Entretien avec Guillaume Chansarel

Guillaume Chansarel, dit Guiyome, est un artiste français qui peint de très grands paysages urbains sur des toiles recouvertes de pages de livres. Depuis longtemps, il portait en lui le personnage d’Ange Ségur. Ayant décidé de lui donner vie, dans un roman jeunesse, il nous a proposé de le découvrir.

Intriguées tant par sa démarche artistique que par son passage à l’écriture, nous avons décidé de lui poser quelques questions auxquelles il a gentiment accepté de répondre.

source : artistics.com

Vous souvenez-vous de ce qui vous a amené à peindre sur des pages de livres ?

J’ai toujours crobardé sur des petits carnets, notamment lors de mes voyages, et j’ai toujours recherché des papiers originaux. Des papiers qui aient une matière et une teinte.
J’aime ajouter moi-même le blanc et l’utiliser comme une couleur.
Un jour, n’ayant rien d’autre sous la main qu’un vieil ouvrage imprimé, j’ai commencé à dessiner directement sur le texte, comme s’il s’agissait d’un support vierge.
L’interaction avec l’encre de chine m’a immédiatement séduit. Je suis rapidement passé aux grands formats pour approfondir cette technique, qui ne cesse d’évoluer depuis.

Est-ce qu’en utilisant des pages de livres comme support vous considérez que vous leur offrez une seconde vie ?

Lors de ma première exposition, en 2001, il y avait pas mal de réflexions sur le fait que je détériorais les livres. Aujourd’hui 20 ans plus tard, tout le monde, instinctivement, y voit une démarche écologique de recyclage…

Récup, Guillaume Chansarel, 2012.

Comment choississez-vous les livres sur lesquels vous peignez ?

Je choisis mes livres non pas en fonction de leur thème, mais de leur papier ; la qualité de leur patine et de leurs caractères d’imprimerie. Je discerne, avec l’expérience, ceux qui me permettront d’appliquer au mieux ma technique.
Cependant certains livres me surprennent encore et me forcent à m’adapter. Les matières et les gris colorés changent d’une exposition à l’autre.

Récemment, afin de répondre à une commande grand format d’un architecte, j’ai recherché et travaillé sur un vieux dictionnaire qui traite de l’histoire de Paris.

Arches Landscape, Guillaume Chansarel, 2019.

Comment vivez-vous le fait que quelqu’un puisse peindre sur votre livre dans quelques années ?

Je n’ai pas réfléchi à l’idée que quelqu’un puisse peindre sur Ange Ségur… Il faudrait que je lui en parle ! 🙂

Est-ce qu’en avoir écrit un vous-même a changé votre rapport aux livres ?

C’est uniquement pendant la phase d’écriture que mon rapport aux livres a changé. Difficile de se laisser embarquer dans une histoire sans essayer de savoir comment c’est fichu. Sans chercher à tout décortiquer… Fort heureusement, après, c’est passé.
Mais je suis encore plus admiratif aujourd’hui lorsque je tombe sur une formule qui fait mouche !

Quand on vit déjà de son art, qu’est-ce qui pousse à se « mettre en danger » en s’essayant à un autre support d’expression ?

La mise en danger, c’est tout le paradoxe de la création. Vitale, mais potentiellement destructrice. « Créer, c’est vivre deux fois », disait Camus.
Je ne me sens jamais aussi vivant que lorsque je crée. Et rien à part cette « rencontre » avec Ange ne m’a porté aussi haut. C’est quelque chose d’inexplicable.
La vraie mise en danger serait de renoncer à cela.

L’écriture et le dessin sont les deux modes de communication graphique de l’être humain. De ce fait, je pense qu’il y a, au-delà de l’aspect pictural, quelque chose d’universel et de rassurant dans mes peintures. Peut-être un écho aux romans illustrés de notre enfance ? …

Un exemple des illustrations d’Ange Ségur

Comment est né le projet Ange Ségur ?

Je ne sais pas exactement… Je crois qu’il toquait à ma porte depuis longtemps, et qu’il fallait juste que je lui ouvre.

Ange Ségur, Guillaume Chansarel, Imprimerie solidaire, 2022.

De quel manière le partenariat avec le Secours Populaire est-il apparu ?

Comme une mise en abime, comme si Ange, par un lien direct avec son histoire, avait dégagé la voie et m’avait montré le chemin, j’ai décidé de reverser les bénéfices au Secours Populaire : un coup de fil, une rencontre, des sourires, une évidence, et voilà le logo du SPF apposé aux côtés d’Ange Ségur.
Chose incroyable, le logo du Secours Populaire, c’est une main tendue qui vole… avec des ailes d’ange !

Quels sont vos prochains projets ?

Je suis en train de travailler sur ma prochaine exposition, mais pour tout vous dire, je viens de recevoir un mail d’une certaine A.S., qui est visiblement quelque part à New-York…

*

Merci à Guillaume Chansarel pour sa disponibilité et son enthousiasme !

Vous pouvez vous procurer ce roman sur le site dédié, retrouver Ange Ségur sur Instagram.

La lecture d’enfant de Théo est ICI, et le site du Secours Populaire LA.

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