Billet d’été : voyages : quête initiatique, quête de liberté ou d’une nouvelle vie…

Après les échappées lointaines de Liraloin et Héloïse, après les échappées graphiques de Lucie et enfin les échappées familiales de Séverine...

Cet été, Héloise – Ileautresor avait envie de parler du voyage qui devient une quête initiatique : comme dans celui du Passager de l’été (Jean-Philippe Blondel) vers le Nord de l’Europe ou dans celui du Don de Lorenzo enfant de Camargue (Michaël Morpurgo). Le voyage peut être aussi l’occasion de se retrouver en famille en traversant l’océan comme dans Rio et la baleine perdue (Hannah Gold).

Mais le voyage peut toutefois ne pas être un choix : dans Alma : le vent se lève, Timothée de Fombelle évoque la traversée des natifs d’Afrique, contraints d’embarquer à bords de navires en partance pour les îles… Désormais, les voyageurs seront en quête de liberté : ils rechercheront leurs proches et leur bonheur perdu.
Le voyage peut enfin être entrepris pour avoir de meilleures conditions de vie – comme dans Au bout des longues neiges (Jean-Côme Noguès) qui met en scène des pionniers partis d’Irlande vers le Nouveau Monde. Le départ était alors entrepris en chariot ou en caravane pour découvrir le sol canadien à la conquête de nouvelles terres vers un rêve de vie meilleure.

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Dans le Passager de l’été, Jean-Philippe Blondel nous présente le beau projet de Samuel : travailler dur dans la restauration pour s’offrir un voyage en train avec son ami.
Tout à coup, tout s’effondre… son meilleur ami, Adrien le « lâche » : il préfère des vacances au soleil…
Mais Samuel tient bon. Il décide de partir malgré tout. C’est une quête. Rien ne lui fera renoncer à son projet de voyage. Seul, avec son sac sur le dos, Samuel va apprendre à se débrouiller.

Amsterdam. Hambourg. Copenhague. Lund. A chaque étape, a lieu une nouvelle rencontre avec une personne qui lui confie son histoire. Désormais, chaque rencontre est comme une histoire au coeur de l’histoire : une mise en abyme… qui vous emporte encore ailleurs.
Mais ce voyage permet aussi de savoir que les personnes rencontrées ont parfois des secrets qui les ont transformés.
Petit à petit, il se découvre lui-même.
J’ai adoré ne pas savoir où ce voyage me conduirait ni quels récits je connaîtrai avec Samuel… qui se découvre lui-même.
Ce roman est une quête initiiatique, qui permet bien sûr à Samuel de partir à la recherche de soi-même.
A la fin de ce voyage, Samuel se sera aussi métamorphosé. Il a grandi intérieurement. Vers plus de maturité.

C’est une aventure passionnante, un roman rythmé, comme je les aime… Avec ce livre, j’ai découvert l’auteur : Jean-Philippe Blondel, et je ne le regrette pas… le temps d’une lecture, il m’a emporté de ville en ville – d’étape en étape – et j’ai beaucoup aimé ce tour d’Europe. Ce livre, c’est une vraie traversée. Un roman passionnant. Une découverte. Dans la relation à d’autres, c’est aussi une vraie découverte de soi-même, d’un soi en devenir… Dans une quête tout aussi passionnante qu’un tour en Europe…

Passager de l’été, Philippe Blondel, Actes Sud Jeunesse, 2023.

Rio et la baleine perdue de Hannah Gold raconte la très belle histoire sur un enfant parti rencontrer sa grand-mère inconnue. Là, le voyage en mer conduit à un retour vers ses origines à travers un merveilleux amour pour les baleines.

Rio et la baleine perdue, Hanna Gold, Seuil jeunesse, 2024.

Le don de Lorenzo de Michaël Morpurgo est un roman attachant, qui parle d’amitié et de rencontres, avec en toile de fonds la Camargue. Vincent, le narrateur, visite la Camargue, le pays des chevaux sauvages et des flamants roses. Il rencontre Kenza, qui le soigne, et Lorenzo, un jeune garçon qui tisse un lien particulier avec les chevaux sauvages et les flamants roses caractéristiques de cette région. L’histoire parle de la rencontre entre Kenza, une enfant du voyage, et Lorenzo, qui a un véritable don pour soigner les animaux sauvages. Le roman a aussi pour sujet l’amitié qui lie les différents personnages, une amitié indéfectible tissée au cours du temps, liée aussi à la liberté et à la vie sauvage, dans la nature camarguaise, au milieu des étangs et des marais. Un roman sur la rencontre de différences et d’amitiés dans ce voyage au pays des chevaux blancs et des flamants roses: les animaux blessés que Lorenzo aime et excelle à soigner.

Le don de Lorenzo, Michael Morpurgo, illustrations de François Place, Folio Junior, 2022.

Dans Alma : le vent se lève (premier tome d’un trilogie), Timothée de Fombelle invite le lecteur dans la vallée d’Afrique où vit paisiblement une famille, celle d’Alma, comme dans un petit paradis. Cependant, Lam, le petit frère d’Alma, a disparu. Qu’est-il devenu ? A-t-il trop écouté les histoires qu’ inventait Alma pour lui ? Leur père les avait pourtant bien mis en garde… Nul ne pouvait entrer ou sortir de la vallée !
Par ailleurs, un beau navire, la Douce Amélie, est prêt à prendre le large, toutes voiles dehors : à son bord, les matelots ont embarqués, prêts à partir à l’aventure. Un clandestin, Joseph Mars, et le redoutable capitaine Gardell sont à la recherche d’un trésor.

C’est aussi l’histoire de la famille d’Alma. Cette dernière vivait heureuse, cachée dans une vallée à l’abri des regards… avant que les marchands d’esclaves ne menacent leur bonheur. Tous les membres de leurs famille sont éparpillés dans le monde entier … Ils vont être embarqués dans de beaux navires, en partance pour les îles ou l’Amérique…

C’est un roman d’aventures avec des pirates et une belle demoiselle de la Rochelle : Amélie, une jeune fille de bonne naissance mais qui va se livrer au commerce triangulaire pour ne pas perdre ses précieuses ressources.
C’est une belle histoire à la fois poétique et romanesque qui permet de voyager à bord d’un navire, la Douce Amélie (un bien doux nom pour un navire de traite d’esclaves). Il s’agit d’un récit qui permet de faire connaissance avec des pirates à la recherche d’un trésor… ou peut-être juste avec des personnes qui sont en quête d’un bonheur perdu et voudraient juste retrouver leurs proches et leur liberté…

Alma, Le vent se lève, Timothée de Fombelle, illustrations de François Place, Gallimard jeunesse, 2020.

Au bout des longues neiges de Jean-Côme Noguès est un roman historique agréable à lire. L’histoire se déroule en Irlande, au milieu du XIXe siècle. Or une grande famine ravage tout le pays.

La famille O’ Connell décide de partir pour le Canada. Ce départ peut-être lui permettre de survivre… Après une longue marche, tous les membres de la famille embarquent à bord d’un voilier vétuste. Parviendront-ils à bon port ?
Après la traversée sur le bateau délabré, la famille irlandaise finit par se retrouver à terre au complet. Ils sont enfin arrivés au Nouveau Monde !
Il faut encore marcher jusqu’à la concession située après le confluent où la rivière Saguenay se jette dans le St Laurent.
Mais les difficultés ne sont pas terminées, loin de là…

Tous les soirs, Dennis Hopper, le responsable de la caravane, installe le campement en plaçant les chariots en cercle sous bonne garde. Petit à petit, les voyageurs se rapprochent de leur concession – qui font encore partie des « terres indiennes ».

Quand enfin le père O’Connell prend possession de ses terres, il faut encore défricher la terre du potager… C’est un travail considérable et de longue haleine pour parvenir à s’implanter.
Mais Finn parvient toutefois à courir dans les bois. Il retrouve enfin sa liberté de mouvement. Il rencontre alors un jeune amérindien sourd-muet, avec qui il va lier amitié : Plumes-Noires.

Ce dernier lui apprend à marcher sans bruit sur les sentiers de la forêt. Il l’emmène aussi dans un canoë sur la rivière jusqu’à un superbe lac canadien. Ainsi, petit à petit, Finn découvre le sol canadien.
C’est un roman historique bien écrit, accessible et agréable à lire. J’ai bien aimé ce récit d’aventures qui décrit la dure vie des pionniers, leur rencontre avec les premiers amérindiens et la solidarité dont font preuve les pionniers entre eux. Un roman d’aventures captivant, avec des passages sur la beauté de la forêt canadienne à la fin de l’été.

Au bout des longues neiges, Jean-Côme Noguès, Nathan, 2014.

Et vous, quels titres auriez-vous proposé ?

Nos Coups de cœur de novembre

Noël approche, tout comme le froid, les idées cadeaux et le bilan de l’année. Avant de vous proposer nos coups de cœur de 2024, voici notre dernière sélection mensuelle. Avec peut-être des titres à piocher pour gâter les têtes blondes, brunes ou rousses qui trépignent déjà devant leur calendrier de l’Avent ?!

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Héloïse – Ileautresor a eu un coup de cœur pour l’album Entre Terre et Eau, un magnifique documentaire écrit avec passion.
D’entrée de jeu, comme dans une balade au bord de l’étang, le lecteur devient le spectateur des scènes de la nature : le Héron cendré se tient immobile, mais s’envole lorsqu’on s’arrête pour l’observer.
Des Cygnes glissent sur l’étang. L’un d’eux plonge dans l’eau.
En ouvrant ce livre, il semble entendre les chants d’oiseaux – même parfois dans un nid. C’est un livre bien vivant. On entend le blop ! de la Grenouille des champs. Un arbre tombe ! C’est le Castor d’Europe qui construit sa hutte Affairé, toujours à l’oeuvre, il est trop occupé pour s’attarder. Le lecteur contemple le vol en V des Oies cendrées – qui se rendent jusqu’en Scandinavie.

Au bord de l’eau, le lecteur-randonneur voit toute la beauté des oiseaux lors de la saison des amours. Il assiste à la parade nuptiale des Avocettes élégantes dans une gracieuse danse avec des becs entrecroisés comme dans un baiser. Il peut voir aussi le vol nuptial du Courlis cendré, qui lançe trilles et vocalises en montant dans le ciel, puis redescend en planant.
Ainsi, le lecteur devient l’observateur attentif du mode de vie de la faune du Nord de l’Europe. Celui-ci se reflète même dans le langage : Le Lièvre d’Europe se livre à de folles cabrioles, ce qui a donné naissance à l’expression « fou comme un lièvre de Mars »). Il représente aussi un symbole de fécondité perceptible dans la légende des oeufs en chocolat qu’il apporte au printemps…
En définitive, c’est un livre précis, vivant, sensible, cultivé, enrichissant, que l’on prend plaisir à découvrir. Il laisse en admiration avec ses superbes gravures, doté de larges traits en noir et blanc, et de quelques couleurs choisies avec mesure. Magnifique.

Entre terre et eau d’Eva Moraal, illustré par Marieke ten Berge, Rue du Monde, 2024.

Son avis complet est ICI.

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Linda a eu un coup de cœur pour un petit roman de Sébastien Joanniez – déjà auteur de son coup de cœur d’octobre – qui aborde le difficile sujet de la perte d’un parent et du travail de deuil et de reconstruction qui en suivent.
Le sujet du deuil est toujours délicat à aborder en littérature jeunesse, d’autant plus quand il est question du suicide d’un parent, mais l’auteur parvient ici à nous faire ressentir la violence de la perte en jouant sur les souvenirs de sa jeune héroïne avec celui qu’elle vient de perdre et sur sa capacité à comprendre que, si elle ne pourra pas en construire de nouveaux, ceux-là ne disparaitront jamais.
Des jours comme des nuits pour montrer la difficulté à avancer quand on a perdu son pilier, l’impression d’être toujours dans l’obscurité.

Des jours comme des nuits de Sébastien Joanniez, éditions Rouergue, 2024.

Les avis complets de Linda et de Séverine.

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Mais il y a aussi une bande dessinée, adaptation d’un classique de la littérature britannique, qui a su lui plaire, d’autant plus que ce format lui a permis d’aller au bout de l’histoire, la lecture du roman s’étant révélée plutôt ennuyeuse…
Graphiquement somptueux, ce roman graphique à réserver aux adolescents nous plonge dans un lieu paradisiaque qui devient bientôt lieu de cauchemars. L’histoire se déroule sur une île déserte sur laquelle un groupe d’enfants tentent de survivre alors qu’ils sont les seuls rescapés du crash de leur avion. Après avoir mis en place une organisation qui rappellent les schémas dans lesquels ils ont grandi, leur fragile équilibre implose en une escalade de la violence qui conduit irrémédiablement à la mort des plus faibles et des plus raisonnables.
Aimée de Jongh a su saisir l’esprit du roman de William Golding et sa vision plutôt pessimiste de l’organisation sociale par la prise du pouvoir et la mise en place de lois avec ce que cela sous-entend de transgressif.

Sa majesté des mouches de Aimée de Jongh, Dargaud, 2024.

Son avis complet est ICI.

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Pour Liraloin, la perspective de rencontrer bientôt Gaël Aymon a orienté sa lecture vers le roman 17 ans à jamais.

J’ai commencé ce roman le 13 novembre, une date gravée à jamais dans le cœur et le visage de Florin. Plongée dans cette histoire, j’ai été fascinée par la vie de Marthe. Sa détermination et son courage, ses recherches pour retrouver son amour perdu se lit dans chaque mot de Gaël Aymon. Comment pourrions-nous réagir en temps de guerre ? Ecrire à travers les époques, se rappeler les atrocités de la vie c’est justement le travail que nous livre l’auteur en nous transportant dans les yeux de Marthe. Un regard que nous ne pourrons oublier de sitôt.

17 ans à jamais de Gaël Aymon, Nathan, 2024

Son avis complet ICI.

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Lucie et son fils ont (enfin !) découvert Les mystères de Larispem, deuxième lauréat du prix Gallimard jeunesse – RTL – Télérama. Pour cette série de trois romans, Lucie Pierrat-Pajot propose une uchronie audacieuse : les communards ont remporté les combats, Paris – renommée Larispem – est coupée du reste de la France et dirigée par un gouvernement tricéphale.

Un univers steampunk dans un Paris qui s’apprête à entrer dans le vingtième siècle, une intrigue politique, une caste de bouchers inquiétante et des nobles spoliés aux pouvoirs étranges… voici quelques uns des ingrédients qui tendent un récit maîtrisé et haletant, porté par des personnages aussi vifs que sympathiques. Attention, si vous laissez l’auteure vous embarquer, vous aurez (comme eux) du mal à lâcher ces romans avant leur conclusion !

Les mystères de Larispem, Le sang n’oublie jamais de Lucie Pierrat-Pajot, illustrations de Donatien Mary, Gallimard jeunesse, 2016.

Son avis sur le premier tome ICI et sur le deuxième LA.

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Ce mois-ci, Helolitla est tombée sous le charme du pétillant The agency for scandal, de Laura Wood. Un roman virevoltant qui mêle avec brio et légèreté action, enquête, féminisme et romance.
Fin du 19e siècle, à Londres. Isabelle Stanhope, surnommée Izzy, est seule pour subvenir aux besoins de sa famille. Lady le jour, elle se transforme en jeune voleur la nuit. Elle travaille pour la Volière, une association de voleuses qui luttent pour défendre les droits des femmes. Mais tout se complique quand le beau Max, un duc, rien que cela, se retrouve mêlé à l’histoire…

Quand j’endossais le costume de Kes, je n’avais pas le sentiment de devenir un garçon ; j’avais le sentiment d’être une femme aussi libre qu’un garçon. Et cela me plaisait beaucoup.

Droits des femmes, ambiance victorienne, bals, jolies robes et espionnage au programme de ce roman vitaminé et coloré, qu’Héloïse a littéralement dévoré ! Un ouvrage divertissant, mais qui fait aussi réfléchir sur la place des femmes dans la société, et l’égalité encore loin d’être acquise !

The agency for Scandal de Laura Wood, Pocket jeunesse, mai 2024

Son avis détaillé ICI.

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Et vous, quels livres vous ont accompagnés en ce mois de novembre ?