La coloc’ de Jean-Philippe Blondel

Jean-Philippe Blondel, c’est un  peu le grand frère de nos ados. Il a cette capacité incroyable à les comprendre, à leur parler juste et à retranscrire  avec authenticité leurs réactions, leurs envies, leurs inquiétudes, … Autant dire que Jean-Philippe Blondel connait les ados par coeur.

Unanimement et rapidement,  A l’ombre du grand arbre nous avons décidé de parler de son dernier roman La Coloc’.

Sophie, Pépita et Bouma se sont joint à moi (Alice) avec enthousiasme pour savourer cette tranche de vie.

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Alice  :  La coloc’ de Jean-Philippe Blondel : je vous ai senti rapidement partante quand j’ai proposé de discuter ensemble de ce roman. Je me trompe ou pas ? Pourquoi cet engouement ?

Pépita : Tout simplement parce que tous les romans que j’ai lu de cet auteur, je les ai tous appréciés. J’aime sa façon d’amener le réel de nos vies avec infiniment de justesse et de délicatesse mêlées. Ses personnages sont toujours très bien vus et il a un don particulier pour entrer dans la tête des adolescents. Il décrit aussi très bien leurs relations avec les adultes. Il considère les adolescents pour ce qu’ils sont, avec leur force, leurs faiblesses, leur enthousiasme, leur noirceur, leurs doutes…sans en faire trop, ni pas assez. Je pense que c’est parce qu’il les respectent. De ses romans, j’en vois des films. Pourtant, je ne suis pas cinéphile, mais son écriture me met des images illico et je les vois à la lecture. Du coup, on entre toujours très facilement dans l’univers de chacun de ses livres, sans peine, et on s’y sent toujours bien même si les thèmes sont souvent graves. Bref, quand un Blondel sort, depuis que je l’ai découvert, j’ai envie de le lire et je sais que je ne serais pas déçue. La coloc’ fait partie de ceux-là donc.

Sophie : Un peu comme Pépita, Jean-Philippe Blondel est pour moi une valeur sûre et j’aime ses histoires ancrées dans la réalité et la vie des ados.

Bouma : Blondel, c’est mon auteur chouchou, celui dont je lis rapidement chaque nouveau roman (ce qui n’est pas peu dire) alors plus on en parle mieux c’est pour moi !

Pépita : J’ajouterais que la thématique de ce roman m’a tout particulièrement attirée et à double titre : maman de deux étudiants, la coloc, ça me parle ! Et puis habitant à la campagne, je me suis retrouvée dans ce choix qu’a voulu faire Romain car cela pourrait être le choix de mes enfants. En tous cas, je me suis revue collégienne et lycéenne dans les froides nuits d’hiver attendre mon bus…ou même carrément le louper.

Alice :  Une réponse vraiment complète Pépita qui traduit effectivement tout ce que l’on peut ressentir en lisant du Blondel, tant sur le fond que sur la forme. Si on en disait un peu plus sur ce titre (déjà explicite) : un petit résumé s’impose. Qui se lance ?

Bouma : Romain n’en peut plus de l’internat. Faire les longs trajets en car jusqu’à son lycée le fatigue tout autant. Alors quand sa grand-mère décède en laissant derrière elle un appartement près de son collège, il y voit la chance d’un nouveau départ, loin du cocon familial qui l’étouffe peu à peu…

Alice : Trois ados se retrouvent à partager une colocation pendant un an : un grand changement dans leur quotidien ! Ensemble, ils vont s’apprivoiser, se construire , évoluer … et découvrir une partie du passé de la grand-mère. C’est une histoire d’amitié, mais aussi une histoire de famille et surtout …. une histoire de mecs.

Pépita : J’ajouterais une histoire d’émancipation où parfois les adultes ne sont pas ceux qu’on croit et une histoire qui envoie balader les barrières invisibles qu’on se met souvent tout seul en travers de notre route en se plaignant de ne pas pouvoir avancer alors que si, il suffit de le vouloir : donc une histoire de détermination aussi.

AliceSympas ces ados, non vous trouvez pas ? Moi j’aurais bien aimé les avoir comme « potes’. Pas vous ? Et puis, pour avoir des ados à la maison, je trouve que leur état d’esprit, leurs envies, leurs réactions correspondent complètement aux ados d’aujourd’hui. On y croit facilement à cette histoire alors qu’au début, une coloc’ à 15/16 ans, cela aurait pu déraper. Vous ne pensez pas ?

Pépita : Oui je les ai trouvé très complémentaires en fait. Oui cela aurait pu déraper mais Romain est si motivé qu’il a su de lui même établir les règles du jeu. En fait ce roman, c’est ça aussi : un roman sur la confiance. A 16-17 ans, on est grand ! Nos aïeux allaient bien travailler à 14 ans ! Faut pas trop les chouchouter non plus….faut leur laisser un espace de liberté consenti aussi. Ils en ont besoin. Nos enfants ne nous appartiennent pas !

SophieComplémentarité c’est en effet le mot qui correspond bien à ces trois garçons. Ensemble, ils pouvaient réussir ce pari de la coloc’ tout en restant des ados d’aujourd’hui avec les préoccupations actuelles.

Bouma : Moi ça m’a rappelé mes années étudiantes et toutes ces choses auxquelles il faut penser alors qu’on n’en a pas l’habitude : faire les courses, la lessive, le ménage… Et cette émulsion aussi de la vie à plusieurs, les tensions aussi, normales, sur lesquelles il faut savoir passer… La coloc, c’est un apprentissage. Un premier pas vers la vie adulte pour ses adolescents. Une reconnaissance aussi de la part des adultes.

AliceJe rebondirai bien sur le mot « complémentarité » et aussi sur le mot « adulte », que pensez-vous des adultes dans ce livre ? Peut-on parler aussi d’une certaine complémentarité avec leurs ados ?

Bouma : J’ai beaucoup aimé les adultes de ce roman, qui restent des personnages secondaires mais qui ont de l’importance dans la vie de ces ados. J’ai en particulier aimé le père de Romain. Cette colocation devait lui permettre de « se retrouver » avec sa femme, et finalement il apparaît comme un ado perdu qui ne sait pas quelle direction emprunter. J’ai aimé ce renversement de situation parce que « être adulte » ça ne veut pas dire tout savoir, ni tout bien faire, c’est aussi un apprentissage de la vie. Et les ados de ce roman vont aussi s’en rendre compte.

 Pépita : La maman de Romain aussi, elle est pas mal : elle met du temps à lâcher son fils mais elle accepte de lui faire confiance. Oui je te rejoins Bouma : le père de Romain est trés touchant dans ses confidences à son fils  » entre hommes ». L’auteur aborde par là le fait que c’est perturbant pour un couple de voir l’enfant grand s’émanciper à son tour. Cela peut révéler des failles qu’on ne voulait pas voir tant que l’enfant est là. Le couple doit réapprendre à vivre à nouveau à deux : et ça passe ou ça casse. Il faut beaucoup d’amour pour ça parce que cela renvoie à la vieillesse qui arrive peu à peu. En quelque sorte, il y a la coloc de Romain et celle de ses parents. Cela rapproche le père et le fils, il y a beaucoup de tact dans ce passage. Oui c’est aussi un roman d’apprentissage et à tous les âges de la vie. Rien n’est jamais acquis.

Alice : En effet il y a une certaine confiance entre les parents de Romain et leur fils et aussi une certaine confidence. Finalement,ne seraient-ce les bons ingrédients pour une entente assez harmonieuse parents/enfants ? Attention nous n’avons pas non plus affaire à des parents et des ados parfaits ! On voit que ça ne marche pas toujours. Si Jean-Philippe Blondel est plein de bienveillance pour ses personnages, il en montre aussi les faiblesses et les soucis : l’estime de soi, les difficultés scolaires, … Quel réalisme ! Mais au final, des ados bien dans leurs baskets, comme le suggère la couverture du livre, non  ?

Sophie : Les parents de Romain ont une relation assez saine avec lui je trouve. Malgré les difficultés à le lâcher, ils lui font confiance et le laisse être acteur de sa vie. J’ai bien aimé aussi voir les « effets secondaires » de cette émancipation avec la relation des parents qui doit se reconstruire autrement maintenant qu’il n’y a plus d’enfant à la maison.

Alice : Nous avons parlé de l’auteur, de son écriture fluide, réaliste, agréable, juste. Nous avons parlé du thème du livre. Pas réellement une intrigue, plutôt une tranche de vie.

Que diriez vous de la fin. Cette fin entre trahison et sans rancune. Une fin ouverte tout de même …

Pépita : Je dirais que la fin résume ce que tu dis : une tranche de vie ! La vie est ainsi faite qu’on ne peut pas tout contrôler…mais j’avoue que j’aurais aimé un roman un tout petit peu plus long…histoire justement d’en savoir un peu plus.

Sophie : Comme le dit Pépita, la fin correspond bien à cette idée de « tranche de vie », il y a eu un avant cette histoire, il y aura un après et moi aussi j’en aurais bien voulu encore un peu !

Pépita : En fait, j’ai trouvé que c’était un peu une pirouette de fin mais il en faut bien une. J’aurais bien aimé une deuxième tranche de vie comme une deuxième année de coloc où Romain tombe amoureux et décide d’installer sa dulcinée au milieu des mâles…juste pour voir le résultat :) Peut-être pas très original mais sans doute très intéressant dans le jeu des relations entre jeunes mais aussi entre jeunes et adultes.

Alice : Alors les copinautes, on est bien d’accord, il y a un petit côté nostalgique de notre plus ou moins lointaine jeunesse à la lecture de ce roman. 
Mais du coup, seriez-vous prêtes à offrir cette expérience à vos enfants ?

Sophie : C’est un peu difficile de se projeter si loin surtout qu’on a la chance de ne pas être loin d’une grande ville et donc des lycées. Mais j’espère avoir assez confiance en mon fils à ce moment là et qu’il soit aussi responsable que Romain pour pouvoir l’envisager. On en reparle dans 15 ans !

Bouma : Je n’ai pas testé personnellement la colocation mais c’est une expérience que j’aurais aimé tenter. Alors oui, je pourrais l’offrir à mes enfants, avec pour seule condition qu’ils le veulent aussi.

Pépita : oui sans problème : j’ai deux garçons étudiants (colocation entre frères ! ) et si cette solution se présentait à eux, pas de souci pour nous leurs parents sous certaines « conditions » tout de même … je pense que la confiance est la clé et puis nos enfants ne nous appartiennent pas…

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Ces échanges vous ont donné envie ?

Pour aller un peu plus loin :

La chronique de Pépita, Méli-Mélo de livres

Celui de Sophie, Littérature jeunesse de Judith et Sophie

Celui d’Alice, A lire aux pays des merveilles

et celui de Bouma, qui avait aussi rédigé un super article A l’ombre du grand arbre sur son auteur chouchou. En bonus : un petit jeu de question réponse avec l’auteur !

 

 

 

Une réflexion sur « La coloc’ de Jean-Philippe Blondel »

  1. Merci, les filles, pour ce bel échange autour d’un roman qui m’a bien émue aussi !
    A travers cette histoire, j’ai plutôt retrouvé la « colocation » vécue avec ma sœur… Je suis loin d’envisager celle que pourraient connaître mes filles. Mais j’en ai un bon souvenir, alors pourquoi pas comme parent ?

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