Olivier Ka et son roman Janis est folle

Peut-être avez-vous eu envie de lire ce roman depuis notre échange récent LA

Olivier Ka - Janis est folle.

Afin d’éclairer notre regard sur ce roman qui nous a tant secouées,Olivier KA a accepté de répondre à nos questions et nous l’en remercions très sincèrement.

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Comment vous est venue cette histoire ? Vous l’avez écrite en résidence : était-ce une nécessité pour vous ?

L’idée a mis du temps à germer. J’ai longtemps travaillé sur la notion de transfert d’identité. J’avais en tête cette relation fusionnelle entre une mère et son fils que je voulais pousser jusqu’à brouiller les individus. Ma première intention était que Janis, dans sa folie, vole l’identité de Titouan, qu’elle le vampirise totalement. Je comptais d’ailleurs y apporter une touche fantastique. Et puis, à l’écriture, c’est une autre direction qui s’est dessinée.
On m’a proposé cette résidence alors que j’étais en cours d’écriture. C’est très bien tombé mais ça n’était pas une demande de ma part. Elle m’a permis de m’isoler et de m’immerger dans mon histoire, ce qui est très confortable, mais j’aurais écris ce roman de toute façon. Peut-être en y mettant un peu plus de temps.

Avez-vous été hanté par vos personnages ? Parce que en tant que lecteur, on en oublie de respirer !

Oui, c’est vrai que Janis, particulièrement, a pris une place importante dans mon esprit. J’éprouve d’étranges sentiments pour elle. Elle me séduit et elle m’agace terriblement. Je connais des gens qui lui ressemblent un peu, dans mon entourage. Je ne sais pas s’ils se reconnaîtront…
J’ai eu longtemps mes personnages en tête, car en réalité j’ai écrit cette histoire deux fois. Dans ma première version, qui était moins tragique, l’émotion avait du mal à éclore. Je restais en surface, sans doute par peur de me faire trop mal. Ça n’allait pas. Après quelques mois de décantation, j’ai tout repris. Et en réécrivant cette histoire, elle a pris une nouvelle direction. Mes personnages étaient plus nets, et j’ai vraiment eu le sentiment qu’ils existaient par eux-mêmes.

N’y aurait-il pas une sorte de « complaisance » à rester dans ce noir dramatique tout le long de l’histoire, véritable descente aux enfers ? Etes-vous conscient de l’impact que peut avoir cette lecture ? Que cherchez vous à secouer à l’intérieur de chacun de nous ?

Quand j’écris, j’essaye de creuser un sillon, de mettre en place une situation et de la pousser au maximum, de la faire évoluer dans un sens qui me paraît logique, voire inévitable. Ce n’est pas de la complaisance. Si j’avais choisi un autre genre, mettons l’aventure, j’aurais tenté d’emmener mes personnages loin, j’aurais multiplié les rebondissements, est-ce que ça aurait été de la complaisance ? A partir du moment où je choisis que le cœur de mon histoire est dramatique, je ne peux pas passer à côté, sinon j’aurais le sentiment de faire des promesses non tenues. Et puis, j’aime bien quand ça fait mal.
Je n’imagine jamais de quelle manière va être reçue mon histoire. Je tente simplement de ne pas être ennuyeux. Quand quelqu’un me dit que mon roman lui a fait verser une larme, je suis content. Pas parce que la personne a pleuré, mais parce qu’elle a ressenti quelque chose. J’ai deux soucis quand j’écris : générer des images et faire naître l’émotion.

Votre roman est publié dans la collection Doado noir. Avez-vous pensé à un type de lectorat à son écriture ? Ou pour être plus précises, dans quelles mains le mettriez-vous ?

Pour cette histoire, je ne me suis mis aucune barrière. Pour moi, Janis est folle est un roman adulte qui peut être lu par les adolescents. C’est ce que j’aime beaucoup d’ailleurs dans cette collection, et chez les éditions du Rouergue en général, le fait qu’ils osent proposer des textes qui ne sont pas formatés, calibrés pour tel ou tel lectorat. Ce roman aurait très bien pu sortir dans une collection pour adultes.

Le reste de votre œuvre est-elle toujours aussi noire ?

Tu tu tu, pas du tout. Je suis très varié dans mon écriture. J’écris d’ailleurs aussi bien des textes poétiques pour des albums jeunesse que des scénarii de bande-dessinée, des nouvelles absurdes ou des chanson humoristiques. Je suis l’inverse de l’auteur monomaniaque qui va passer sa vie à tirer sur la même corde, à réécrire le même roman tout au long de sa carrière. Quand je voyage, j’aime la découverte. Ça m’ennuierait profondément de retourner toujours au même endroit.

Y a-t-il des éléments autobiographiques ?

Moins que dans mes précédents romans pour adolescents. Les éléments autobiographiques sont très discrets. Je joue de l’accordéon diatonique, par exemple. J’habite à présent dans le Tarn et, quand j’écrivais cette histoire, je résidais près du Tréport. Mais c’est tout.

Une suite est-elle envisagée ? Plus lumineuse ?

Pour l’instant, non, je n’ai pas pensé à une suite. Mais pourquoi pas. Jusqu’à présent, je n’ai jamais fait cela. Quand je bâtis une histoire, je tourne autour d’une émotion principale, je développe un sentiment et quand j’arrive à la fin, j’ai dit ce que j’avais à dire. J’ai un peu peur d’être redondant en étirant une histoire, en remettant le couvert. Même si j’ai tendance à terminer sur des fins ouvertes qui, d’ailleurs, sont en général une respiration pour le lecteur. La suite de Janis, tout le monde peut l’imaginer, elle peut prendre la direction que chaque lecteur souhaite. Ou on peut simplement souhaiter bon vent à Titouan…

Entretien avec Olivier Ka en résidence à Blois from bdboum on Vimeo.

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