« Le faire ou mourir » – lecture commune

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SophieLJ (La littérature jeunesse de Judith et Sophie) : Bonjour tout le monde. Aujourd’hui, on va discuter du premier livre de Claire-Lise Marguier : Le faire ou mourir. Entrons directement dans le vif du sujet : il parle de quoi ce roman au titre énigmatique ?

Carole (3 étoiles) : C’est l’histoire de Damien, dit Dam, un ado de 16 ans. Fraîchement débarqué dans un nouveau collège, il cherche sa place partout : dans sa famille, dans sa classe et surtout dans sa propre vie et son corps. Il va faire des rencontres, une surtout, celle avec Samy, qui vont le bouleverser et changer le cours de sa jeune et sombre vie. Le faire ou mourir, c’est l’histoire d’une quête, celle de l’adolescence malmenée, fragile, sensible, violente qui grandit via une appartenance à une tribu, la musique, les codes, des rituels, l’Amitié et l’Amour.

Dorot’ (Les livres de Dorot’) : Je pense qu’il est important de souligner le fait que Damien n’est bien nulle part. Dans sa famille, il y a la grande sœur qui passe avant lui dans tout, et à l’école, dès son plus jeune âge, il se fait malmener par des caïds de la cour de récré…

 

Dorot’ : La rencontre avec Samy m’a beaucoup marquée. Et vous ? Qu’est-ce que vous en pensez ? Pourquoi cette rencontre a évolué en amitié si intense ?

SophieLJ : Je ne sais pas s’il y a vraiment une explication, comme dans toutes les relations les choses se font sans qu’on ne puisse vraiment l’expliquer.

Si je devais quand même dire quelque chose, c’est que ça viendrait de leur profonde différence de caractères. Samy est un jeune homme plein d’assurance et de confiance en lui, il s’assume totalement et n’en devient pas hautain mais au contraire très gentil. C’est sûrement cette gentillesse qui l’a poussé vers Damien, garçon solitaire et torturé. Et vice-versa, Damien avait besoin de quelqu’un qui le rassure.

Carole : J’ajouterais qu’à l’adolescence, on fonctionne souvent en binôme, et souvent du même sexe. C’est vrai que Samy et Dam apparaissent opposés sur bien des points, et en même temps ils sont similaires dans la mesure où ils se comprennent. C’est une mise en abîme de la complexité de la personnalité adolescente je trouve. Ils ont en commun cette sensibilité et cette intelligence de cœur qui m’émeuvent.

 

Carole : Avez-vous été sensible à l’univers de ces ados ? Leur musique, les codes vestimentaires, leur façon d’exister ?

Dorot’ : Musique, codes, je suis passée un peu à côté. Par contre leur façon d’être, de se soutenir m’a émue énormément. Peut-être parce que ce genre de comportement était le mien à l’époque où je vivais en internat. Dans un groupe on voit sa famille, on est solidaire, on s’apprécie malgré les défauts de chacun. Un monde à part que tous les parents ne sont pas prêts d’accepter…

SophieLJ : Comme Dorot’, je ne me suis pas vraiment reconnue dans leurs codes autour du gothique et de la destruction de soi. En revanche, leurs sentiments m’ont beaucoup touchée et j’ai retrouvé des sensations que j’avais ressenties à l’adolescence : l’injustice et l’incompréhension des adultes en particulier.

Carole : Me concernant, j’ai été hyper sensible à leur musique, écoutant la même depuis toujours, sans le côté gothique et dépressif. Rien que la dédicace de l’auteure au leader du groupe Indochine m’a plongée directement dans l’ambiance. Évidemment, la sensibilité à fleur de peau de Damien a eu quelques échos à ma propre adolescence. Et comme vous, le conflit avec la génération parent m’a également parlé, sensation de compréhension renforcée par l’emploi du « je » comme le souligne Sophie.

 

SophieLJ : Qu’avez-vous pensé du style de l’auteur ?

SophieLJ : Elle écrit à la première personne via le personnage de Damien. Ses phrases sont assez courtes et saccadées. J’ai aimé ce style, ça rend la lecture particulièrement fluide et représente assez bien l’adolescence et la vitesse à laquelle on ressent les choses.

Carole : Le rythme est rapide, parfois confus, avec une ponctuation minimale : autant d’éléments de style qui soulignent la jeunesse des personnages, leur pensée en prise directe avec les évènements qu’ils vivent et tous ces chamboulements sensoriels et émotifs. Il y a tous les ingrédients de la littérature adolescente qui la transcendent au niveau universel pour tous les lecteurs ados mais aussi pour ceux et celles qui ont un jour traversé cette période riche et difficile à la fois. Bref j’ai ADORE ce livre qui m’a émue, beaucoup.

Dorot’ : Pour ce qui est l’écriture du roman, vous avez tout dit. J’adhère totalement à cette forme de narration et quand c’est bien écrit comme c’est le cas ici, c’est encore mieux.
Il y a juste une chose qui m’a froissée dans ce livre… Les parents respectifs de Damien et de Samy.
Le père de Damien complètement obtus et enfermé dans ses préjugés et la mère à Samy qui comprend tout et consent à tout… Pas de nuances de gris pour ces personnages, juste noir et blanc, dommage.

SophieLJ : C’est vrai que c’est regrettable de ne pas avoir de juste milieu pour les parents de Dam et Samy. De la même façon, la mère de Dam semble totalement soumise. Ça aurait été peut-être plus intéressant de lui donner un peu plus de caractère face à son mari parce qu’elle n’a pas toujours l’air d’accord avec son jugement.

Carole : Concernant, les personnages des parents, qui sont aux antipodes, ça ne m’a pas gênée à la lecture, j’ai plus focalisé sur Damien et Samy à vrai dire. Il faut de tout pour faire un monde, alors pourquoi pas ces parents-là !

 

ATTENTION si vous n’avez pas lu le livre, mieux vaut éviter de lire ce passage !

 

SophieLJ : Qu’avez-vous pensé de cette double fin ?

SophieLJ : En ce qui me concerne j’ai adoré. Ça donne une bonne dose d’adrénaline. J’ai été suffoquée par la première fin. Puis la seconde m’a rassurée, les choses peuvent parfois se finir bien !
En tout cas, ça montre bien que la vie peut basculer en quelques secondes.

Dorot’ : J’ai aimé le choix proposé par l’auteur pour finir son histoire…
Comme tu dis Sophie, en lisant la première issue on suffoque, on a mal pour Damien et les autres, on se demande pourquoi, même si on a un semblant de réponse !
Un brin d’espoir avec la deuxième proposition, même si tout n’est pas rose…

Carole : Pour la première fin, j’étais complètement angoissée à cette idée et en même temps assez fascinée parce que finalement cette fin est crédible, et c’est là tout le talent de l’auteure je trouve. Évidemment, la seconde fin est plus  » joyeuse  » si on peut dire, et toute aussi crédible.

 

Vous pouvez reprendre votre lecture sereinement.

 

SophieLJ : Le mot de la fin ?

Carole : Perso, j’ai vraiment adoré ce roman : j’ai ri, j’ai pleuré, j’ai souri, j’ai paniqué, j’ai chanté, j’ai visualisé… Bref toutes les émotions propres à la grande ado que je suis y sont passées !

Dorot’ : Pour finir, je voudrais juste ajouter que les premiers romans comme celui-ci sont rares. Écrit avec une sensibilité inouïe, et avec des mots justes. Les ados à qui je l’ai prêté, l’ont lu plusieurs fois et tous ont apprécié.

Un livre émouvant et bouleversant. Un livre qui a rappelé à l’adulte que je suis devenue, l’ado que j’ai été, et les émotions à fleur de peau qui nous perturbent tant à la puberté.

SophieLJ : En effet Dorot’, les premiers romans de cette qualité sont rares. J’ai adoré ce livre qui fait réfléchir et qui donne beaucoup d’émotions. J’ai hâte de découvrir la suite du travail de Claire-Lise Marguier.

 

Nos billets sur Le faire ou mourir

Dorot’ : http://www.livres-de-dorot.fr/le-faire-ou-mourir-claire-lise-marguier-a35494419
SophieLJ : http://litterature-jeunesse.over-blog.fr/article-le-faire-ou-mourir-108048837.html
Thierry : http://lecturejeunesse83.wordpress.com/2012/04/26/8250/

Le faire ou mourir
Claire-Lise Marguier
Éditions du Rouergue
Collection DoAdo