distance. Mais alors qu’elle grandit, Elise cherche des réponses à ses questions. Entre quête d’identité et travail du deuil, elle va devoir prendre son courage pour oser poser LA question qui occupe son esprit. Elle peut compter sur le soutien de son amie Stella, fantasque, solaire et pleine d’exubérance pour la pousser à se surpasser, et sur sa grand-mère, fraichement débarquée du Japon, pour mener une révolution.
L’écriture aborde le deuil avec une justesse touchante et utilise de nombreuses métaphores pour parler du chagrin et de la quête d’identité. Mais c’est aussi un immersion dans la culture japonaise avec ce qu’elle amène de traditions, de spécialités culinaires et de héros issus de manga.

On ne dit pas sayônara d’Antonio Carmona, Gallimard jeunesse, 2023.

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Pour sa première participation, Héloïse n’a pas su choisir un seul coup de cœur, elle a eu beaucoup de belles surprises en février ! Et notamment Noblesse Oblige, le roman Young adult de Maïwenn Alix qu’elle ne s’attendait pas à autant aimer, ou encore Nous traverserons des orages, la pépite d’Anne-Laure Bondoux…

Et finalement, son choix s’est porté sur La maison sous la maison, d’Émilie Chazerand, pour son aspect délicieusement régressif, qui l’a replongée en enfance, entre aventure et fantaisie, espièglerie et sérieux. Une lecture réconfortante et pétillante.

Une étrange annonce amène Albertine et sa famille à emménager dans une maison qui cache bien des secrets. C’est tout un monde qui s’ouvre pour la jeune fille, qui possède la capacité de dialoguer avec les plantes. Un monde d’aventure et de féerie, qui n’est pas sans dangers.

Des personnages atypiques, hauts en couleurs et délicieusement attachants, un message écologique de fraternité entre les êtres vivants, La maison sous la maison est une lecture addictive, pleine de poésie et de fantaisie !

La maison sous la maison, Emilie Chazerand, Sarbacane, Août 2023

Son avis complet ICI.

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Côté albums, Héloïse a bien ri avec Steve, un cheval exceptionnel, de Kelly Collier, réfléchi et rêvé avec le petit Barnabus, (Le projet Barnabus, des Fan Brothers), discuté bonheur et partage avec Petit Bonheur de Yue Zhang, contemplé les nuages avec le merveilleux Tête-en-l’air de Rémi Durin. Mais celui qui l’a le plus fait craquer, c’est Quand on est au milieu, d’Anika A. Denise, illustré avec brio par Christopher Denise.

C’est un album d’une grande tendresse qui nous parle de la fratrie, et plus particulièrement de l’enfant du milieu. Une place pas toujours évidente, mais qui offre aussi de jolis avantages… Entre disputes et moments de complicité, le plus important, ne serait-ce pas le fait de faire famille ?

La thématique et la délicatesse avec laquelle elle est abordée ont totalement convaincu Héloïse, qui a en outre totalement fondu devant les superbes illustrations. Des dessins pleins de lumière, au charme désuet.

Un album rempli de tendresse, de douceur et d’amour familial. Un gros coup de cœur !

Sa chronique complète à retrouver ici.

Quand on est au milieu, Anika A. Denise et Christopher Denise, Kaléidoscope, Janvier 2024

Son avis complet ICI.

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Pour Colette, coup de coeur absolu pour l’album Les Printemps d’Adrien Parlange. Dans ce bel album cartonné qui se présente à la fois comme un écrin et un berceau, c’est toute une vie qui se dessine, de l’enfance à la vieillesse. Le narrateur s’y montre particulièrement sensible à la beauté du monde, à la fois dans ce qu’il a d’intemporel et d’incroyablement mouvant. Et cet album est d’une poésie délicate non seulement dans les mots choisis par l’artiste mais aussi dans son dispositif même : en effet comme dans ses albums précédents, notamment Le Ruban, Adrien Parlange se joue de la matérialité du livre pour représenter concrètement par des découpes dans la page ces éclats de souvenirs qui rythment nos vies, éclats qui se complètent, se superposent, s’oblitèrent. Eclats dont nous sommes tout entiers constellés, au fil des printemps qui s’égrènent. Un livre qui pourrait rejoindre notre précieuse sélection « Les-livres-de-toute-une-ie, quintessence de papier ».

Les Printemps, Adrien Parlange, La Partie, 2022.

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Le coup de cœur de Blandine est une belle réussite! Adapter Au Bonheur des Dames à destination des tout-petits, tel est le pari d’Anne-Sophie Tilly et d’Amélie Videlo! Elles en ont fait un bel album cartonné et carré qui prend l’apparence d’un imagier des vêtements. Nombre de détails du roman se cachent entre les mots et dans les illustrations. L’idée est vraiment ingénieuse !

Au Bonheur des Dames. Anne-Sophie TILLY et Amélie VIDELO. Marmaille & Compagnie, août 2014

L’avis complet de Blandine.

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Le coup de cœur mensuel d’Isabelle va à une BD aussi décoiffante qu’émouvante. Quand un lapin mal en point tombe sur un loup à l’infirmerie – il leur arrive aussi de se blesser – cela devient immédiatement électrique. Mais un chasseur vient s’inviter à coups de fusil et les deux patients vont malgré eux faire équipe dans la traque impitoyable qui s’ensuit. Le loup écope d’un léporidé et de sa perfusion à roulettes, assortie d’une liste de médicaments d’un mètre de long… Ce titre se démarque par sa composition dynamique, son trait plein d’énergie, son intrigue burlesque et une sacrée dose d’humour malgré le thème. L’ingénuité désopilante du lapin et le bagout du loup sont véritablement réjouissants, mais il y a plus, on s’en rendra compte au fil du voyage. Impossible de ne pas être tourneboulée de voir les deux compères entonner « Born to be wild » alors que le dernier cheveu de Lapin s’envole et que Loup s’efforce de stabiliser le véhicule. Lire ces pages offre un chouette bol d’air et de bonnes ondes, tant il est joli de voir ces deux-là tisser des liens… et surmonter une grave maladie.

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Et comment ne pas parler du manifeste récent publié par Clémentine Beauvais dans la collection ALT chez La Martinière qui propose des essais à destination des jeunes (mais pas que ?). Clémentine Beauvais nous invite à cultiver notre plaisir de lire en questionnant nos goûts les plus évidents, en prenant conscience de ce qui les conditionne et de ce qu’on manque à cause de cela, et à tenter des choses pour découvrir ce qui nous fait vraiment prendre notre pied. Ce manifeste évoque les mille et une manières dont un texte peut nous extasie, rappelant de mémorables moments de lecture. Vous l’aurez compris, ces pages composent un réjouissant programme. Mais cela va plus loin que ce à quoi je m’y attendais – et c’est là qu’on glisse vers un terrain plus politique. Il ne s’agit pas (que) d’une quête hédoniste individuelle. D’une part, on comprend que l’initiation au plaisir de lire est un enjeu d’éducation qui ne demande qu’à être embrassé. D’autre part, on le sait, les livres ouvrent des fenêtres sur le monde. En nous libérant des conceptions dominantes de la littérature, nous nous autorisons des désirs littéraires qui ont le potentiel de repousser l’horizon des possibles et… de changer le monde. Rien que ça !

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Et vous, quelles lectures vous ont enthousiasmés en ce mois de février ?