Ce 13 septembre, on fête l’anniversaire du centenaire de la naissance de ce grand conteur qu’était Roald Dahl.
Celles et ceux qui s’intéressent de près à la littérature jeunesse ont au moins tous lu un livre de cet immense auteur. Et tous, sans exception, on connait au moins un des titres de son oeuvre.
Sous le Grand arbre, on a décidé de lui consacrer deux articles cette semaine à travers une lecture commune intergénérationnelle sur le BGG (avec la participation de Lucie -13 ans et de F….-14 ans, respectivement filles de Solectrice et de Pépita) et une sélection thématique sur nos lectures de ses livres ce vendredi.
« J’adore aider les enfants à devenir des lecteurs, à être à l’aise avec les livres et à ne pas se sentir intimidés. Un livre ne devrait jamais être intimidant : il devrait être drôle, passionnant, merveilleux. Aimer lire est un immense atout dans la vie. »
Roald Dahl
Phrase lue dans le dossier du numéro 74 de la Revue Citrouille des Librairies Sorcières
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Pépita : Que retenez-vous de cette lecture ?
Solectrice : En suivant Sophie et le BGG, on s’offre un sacré moment de détente. C’est également un beau récit d’aventure, avec des monstres effrayants, une héroïne rusée, d’étranges légumes et une incroyable collection de rêves. Pendant la lecture, menée en parallèle avec les filles, on a souvent ri en partageant les jeux de mots du Géant, mais on discutait souvent aussi des réactions de Sophie face au mode de vie du Géant. Je retiens donc que cette histoire nous donne aussi à réfléchir sur notre monde par une exploration inversée : à travers les yeux du BGG, on en vient à s’interroger sur notre monde d’humains.
Sophie LJ : Quel plaisir c’était cette lecture. Je n’ai pas lu beaucoup de romans de Roald Dahl mais j’ai retrouvé exactement l’ambiance que je gardais en souvenir : un univers un peu décalé et pourtant si emprunt de la société réelle, une héroïne courageuse et intelligente et un texte succulent comme une gourmandise.
Lucie : C’est un roman où l’univers imaginaire occupe une grande place. C’est une histoire qui se passe partout dans le monde et même dans un autre monde où les géants sont très impressionnants.et les illustrations sont vraiment amusantes.
F. : Ce qui m’a beaucoup plu, c’est l’imagination autour des rêves. C’est merveilleux ce monde-là ! Quand il fait découvrir sa bibliothèque à rêves à Sophie, ce que j’aurais aimé être avec elle ! Et quand il explique ce qu’il fait, avec sa trompette et son grand sac la nuit…
Pépita : Une récréation ! Un plaisir de la langue inouï ! L’évasion totale. Comment avez-vous appréhendé ce langage inventé ?
Solectrice : Quand on rencontre le Géant et qu’on écoute ses premiers mots, on se dit qu’il bafouille et qu’il s’entortille dans les mots et petit à petit, on prend plaisir à trouver ces perles farfelues. D’autant que ces mots-valises et autres paronymes ne sont pas systématiques dans les paroles du Géant. Alors on se surprend à les guetter et à les savourer au détour d’une phrase. Les filles, quant à elles, en ont été un peu déroutées au début parce qu’elles ne les comprenaient pas toujours, mais elles ont finalement trouvé ce langage très amusant.
Sophie LJ : Comme Solectrice, on s’attache d’abord aux erreurs de prononciation et puis petit à petit ce langage nous devient familier, agréable et même d’une certaine poésie. Un peu comme Sophie, l’héroïne (beaucoup de Sophie dans cette lecture commune) qui relève tout au début et finit par s’y habituer et accepter qu’il s’agit là de la personnalité du BGG.
Lucie : La façon de parler du BGG m’a semblé bizarre au début mais je l’ai vite trouvé très rigolote. Et à la fin, j’avais du mal à changer les mots du Géant parce que je les trouvais plus amusants que les vrais : je rêverais de faire un tour en « hernigroptère » ! J’aimais bien le fait d’assembler deux mots comme dans « délexquisavouricieux ».
F. : Cela ne m’a pas dérangée du tout et même j’en aurais voulu plus ! Je me souviens que pendant un long chapitre, le BGG n’a plus trop parlé de façon inventive et cela m’a ennuyée. J’ai eu peur qu’il arrête ! Son langage est génial, on finit par ne plus s’en étonner, cela devient une vraie langue.
Pépita : Un peu prise au dépourvu au début je l’avoue puis peu à peu, on se régale et on aurait vraiment envie de parler comme lui tant c’est farfelu, gourmand et imagé. D’ailleurs, quel est votre passage préféré ? Dites pourquoi ?
Solectrice : J’adore la chasse aux rêves. Et l’exploration de cette incroyable collection qui donne envie de goûter à tous ces rêves merveilleux. Je trouve cette idée très poétique et j’aime à croire que les rêves puissent être butinés, soigneusement rangés dans des bocaux étiquetés, avant de nous être soufflés pour un géant bienveillant. Quelle invention géniale !
Pépita : Oui c’est vrai que c’est féérique et j’aime bien aussi. Mais le passage qui m’a fait beaucoup rire et en le lisant je l’imaginais fort bien, c’est l’accueil de la Reine d’Angleterre ! L’arrivée du BGG et le repas qui suit est mémorable je trouve. Quelle imagination ! Quel humour ! Quel enfant résisterait à une telle scène, vraiment, je vous le demande !
Sophie LJ : Moi aussi c’est le passage avec la reine qui m’a beaucoup plu. J’ai essayé d’en trouver un autre qui m’ait autant marqué mais je ne vois pas. J’ai adoré ce décalage entre le BGG impotent et imposant et le bonne éducation royale toujours discrète.
Lucie : Dur de choisir. J’ai bien aimé le moment où les domestiques de la reine cherchaient le mobilier adapté au Géant car je trouvais rigolo d’imaginer que le Géant était tellement grand qu’il lui fallait tous ces meubles pour s’asseoir confortablement. J’adore aussi la capture des géants par les militaires.
F. : J’ai beaucoup aimé le passage de l’arbre à rêves, c’est magique ! Mais comme j’ai vu le film, je l’ai trouvé moins réussi dans le livre finalement. J’aurais bien aimé pouvoir aller m’y promener comme Sophie…c’est si beau !
Pépita : Roald Dahl, outre l’opposition bien /mal qui fonctionne toujours aussi bien, n’a pas son pareil pour instiller des messages aux valeurs fortes, y compris dans ce roman aux allures de conte merveilleux. Est-ce un aspect qui vous perturbe ou au contraire le trouvez-vous pertinent ?
Sophie LJ : Je trouve ça intéressant. Il y a souvent plusieurs lectures dans les romans de Roald Dahl. Ici, on peut simplement voir cette histoire de petite fille et de géants ou alors allez plus loin et percevoir des notions de politique (on la voit pas souvent dans les romans la Reine d’Angleterre) ou des valeurs comme la tolérance, l’acceptation de la différence…
Pépita : En effet, Roald Dahl n’a pas son pareil pour prendre les enfants au sérieux. Malgré leur sort souvent peu enviable dans ses romans, il leur montre qu’il y a toujours de l’espoir et que l’optimisme et l’envie de changer les choses ne peuvent venir que d’eux. Avec lui, on se sent déplacer des montagnes ! Dans ce BGG, j’ai particulièrement aimé la relation de grand adulte à enfant : ils apprennent l’un de l’autre et se respectent.
Lucie : Je ne m’étais pas rendu compte des messages de l’auteur pendant ma lecture mais si j’y réfléchis, je pense qu’il soutient l’idée que la vérité sort de la bouche des enfants. Par exemple il donne raison à Sophie face au chef des armées.
Sophie : Le côté moral ne m’a pas dérangée car il fait aussi partie de l’univers du conte. J’ai aimé les remarques du Géant sur le mode vie des humains, cette remise en cause se fait en douceur et donne au jeune lecteur une vision critique de l’humanité pour l’inviter à réfléchir ensuite. L’humour fait ainsi passer beaucoup d’idées pertinentes.
F. : Je n’ai pas du tout pensé à ça non plus, je l’ai lu comme un conte magique parce que c’en est un.
Pépita : Par quel biais conseilleriez-vous cette lecture aux enfants ?
Sophie LJ : L’humour. Pour moi, c’est l’élément incontournable des romans de Roald Dahl et de ce livre là en particulier. C’est par ce langage surprenant, les scènes triviales et les illustrations qu’on arrive ensuite à aller plus loin dans ce que veut nous dire l’auteur.
Pépita : Oui, je te rejoins Sophie. L’humour ! Cette alchimie si particulière qu’il arrive à insuffler à ses romans et celui-ci en particulier. Je suis redevenue une enfant en le lisant et ce que ça fait du bien !
Lucie : Je dirais à l’enfant : tu vas te plaire dans l’univers de ce roman car l’héroïne est jeune et elle vit beaucoup d’aventures fantastiques.
Sophie : C’est un roman qui nous transporte dans un monde fabuleux et qui donne envie d’adopter un Bon Géant ! On frémit, on rit et on suit une petite fille dans de folles aventures. En plus, les dessins nous font entrer avec plaisir dans cet incroyable imaginaire.
F. : Je lui dirais qu’il va découvrir un monde fantastique qui va l’enchanter et qu’il ne verra plus ses rêves de la même façon (et les géants aussi !).
Pépita : Pour finir : juste un mot significatif pour vous quand vous évoquez ce roman.
Sophie LJ : Savouricieux !
Pépita : Et je dirais même plus ! Délexquisavouricieux ! 🙂
Lucie : Rigolo !
F. : Extraordinaire !
Sophie : Complètement magique !
Dans les mots du BGG, je retiendrais : « L’ennui, avec les hommes de terre, poursuivit le BGG, c’est qu’ils refusent de croire aux choses qu’ils n’ont pas vues devant leur museau. Bien sûr que les farfouilleras existent, j’en rencontre souvent, et même, je bavardouille avec eux. »
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Nos chroniques pour aller plus loin :
-Sophie-La littérature de jeunesse de Judith et Sophie
-Solectrice-Les lectures lutines
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Le BGG est maintenant adapté au cinéma par Steven Spielberg.
Pépita et sa fille l’ont vu et ont beaucoup aimé, même si Spielberg prend quelques libertés par rapport à l’histoire. Certains passages sont magnifiques, d’autres plus violents mais l’esprit du livre est conservé et c’est ça l’essentiel. Le cinéaste a lui aussi sa vision…
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J’aime beaucoup le langage du géant, c’est rafraîchissant ! Et le film adapté m’a bien plu 🙂