Billet d’été : regarder germer les graines

Après avoir avec bonheur voyagé, réfléchi et rêvé dans les précédents billets d’été, je vous invite à mon tour, à découvrir des lectures tournées vers la nature, allongé.e.s dans l’herbe.

Pendant ces semaines confinées, on a pensé à notre santé, on s’est rappelé que nous n’étions qu’une espèce d’êtres vivants menacés parmi d’autres et qu’on devrait prendre soin de cette planète partagée. On a cherché ce qu’on pourrait changer pour faire un monde meilleur et on a vu la pollution diminuer, la nature respirer.

Parmi les livres en attente, j’ai alors retrouvé dans mon bureau des sachets de graines que j’ai semées, par curiosité. Et pour distraire mes journées très occupées, petites pauses dans le rythme effréné du télétravail, je les ai arrosées.

On a lu ce qui nous promettait des jours meilleurs. On a espéré.

Et quelques graines (un coquelicot et des alysses corbeilles d’argent) ont germé.

On a écouté les battements du cœur de la nature, jusqu’à ce que la fourmilière humaine se remette en marche et couvre cette mélodie.

Dès le début de l’été, alors que notre boîte aux lettres était encore un peu endormie, on a été enchantées d’y trouvé des colis. Oh, le swap d’été !

Un album en particulier nous a rappelé qu’il est précieux de conserver (sans plastique) les bonheurs de chaque jour…

Outre les chatoyants dessins de ce grand format et son arbre accueillant, l’histoire de ce marchand ambulant a aussi résonné en moi, comme un clin d’œil à la collection de bocaux que je garde pour le vrac, les confitures ou toute autre occasion…

On a aussi repris sans attendre le chemin des librairies. Bien sûr, on avait déjà entendu son titre murmuré, à l’ombre (du forum) du grand arbre, mais on a aussitôt remarqué sur l’étagère les petites feuilles vertes qui se détachaient de la couverture sable.

Comme un écho à nos peurs, ce roman imagine un peuple qui aurait oublié son passé et pillerait toujours plus loin les arbres nécessaires à sa survie, élargissant chaque jour le désert qui l’entoure. Heureusement, Samaa, une jeune fille téméraire, prête à bousculer les traditions, va découvrir, malgré elle, une alternative à cette vie destructrice.

J’ai lu avec ravissement cette fable, peuplée d’étranges créatures, et comme une graine, j’espère qu’elle germera dans les mains ou les oreilles des jeunes où je la déposerai.

Je me suis également réjouie que l’autrice (ou la maison d’édition) ait eu une pensée pour la nature jusque dans la fabrication du livre, avec une impression écologique et un marque-page à planter (!).

Je vous souhaite de passer une belle fin d’été et de voir germer vos plus belles idées dans les livres ou dans la vie !

Billet d’été : rappeler les enfants !

Pour nos billets d’été, avec les copinautes on a échangé autour de plusieurs formules : faire découvrir le contenu de notre écolo-swap comme l’ont déjà proposé Bouma, Liraloin ou les Merveillesdalice, évoquer des lectures qui nous font voyager comme l’a fait Isabelle de l’île aux trésors ou pourquoi pas partager autour de lectures qui nous aident à penser / panser « le monde d’après » comme les médias se sont empressés de le qualifier – avec tout ce qu’il peut y avoir de caricatural dans une telle étiquette.

C’est cette dernière proposition que je voudrais saisir aujourd’hui. Après trois mois d’anesthésie totale de mon désir de lire, je me suis réconciliée avec la lecture avec un roman de littérature générale. Rappeler les enfants d’Alexis Potschke. Si je me permets de l’évoquer sur notre blog collectif dédié à la littérature jeunesse, c’est que ce roman est une incursion dans le monde des collégiens et que la myriade de portraits d’adolescents qui y est évoquée est un joli miroir tendu à la jeunesse que l’on côtoie de près dans la littérature jeune public. Et puis quelle est la véritable limite entre littérature « adulte » et littérature « jeunesse » ? Vaste débat que nous menons justement en ce moment dans les coulisses du blog 😉

Il était donc un roman qui racontait les premières années d’un jeune professeur de lettres exerçant en région parisienne. Et ce jeune professeur est tout particulièrement sensible à la beauté des moments partagés avec ses élèves. De chaque petite scène racontée dans ce roman qui se construit au fil des trimestres, émerge des portraits d’une grande douceur, d’une incroyable tendresse, d’une infinie poésie. Et d’une humanité sincère. D’une humanité qui cette année, pendant trois mois, m’a terriblement manqué : l’humanité de la salle de classe.

Si ce livre m’a permis de penser/panser mon « monde d’après », c’est qu’il m’a permis l’espace de quelques pages de renouer avec ce qui fait l’essence même de mon métier et dont cette année j’ai du me passer tout un trimestre sans l’avoir choisi. Si ce livre m’a permis de penser/panser mon « monde d’après » c’est qu’il m’a rappelé combien j’aimais moi aussi capter l’infinie poésie des regards d’adolescents, la lumière de leur visage entre deux âges, leur parole vive et belle comme un ruisseau, le flot d’émotions dont leurs journées semblent tissées. Il m’a rappelé combien il était primordial d’être présent.e.s les un.es pour les autres. En vrai, en chair et en os. Sans écran entre nous…

A quelques pages de la fin, il y a ce discours improvisé par le narrateur un jour que ses élèves du club théâtre lui ont souhaité son anniversaire.

« Vous savez, j’ai eu plusieurs vies avant d’être professeur […] Je ne fêtais plus mon anniversaire parce que je m’étais rendu compte que j’avais arrêté de grandir. C’était autre chose.

Vieillir, a dit Elsa.

Oui, Elsa, vieillir. Vieillir. Je ne grandissais plus, je vieillissais. Les anniversaires ont commencé à me faire un peu peur, je voyais le compteur tourner ; je n’étais pas très vieux pourtant, mais je n’aimais plus ça. Je voyais le temps qui passait, qui passait. Et puis, finalement, je suis devenu professeur.

-Heureusement, a flatté Céleste.

-Oui, heureusement. Parce que, vous savez, j’aime mon métier. Oui, vous devez le savoir. J’aime vraiment mon métier.

Bien sûr, au club théâtre, c’est facile d’aimer son métier. Mais même quand mes élèves sont pénibles, même quand ils me fâchent, je suis toujours content de les retrouver. Ce qu’il y a de bien avec mon métier -, c’est qu’il change tous les jours. Je n’ai pas la routine des champs, des bureaux, de l’usine. C’est vrai que c’est un peu fatigant, parfois, mais j’aime ça, ne jamais savoir comment va être ma journée.

Quand je suis avec vous, que l’on discute, que l’on répète, et que j’essaie de vous apprendre des choses, que j’ai le bonheur de vous voir les apprendre, que je vous vois grandir aussi, j’ai l’impression, moi d’apprendre aussi, d’apprendre de vous. Vous, vous qui êtes là et qui m’écoutez, vous êtes mon antidote au temps qui passe, parce que le temps a du sens, maintenant, et je crois que c’est ce qu’il lui manquait. C’est pour ça qu’il me faisait peur.

Alors je n’attends plus les cadeaux, et ça ne reviendra pas, je n’attends plus rien, mais je n’en ai plus peur, de mon anniversaire, parce que je n’ai plus peur de vieillir.

Vous savez, depuis que je suis professeur, depuis que je côtoie mes élèves – et mes élèves, ce ne sont pas que mes cent vingt élèves, ce n’est pas que ceux que j’ai ou que j’ai eus, ce sont tous les élèves de ce collège-, depuis que je côtoie mes élèves, que je vous côtoie, vous, eh bien, voilà : j’ai arrêté de vieillir. Je ne vieillis plus, et c’est grâce à vous.

Et vous savez quoi ? Il faut que je vous le dise… depuis que je vous connais, vous, mes élèves, je crois même… je crois même que j’ai recommencé à grandir.

-Monsieur, a dit Charlotte, monsieur, je crois qu’Elsa pleure. »

Voilà.

J’ai hâte.

J’ai hâte de retrouver mes élèves.

Pour continuer à grandir.

Et entendre quel « monde d’après » ils désirent ardemment.

Et m’y atteler, de toutes mes forces, à ma petite mesure.

Billet d’été: Regarder vers l’avenir

Alors qu’une vague étouffante de canicule traverse la France, accablant une population fragilisée par un début d’année particulier, étouffant sous les masques devenus garants incertains de notre santé, on ne peut que faire le constat d’une crise écologique qui bouleverse nos modes de vie. Entre crise sanitaire mondiale et réchauffement climatique, je fais le choix de proposer une sélection de livres qui abordent l’écologie, amenant une réflexion sur le monde de demain. Le colis reçu dans le cadre du Green Swap, envoyé par La collectionneuse de Papillons, a ouvert la porte à des lectures engagées découvertes grâce à l’un des titres, sélection du Prix UNICEF de littérature 2020 qui a pour thème « Objectif Terre: lisons pour la planète! »…

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Greta Thunberg est une figure médiatique majeure de notre époque. Militante engagée dans la lutte pour le climat, elle est à l’origine d’un mouvement de grèves scolaires qui s’est étendu à toute la planète. Son Rejoignez-nous explique clairement son parcours et ses revendications. En une trentaine de pages, l’adolescente convainc que sa démarche est juste.

Mon avis complet ICI

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Mais ce n’est pas la seule à mener un combat par des actions concrètes. Ils sont nombreux ces jeunes qui veulent rendre le monde meilleur pour tous. Ici il n’est pas question que de la planète, mais également des droits de l’homme.

Pour en savoir plus, c’est par ICI.

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Sensibiliser les plus jeunes à la biodiversité et à la préservation de la nature est facile avec ces deux magnifiques albums qui offrent un regard optimiste sur l’avenir et proposent des solutions concrètes de petites actions à mener à titre individuel et depuis chez soi. Alors que Amandine Thomas propose de découvrir les Océans… et comment les sauver, Philippe Nessmann propose une réflexion plus large sur la protection de la nature au travers d’un album riche en symboles, Il y avait une maison.

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L’optimisme n’est malheureusement pas toujours de mise et il faut aussi savoir proposer un regard plus sombre pour ouvrir les yeux des plus sceptiques. Dans Nous sommes l’étincelle, roman d’anticipation, Vincent Villeminot propose une réflexion percutante sur le monde de demain en partant des choix que l’on doit faire aujourd’hui. Si la nature est le cœur du récit, c’est la famille et l’amour qui en sont les piliers. A partir de 13 ans…

Mon avis complet ICI

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Autant de réflexions sur l’avenir et de prises de conscience qui laissent entrevoir un avenir meilleur pour lequel les jeunes d’aujourd’hui et de demain seront des acteurs responsables et engagés.

Billet d’été : Flânez, c’est l’été !

Voici l’été. Le moment des congés qui permettent (parfois) de se retrouver et d’arrêter la course folle de l’année pour enfin prendre le temps. Pour soi, pour ses proches, et… pour la lecture !

Il s’agit à la fois de mon premier billet d’été et de mon premier SWAP. Ces premières fois, suite à mon arrivée à l’ombre du grand arbre et des échanges qui en ont découlé, sont assez émouvantes.

Les lectures se mettent au vert

Et l’émotion était justement au cœur du magnifique colis envoyé par Alice, notamment avec le très touchant En émois de Anne Cortey.

En émois, Anne Cortey, L’école des loisirs, 2019

Les émotions adolescentes exacerbées sont au cœur de ce roman se déroulant pendant les vacances d’été en Provence. Mon avis complet ici.

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Anne Cortey toujours, avec la complicité de l’illustratrice Anaïs Massini, partage dans Le souffle de l’été quatre instantanés, quatre moments qui semblent anodins mais qui sont les précieux  indices de vacances réussies. Un rêve de douceur et de simplicité qui rappellent de beaux souvenirs d’enfance. Mon avis complet ici.

Le souffle de l’été, Anne Cortey et Anaïs Massini, Grasset Jeunesse, 2017

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Ce SWAP se voulait aussi « écolo » et source de réflexion sur « l’après ». Et c’est avec Je suis l’arbre d’Eric Singelin que le pont s’est fait naturellement.

Je suis l’arbre, Eric Singelin, Gallimard Jeunesse, 2017

Un tout petit livre pop-up aux couleurs éclatantes, qui montre de manière très poétique et singulière les ressources infinies de la nature face aux agressions humaines. La vie d’un arbre évoquée en douze pages avec une rare sensibilité. Mon avis complet ici.

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Ce discours est aussi au cœur du combat de Greta Thunberg dont le livre Rejoignez-nous a été l’un des succès de ce SWAP.

Si cet « impératif » me met mal à l’aise et que certaines méthodes me semblent assez démagogiques (la grève du vendredi pour les adolescents), les initiatives et les prises de conscience se multiplient et c’est bien l’essentiel !

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Merci encore à Alice pour ce colis plein d’attentions.

Entre émotion, vacances de rêve et réflexions écologiques, il me reste à vous souhaiter un bel été !

Billet d’été : traverser la mer…

Il y a d’abord la joie de découvrir une enveloppe épaisse dans sa boite aux lettres et ensuite le plaisir de décacheter chaque paquet et d’envisager de futures nouvelles lectures. Et le voilà ! Le livre inattendu et inconnu qui a vite fait de trouver sa place au dessus de ma PAL.

Quand ce Greenswap est arrivé, je me suis dis que j’avais de la chance de vivre cette aventure épisto-littéraire A l’ombre du grand arbre. Alors c’est à travers ce blog collaboratif, pour saluer le travail participatif engagé de tous/tout.es et son esprit généreux, que j’ai choisi de vous présenter ce roman envoyé par l’Atelier de coeurs.

[Entre crochet vous trouverez donc des liens vers des articles parus sur le blog A l’ombre du grand arbre. N’hésitez pas à cliquer].

« Ceux qui traversent la mer reviennent toujours à pied« 

Quel titre ! Une affirmation ? Comme une évidence ? Sera-t-il fidèle à l’histoire ? En tout cas, il m’interpelle, il me questionne… Je le trouve à la fois significatif et pas banal. J’ai hâte de mieux comprendre comment il faut réellement le décrypter.

[Choisir un titre n’est pas anodin, cette étiquette qui lui collera à la peau tout au long de sa vie ne se décide pas d’un simple coup de baguette magique ! Sujet intéressant à retrouver dans l’article Des livres et des titres]

Vais-je faire un long voyage sur l’eau ? Embarquer sur un voilier ? Partir pour un périple avec des escales ? Je pars en mer et j’ai envie de me laisser porter par les flots. Je sais que le voyage ne sera pas tranquille et que cette lecture « de vacances », ne sera pas paisible et ressourçante.

[Malgré tout, parce que c’est la période, je vous propose quelques lectures légères aux saveurs et aux couleurs de l’été qui sentent bon «  Le ciel, le soleil et la mer… »]

Dès les premières pages tournées, je suis en compagnie de Julien, 18 ans, jeune ado à la rue qui tombe sur un drôle de gars, Bardu, alors qu’il fait du stop. Il est évident que ces deux là sont faits pour s’entendre. Dans leur solitude respective, ils vont vite trouver comment s’aider, se réconforter et entre eux se tisse une relation quasi filiale qu’aucun des deux n’espérait plus. Sous nos yeux se nouent des liens à la fois forts et tout en retenue. La génétique ne fait pas tout dans une relation père/fils…

[La figure paternelle, tantôt haïe, tantôt adorée, souvent compliquée… une sujet souvent abordé en littérature jeunesse que je vous invite à découvrir dans cette sélection].

Nos deux rescapés de la vie embarquent alors sur le Meursault, le voilier de Bardu sur lequel il importe du cannabis du Maghreb jusqu’au sud de la France. L’aventure s’annonce rock’nroll dans ce monde de mafieux. Let’s go, embarquons avec eux !

[Je suis prête à quitter la terre ferme et à larguer les amarres. J’aime les road trip qui font souffler dans un coin de ma tête un esprit de liberté. Vous aussi ? Laissez vous inspirerSur la route.]

Sept ans plus tard, on retrouve notre duo à Parlerme, Bardu a un orteil cassé, Julien a quelques appréhensions et Exaucée, une jeune congolaise, a une bonne raison de monter avec eux à bord du Meursault. Et c’est là que tout va commencer.

Ça parle de mer, de pêche, de voyage, de tempêtes…

Ça parle de rencontres improbables, d’engagement, de changement, de frontières qui n’existent plus, de revanche sur la vie…

Ça parle de trafic de drogue, de mafia, de colère, de situation écologique et surtout cela porte un autre regard sur l’immigration.

Ce personnage d’Exaucée m’a vraiment séduite : forte, franche, indépendante, parfois brûlante, toujours en mouvement, elle est un véritable rayon de soleil farouche, mais indispensable qui donne un nouveau rythme au récit.

Elle nous met face à la dure réalité de la traversée de la Méditerranée par les réfugiés tout en gardant un optimisme respectable.

[J’ai aimé ce point de vue intéressant qui complète parfaitement les titres listés dans Histoires de migrants]

Un aventure pas banale, plutôt originale et qui donne l’opportunité de réfléchir sur des questions de société. Plutôt bien vu !

Merci ! J’aime découvrir des livres que de moi-même je n’aurais pas lu !